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Guide des appels à projets de recherche 2016
« Islam, religion, société »
Ministère de l’Intérieur, en partenariat avec le ministère de l’Education nationale, de
l’enseignement supérieur et de la recherche
Direction des libertés publiques et des affaires juridiques - Bureau central des cultes
En février 2015, le Gouvernement annonçait entre autres mesures le soutien à la
recherche en islamologie ainsi que sur l’islam de France. Cette annonce fait suite au constat
d’un déclin de l’islamologie en France (« Livre Blanc » du GIS Moyen-Orient/Mondes
Musulmans » et Rapport « Disciplines rares », 2014), contrairement à la plupart des pays
européens, et d’un défaut de renouvellement des travaux en sciences humaines portant sur
l’islam de France. Une ligne de crédits de recherche intitulée « Islam, Religion, Société » a
donc été ouverte pour la première fois à la rentrée 2015, avec pour finalité de répondre aux
besoins de connaissance de la diversité des institutions, courants, pratiques et discours relatifs
à l’islam contemporain en France, de sa composition, en mutations et recompositions
permanentes. Les usages passés et présents du corpus religieux islamique, l’étude de la
production scripturaire ancienne comme contemporaine ne seront pas non plus ignorés. Une
approche pluridisciplinaire intégrant sociologues, anthropologues, juristes, économistes,
politologues, historiens et islamologues a été privilégiée.
Les appels à projets 2016, qui s’adressent à l’ensemble de la communauté académique
francophone, répondent aux besoins de connaissance des pouvoirs publics, dont le récent
rapport « Recherche sur les radicalisations » de l’Alliance Athena (mars 2016) estime qu’ils
devraient nouer un dialogue plus soutenu avec le monde de la recherche. Plusieurs thèmes ont
été retenus cette année, en accord avec le Conseil scientifique de ces crédits de recherche,
composé de sept universitaires reconnus, présidé par le professeur Francis Messner
(Université de Strasbourg).
En amont de la « radicalisation », il conviendra de préciser la nature des « discours de
rupture » (Projet n°8-2016) qui circulent dans l’espace discursif musulman français ainsi que
leurs vecteurs. A l’opposé de ces « discours de rupture », on ne doit pas ignorer pour autant
les « approches réformistes » (Projet n°11-2016) de plus en plus visibles. Un appel d’offres
sera également lancé sur le thème de l’« Enseignement confessionnel destiné aux enfants »
(Projet n°9-2016) ainsi que sur les « Etablissements scolaires musulmans en France » (Projet
n°10-2016) qui se sont multipliés ces dernières années. Enfin, il est envisagé de financer le
prolongement de l’étude préliminaire sur « Le marché halal en France et en Europe » (Projet
n°12-2016) amorcée en 2015 ainsi que de proposer à une équipe de recherche de mener une
investigation sur le « Hadj : étude du marché français et enquête de satisfaction des
pèlerins » (Projet n°13-2016), deux secteurs socio-économiques en pleine structuration, qui
constituent également des sujets d’intérêts.
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Ces crédits de recherche soutiendront par ailleurs la création d’un « Prix Rémy Leveau de
la thèse en sciences humaines et sociales de l’islam de France et d’Europe » qui sera attribué
tous les deux ans en alternance avec le « Prix Mohamed Arkoun de la thèse en islamologie »
par le GIS Moyen-Orient/Mondes Musulmans et l’IISMM-EHESS1.
Modalités des candidatures
- L’appel est ouvert à tout porteur de projet titulaire d’une thèse de doctorat dans le
domaine des sciences humaines et sociales, affilié à un laboratoire de recherche
reconnu, notamment EA et UMR, et bénéficiant d’une réelle compétence dans les
champs et thématiques impliquées. La date limite d’envoi des propositions (1
exemplaire par courriel, un exemplaire par courrier, voir ci-dessous) est fixée au 13
mai 2016.
- Le dossier sera constitué d’un projet qui s’articulera principalement autour de deux
axes : I. Présentation, état de la question, problématisation ; II. Axes de
recherche, méthode et mise en œuvre pratique (modalités de l’enquête de terrain,
calendrier du déroulement de la recherche, et budget prévisionnel) suivis d’une courte
bibliographie indicative, l’ensemble ne devant pas excéder 5 pages (hors CV et
lettre de soutien).
- Le dossier électronique devra être accompagné dans le même document que le
projet d’un CV du ou des porteurs de projet (qui mentionnera clairement les
publications, notamment) ainsi que d’une lettre de soutien du/de la directeur/trice
d’un laboratoire de recherche qui s’engage à héberger le projet s’il est retenu. Une
lettre de recommandation pourra également être jointe au dossier. On n’omettra pas le
cas échéant de préciser en quelques lignes les noms, prénoms, et références des
chercheurs (étudiants de master ; doctorants, post-doctorants, enseignants ou
chercheurs statutaires) susceptibles de composer l’équipe de recherche, ainsi que leur
rôle précis au sein de celle-ci. Le porteur de projet ajoutera enfin à l’exemplaire papier
de son dossier (uniquement, et non au dossier par courriel, voir ci-dessous) l’une de
ses publications relative au sujet pour lequel il candidate.
- Chaque porteur évaluera de manière réaliste ses besoins en matière de ressources
humaines et matérielles en proposant un budget prévisionnel précis (sachant qu’une
somme plafond par projet a déjà été arrêtée par le conseil scientifique). Il/Elle pourra
le cas échéant se rapprocher du Bureau Central des Cultes pour obtenir plus
d’informations sur ce point.
- Les dossiers de candidature au format papier (+ publication significative) seront
envoyés au Ministère de l’intérieur, DLPAJ, Bureau central des cultes, 1 bis Place des
Saussaies, 75008 et au format électronique (sans publication significative) à bureau-
[email protected]2 via une plateforme de téléchargement AVANT le 30
MAI 2016. Ils seront ensuite examinés par un conseil scientifique en charge de
l’évaluation. Le conseil d’administration communiquera les délibérations et décisions
aux candidats dans le courant du mois de juillet 2016.
Paris, le 5 avril 2016
1 L’appel à candidature pour ce prix est prévu courant octobre 2016.
2 La case « sujet » du courriel indiquera notamment le numéro du projet pour lequel postule le candidat.
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Appel à projet de recherche 2016 « Islam, Religion et Société »
Ministère de l’Intérieur, en partenariat avec le ministère de l’Education nationale, de
l’enseignement supérieur et de la recherche
Direction des libertés publiques et des affaires juridiques - Bureau central des cultes
Projet n°8-2016 : Discours de rupture dans l’islam contemporain (islamologie,
linguistique, sciences de l’information et de la communication, sociologie, anthropologie,
histoire)
Depuis la proclamation d’un califat par l’organisation Etat Islamique en 2014 et le
départ de plusieurs milliers de jeunes européens pour la Syrie ou l’Irak, de nombreuses
réflexions sur le processus de radicalisation1 sous la forme d’ouvrages (Khosrokavar 2014,
Thomson, 2014 etc.), d’articles ou multiples séminaires, colloques, conférences ainsi que
quelques projets de recherche ont vu le jour.
Mais en-deçà de la seule radicalisation se matérialisant en appel au djihâd, on connaît
toujours assez mal les « discours de rupture » avec la société environnante qui circulent dans
l’espace discursif musulman francophone contemporain. Les Anglo-saxons parlent de
« rejectionnist Islam » (Muslih, 2007-2016, Hegghammer, 2007) ou de « radical Islamism »
pour désigner cette tendance. La notion de « discours de rupture » se rapproche également de
ce que les spécialistes du christianisme d’époque moderne (XVIe-XVIIIe siècle) appellent des
discours de « distinction confessionnelle » (Crouzet, 2015).
Il appartiendra à l’équipe de recherche d’en déterminer les principaux thèmes, le
glossaire, les récurrences terminologiques et les champs sémantiques ainsi que leurs
idéologues et propagateurs. Celle-ci identifiera les vecteurs de propagation de ces notions et
les modalités de réception de ces discours. On cherchera ainsi à mesurer le niveau de
pénétration de ces discours de rupture auprès des jeunes.
A ce titre, les candidats constitueront une équipe pluridisciplinaire composée de
chercheurs qui pourront relever des champs disciplinaires de l’islamologie, de la linguistique
(sémiotique notamment), des sciences de l’information et de la communication, ainsi que de
la sociologie et de l’anthropologie pour les enquêtes de terrain. Ce programme de recherche
débutera en septembre 2016 pour s’achever en aôut 2018.
1Définit par Farhad Khosrokavar comme « processus par lequel un individu ou un groupe adopte une forme
violente d’action, directement liée à une idéologie extrémiste à contenu politique, social ou religieux qui
conteste l’ordre établi sur le plan politique social ou culturel » (2014 : 7-8)
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1-Les grandes notions du « discours de rupture »
Concrètement, il s’agit d’identifier les termes et notions "islamiques" (ou présentées
comme telles) les plus usités et connotés symboliquement tels que takfîr, kafîr, hijra, taghût,
hakimiyya, al walā’ wa-l-barā’, al amr bi l-ma’rûf wa an-nahy ‘an al-munkar, shirk, al-firqa
al-nâjiya, al-jâhiliyya etc. A travers l’étude détaillée de ce glossaire du « discours de rupture »
et de ses multiples occurrences, on mettra en évidence les définitions de l’altérité
confessionnelle/convictionnelle, de la liberté de conscience, du rapport au politique
(conception de l’Etat, de la démocratie, de la participation citoyenne et politique…), des
modalités du prosélytisme en milieu non-musulman, de la place de la femme dans la
société, du rapport à la pureté (extension du harâm et du halâl à de nombreux domaines de la
vie sociale…), du rapport au compromis, de la légitimation ou non de la violence etc. qu’elles
supposent. Une typologie de ces discours pourra être proposée.
2-Disputations numériques : les discours de rupture sur internet et les réseaux sociaux
Dans un second temps, l’équipe de recherche essaiera de mesurer l’ampleur de la
diffusion de ces notions à la fois sur les sites internet, les réseaux sociaux ou les chaînes
satellitaires en identifiant plusieurs cas qui lui paraissent caractériser la diffusion de ce type de
discours de rupture. Cette étude menée par des islamologues, linguistes et des sociologues (ou
chercheurs en sciences de l’information et de la communication) portera sur les principaux
espaces du net francophone (sites, forums, Youtube, Dailymotion) qui véhiculent ces discours
de rupture.
3-Niveau d’élaboration et diffusion éventuelle du discours de rupture sur le terrain
Resserrant un peu plus la focale, l’équipe diligentera également des enquêtes de terrain
(voir cadre géographique ci-dessous) dans les zones urbaines du territoire français qui ont vu
ces discours de rupture se diffuser peu ou prou ces dernières années. Il conviendra de mettre
en évidence les principaux relais de ces discours de rupture sur le terrain (associations,
personnalités charismatiques, ouvrages religieux,…).
Dans chaque bassin de population, les chercheurs veilleront à recueillir des entretiens
de première main avec au moins trois propagateurs du discours de rupture et une vingtaine
d’entretiens avec des jeunes gens susceptibles de constituer des cibles de ces discours.
Quatre bassins principaux de populations seront sélectionnés parmi les régions
parisienne, lyonnaise, lilloise, toulousaine ou marseillaise.
Méthodologie
En dehors de ces grandes lignes, les candidats établiront clairement leur méthodologie, les
terrains précis pressentis ainsi que le nombre et la biographie académique des chercheurs
et/ou étudiants identifiés pour mener à bien l’ensemble de ce projet de recherche.
Délivrables
Un rapport à mi-parcours, un séminaire à mi-parcours, un colloque de fin de recherche et un
ouvrage collectif.
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Document budgétaire
Le porteur de projet évaluera de manière réaliste ses besoins en matière de ressources
humaines et matérielles en proposant un budget prévisionnel précis (sachant qu’une somme
plafond par projet a déjà été arrêtée par le conseil scientifique). Il/Elle pourra le cas échéant se
rapprocher du Bureau Central des Cultes ([email protected]) pour
obtenir plus d’informations sur ce point.
Calendrier
Date limite : 30 mai 2016 (voir la fiche « Guide des appels à projets » pour le contenu des
dossiers et modalités de soumission).
Bibliographie indicative
Histoire
BENACHOUR Yâdh, Aux fondements de l’orthodoxie sunnite, PUF, Paris, 2008.
CROUZET Denis, Au péril des guerres de religion, PUF, Paris, 2015.
LAUZIERE Henri, The Making of Salafism: Islamic Reform in the Twentieth Century
(Religion, Culture, and Public Life, Columbia University Press, NY, 2015.
LAUZIERE Henri, “The Construction of Salafiyya: Reconsidering Salafism From the
Perspective of Conceptual History, International Journal of Middle East Studies
International Journal of Middle East Studies, Vol. Issue 03, August 2010, pp 369-389.
MOULINE Nabil, Les Clercs de l’Islam. Autorité religieuse et pouvoir politique en Arabie
Saoudite, XVIIIe XXIe siècle, PUF/Proche-Orient, 2011.
Idéologie
HAYKEL Bernard, “On the Nature of Salafi Thought and Action”, in Global Salafism.
Islam’s New Religious Movement, dir. Roel Meijer, Hurst & Company, London, 2009.
KEPEL Gilles, HEGHAMMER Thomas, MILLELI Jean-Pierre (dir.), Al Qaeda dans le texte,
PUF (coll. Orients), 2005.
HEGGHAMMER Thomas, Jihadi-Salafis or Revolutionaries ? On Religion and Politics in
the Study of Militant Islamism”, in Global Salafism, op.cit.
LACROIX Stéphane, « Al-Zawahiri », in Al Qaeda dans le texte, op.cit..
LOHLKER Rüdiger, Jihadism: Online Discourses and Representations. Vienna University
Press, 2013.
MUSLIH Muhammad, "Democracy" (“The rejectionist Islamic view”), in The Oxford
Encyclopedia of the Islamic World. Oxford Islamic Studies Online,
http://www.oxfordislamicstudies.com/article/opr/t236/e0185 (accessed 17-Jan-2016), 2007-
2016.
KHOSROKAVAR Farhad Radicalisation, Éditions de la Maison des sciences de l'homme,
FMSH, coll. « Interventions », Paris, 2014
BEHNAM Saïd, Hymns (Nasheeds): A Contribution to the Study of the
Jihadist Culture, Studies in Conflict & Terrorism, 35:12, 863-879, 2012.
SEIDENSTICKER Tilman, Islamismus. Geschichte, Vordenker, Organisationen,
Sonderauflage für die Landeszentralen für politische Bildung, München, 2014
WAGEMAKERS, J. "The Kafir Religion of the West". Takfir of Democracy and Democrats
by Radical Islamists, in Camilla Adang, Hassan Ansari, Maribel Fierro & Sabine Schmidtke
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