Chapitre IV 0B Action du médicament 1B 53 1 Introduction Si le devenir du médicament dans l’organisme constitue la pha rmacocinétique, le mécanisme d’action du principe actif relève de la pharmacodynamie. L’ensemble constitue la pharmacologie . a U U Indépendamment du mécanisme d’action, il existe quatre grandes classes fondamentales de médicaments. - médicaments à usage préventif : administration à un sujet sain en vue de prévenir le développement de la maladie. Exemple : les vaccins antiviraux (hépatite B…) et antibactériens (coqueluche). U U - médicaments de substitution : pour pallier à une carence de l'organisme. a) soit d'origine exogène ou alimentaire Exemple : administration de minéraux (calcium, fluor…) ou de vitamines (vit D, vit A,…) U U b) soit d'origine endogène Exemple: administration d'insuline chez le diabétique - médicaments supprimant la cause première de la maladie Exemple : antibiotiques, antiviraux, antifongiques,… U U - médicaments supprimant les symptômes d'une pathologie : ils constituent la majorité des médicaments disponibles. Exemple : anti-douleurs, anti-hypertenseurs, anti-inflammatoires,… U 2 U Interaction cible – principe actif L’action d’un médicament est toujours le résultat de son interaction avec une cible qui est toujours de nature protéique. Il s’agira soit d’un récepteur, soit d’une enzyme. Ces cibles sont soit intégrées à une membrane (cellulaire, …), soit en solution (cytoplasme, nucléoplasme, liquide extracellulaire, plasma,…). Les interactions chimiques avec la cible sont multiples et variées : - liaisons interactions covalentes (40-100 kcal.mol-1), - interactions ioniques (5 kcal.mol-1), - ponts hydrogènes (2-10 kcal.mol-1), - interactions hydrophobes (1 kcal.mol-1) … Pour chaque récepteur, il existe au moins une substance endogène capable de s’y lier, et de déclencher une réponse : cette substance est appelée ligand endogène. Il peut y avoir plusieurs ligands et plusieurs sites pour un même récepteur. Dans certains cas, il existe des récepteurs pour lesquels aucun ligand n’a été identifié, ce sont les récepteurs orphelins. 54 Récepteur GABAA : Site de fixation Localisation sous unité GABA Action des agonistes ouverture du canal et entrée de Cl- BZD sous unité barbiturique favorise la fixation de GABA renforce l’effet du GABA diminue la perméabilité picrotoxine intra-canal aux Claugmente la durée d’ouverture du canal stéroïde L’interaction d’un principe actif ou d’un ligand avec un récepteur peut déclencher, ou empêcher une réponse cellulaire (contraction, sécrétion,…) ou biochimique, voire provoquer une réponse inverse. Le récepteur peut être couplé à un transporteur ionique (canal, symport, antiport,…) ou avec un second messager. L’interaction d’un principe actif sur un récepteur se traduira par exemple par : - la contraction cellulaire (cœur, vaisseaux, bronches, muscles…) - la sécrétion d’une hormone (insuline, testostérone…) - la sécrétion d’un neurotransmetteur (adrénaline, sérotonine….) - la synthèse de molécules (antibiotiques, hypocholestérolémiants, anticancéreux,..) Lorsque le principe actif cible une enzyme, il est appelé substrat lorsqu’il est transformé par l’enzyme en produit de la réaction. Si ce principe actif empêche l’action de l’enzyme, on parlera d’inhibiteur. Lorsque cet inhibiteur occupe la place du substrat, il s’agira d’un inhibiteur compétitif. S Enzyme P Idéalement, un principe actif sélectif n’interagira qu’avec un seul type de cible. 55 3 Relation dose-effet : Au niveau cellulaire ou subcellulaire, le nombre de récepteurs ou d’enzymes est un nombre fini. Dès lors, lorsqu’un ligand interagit avec la totalité de ses protéines réceptrices, l’effet sera maximal, un accroissement de la concentration en principe actif n’augmentera pas davantage l’effet recherché, l’effet maximal (Effetmax) est atteint. Il risquera en outre de déclencher des effets non recherchés éventuellement et toxiques par interaction avec d’autres cibles. Effet Effetmax = 100% 50% EC50 concentration en drogue Relation entre la concentration en principe actif et l’intensité de l’effet produit. La concentration d’un récepteur ou d’une enzyme peut varier en fonction de l’organe, du tissu ou du type de cellule. Si le ligand est spécifique d’un type de récepteur, alors l’activité pharmacologique peut ne concerner qu’un organe ou un tissu bien défini. La concentration en principe actif capable de donner une réponse égale à 50% de l’effet maximal (Emax) sera appelée EC50 (concentration efficace). Ce paramètre est généralement utilisé lors d’expérimentation in vitro. L’ED50 correspond à la dose (mg.kg-1) capable de donner une réponse égale à 50% de l’effet maximal. Cette notion est d’application dans les expérimentations in vivo et donc dans les essais cliniques. U U U U L’intensité de l’effet maximal correspond à l’efficacité, tandis que la puissance dépend de la concentration nécessaire pour atteindre la moitié de l’efficacité maximale. Dans la première partie de la courbe du graphique repris ci-dessous, une faible augmentation de la concentration en principe actif produit une faible augmentation de l'effet thérapeutique. Dans la partie centrale, l’accroissement de la concentration en principe actif produit une forte augmentation de la réponse pharmacologique. Tandis que dans la partie droite de la courbe, une augmentation de la concentration en principe actif ne produit plus que de très faibles augmentations de la réponse pharmacologique, jusqu’à atteindre l’effet maximal. 56 Pour déclencher une réponse pharmacologique, un nombre minimum de sites (enzymes ou récepteurs) doivent être occupés par le principe actif. Il faut donc que ce principe actif atteigne une oncentration minimale efficace au voisinage de sa cible. c D’autre part, lorsque la con centration minimale toxique ou concentration maximale tolérée est atteinte, des effets indésirables graves ou bénins peuvent apparaître. n 57 Lors de l’administration d’un médicament on doit se situer entre ces deux concentrations. La marge ou l’index thérapeutique d’un médicament sera défini comme étant le rapport entre sa concentration maximale tolérée et sa concentration minimale efficace. Plus grande sera cette différence, plus aisée, plus sûre seront l’utilisation et la manipulation du médicament. U U Concentration plasmatique en principe actif après administration orale unique. Lors de la prise unique d’un médicament, il faut un certain temps pour que le principe actif atteigne sa concentration maximale dans le sang. On parlera de Tmax et de Cmax. T0 : administration du médicament. T0 → T1 : T0 → T2 : temps de latence ou temps nécessaire pour atteindre la concentration efficace (=délai de survenue de l’action). temps nécessaire (Tmax) pour atteindre la concentration maximale (Cmax) où l’effet est maximal. T1→ T3 : durée de l’effet. Selon la forme pharmaceutique administrée, la concentration en principe actif peut varier fortement, de même que la durée d’action, et l’efficacité : ces variations font partie de la pharmacocinétique (= devenir du médicament) 58 4 Le ligand La nature du ligand endogène ou exogène peut être très variable ; il peut s’agir d’une molécule organique de synthèse (aspirine, diazépam,…), d’un peptide (vasopressine,…), d’une protéine (fibrinogène,…), d’un neurotransmetteur (acétylcholine,…), d’une hormone (œstradiol,…),… En fonction de la réponse induite par le ligand lorsqu’il interagit avec un récepteur, il est possible de classer celui-ci : 1) Une molécule capable de déclencher, par sa liaison à un récepteur spécifique, une action analogue à celle du ligand naturel endogène, est un agoniste. C’est le cas des endorphines et de la morphine vis-à-vis des récepteurs aux opiacés. 2) Une molécule qui se lie à son récepteur mais qui empêche la réponse du ligand naturel endogène est un antagoniste. C’est le cas des -bloquants, anti-hypertenseurs, vis-à-vis des récepteurs 1 et/ou 2. 3) Une molécule capable de déclencher, par sa liaison à un récepteur spécifique, une action opposée à celle du ligand naturel endogène, est un agoniste inverse. 4) Dans le cas où l’intensité maximale de la réponse déclenchée par le principe actif est inférieure à celle produite par le ligand endogène, on parlera d’agoniste ou d’antagoniste partiel. 5) Dans le cas d’une molécule dont la cible est une enzyme, on parlera d’activateur (ou substrat) ou d’inhibiteur. Parmi les inhibiteurs on distinguera les inhibiteurs de type compétitifs, non-compétitifs ou encore incompétitifs. ligand endogène agoniste agoniste partiel 0 log [L] agoniste inverse 59 60