– une définition des contenus et modalités
de recueil d’informations standardisées, à
l’aide de bordereaux.
L’expérimentation du PMSI
psychiatrie
Au mois de septembre 1997, en compa-
gnie de psychiatres publics, privés, PSPH
de la région Rhône-Alpes – d’autres
l’avaient fait à l’échelon national –, nous
avons participé à titre volontaire ou en tant
que “désigné volontaire” à une formation
de formateurs visant à entreprendre, en fin
décembre 1997 et janvier 1998, une expé-
rimentation du PMSI psychiatrie. Le
PMSI-MCO (médecine, chirurgie, obsté-
trique) avait déjà été expérimenté.
Les préalables ayant été définis lors des
réunions préliminaires auxquelles nous
n’avions pas assisté, il n’était pas question
de perdre du temps avec nos éventuels
états d’âme. Avait-on le loisir de penser
alors que nous était fournie une multitude
de documents, d’échelles de cotations éta-
blies par des experts, dont nous saurons
plus tard qu’ils étaient autoproclamés ? Le
groupe des treize avait trié sur le volet des
cas cliniques “type” pour nos exercices.
Car la consigne était claire : surtout ne pas
réfléchir mais “lister” des signes sans réfé-
rence nosographique… Une réflexion
étiopathogénique ou psychopathologique
aurait été bien trop risquée, car pouvant
conduire à raisonner, réfléchir, penser !
Penser… Verbe “tabou”… Si on pense, il
y a risque de contestation ou de critique…
Certains de nos confrères ont – sans doute
inconsciemment (!) – fait ce que mon
maître Georges Daumezon avait toujours
dénoncé haut et fort. Il écrivait en effet en
1979 : “[…] Nous devons dénoncer toute
tentative du pouvoir, de n’importe quel
pouvoir, de nous ‘associer’ à ses décisions.
Ces dernières années, dans notre pays, le
pouvoir a imaginé – j’espère pour lui que
c’est inconsciemment – des procédés dia-
boliques pour nous compromettre. […] On
ne peut trouver, dans l’inconscience des
médecins acceptant ces compromissions,
meilleure illustration de l’urgence d’une
rigoureuse discipline de pensée. En ces
matières comme dans le raisonnement
dirigeant la thérapeutique, l’absence de
rigueur est trahison du seul sujet, le
malade.”
Le PMSI relève d’une logique médico-
économique nous a-t-on dit. Il s’avère
qu’il s’agit bel et bien d’une logique stric-
tement économique.
En outre, le PMSI n’est que le premier
volet d’un triptyque, le deuxième consis-
tant en une démarche présentée comme
qualitative visant à l’accréditation des
structures de soins, le troisième en la pla-
nification des soins…
L’objectif du PMSI est de constituer des
groupes homogènes de patients. Or, le
recueil d’informations est fondé sur des
bordereaux pour tous les soignants avec
deux axes : la consommation de soins par
patient et les soins réellement prodigués
par intervenant… Les corrélations sont
faciles à établir entre ces deux axes.
L’enquête s’est avérée lourde et répétitive.
Elle a mobilisé beaucoup trop d’énergie
pour les soignants qui ont négligé leurs
patients pendant ce temps. Le mot
“patient” a fait place à celui de “client”
venant chercher des prestations. Quant aux
diagnostics (six champs plus une échelle
globale de fonctionnement des patients),
ils reposent sur l’utilisation de la CIM
10emouture. La CIM est une classifica-
tion et non une nosographie. Et pourtant,
à partir d’un catalogue, la CIM, on va éta-
blir des groupes homogènes de patients
afin de savoir combien coûtent la schizo-
phrénie et les sous-types de schizophré-
nie, l’alcoolisme, l’anorexie, etc… Donc
il est question d’évaluer le coût de mala-
dies avec un instrument qui recense des
signes et au mieux des syndromes mais en
aucun cas des maladies.
Certes, il était indispensable de chercher et
de trouver une classification des maladies
mentales plus fiable que l’étique et unique
classification Inserm en 20 catégories.
Mais comment retranscrire la richesse des
fines descriptions de nos prédécesseurs
aliénistes du XIXesiècle tout en synthéti-
sant des notions éparses, diversement
admises par l’ensemble des psychiatres
français, européens et a fortiori à l’échelle
planétaire ?
L’OMS a tenté un travail fédérateur, en
publiant les diverses versions de la CIM
(classification internationale des mala-
dies), mais il faut se rendre à l’évidence,
le DSM (classification américaine et non
internationale) devient de facto LA clas-
sification internationale et l’unique réfé-
rence.
Nous devons reconnaître que le DSM et la
CIM n’apportent strictement rien sur le
plan purement clinique et quotidien.
Christian Vasseur, secrétaire général de
l’AFP, écrivait en janvier 1999 dans le
numéro 81 de la revue Psychiatrie
Française : “Lors du congrès de l’AMP à
Madrid en 1996, le DSM était le seul livre
présent à tous les stands, en toutes les
langues et dans toutes les couleurs. Il est
vrai que le thème du congrès était révéla-
teur : ‘Une psychiatrie, une langue’. Je
qualifiais d’orgueilleux projet cette vision
idéale qui aurait pu et pourrait toujours
être source d’impérialisme, donc d’explo-
sion… [...] Nos collègues avaient et ont
encore la mémoire courte car, sans évo-
quer le sinistre ‘Un pays, un peuple, un
chef’, nous avons tous en tête un de nos
mythes imaginaires, la Tour de Babel. On
sait ce qu’il advint aux hommes à se vou-
loir une langue et un projet communs
défiant les cieux et défiant leur radicale
singularité : ils s’entre-déchirèrent.”
Les classifications changent, la clinique
demeure…
Mais revenons au PMSI proprement dit.
Pourquoi jouer les Cassandre, m’a-t-on
dit ? Certes, la montagne PMSI accou-
chera très certainement d’une souris, car
la constitution de groupes homogènes de
patients est loin d’être chose facile… Pour
s’en convaincre, il suffit d’être attentif aux
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sionnelle
Vie professionnelle