Prop. 10.74 EXAMEN DES PROPOSITIONS D'AMENDEMENT DES ANNEXES I ET II Autres propositions A. Proposition Inscription à l'Annexe II B. Auteur de la proposition Ministère de l'Environnement et des Forêts, autorité scientifique CITES de l'Inde C. Justificatif 1. Taxonomie 1.1 ClasseDicotyledoneae 1.2 Ordre Personales 1.3 FamilleScophulariaceae 1.4 Nom scientifiquePicrorhiza kurrooa Royle ex Benth. Scroph. Ind. 47.1835 1.5 Synonyme scientifique 1.6Nom commun 1.7Numéro de code 2. Paramètres biologiques 2.1Répartition géographique Himalaya, du Jammu-et-Cachemire (Inde,) jusqu'au Népal et au Sikkim, s'étendant jusqu'aux aux montagnes du Yunnan en Chine. 2.2Habitat disponible Cette espèce croît sur des pentes rocheuses bien drainées, humides et à l'état naturel, dans les zones alpines de l'Himalaya, à des altitudes comprises entre 3000 et 5000m. 2.3Etat de la population Rare. D'après des relevés antérieurs, l'aire de répartition était vaste (voir point 2.1) et l'espèce connaissait une régénération naturelle à partir des graines et des rhizomes. Cette population a été abondamment enregistrée et authentifiée, notamment par des scientifiques tels que Watt, Stewart et Royl, entre la fin du 19e siècle et des années 1970 ou 1980. Les rhizomes ont été utilisés par les groupes ethniques locaux pour soigner divers maux et maladies, et par les médecines locales pendant des siècles sans aucun préjudice pour les populations sauvages. Ce n'est qu'avec les progrès de la biotechnologie que l'exploitation a décuplé, entraînant un déclin rapide des sources naturelles. Une étude récente révèle que l'espèce a totalement disparu en de nombreux endroits situés à des altitudes relativement faibles où elle avait été enregistrée précédemment et que des populations enregistrées comme denses à des altitudes plus élevées ont régressé. Cependant, dans les aires protégées comme le parc national de Valley of Flowers, on trouve encore des concentrations localisées comportant plus de 50 individus/m2. 2 2.4Tendances de la population Vulnérable. La destruction de la population sauvage, qui dépasse 60%, est imputable aux prélèvements sans discernement des rhizomes, avant même l'apparition des fruits, qui empêchent la régénération naturelle de l'espèce. Des études de terrain répétées suggèrent que si ces prélèvements soutenus et non planifiés se poursuivent, l'espèce est vouée à l'extinction dans un proche avenir. 2.5Tendances géographiques Selon les derniers rapports et études, l'espèce ne s'étend pas au-delà de son aire de répartition antérieure (voir point 2.1). 2.6Menaces La principale menace pesant sur l'espèce est sans aucun doute le prélèvement excessif de rhizomes à des fins médicinales. La demande considérable dont cette espèce fait l'objet, sur le marché tant intérieur qu'international, entraîne des prélèvements sans discernement dépassant de loin la capacité d'utilisation et les besoins. Une enquête récente à permis de découvrir d'énormes bottes de plantes déracinées dans la nature, transportées à dos d'âne vers le marché local. L'autre facteur du déclin de cette espèce est, à l'instar de nombreuses autres espèces rhizomateuses ou pulpeuses de la région himalayenne, la perturbation de l'habitat. Les grands projets tels que barrages et construction industrielle entraînent la destruction massive de nombreuses ressources génétiques potentielles de ce type, avec pour principaux effets indirects à long terme la destruction de l'habitat, la modification de l'écosystème et la pollution. La construction de routes entraîne aussi des destructions en ouvrant l'accès à des ressources potentielles prospères. 3.Utilisation et commerce 3.1Utilisation au plan national Les rhizomes de cette espèce sont utilisés par divers groupes ethniques des régions montagneuses depuis des temps immémoriaux pour traiter différents maux et maladies. Ils constituent également un élément important des médecines ayurvedique et du Yunnan. Avec les progrès de la biotechnologie, la croyance grandissante dans les plantes médicinales et le développement de l'industrie pharmaceutique, la demande a décuplé, entraînant le prélèvement et la commercialisation de plus grandes quantités de plantes. Ces rhizomes sont également utilisés comme adultérant ou substitut de la gentiane indienne Gentiana kurroo. Dans le Sikkim, des quantités avoisinant 4000 kg de rhizomes ont été commercialisées entre 1993 et 1994. 3.2Commerce international licite Une analyse récente des registres commerciaux révèle que d'importantes quantités de Picrorhiza kurrooa sont exportées régulièrement de l'Inde vers le Sri Lanka, les Etats-Unis et l'Australie. Selon la Wildlife Protection, Western Zone, Pune, quelque 7218 kg ont été exportés du port de Bombay en 1992-93, 1000 kg en 1993-94, et 2060 kg en 1994-95; environ 4000 kg ont été exportés du port de Calcutta en 1991-92, 9000 kg en 1994-95 et 300 kg en 1995-96, selon les registres de la Wildlife Protection, Eastern Zone, Calcutta. Mais l'exploitation réelle dépasse nettement ces chiffres, comme en témoigne notamment un rapport d'experts de l'UICN selon lequel 10 à 24 tonnes de racines de Picrorhiza kurrooa sont exportées par les Etats de l'aire de répartition, dont la majeure partie provient forcément de l'Inde. 3.3 Commerce illicite Compte tenu de l'ampleur de la demande, principalement orientée vers l'exportation, un volume important est forcément commercialisé illicitement, que ce soit en contrebande ou sous le nom d'une autre espèce semblable. 3 3.4Effets réels ou potentiels du commerce Dans la littérature sanscrite, les rhizomes sont décrits comme étant amers, âcres et stomachiques. L'extrait est considéré comme un tonique précieux presque aussi efficace que la gentiane indienne Gentiana kurroo. La substance extraite du rhizome contient une grande proportion de principes amers tels que pricrorhizine, kutkine, kurrine, kuticol et kutki-stérol. Le sesquiterpène est connu pour être le principe odorant de la racine. Ces substances sont couramment utilisées pour leurs propriétés stomachiques, antipyrétiques, dysménorrhéiques, anthelminthiques, laxatives, émétiques en petites doses et cathartiques en doses plus importantes. Elles sont également prescrites pour les fièvres biliaires, la dyspepsie, les troubles urinaires, l'asthme, les brûlures, le leucoderme, la jaunisse, les problèmes de foie, l'épilepsie, la goutte, les infections dues à la teigne, la galle et les hémorroïdes. Les racines entrent également dans la composition de certains purgatifs. Cet usage médicinal si diversifié, tant national qu'international, fait peser de graves menaces sur les populations de l'espèce, du fait que l'essentiel de l'approvisionnement provient de ressources sauvages. 3.5Elevage en captivité ou reproduction artificielle à des fins commerciales (hors du pays d'origine) Inconnu. 4.Conservation et gestion 4.1Statut légal 4.1.1Au plan national Une étude de la population de l'espèce a révélé qu'elle était classée dans la catégorie «vulnérable», dans le Red Data Book of Indian Plants, de la Botanical Survey of India. 4.1.2Au plan international Compte tenu de l'ampleur de la menace pesant sur cette espèce, il conviendrait de l'inscrire sans tarder à l'Annexe II de la CITES afin de pouvoir mettre en oeuvre une réglementation efficace du commerce. 4.2 Gestion de l'espèce 4.2.1Surveillance continue de la population Effectuée par des scientifiques dans le cadre de la Botanical Survey of India. 4.2.2Conservation de l'habitat Une partie de l'habitat d'origine se trouve dans la réserve de biosphère de Nanda Devi et dans le parc national de Valley of Flowers, dans l'Himalaya, en Uttar Pradesh, où elle est protégée. Des stratégies sont en préparation en vue de protéger l'espèce au Sikkim. 4.2.3Mesures de gestion Des programmes sont en cours afin de réintroduire l'espèce dans certaines parties de l'habitat d'origine gravement dégradées par la surexploitation et autres facteurs écologiques. Des études d'impact sur l'environnement sont effectuées dans le cadre de la Botanical Survey of India et d'autres organisations scientifiques dans certains sites où des projets d'aménagement sont proposés, afin que des stratégies adéquates de protection et de conservation puissent être élaborées avant la mise en route des projets. On essaie actuellement de cultiver et de multiplier cette espèce à partir de graines et de rhizomes pour en faire une exploitation commerciale en utilisant un système de prélèvement par rotations et de contingentement. 4 4.3Mesures de contrôle 4.3.1Commerce international La principale menace pesant sur les populations sauvages de l'espèce étant la surexploitation orientée vers le commerce intérieur et international, la réglementation du commerce par l'inscription de l'espèce à l'Annexe II de la CITES semble, à l'heure actuelle, le meilleur moyen de protéger l'espèce contre des dommages irréversibles. Nous proposons que seuls les stocks de rhizomes, qui sont faciles à identifier, soient inscrits à l'Annexe II et non pas leurs produits. 4.3.2Mesures internes Des stratégies de protection et de conservation de l'espèce in situ sont en préparation. Des programmes ont été lancés portant sur la reproduction artificielle et la culture à partir de graines et rhizomes, étant donné que l'espèce constitue la source potentielle de toute une gamme de médicaments à base plantes et que l'économie des communautés locales en est directement tributaire. Une plus grande attention est également accordée aux prélèvements durables orientés simultanément vers la protection et l'utilisation. 5.Information sur les espèces semblables 5.1Similarité dans l'apparence Les rhizomes de Gentiana kurroo Royle ressemblent superficiellement à ceux de Picrorhiza kurrooa. Les propriétés médicinales étant, elles aussi, plus ou moins semblables, le nom commercial courant et vernaculaire «Kutki» est appliqué aux deux espèces concernées. Il faut savoir que les racines de Picrorhiza kurrooa sont couramment utilisées comme adultérant de la gentiane indienne (Gentiana kurroo). Les rhizomes de Picrorhiza kurrooa se distinguent nettement par les bases de feuilles fanées, la peau plus fine, la surface relativement lisse, sans aucun rayon médullaire en coupe transversale; ces rhizomes sont durs et donc difficiles à comprimer. De plus, les feuilles de Picrorhiza kurrooa sont oblancéolées, celles de Gentiana kurroo étant linéaires et lancéolées. Neppicrorhizi scrophulariflora (Picrorhiza scrophulariflora) est une autre espèce apparentée, confinée à l'Himalaya du Sikkim, rare et se distinguant par une fleur irrégulière sur une hampe ressemblant à un pédoncule, sans bractées et aux étamines enfermées. 5.2 Spécimens faisant l'objet de commerce On trouve dans le commerce des rhizomes brun clair à jaune intense ou noir. Secs, il ont une épaisseur de 0,5 à 1 cm, sont cylindriques et restent couverts de bases de feuilles fanées. On peut les commercialiser intacts (de 3 à 6 cm de long) ou en petits morceaux. 5.3 Inscription aux annexes Pas à ce jour. 6.Autres commentaires 6.1Etats de l'aire de répartition Chine, Népal 6.2Organisation intergouvernementale L'organe de gestion CITES de l'Inde, a correspondu avec les organes de gestion de la Chine et du Népal. A la dernière session du Comité pour les plantes, l'autorité scientifique de l'Inde s'est entretenue avec l'organe de gestion de la Chine concernant la proposition d'inscrire cette espèce à l'Annexe II de la CITES et a obtenu son accord de principe. Toutefois, cette question fait encore l'objet d'une correspondance. 5 7.Remarques supplémentaires Description Petite plante vivace, plus ou moins velue. Rhizome allongé, vigoureux, de l'épaisseur de l'auriculaire, couvert de bases des feuilles fanées. Feuilles oblancéolées, 5 à 10 cm de long, fortement serratifoliées. Hampe (axe de l'inflorescence) vigoureuse, plus longue que les feuilles qui la sous-tendent, multiflore, bractées oblongues ou lancéolées. Fleur blanche ou bleu violacé pâle. Capsules (fruits ovoïdes) de 1 à 1,5cm de long, turgescentes. Annotation Les caractéristiques diagnostiques, morphologiques et anatomiques (coupe transversale) des rhizomes (partie commercialisée) de Picrorhiza kurrooa et Gentiana kurroo sont jointes en annexe avec un dessin pour faciliter l'identification. Picrorhiza kurrooaGentiana kurroo Morphologie 1. Rhizome généralement pourvu 1. Dépourvu de bases de feuilles de bases de fleurs fanées.fanées. 2. Allongé, généralement à peu près2. Plus souple mais ferme, de l'épaisseur d'un auriculaireplein, donc difficile à et creux ou évanescent à l'intérieur,comprimer. donc facilement compressible. 3. Peau plus fine ou membraneuse, plus3. Pelure plus épaisse, plus ou ridée, aux stries plus proéminentes. moins douce. Coupe transversale 1. Faisceaux (Xylème & Phloème) 1. Faisceaux disposés vers disposés vers la régionla région centrale. corticale (périphérique). 2. Péricycle (structure en forme d'anneau)2. Péricycle non proéminent. entourant les faisceaux très proéminents. 3. Rayons médulaires proéminents.3. Rayons médulaires non proéminents. Les contrôles de la CITES devraient se limiter aux racines et à leurs parties facilement identifiables (les produits devraient en être exclus). 8.Références Anonymous 1969. The wealth of India. CSIR. New Delhi. Vol. 8:49-50. Kirtikar, K.R. & Basu, B.D. 1935. Indian Medicinal Plants. (2nd ed.). Allahabad. Vol. 3:1802. Chowdhery, H.J. 1988. Picrorhiza kurrooa Royle ex Benth. in Nayar, M.P. & Sastry, A.R.K. eds. Red Data Book of Indian Plants. Howrah. Vol. 1:350-351. Hong. D.Y. 1984. Op. Bot. 75:56. Pennell, 1943. Scorphulariaceae of Western Himalayas. 65. Rao, M.A. 1975. High altitude flowering plants of W. Himalayas. p. 158. 6 Watt, J. 1893. Dictionary of the Economic products of India. Vol. 6(1):228-229. 7