Tout le monde s’entend pour reconnaître que la
philosophie des Lumières, si elle n’en fait elle-
même partie, est au moins un des principaux fer-
ments de la Révolution. Suite à la Renaissance et
aux succès éclatants des sciences, le rationalisme
fut en vogue et l’on commença à idolâtrer la raison
humaine. S’il n’y eut pas que des rationalistes par-
mi les Lumières, l’idée générale fut bien d’affir-
mer l’indépendance de l’homme vis à vis de la tra-
dition et de la Religion, et tout fut jugé bon pour
parvenir à cette fin. Le rationalisme eut la commo-
dité de ne pas se passer de Dieu dans un premier
temps, tout en refusant catégoriquement la
moindre explication non rationnelle. Inéluctable-
ment, d’un Dieu relégué à une place abstraite et de
plus en plus inconfortable, ce dans un système phi-
losophique où l’homme régnait en maître, l’on
passa aisément à l’affranchissement total. Le
déisme engendra l’athéisme, parce qu’en lui-
même résidait déjà ce principe : échapper au
mieux à la Révélation chrétienne.1 Avec Kant, ce
fut la caution définitive pour fuir toute métaphy-
sique ; l’on n’expliquera désormais plus le monde
qu’à partir de l’homme. S’il faut un mot pour
réunir ces diverses philosophies en une, pour défi-
nir la philosophie de la Révolution, le Marquis de
1. « Un déiste est un homme qui n’a pas encore eu le temps de devenir
athée. » Louis de Bonald.