rouver le meilleur équilibre entre la
préservation de la fonction du gref-
fon et les risques associés aux immuno-
suppresseurs est au cœur des préoccupa-
tions des transplanteurs. Un effet
secondaire particulièrement redouté de
l’immunosuppression est la survenue de
différents types de cancers (1-4). La
recherche d’une association entre immu-
nosuppression et survenue de cancers en
transplantation a été l’objet de différents
types d’enquêtes épidémiologiques. Un
essai thérapeutique récent est en quelque
sorte l’exception qui confirme la règle (5).
L’épidémiologie contribue à la connais-
sance des cancers survenant au cours de
l’insuffisance rénale terminale (IRT) sous
plusieurs aspects. Il s’agit, par exemple,
de l’étude des variations d’incidence selon
la géographie et le temps, selon les
groupes d’exposition (dialysés, trans-
plantés avec greffon fonctionnel ou
retournés en dialyse) et selon la nature de
l’exposition (type, posologie, ou durée de
l’immunosuppression), ou encore de
l’étude de l’influence d’interventions des-
tinées à soustraire les sujets exposés à cer-
tains facteurs de risque (carcinogènes). Il
s’agit aussi de l’étude des mécanismes par
lesquels les cancers surviennent dans ces
populations, du rôle de certains virus
(Epstein-Barr, herpèsvirus 8, papilloma-
virus), des ultraviolets, des facteurs
influençant la transformation de cellules
humaines normales en cellules malignes
(6), ou du rôle propre des immunosup-
presseurs, non médié par une diminution
de la surveillance immune (7).
Dans la mesure où les données d’un seul
centre ne suffisent pas à fournir des esti-
mations fiables de l’incidence des can-
cers, les données des registres sont utiles.
Les registres des cancers collectent de
manière exhaustive et continue tous les
cas survenus dans une aire géographique
donnée et sur une période donnée. Ce
type d’approche a été développé en appui
des enquêtes d’observation. Aux États-
Unis, le registre des tumeurs des trans-
plantés de Cincinnati (Cincinnati Tumor
Transplantation [CTT] Registry) ras-
semble des informations sur les cancers
chez les transplantés rénaux, mais aussi
pour d’autres greffes (cœur, pou-
mon, foie ou pancréas) (8).
Cependant, ce registre ne fournit
pas de données d’incidence, car le
dénominateur, à savoir le nombre
de patients-années à risque, n’est
pas systématiquement enregistré.
Le registre australien et néo-zélan-
dais, en revanche, fournit des don-
nées d’incidence des cancers chez
les transplantés (9). C’est aussi le
cas pour les pays nordiques (10).
L’épidémiologie de l’incidence
des cancers chez les insuffisants
rénaux terminaux sera illustrée
d’exemples tirés de la littérature,
et particulièrement de l’étude de
Brunner et al. réalisée sur la base
du registre de l’EDTA (European
Dialysis and Transplantation
Association) (11). Ce registre a
colligé de manière continue l’IRT
en Europe, ses traitements et la
survenue de cancers.
DÉCLARATION DES CAS
ET POPULATION À RISQUE
Plusieurs questions doivent être
posées a priori concernant la décla-
ration des cas et leur classification.
D’autres questions concernent la
définition de la population à risque
(encadré 1). La population à risque
de l’étude de Brunner (11) est
représentée par les patients inci-
dents qui commencent le traitement
de l’IRT quelle que soit la modalité.
Le recueil sur la période n’était pas
exhaustif pour l’ensemble de l’Eu-
rope. Il variait d’un pays à l’autre.
En moyenne, il était voisin de 60 %.
Les auteurs ont fait l’hypothèse forte
que cette population était représen-
tative de la population cible.
DISTRIBUTION DES CAS
La distribution par âge et par sexe de
la population des transplantés avec
greffe fonctionnelle est différente de
celle des dialysés jamais greffés
(figure 1). La distribution des cas de
cancers dans la population des insuf-
Le Courrier de la Transplantation - Volume III - n o2 - avril-mai-juin 2003
60
DOSSIER
thématique
T
Encadré 1.Analyse du taux d’incidence d’un cancer.
■LENUMÉRATEUR DU TAUX CONCERNE LES CAS
Déclaration
✓Le suivi des patients est-il approprié
au regard de la détection du cancer étudié ?
✓Les modalités du diagnostic sont-elles adaptées ?
✓La procédure de déclaration est-elle homogène ?
✓Le questionnaire est-il complété
de manière adéquate ?
✓Le médecin ayant complété le rapport est-il
le médecin habituel du patient ?
✓Le médecin est-il motivé pour déclarer tous les cas
et non pas seulement les cas rares ou sévères ?
Classification
✓La classification utilisée est-elle appropriée
(disparité des nomenclatures ou instabilité
temporelle) ?
✓Existe-t-il une définition des affections étudiées ?
■LEDÉNOMINATEUR DU TAUX CONCERNE
LA POPULATION À RISQUE
✓La définition de la population exposée est-elle
précise et complète ?
✓La population exposée est-elle
représentative de la population cible ?
✓La composition de la population exposée est-elle
enregistrée de manière appropriée (âge, sexe, pays,
région, décès...) ?