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Les aires ganglionnaires sont libres et aucune
viscéromégalie n’existe.
Les examens biologiques ont montré
notamment une réaction inflammatoire :
C Reactive Protein à 121 mg/l, VSH de la 1ère
heure à 52 mm, des sérologies bilharziennes
positives à 1/1024 (technique HAI), les réactions
immunologiques bilharziennes n’ayant pas été
effectuées dans le LCR. Les autres examens
(étude virologique comprise) sont normaux.
Les examens paracliniques instrumentaux
(radiographie, échographie) sont normaux, à
part une surcharge hilaire bilatérale à la
radiographie cardio-pulmonaire, une fibrose
périportale sans épanchement péritonéal, et un
foie de volume normal à l’échographie
abdominale.
L’EMG et le scanner de la région cervico-
dorsolombaire n’ont pas pu être effectués.
L’évolution a été progressivement favorable
sous un traitement antiparasitaire bilharzien :
praziquantel à la dose de 40 mg/kg associé à
une corticothérapie : prednisone 2 mg/kg
pendant 14 jours ; une antibiothérapie par
bétalactamine et une kinésithérapie de
stimulation. Le déficit des membres supérieurs
ainsi que l’encombrement respiratoire ont
disparu en moins d’une semaine. La
réapparition des réflexes ostéotendineux et
l’acquisition de la station assise ont été
observées à J15, ainsi que l’amélioration des
fonctions sphinctériennes. L’enfant a pu
marcher avec appui à J21. La sortie a été
autorisée à J30 avec comme seule séquelle une
petite incontinence vésicale à l’effort.
DISCUSSION
La pathogénèse de la ménigo-myélo-radiculite
pourrait s’expliquer ainsi : le transport des œufs de
schistosomes jusque dans les structures nerveuses
(intramédullaire, radiculaire ou arachnoïdien)
implique l’utilisation des vaisseaux d’une part, et
l’existence d’un certain déterminisme par la
conjonction de plusieurs facteurs locaux ou
généraux d’autre part [4]. Ainsi, la moelle peut être
le siège d’expansions superficielles multiples, de
foyers de nécrose et d’hémorragie. Sur la moelle
et les racines nerveuses, plusieurs œufs peuvent
être visibles, entourés par une zone de nécrose
périovulaire.
D’après Brudzilovitch [4], la présence d’œufs
de Schistosoma mansoni dans la moelle et les
racines nerveuses n’induit pas systématiquement
des lésions ou des manifestations cliniques chez les
sujets immunocompétents. Ces complications
neurologiques résultent de la migration aberrante
des S. mansoni ou S. haematobium ou de
l’embolisation ectopique d’œufs de bilharzies dans
les vaisseaux médullaires, la ponte ayant lieu dans
le système veineux mésentérique inférieur ou dans
les plexus veineux vésicaux, d’où ectopie plus aisée
vers les vaisseaux médullaires [5,6,7]. Les
complications médullaires de la bilharziose sont de
deux types [8] :
- les granulomes bilharziens, essentiellement
intramédullaires, radiculaires mais parfois méningés
qui sont des granulomes inflammatoires se
comportant comme une lésion expansive affectant
la plus fréquemment le cône terminal, la moelle
basse, les racines. Ces granulomes sont en rapport
avec une hypersensibilité retardée vis-à-vis
d’antigènes ovulaires;
- la myélite aiguë peut correspondre à de
multiples granulomes intramédullaires, mais peut être
aussi la conséquence d’une nécrose de la moelle
avec vacuolisation et atrophie sans réaction
inflammatoire nette autour des œufs.
La démarche diagnostique doit tenir compte de
plusieurs facteurs. Dans les lésions granulomatoses
bilharziennes, la présentation neurologique la plus
typique associe une paraplégie flasque aiguë ou très
rarement une tétraplégie avec des troubles
sphinctériens parfois méningés, réalisant une
méningo-myélo-radiculite. Des douleurs dorso-
lombaires et des membres inférieurs sont
fréquentes. En cas de myélite transverse, les
symptômes neurologiques ont un caractère plus aigu
avec une période d’incubation plus courte [8]. Mis
à part ces signes neurologiques, les particularités
de notre cas sont :
- le jeune âge du sujet, le premier cas décrit à
Madagascar étant celui d’un enfant de 9 ans,
hospitalisé en 1990-1991 à l’hôpital Befelatanana
d’Antananarivo dans le service de Neurologie du
Pr Andriambao D, pour une paraplégie flasque
avec rétention d’urine et dont les sérologies
bilharziennes (hémagglutination passive) et de la
cysticercose étaient toutes les deux positives. La
sérologie permettait, en effet, comme dans notre
cas, le diagnostic indirect de la bilharziose, la mise
en évidence des œufs de schistosomes dans les
selles et les urines et plus rarement dans les
expectorations ou le LCR pouvant être négative.
- l’échographie abdominale peut montrer des
images hyperéchogènes assez spécifiques dans les
atteintes hépatospléniques [9,10,11]. C’est ce qui a
orienté le diagnostic chez notre patient qui a
présenté un épaississement périportal alors que le
foie, la rate, les reins, le pancréas, la vésicule biliaire