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Métabolismes Hormones Diabètes et Nutrition (XI), n° 1, janvier-février 2007
thématique
Dossier
Ces données peuvent être rappro-
chées des résultats positifs d’un
programme d’aide à la perte de poids
diffusé sur Internet. L’étude mono-
centrique conduite aux États-Unis a
randomisé 92 adultes en surpoids, à
risque de diabète de type 2, entre un
programme Internet basique et un
programme Internet renforcé par un
programme comportemental diffusé
par courrier électronique personna-
lisé avec échanges d’informations
hebdomadaires. L’étude, menée sur
un an, révèle que la perte de poids
est plus marquée chez les patients
ayant bénéficié du programme de
conseils comportementaux (9).
Les NTIC comme outil
d’aide à la décision
Au-delà de la transmission par voie
électronique des glycémies, des
systèmes d’aide à la décision utili-
sant une transmission des informa-
tions par Internet et un logiciel expert
automatisé d’aide à l’ajustement des
doses d’insuline ont vu le jour. Une
étude québécoise randomisée en
crossover a permis à dix diabétiques
de type 1 candidats à une insulino-
thérapie intensive selon un schéma
basal-bolus d’accéder à un système
informatique fournissant des recom-
mandations sur les doses d’insuline
selon des algorithmes spécifiques.
Ces patients étaient déjà rompus au
décompte des hydrates de carbone
et aux méthodes d’ajustement de
l’insulinothérapie. Fait intéressant,
la majorité des sujets ont suivi les
recommandations du système, et
ont pratiqué plus d’ajustements
de doses pendant la période où ils
étaient sous contrôle de celui-ci. Si
les paramètres métaboliques se sont
améliorés de façon similaire dans les
deux bras de l’étude, et si ce travail a
permis de valider également la sécu-
rité du dispositif, c’est surtout dans
l’amélioration des connaissances du
patient, de son comportement et de sa
désinhibition vis-à-vis de la pratique
de l’auto-ajustement des doses qu’il
faut voir l’intérêt d’un tel système
(10). L’incorporation de tels logi-
ciels directement dans les matériels
d’autosurveillance glycémique ou
d’infusion d’insuline serait suscep-
tible de favoriser la mise en place de
l’insulinothérapie fonctionnelle. Les
pompes à insuline récentes compor-
tent une fonction “assistant bolus”
dont l’intérêt n’a pas été formelle-
ment évalué. L’utilisation d’un PDA
de type Palm, avec le logiciel Accu-
Check® Pocket Compass offrant une
présentation graphique des résultats
de l’autosurveillance glycémique et
des paramètres de la pompe à insu-
line, a fait l’object d’une étude pilote
chez une trentaine de diabétiques
de type 1 français, dont les résul-
tats suggèrent que cette technologie
aide le patient à s’approprier son
traitement et à améliorer le contrôle
métabolique. Par ailleurs, un carnet
glycémique électronique, incorporé
dans un smartphone, a été récemment
introduit (MedPassport®, Voluntis).
Outre la possibilité pour le patient de
transmettre ses résultats glycémiques
en temps réel sur un serveur Internet,
ce carnet peut être paramétré avec les
équations de l’insulinothérapie fonc-
tionnelle, ce qui offre un réel support
à l’auto-ajustement des doses d’in-
suline par le patient. Les données
d’une étude pilote suggèrent forte-
ment que ce dispositif aide le patient
à mettre en œuvre l’insulinothérapie
fonctionnelle.
Synthèse
Les quelques études contrôlées
disponibles permettent de suggérer,
sans toutefois le prouver, que l’uti-
lisation de la télémédecine est
justifiée, en termes d’efficacité, de
satisfaction du patient, mais surtout
de coûts de santé et de meilleure
adéquation entre la demande et
l’offre de soins.
Les études de télédiabétologie dispo-
nibles soulèvent d’une part des ques-
tions d’ordre technologique. Les
progrès réalisés dans le domaine
des techniques de communication
ont été fulgurants, et il semble que
la tendance soit à l’utilisation large
du téléphone portable, dont l’avan-
tage est sa large diffusion au sein
du public, ce qui permet d’éviter un
investissement matériel de la part du
patient ainsi que l’apprentissage de
technologies complexes. L’essentiel
des coûts porte ainsi sur le fonc-
tionnement et l’expertise médicale.
D’autre part, on voit que plusieurs
essais ont recouru à des profes-
sionnels de santé non médicaux, en
particulier infirmières spécialisées
en éducation thérapeutique. Cela
souligne que les progrès de la télé-
médecine seront dépendants des
décisions en matière de glissement de
tâches, actuellement débattues dans
notre pays. Enfin, les études suggè-
rent fortement que les résultats d’une
intervention télémédicale dépendent
largement de la population ciblée. À
ce jour, les études n’ont pas permis
de dégager le profil métabolique,
social et psychologique des patients
susceptibles de tirer le meilleur béné-
fice de la télémédecine.
Ainsi, la télémédecine paraît parti-
culièrement pertinente en termes
d’efficacité, de coûts de santé et
de qualité de vie, dans la prise en
charge de certaines situations diabé-
tologiques nécessitant une réacti-
vité plus grande pour l’ajustement
de l’insulinothérapie : c’est le cas
notamment du diabète au cours de
la grossesse, de l’initiation d’un
traitement insulinique par pompe,
de l’accompagnement initial du
patient lors de la phase suivant la
découverte de sa maladie, de l’as-
sistance aux parents d’un enfant
nouvellement diabétique, du suivi
lors de modifications thérapeutiques
significatives ou lors de maladies
intercurrentes.
Il nous paraît en revanche déraison-
nable de placer ses espoirs dans la
télémédecine pour certains patients
dont le suivi de longue date par un
diabétologue ou dans un service de
diabétologie expérimenté a échoué ;
de tels patients relèvent d’autres