Dans l'armée d'Italie, la cavalerie n’a pas de chef, les régiments, dragons, chasseurs, hussards sont mal équipés, aux effectifs
dérisoires et désordonnés. Murat les entraîne, cogne et frappe, dispersant les carrés de fantassins peu habitués à de telles charges et
ce sera Dego Mondovi où il retourne la situation compromise. Le lendemain 28 avril, Colli, le généra| sarde, demande l'armistice.
Bonaparte donne à Murat l'ordre de porter les drapeaux pris à l'ennemi au Directoire et de lui ramener son épouse Joséphine. Il
sera nommé général de brigade. De retour auprès de Bonaparte, ayant sollicité en vain le commandement de l'armée de l'Intérieur,
Murat se couvre de gloire contre Beaulieu à Borghetto puis soumet le Sénat de Gênes qui entretenait des bandes armées, avant
d'occuper la Toscane et le port de Livourne. Il rejoint alors Bonaparte devant Mantoue, mais échoue dans un projet
d'investissement de la ville.
Cette Campagne d'Italie allait révéler les qualités et les défauts de Murat. Excellent entraîneur d'hommes, à la bravoure
incontestable, saisissant de façon intuitive le moment judicieux de l'attaque, croyant à sa bonne étoile et à son invincibilité, mais
aussi piètre tacticien durant le siège de Mantoue, il échouera dans une tentative de s'emparer, par ruse, d'une des portes de la ville
et sera quelque peu paralysé dans l'action. Mais aussi, jouant cavalier seul, rapportant au Directoire les drapeaux de Dego
Mondovi, il œuvre pour avoir le commandement de l'armée de l'Intérieur. C'est aussi en 1797 l'ébauche d'une idylle avec une toute
jeune fille, Caroline Bonaparte, âgée de 15 ans, car la Campagne d'Italie alterne combats (Lodi, Rivoli) et fêtes autour de
Joséphine en Lombardie. Mais déjà se prépare la grande expédition d'Égypte dans le secret le plus absolu, Murat est placé sous les
ordres de Baraguey d'Hilliers, il embarque à Gênes, reçoit un accueil assez froid de Bonaparte à Lavalette.
LA CAMPAGNE D’ÉGYPTE, LE MARIAGE AVEC CAROLINE ET LE RETOUR À PARIS
La Campagne d'Égypte représente pour Murat la réconciliation avec Bonaparte. Il se couvre de gloire en Palestine et surtout
débloque Junot à Nazareth et remporte la victoire du Mont Thabor. Le jeune général accompagne Bonaparte lors de son retour
d'Égypte.
Très vite il faut nous retourner contre l'Autriche qui menace et tenter de dégager Masséna enfermé dans Gênes. Une armée de
réserve aux ordres de Berthier contre l'Autrichien Mélas, une autre armée aux ordres de Moreau, l'armée du Rhin, contre
l'archiduc Charles. Jouant un rôle de premier plan aux avant-gardes, l'œil sûr, l'aventureux Murat se bat comme un lion à
Marengo 14 juin 1800. Il est trois heures, la défaite est annoncée, mais Desaix survient lors de la première charge, il est abattu.
Kellerman le Jeune prend le commandement de la cavalerie, Murat se charge de la poursuite. Par la suite, il est sous les ordres de
Brune dont il dénonce la lenteur et l'incapacité. Il voudrait dépendre directement du Premier consul et non, sous l'autorité de
Brune, passer par Berthier (ministre de la guerre). Murat est l'irascible, le colérique, le mal aimé, il reste jusqu’en 1803 dans la
péninsule où il s'exerce avec succès à la diplomatie, contrôlant Naples, mais il lui faut s'effacer devant Melzi qui administre avec
sagesse la République italienne. Auparavant, il avait épousé en janvier 1800, à Mortefontaine, Caroline qui se souciait des intérêts
du couple. Le mariage avait été favorisé par Joséphine qui espérait un contrepoids à l'hostilité des Bonaparte envers elle.
De retour dans la capitale, les honneurs pleuvent, il est nommé gouverneur militaire de Paris et de l'Île de France, assisté de son
chef d'état-major, César Berthier. En 1805, il achètera l'Élysée qu'il gardera jusqu'en 1808. Il le transformera profondément et
construira, pour son frère André, titré comte de l'empire, une reproduction de ce palais. En 1808, il recevra 500000 francs de
l'Empereur comme revenu de ses possessions en France.
Le 19 mai 1804, c'est la proclamation de l'empire à Saint-Cloud et le début d'une ascension vertigineuse. Murat fait partie de la
première promotion de maréchaux. Lors de la cérémonie du sacre, il portera la couronne que Napoléon dépose sur la tête de
Joséphine. Grand amiral de l'empire, il jouera un rôle dans la promotion des officiers de Marine, au sein des prévôtés chargées de
la police et des jugements ayant trait à la Marine. Certaines promotions seront visées par lui.
1804, c'est aussi la remise de la Légion d'honneur dont la loi controversée, votée en 1802, fut appliquée. Cette année-là eurent
lieu les premières remises solennelles au Champ de Mars puis à Boulogne.
La paix d'Amiens n’a duré que 13 mois. Dès 1803, nous sommes à nouveau en guerre avec l'Angleterre. Pitt, le premier
ministre britannique inonde les cours européennes de son argent, presse l'Autriche et la Russie à armer, afin de neutraliser une
possible descente des troupes françaises, amassées de Brest à Amsterdam, pour une invasion de l'Angleterre. C'est au camp de
Boulogne qu'est née la première Grande Armée. L’Angleterre forme des milices, inaugure le long de la côte les tours Martello,
destinées à empêcher, limiter ou retarder le débarquement, mais sa flotte est toute puissante. Il faut éloigner Nelson, le faire
tomber dans un piège, jouir des deux ou trois jours de bonne météo pour
assurer la traversée d'une armée de fantassins et de cavaliers qui s'entraînent,
désireux de renouveler l'exploit du « Conquérant ».
Octobre 1805, c'est la désastreuse défaite de Trafalgar où le pusillanime
Villeneuve se fait écraser par l'amiral Nelson qui trouve la mort et la victoire
sur son vaisseau amiral démâté le Victory. Notre flotte et celle de notre alliée,
l'Espagne, sont détruites au large de Cadix. L’Autriche envahit la Bavière, le
plan de Napoléon se réalise.
Sept corps d'armées, sept torrents dévalent de la Manche et de la Mer du
Nord vers l’intérieur des terres et à marches forcées gagnent Strasbourg. Murat
est à la tête de la cavalerie de réserve, car chaque corps d'armée a son
infanterie, sa cavalerie, son génie, un peu plus tard aura son train des équipages
et son intendance à laquelle est rattaché le service de santé. Le génie de
Napoléon rend autonome les corps d'armée, véritables armées en miniature.
Lannes et Ney sont sous les ordres de Murat, ce qu'ils apprécient assez peu.
Lannes est un bon stratège, Ney un bon exécutant et excellent entraîneur
d'hommes. Ils estiment peu Murat « Tête brûlée » pouvant exposer inutilement
et sans couverture certains détachements, c'est le cas de la division Dupont. Les
ordres ne sont pas toujours exécutés, Ney se plaint des erreurs tactiques de
notre cavalier Murat, de son manque d'ascendant sur ses collègues, mais c'est la
victoire d'Elchingen où Ney, conseillé par Jomini, remporte un éclatant succès,
obligeant l'armée autrichienne à se réfugier à Ulm en Bavière puis à capituler.
Joachim Murat par Antoine-Jean Gros, Musée du Louvre