Accident d’évolution des dents de sagesse
Introduction :
La 3e molaire ou « dent de sagesse » (DS) est, selon Darwin, une dent en
voie normale de disparition, etc.
Pour l’instant, la pathologie qu’elle est susceptible d’occasionner à un
individu, au cours de son évolution, reste un motif de consultation
fréquent.
Les accidents des DS surviennent au moment de leur éruption
physiologique qui se situe, en moyenne, entre 18 et 25 ans : ce sont les
accidents d’évolution proprement dits, que l’on distingue
du classique accident de « désinclusion » survenant plus tardivement ;
leur dénominateur commun est l’infection qui peut entraîner des
complications graves, locorégionales ou à distance.
En règle générale, c’est la DS mandibulaire qui est la plus grande
pourvoyeuse de ce type d’accidents.
Les DS peuvent également être responsables d’accidents mécaniques
au niveau de la denture de voisinage, ou tumoraux et, dans ce cas, leur
découverte peut en être tout à fait fortuite : la DS peut être incluse ou
ectopique et n’avoir jamais fait parler d’elle auparavant.
L’élaboration de ces dents, leurs conditions d’éruption sur les arcades, leur
environnement anatomique, rendent compte des situations pathologiques
habituellement rencontrées.
Élaboration des dents de sagesse :
Vers la 16e semaine de vie intra-utérine, à l’extrémité distale de la lame
dentaire primitive, apparaissent des digitations épithéliales qui formeront
les germes des 2e et 3e molaires permanentes : la première molaire
définitive occupe la partie terminale postérieure de cette lame et son iter
dentis est rattaché à la crête gingivale.
Les ébauches des deux dents suivantes apparaissent comme des
dépendances des dents qui les précèdent : la 2e molaire se différencie
à partir du bourgeon de la 1re molaire et celui de la DS à partir de celui de
la 2e molaire.
Leur iter dentis est rattaché au gubernaculum de la 1re molaire et non à la
gencive.
Cette dent apparaît ainsi comme une dent de « remplacement » de la dent
précédente, qui va cependant évoluer derrière elle et non la rhizalyser
pour prendre sa place.
En effet, après la formation de leur couronne, ces deux dents migrent
progressivement vers la gencive en se verticalisant au contact de la face
distale de la molaire précédente, décrivant la classique « courbe de
Capdepont ».
Anomalies d’évolution des dents de sagesse et leurs conséquences
:
Normalement, le processus de verticalisation aboutit à l’éruption de la
dent en bonne position sur l’arcade ; l’épithélium gingival se continue sans
interruption avec l’épithélium péricoronaire qui disparaît au moment de la
mise en place définitive de la couronne.
Puis la couronne va à la rencontre de ses antagonistes, tandis que se
termine l’édification des racines et du parodonte.
Le premier écueil à ce bon ordonnancement est le manque de place sur
l’arcade pour l’évolution de la dent : pour la 2e molaire,
l’espace postérieur est le plus souvent suffisant ; ce n’est pas toujours le
cas pour la DS inférieure notamment, coincée sous le bord antérieur de la
branche montante par insuffisance de l’espace rétromolaire.
De plus, cette dent se met en place à un moment où l’os mandibulaire est
mature : elle va devoir traverser un os particulièrement compact dans
cette région.
Le deuxième écueil peut être l’impossibilité pour la DS inférieure de se
verticaliser complètement, même en présence d’un espace rétromolaire
suffisant : un redressement d’axe trop important pour la dent
en formation peut être incriminé, de sorte que la dent n’achève pas son
trajet et sa couronne reste enclavée sous le collet de la dent de 12 ans ;
de plus, à une obliquité potentiellement défavorable du germe se
surajoute le développement vers l’arrière de l’arc mandibulaire, qui
entraîne également vers l’arrière l’ébauche des racines en les incurvant.
Bien sûr, c’est sans compter une éventuelle malformation du germe, une
détérioration traumatique, voire iatrogène lors de l’avulsion d’une 2e
molaire, ou une tumeur bénigne qui lui ferme le chemin.
Au maxillaire, l’absence d’obstacle osseux permet à la DS de faire plus
facilement son éruption, soit en bonne position, soit plutôt en
vestibuloversion sur le versant inféroexterne de la tubérosité.
Pour expliquer l’inclusion de cette DS, en dehors d’une pathologie du
germe dentaire, Cauhépé évoque le rôle de la sangle musculotendineuse
ptérygoïdienne qui conditionnerait l’orientation de croissance de l’os
alvéolaire tubérositaire et repousserait en avant la DS.
En fait, les deux étiologies qui viennent d’être exposées (manque de
place, défaut de verticalisation) paraissent le plus souvent s’intriquer.
Il faut y ajouter le processus de « désinclusion » qui intervient plus
tardivement, après l’âge normal d’éruption : il s’agit alors plutôt d’un «
dégagement » secondaire de la dent, dû à une récession gingivale et
osseuse, ou causé par l’infection d’une poche parodontale développée sur
la face distale de la 2e molaire.
Ainsi, quel que soit le mécanisme incriminé, la résultante finale est une DS
dont la couronne est plus ou moins complètement exposée sur l’arcade ;
la partie restante est recouverte par un « capuchon muqueux » ; la porte
est ouverte aux accidents infectieux, dont la pathogénie reste discutée.
La théorie de Capdepont attribue un rôle essentiel à la formation d’une
cavité péricoronaire au niveau de laquelle une prolifération bactérienne est
à l’origine des complications : la DS oblique en avant vient buter sur la
couronne de la 2e molaire, ce qui provoque l’écrasement et l’ouverture
du sac péricoronaire.
Une cavité se forme alors entre la muqueuse buccale et le sac folliculaire
qui a fusionné avec elle.
Cette cavité est le lieu d’une stagnation salivaire, d’accumulation de
débrisalimentaires et de bactéries à l’origine d’une inflammation puis
d’une suppuration qui ne peut s’évacuer complètement en raison du
capuchon muqueux qui fait obstacle en persistant partiellement sur la
couronne de la dent.
Pour d’autres , la survenue de l’infection est due à la présence d’un kyste
péricoronaire, cavité réelle qui apparaît lors de la constitution de la dent
avant lafusion avec la muqueuse gingivale.
Cette théorie expliquerait pourquoi certaines DS sont à l’origine
d’accidents de désinclusion tandis que d’autres, dont la situation
anatomique est comparable, ne sont jamais à l’origine d’accidents
d’évolution.
Cela a été confirmé histologiquement par de nombreux auteurs.
Cliniquement, la présence d’une cavité se vérifie en tentant d’introduire
une sonde entre la couronne dentaire et la muqueuse qui la recouvre.
L’hypothèse selon laquelle l’apparition d’un kyste péricoronaire pourrait
être favorisée par un obstacle mécanique n’est pas non plus exclue.
Enfin, la région de la DS, difficilement accessible à un brossage rigoureux,
est à l’origine de lésions carieuses fréquentes.
Ces lésions carieuses peuvent aussi survenir sur une dent incluse ou
enclavée et conduire à la mortification et à ses complications.
Environnement anatomique des dents de sagesse :
A - Dent de sagesse supérieure :
De forme très variable, souvent naine, elle est située dans la partie
postéroexterne de la tubérosité du maxillaire entre la 2e molaire
supérieure en avant, l’espace ptérygomaxillaire, en arrière et plus
particulièrement, à ce niveau, la sangle musculotendineuse formée par les
ptérygoïdiens, le ligament ptérygomaxillaire et le buccinateur, qui cravate
la tubérosité maxillaire.
En dehors, elle est contiguë au muscle buccinateur et à
la boule graisseuse de Bichat.
En dedans, le voile du palais est situé à l’aplomb de la tubérosité du
maxillaire et de l’aile interne de l’apophyse ptérygoïde.
En haut et en avant, elle est en rapport avec le fragile plancher du sinus
maxillaire.
B - Dent de sagesse inférieure :
Elle est moins inconstante dans sa forme que son homologue supérieure ;
sesrapports anatomiques sont complexes.
En avant, la 2e molaire est le rapport primordial rencontré par la DS :
guide dans son évolution normale, ou obstacle plus ou moins
infranchissable.
Comme au niveau de l’arcade maxillaire, l’environnement parodontal de
cette dent est important à prendre en compte.
En arrière, c’est la corticale osseuse dense du trigone rétromolaire ou du
bord antérieur de la branche montante mandibulaire qui la recouvre
parfois en tout ou partie.
En bas, elle est en rapport avec le canal mandibulaire et son contenu
vasculonerveux, expliquant les difficultés chirurgicales rencontrées lors
des avulsions et ce, d’autant qu’il existe une dysmorphose radiculaire, une
malposition ou une inclusion dentaire.
En haut, elle est bien entendu en rapport avec ses homologues
antagonistes ; en cas de rétention ou d’inclusion, elle n’est pas recouverte
par de l’os alvéolaire, mais par un os compact comme nous l’avons vu.
En dehors, la DS est classiquement à distance de la corticale externe et
ce, d’autant qu’elle est plus évoluée sur l’arcade.
L’angle mandibulaire est recouvert par la puissante sangle massétérine et
les espaces de glissement celluleux situés au contact de la face externe de
la branche montante mandibulaire.
Par ailleurs, il existe une particularité anatomique régionale qui est la
gouttière buccinatomaxillaire qui vient s’ouvrir en avant dans la région
génienne au niveau du quadrilatère de moindre résistance de Chompret.
En dedans, la DS est en relation plus ou moins intime avec la corticale
interne sur laquelle est plaqué le nerf lingual ; ses apex se situent sous la
ligne d’insertion du muscle mylohyoïdien ; elle est toute proche de
l’espace para-amygdalien qui est le carrefour stratégique des régions
celluleuses cervicofaciales en continuité avec les espaces médiastinaux.
Cette situation au sein d’un carrefour de régions anatomiques profondes
est importante à retenir.
Pour ce qui est de la diffusion d’une infection, la position anatomique de la
DS (incluse et plus ou moins inclinée suivant différents plans de l’espace,
ou ectopique) peut influer dans une certaine mesure sur la localisation
initiale ; en fait, tous les espaces communiquent, ce qui rend
potentiellement dangereux tout accident infectieux de cette région.
Accidents infectieux :
A - Péricoronarites :
1- Péricoronarite aiguë congestive :
C’est une inflammation du sac péricoronaire et de la fibromuqueuse
adjacente survenant au cours de l’éruption de la dent dans la cavité
buccale.
Sa symptomatologie est celle rencontrée lors des accidents de dentition,
mais elle est exacerbée.
Elle se manifeste par une douleur spontanée de la région rétromolaire.
L’examen retrouve une muqueuse rouge, oedématiée, laissant apparaître
une partie de la couronne de la DS.
La pression est douloureuse et peut faire sourdre un liquide sérosanglant.
Les empreintes des cuspides de la dent antagoniste peuvent être
observées sur ce capuchon muqueux.
Dès ce stade, la radiographie panoramique permet de se rendre compte
des possibilités d’évolution de la dent incriminée, ainsi que de la situation
des autres DS.
L’évolution est variable : soit l’accident guérit avec la mise en place de la
dent sur l’arcade ; soit se constitue un des tableaux suivants.
2- Péricoronarite aiguë suppurée :
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