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Introduction : Pascal ou l’apologétique contre 
la philosophie 
« L’apologétique  contre  la  philosophie »  est  un  titre  qui 
peut surprendre : Pascal est généralement considéré comme un 
philosophe,  son  œuvre  est  inscrite  au  programme  de  philoso-
phie des classes terminales, il est étudié dans les facultés de phi-
losophie
.  Tout  cela  est  légitime,  certes,  si  d’abord  l’on  saisit 
bien tout ce qui sépare Pascal de ce qu’on appelle usuellement 
un philosophe. 
 
La vie de Pascal fut brève, mouvementée, partagée entre les 
attraits  du  monde  (la  recherche  scientifique  notamment)  et 
l’attrait  de  Dieu.  Pascal  est  un  esprit  d’une  puissance  hors  du 
commun, cela ne fait aucun doute pour ses contemporains. Des-
cartes, au sommet de sa gloire, rend visite au jeune Pascal (mal-
gré leurs divergences en physique) ; Leibniz, peu d’années après 
sa mort, s’efforce d’obtenir une copie du maximum de ses écrits 
scientifiques. L’invention et la fabrication par Pascal de la pre-
mière machine à calculer fait date dans l’histoire des techniques 
et  même  dans  l’histoire  de  l’esprit  humain.  Mais,  en  même 
temps, Pascal ne consacre que peu de son temps aux recherches 
mathématiques  et  physiques.  « Car,  pour  vous  parler  franche-
ment de la géométrie »,  écrit-il au mathématicien Fermat,  « je 
la trouve le plus haut exercice de l’esprit ; mais en même temps 
je la connais pour si inutile que je fais peu de différence entre un 
homme qui n’est que géomètre et un habile artisan […] et j’ai dit 
souvent  qu’elle  est  bonne  pour  faire  l’essai,  mais  non  pas 
 
 1. Fixons un point de vocabulaire : une apologie, comme nous le 
rappelons plus loin, est un discours (écrit ou oral) prenant la défense et 
vantant  les  mérites  d’une  personne  (et,  par  extension,  d’un  comporte-
ment, d’une croyance, etc.) ; l’apologétique, c’est l’ensemble des moyens 
rhétoriques  et  argumentatifs  (raisonnements,  appel  aux  faits  ou  à 
l’histoire, éloquence, etc.)  dont  se sert l’apologiste  pour convaincre  son 
auditoire, c’est aussi le « style » intellectuel de l’apologie considérée.