L’idéal est d’utiliser au mieux les courants d’air pour dissiper la chaleur accumulée par les matériaux « absorbants », en
jouant sur les différences de hauteurs des immeubles. Enfin, la température est également très dépendante de la
présence végétale. Un square de 1.000 m de surface au sol permet de réduire la température alentour d’au moins un
2
degré Celsius sur une distance cumulée de 100 mètres de profondeur. Athènes, par exemple, qui possède un grand parc
central, réduit sa température intérieure de 6-7 degrés par rapport aux quartiers riverains ! L’espace vert est un excellent
climatiseur naturel !
Quel impact cela a-t-il sur la réflexion autour de la place de la nature en ville ?
Le rôle et l’intérêt de la nature en ville n’ont cessé d’évoluer selon l’angle de regard qu’on leur porte. Dévolue à
l’embellissement dans les années 30, la nature est mise en scène au moyen de parcs et de jardins. Dans les années 60,
elle est pensée en termes de bases de loisirs. À cette époque, la dimension sociale, récréative et ludique de la nature,
est très prégnante. Les années 70-80 voient le retour en force du paysage, d’un regain d’intérêt pour le cadre de vie.
C’est la redécouverte du charme désuet des vieux parcs. La végétation sert à valoriser et embellir le bâti, à l’image du
parc de la Ceriseraie de la Croix-Rousse, ou encore des immeubles nouvellement construits qui offrent des espaces
verts intérieurs privés pour les habitants. D’ailleurs, sous la présidence de Georges Pompidou, le ministère de
l’environnement et du cadre de vie rédige une circulaire, en 1973, qui souligne que «
les espaces verts figurent
». Les années 90 abordent la nature sous le prisme de
désormais parmi les équipements structurants d’intérêt public
l’écologie et de la biodiversité qui cède la place, en 2000, au développement durable et à la gestion différenciée des
espaces verts. Actuellement, c’est la préoccupation du réchauffement climatique qui émerge. Ces moments historiques
et les différents argumentaires développés au fil des années confortent les rôles et les intérêts de la nature en ville. Ces
justifications sont additionnelles et complémentaires les unes par rapport aux autres. La mise en avant de l’un des
arguments ne doit pas faire oublier les autres dimensions qui restent aussi importantes. Pour faire face au réchauffement
climatique, il faut créer plus d’espaces verts, et aborder le problème de l’étalement urbain avec un regard nouveau.
Verdir la ville, c’est gagner en qualité de vie et en santé publique. Or, la présence d’espaces verts de grande taille, les
coupures d’urbanisation et les trames vertes, ne favorisent pas la ville compacte, car les espaces verts limitent et freinent
le développement des espaces urbanisés. Malheureusement, en plus des budgets importants que les espaces verts
mobilisent, tant pour la création que l’entretien, les parcs et jardins prennent la place des espaces libres qui sont dédiés
au bâti, à la voirie, aux centres commerciaux. Les espaces verts contribuent à l'étalement urbain. Ils vont à l’encontre du
développement durable, véritable école de la densité urbaine, dont les préconisations sont revisitées par les urbanistes
et soutenues par les pouvoirs publics. La densité est synonyme de réduction des gaz à effet de serre, de baisse des
consommations énergétiques pour le chauffage urbain, de transports collectifs efficients, de mixité sociale... Sur ces
critères, la ville dense est gagnante, mais au regard des critères de qualité de vie et d’ambiances, elle ne l’est plus. La loi
relative à la solidarité et au renouvellement urbain [loi SRU du 13 décembre 2000] vise clairement à redensifier la ville,
mais elle ne prend pas en compte la dimension bien-être, qualité de vie, réchauffement climatique. Le tissu pavillonnaire
de nos banlieues est décrié, parfois démoli et recyclé en quartier d’habitation plus dense. Cette tendance va trop loin à
mon sens. Si on regarde Lyon et son agglomération, le quartier Montchat, le plateau de la Croix Rousse, sont des
quartiers pavillonnaires, fort attractifs, qualifiés de « villages urbains ». Ne serait-il pas dommage de les urbaniser pour
en faire le 6° arrondissement ?
Comment expliquez-vous que cette problématique soit si peu abordée ?
Le discours actuel est très modelant et reprend une partie des idéologies d’après-guerre. Le Corbusier était contre la
cité-jardin : il estimait qu’elle conduisait à l'individualisme, à l’isolement stérile de l’individu et à la destruction de l’esprit
social, qu’elle limitait le confort et finalement portait atteinte à la liberté ! Il y a un discours très moralisateur sur le
périurbain « synonyme de merguez et de 4/4 »… Pourtant, des auteurs comme Yves Chalas, Laurent Davezies, Olivier
Mongin, montrent que la qualité de vie y est bonne et que la ville émergente est attractive. Il est possible de faire de
l’urbanisme végétal, en bande, en habitat groupé… sans prôner une densité extrême, un peu à l’image du quartier de la
Croix-Rousse qui conjugue assez bien un habitat mixte. Les formes urbaines denses créent de l'exclusion sociale alors
que le périurbain permet à des ménages défavorisés de pouvoir se loger à moindre coût. Les centres urbains sont de
plus en plus onéreux, et de ce fait, les ménages à faible revenu, voire les classes moyennes, ne peuvent plus accéder au
logement. La densité induit des coûts supérieurs de transaction et de montage des opérations immobilières par rapport
au périurbain : le portage du foncier, les techniques et pratiques constructives, le dimensionnement des réseaux et des
raccordements, les délais d’instruction des permis de construire sont des postes incompressibles qui renchérissent les
prix de sortie d’un logement…. Au final, à surface égale, le prix de vente d’un logement en centre-ville est plus élevé
qu’un logement pavillonnaire. Ces questions soulèvent nombre de paradoxes et de contradictions. Il ne faut pas avoir
une approche mono-fonctionnelle d’un problème, mais au contraire aborder tous les aspects, le réchauffement climatique
n’étant qu’un élément parmi d’autres, et arbitrer en fonction des enjeux de société. Actuellement la réflexion porte
essentiellement sur la densité en négligeant tous les autres aspects de la problématique, alors que devant nous, ce sont
notamment des enjeux de santé publique qui se profilent !
Concrètement, quelles sont les pistes à privilégier dans une stratégie d’adaptation au réchauffement ?
Elles sont nombreuses. Il est très pertinent d’agir sur les matériaux qui emmagasinent la chaleur comme le bitume, le