UNIVERSITE DE NANTES FACULTE DE MEDECINE MAITRISE EN SCIENCES BIOLOGIQUES ET MEDICALES M.S.B.M MEMOIRE POUR LE CERTIFICAT D’ANATOMIE, D’IMAGERIE ET DE MORPHOGENESE 2002-2003 UNIVERSITE DE NANTES LE NERF MANDIBULAIRE Par Sophie DUGUET LABORATOIRE D’ANATOMIE DE LA FACULTE DE MEDECINE DE NANTES Président du jury : Pr. J. LEBORGNE Vice-Président : Pr. J.M. ROGEZ Enseignants : Pr. O. ARMSTRONG Pr. P. COSTIOU Pr. D. CROCHET Pr. A. DE KERSAINT-GILLY Pr. B. DUPAS Pr. Y. HELOURY Pr. J.P. MOISAN Pr. N. PASSUTI Pr. R. ROBERT • Pr. O. RODAT • • • • • • • • • Remerciements A Monsieur le Professeur Robert pour son enseignement et ses précieux conseils pour la conduite de ce travail. A Messieurs les Professeurs Rogez, Le Borgne, Armstrong pour leur enseignement qui m’a donné le goût de l‘anatomie. A Madame le Docteur Gayet-Delacroix pour le prêt de documents de sa collection. A mes parents pour leur soutien. A Stéphane Laugier et Yvan Blin pour leur aide et leur disponibilité. 2 SOMMAIRE 1- Introduction 2- Rappels anatomiques 3- Dissections 4- Exploration en imagerie 5- Pathologie 6- Conclusion 3 1 – Introduction Le nerf mandibulaire, branche du nerf trijumeau, traverse un grand nombre de régions anatomiques du crâne et de la face : de son origine centrale dans l’étage moyen de la base du crâne, puis à travers la fosse infra-temporale, il se distribue enfin par ses différentes branches aux régions cutanéo-muqueuses crâniennes et faciales dont il assure l’innervation sensitive. Il hérite seul de la fonction motrice du nerf trijumeau, c’est le nerf de la mastication. Nous rappellerons tout d’abord son anatomie et exposerons sa dissection, puis nous ferons un rapprochement avec les différentes techniques d’imagerie et évoquerons quelques applications en pathologie. 4 2 - Rappels anatomiques Le nerf mandibulaire constitue la troisième et la plus grosse branche du nerf trijumeau, cinquième paire des nerfs crâniens. Il résulte de l’union de la troisième branche de division de la racine sensitive et de la totalité de la racine motrice. C’est un nerf mixte sensitivo-moteur. 2-1 Origine réelle Elle est composée de deux noyaux : un noyau sensitif et un noyau moteur. 2-1-1 Noyau sensitif Le noyau sensitif s’étend du mésencéphale au bulbe, c’est le plus long noyau crânien. Il appartient à la colonne des noyaux somato-sensitifs. Ce noyau est en fait formé de trois noyaux qui diffèrent par leur topographie, leur taille et leur fonction dans la sensibilité. La racine sensitive véhicule les fibres sensitives dont les corps cellulaires se situent dans le ganglion trigéminal ; leurs axones gagnent les différents noyaux du V. 5 3- noyau mésencéphalique 5- noyau pontique 10- noyau spinal Systématisation du nerf trijumeau D’après KAMINA. Anatomie – Introduction à la clinique Tête et cou n°10 - Nerfs crâniens et organes des sens. Tome 2. Maloine, éd. Paris 1996 • le noyau et mésencéphalique du V est une mince colonne située de part d’autre de l’aqueduc du mésencéphale. Il est longé par le tractus du mésencéphale qui porte les fibres afférentes de ce noyau. Ce tractus véhicule la sensibilité proprioceptive des muscles masticateurs, de l’articulation temporo-mandibulaire (ATM), des dents, des muscles faciaux et des muscles extrinsèques de l’œil. • le noyau pontique du V se situe au niveau de l’angle latéral du quatrième ventricule. C’est le noyau principal du trijumeau. Ses fibres afférentes véhiculent la sensibilité tactile discriminative de la face. • le noyau spinal du V prolonge le noyau pontique jusqu’au deuxième myélomère cervical. Le tractus spinal du V, formé de ses fibres afférentes, le longe latéralement. Ce tractus véhicule la sensibilité nociceptive et thermique de la face. • les fibres sensitives efférentes forment les tractus trigémino-thalamiques croisé (en majorité) et direct. Ils remontent jusqu’au noyau ventral postéro-médial du thalamus. 2-1-2 Noyau moteur Le noyau moteur appartient à la colonne des noyaux somato-moteurs. Il est situé sous la fosse rhomboïde, à mi-hauteur du pont. Il est médial au noyau pontique du V et se trouve au-dessus du noyau du VII. La racine motrice véhicule les fibres motrices dont les corps cellulaires se situent dans le noyau moteur du V. Ces fibres efférentes sont destinées aux muscles masticateurs. 2-2 Origine apparente 2-2-1 Nerf trijumeau Il émerge de la face antéro-latérale du pont, à la jonction des tiers supérieur et moyen (jonction du pont et du pédoncule cérébelleux moyen) par deux racines : une racine sensitive latérale/caudale, la plus large : 5 mm de diamètre une racine motrice médiale/rostrale, la plus mince : 1 mm de diamètre 7 Dans la fosse crânienne postérieure, les racines traversent la citerne pontique entourées de pie-mère. Elles se dirigent en avant et en haut vers la fosse trigéminale (dans la partie pétreuse de l’os temporal). La racine motrice de médiale devient inférieure au ganglion trigéminal. Origine apparente du nerf trijumeau D’après DOYON, MARSOT-DUPUCH, FRANCKE Nerfs crâniens – Anatomie, clinique, imagerie Masson, éd. Paris 2002 Dans la fosse crânienne moyenne, le nerf présente le ganglion trigéminal (ganglion de Gasser) dans le cavum trigéminal. Le ganglion est semi-lunaire, à concavité postérieure. Il mesure 15 mm de large, 5 mm de long et 3 mm d’épaisseur. Le cavum trigéminal constitue un dédoublement de la dure-mère qui engaine le ganglion et ses branches jusqu’aux foramens crâniens. 8 157911- racine sensitive dure-mère a. carotide interne racine motrice n. mandibulaire Cavum trigéminal - Coupe sagittale schématique D’après KAMINA. Anatomie – Introduction à la clinique Tête et cou n°10 - Nerfs crâniens et organes des sens. Tome 2. Maloine, éd.Paris 1996 2-2-2 Nerf mandibulaire La troisième branche de division de la racine sensitive se détache de la partie latérale du bord antérieur du ganglion trigéminal et se dirige obliquement en bas vers le foramen ovale. La racine motrice s’unit à la partie sensitive du nerf mandibulaire au niveau du foramen ovale. 1- ganglion trigéminal 14- n. mandibulaire dans le foramen ovale Ganglion trigéminal droit Vue latérale après résection partielle du sphénoïde D’après KAMINA. Anatomie – Introduction à la clinique Tête et cou n°10 - Nerfs crâniens et organes des sens. Tome 2. Maloine, éd.Paris 1996 9 2-3 Trajet et rapports 2-3-1 trajet du mandibulaire Le tronc du nerf mandibulaire est très court (moins de 1 cm) car il se divise très rapidement en ses branches terminales. Il se termine dans la fosse infra-temporale où il donne classiquement deux troncs antérieur et postérieur. • le tronc antérieur est surtout moteur. Il donne : le tronc temporo-massétérique. Il se divise en nerf temporal profond postérieur (pour le m. temporal) et en nerf massétérique (pour le m.masséter). le nerf temporal profond moyen (pour le m. temporal) le tronc temporo-buccal (duquel naît le nerf du ptérygoïdien latéral innervant le muscle homonyme) qui se sépare en nerf temporal profond antérieur (pour le m. temporal) et en nerf buccal, seul nerf sensitif de ce tronc, qui donne la sensibilité de la peau et de la muqueuse de la joue. • le tronc postérieur est surtout sensitif. Il donne : le tronc commun des muscles ptérygoïdien médial, tenseur du tympan et tenseur du voile du palais, qui se distribue à ces trois muscles. le nerf auriculo-temporal qui se distribue à l’ATM, à l’auricule, au méat acoustique externe, à la membrane tympanique, à la glande parotide et à la peau de la région temporale. le nerf lingual qui innerve l’isthme du gosier, la tonsille, les deux tiers antérieurs de la langue, les glandes submandibulaire et sublinguale, la gencive des dents antérieures et la muqueuse du plancher oral. le nerf alvéolaire inférieur qui se distribue aux racines des dents de l’arcade dentaire inférieure et à la gencive adjacente. Il donne le nerf mentonnier qui sort du canal mandibulaire au niveau du foramen mentonnier et innerve le menton et la lèvre inférieure. 10 Branches de division du nerf mandibulaire D’après PERLEMUTER, WALIGORA et DJINDJIAN Cahiers d’Anatomie – Tome 1 – SNC Masson, Paris 1980 2-3-2 Rapports du nerf mandibulaire Dans la fosse crânienne moyenne (étage moyen de la base du crâne) Le nerf mandibulaire est situé dans le cavum trigéminal par l’intermédiaire duquel il entre en rapport avec : en bas, la face antérieure du rocher de l’os temporal (sur laquelle courent les nerfs petit et grand pétreux). en haut, le lobe temporal du cerveau. latéralement, l’artère méningée moyenne. médialement, le nerf maxillaire. Dans le foramen ovale Le nerf mandibulaire traverse le foramen ovale avec un rameau de l’artère maxillaire (rameau méningé accessoire) et les veines émissaires du foramen ovale. Par l’intermédiaire du foramen ovale, il est en rapport avec : 11 en arrière et latéralement, le foramen épineux (d’où émerge l’artère méningée moyenne) médialement, le foramen veineux ou trou de Vésale pour des veines émissaires en arrière, le foramen pétreux ou canal d’Arnold (où passe le nerf petit pétreux) en avant, le foramen rond avec le nerf maxillaire et les veines émissaires NB : les foramens veineux et pétreux sont inconstants. Vue supérieure de l’endocrâne après résection de la calvaria d’après SOBOTTA Atlas d’Anatomie humaine – Tome 1 – Tête, cou, membre supérieur Urban & Fischer éd. originale Technique et documentation, Paris éd. 2000 12 Dans la fosse infra-temporale Le nerf mandibulaire sort dans la fosse infra-temporale entre les aponévroses des deux muscles ptérygoïdiens médial et latéral et juste en arrière du processus ptérygoïde du sphénoïde. Dans cet espace, il entre en rapport avec : en haut, la face inférieure de la base du crâne en bas, l’artère maxillaire et ses rameaux méningés médialement, le fascia inter-ptérygoïdien et le m. ptérygoïdien médial, le ganglion otique d’Arnold, ganglion végétatif qui reçoit le nerf petit pétreux issu du nerf glosso-pharyngien (IX) latéralement, le m. ptérygoïdien latéral et son fascia en avant, l’espace est fermé par la lame latérale du processus ptérygoïde 2-3-3 trajet et rapports des branches du mandibulaire Branches du tronc antérieur le tronc temporo-massétérique passe au-dessus du fascia ptérygo-temporomandibulaire et du m. ptérygoïdien latéral. Puis, il se sépare et donne : le nerf temporal profond postérieur qui rejoint la face profonde du m. temporal. le nerf massétérique qui se dirige, par l’incisure mandibulaire, vers le m. masséter qu’il aborde par sa face profonde et son bord postérieur. le nerf temporal profond moyen passe lui aussi au-dessus du fascia ptérygotemporo-mandibulaire et du m. ptérygoïdien latéral et, comme le nerf temporal profond postérieur, gagne la face profonde du m. temporal. le tronc temporo-buccal passe au-dessus du fascia ptérygo-temporomandibulaire et se dirige vers la face profonde du m. ptérygoïdien latéral puis se divise en : 13 nerf temporal profond antérieur qui rejoint la face profonde du m. temporal. nerf buccal qui se dirige vers le bas et l’avant et passe entre la branche de la mandibule et le muscle buccinateur (qu’il traverse sans l’innerver). Branches du tronc postérieur le tronc commun des muscles ptérygoïdien médial, tenseur du tympan et tenseur du voile du palais part médialement, perfore la partie supérieure du fascia inter-ptérygoïdien et se sépare en ses trois branches : le nerf du ptérygoïdien médial gagne le muscle homonyme par son bord supérieur. le nerf du tenseur du tympan atteint le muscle au niveau de son insertion sur la trompe auditive. le nerf du tenseur du voile du palais rejoint son muscle derrière le processus ptérygoïde. le nerf auriculo-temporal naît souvent par deux racines entre lesquelles émerge l’artère méningée moyenne. Il se dirige ensuite horizontalement et vers l’arrière en direction de la loge parotidienne, en passant au-dessus de l’artère maxillaire. Il croise enfin la face médiale de l’artère temporale superficielle puis monte verticalement. le nerf lingual descend presque verticalement, légèrement oblique en bas et en avant. Il donne un rameau communicant pour la corde du tympan (issue du nerf de Wrisberg VII bis) puis se dirige vers la loge submandibulaire (avec le m. styloglosse) et se place sous la muqueuse orale au niveau de la troisième molaire inférieure. Il atteint ensuite la loge sublinguale et la face latérale de la langue (où il est en rapport étroit avec le conduit submandibulaire de Wharton qu’il sous-croise en X allongé). Il est situé au-dessus du nerf hypoglosse XII avec lequel il s’anastomose par un rameau communicant. Il s’épanouit enfin sous la muqueuse linguale. 14 le nerf alvéolaire inférieur descend lui aussi presque verticalement jusqu’au foramen mandibulaire. Il abandonne le nerf du mylo-hyoïdien (qui innerve le muscle homonyme et le ventre antérieur du muscle digastrique) 15 mm avant de s’engager dans le canal mandibulaire avec l’artère alvéolaire inférieure. Il circule dans le canal mandibulaire et donne le nerf mentonnier pour en sortir en bouquet par le foramen mentonnier (qui se projette entre les racines des première et deuxième prémolaires inférieures). 21- n. alvéolaire inférieur 22- n. lingual 11- n. buccal Nerf mandibulaire et nerf facial D’après KAMINA. Anatomie – Introduction à la clinique Tête et cou n°10 - Nerfs crâniens et organes des sens. Tome 2. Maloine, éd. Paris 1996 2-5 Vascularisation Le tronc du nerf mandibulaire est vascularisé par des rameaux trigéminaux de l’artère carotide interne, par l’artère méningée moyenne et l’artère maxillaire (rameau méningé accessoire). les rameaux à destinée musculaire sont vascularisés par les branches homonymes de l’artère maxillaire : artères temporales profondes antérieure et postérieure artère massétérique 15 artère buccale artère ptérygoïdienne le nerf auriculo-temporal reçoit une vascularisation de l’artère méningée moyenne puis de l’artère temporale superficielle. le nerf lingual est vascularisé par l’artère méningée moyenne puis l’artère alvéolaire inférieure ou l’artère maxillaire. le nerf alvéolaire inférieur est vascularisé par l’artère maxillaire et par l’artère alvéolaire inférieure. 8- a. temporale superficielle 1 - a. méningée moyenne 3 - a. temporales profondes 9 - a. buccale 12 - a. massétérique 13 - a. alvéolaire inférieure Artères maxillaire et temporale superficielle droites et leurs branches D’après KAMINA. Anatomie – Introduction à la clinique Tête et cou n°10 – Muscles, vaisseaux, nerfs et viscères. Tome 1. Maloine, éd. Paris 1996 2-6 Fonctions Territoire sensitif Il comprend : les téguments de la région temporale, du tragus et du lobule de l’auricule, de la région parotido-massétérique (sauf l’angle de la mandibule), de la joue, de la lèvre inférieure et du menton. 16 la muqueuse de l’isthme du gosier, de la joue, de la lèvre inférieure, de la gencive inférieure et des deux tiers antérieurs de la langue. les dents de l’arcade dentaire inférieure. la dure-mère de la fosse crânienne moyenne. les artères de la fosse infra-temporale et de la région temporale. en 8 : territoire du nerf mandibulaire Innervation sensitive de la face D’après KAMINA. Anatomie – Introduction à la clinique Tête et cou n°10 - Nerfs crâniens et organes des sens. Tome 2. Maloine, éd. Paris 1996 Territoire moteur Il comprend : les muscles masticateurs (m. temporal, m. masséter et mm. ptérygoïdiens médial et latéral) le muscle mylo-hyoïdien le ventre antérieur du muscle digastrique le muscle tenseur du tympan le muscle tenseur du voile du palais Territoire sensoriel 17 Le nerf mandibulaire sert de vecteur pour les fibres sensorielles des deux tiers antérieurs de la langue. Ces fibres suivent le nerf lingual, remontent la corde du tympan, le nerf facial (VII), le nerf de Wrisberg (VII bis) pour se terminer dans le noyau gustatif. Territoire végétatif Le nerf mandibulaire véhicule les fibres du noyau salivaire supérieur. Celles-ci se rendent aux glandes submandibulaire et sublinguale via le nerf de Wrisberg, le nerf facial, la corde du tympan et le nerf lingual. NB : le nerf mandibulaire n’a pas de fonction sensorielle ni sécrétoire propre, il véhicule seulement les fibres du nerf facial. 18 3 - Dissections Nous avons utilisé une tête pour réaliser ces dissections. Elle a été sectionnée sagittalement sur le sujet frais et a été formolée par la suite pour les dissections. Méthode A la suite de la découverte de la fosse cérébrale moyenne par résection de la masse cérébrale, nous avons d’emblée été surpris de constater que l’aspect macroscopique du ganglion trigéminal est en fait très différent de l’image qu’on peut s’en figurer sur de nombreux schémas classiques. Par ailleurs, la dure-mère est très adhérente au ganglion qui se présente comme un feutrage dense et fragile. Nous n’avons pas mis en évidence les éléments anatomiques qui accompagnent le tronc du nerf à sa sortie dans le foramen ovale. Nous avons ensuite abordé ce tronc dans la fosse infra-temporale par sa face médiale. Dans cette région, la dissection et l’exposition des structures nerveuses est plus aisée et autorise la découverte progressive de l’origine des branches de division. Une fois la muqueuse du voile du palais et du pharynx excisées, nous avons réséqué le muscle péristaphylin médial, la trompe auditive et le muscle péristaphylin latéral. Enfin, la résection de toute la paroi du pharynx a permis la découverte du muscle ptérygoïdien médial et du fascia inter-ptérygoïdien. Après avoir ôté ce fascia, nous avons pu observer les nerfs lingual et alvéolaire inférieur et les suivre (de bas en haut) jusqu’à leur point de séparation. Nous avons pu ensuite les exposer en faisant apparaître, autant que possible avec notre technique, les différentes branches. Par ailleurs, nous avons abordé le nerf alvéolaire inférieur par voie exobuccale. Après avoir rabattu en avant et en haut la peau de la région parotido-massétérine, le plan du 19 platysma et le fascia cervical superficiel, nous avons découvert le bord basilaire et relevé, après sa désinsertion de l’angle mandibulaire, le muscle masséter pour découvrir la face latérale du corpus mandibulaire. De cette région, nous avons ruginé sous le périoste du ramus pour relever ensuite le reste des insertions du masséter et exposer le processus coronoïdien, l’incisure mandibulaire et enfin le processus condylaire. Pour sectionner le processus coronoïde et le processus condylaire, nous avons pratiqué un série d’orifices rapprochés et alignés à la fraise boule pour réaliser un trait d’ostéotomie le long de la ligne ainsi constituée. C’est toujours à la fraise boule que nous avons exposé dans le ramus et le corpus mandibulaire le trajet du nerf alvéolaire inférieur, jusqu’au foramen mentonnier. Nous avons relevé ce dernier de la profondeur à la superficie pour apprécier sa distribution au territoire labio-mentonnier. Nous présentons ci-après les principales étapes de nos dissections en suivant le trajet du nerf mandibulaire puis de ses branches de division d’arrière en avant et de bas en haut. 20 Photo n° 1 : le ganglion trigéminal (vue antéro-latérale de l’étage moyen de la base de l’hémi-crâne droit) Ht Avt artère carotide interne ganglion trigéminal (fin feutrage) n. ophtalmique (V1) n. mandibulaire (V3) n. maxillaire (V2) 21 Photo n° 2 : vue générale du nerf mandibulaire dans la fosse infra-temporale (tronc et branches) tronc du nerf mandibulaire Ht Arr n. temporbuccal n. auriculo-temporal n. lingual a. maxillaire n. alvéolaire inférieur n. du mylo-hyoïdien 22 processus ptérygoïde Ht Arr n. lingual récliné n. alvéolaire inférieur n. du mylohyoïdien m. mylohyoïdien récliné Photo n° 4 : le nerf du mylo-hyoïdien 23 terminaison du nerf souvent bifide Photo n° 5 : les nerfs alvéolaire inférieur et mentonnier Ht n. alvéolaire inférieur Avt Os mandibulaire avec ouverture du canal mandibulaire n. mentonnier 24 Photo n° 6 : le nerf mentonnier et sa terminaison en bouquet Ht Avt terminaison en bouquet du n. mentonnier sortie du n. mentonnier par le foramen mentonnier n. alvéolaire inférieur 25 Photo n° 7 : le nerf lingual Ht n. lingual Arr a. maxillaire ramification terminale du n. lingual à la face latérale de la langue langue réclinée 26 Ht Arr n. lingual langue réclinée Photo n° 8 : le nerf lingual Ht Ht Arr tronc temporo-buccal a. maxillaire n. lingual n. alvéolaire inférieur Photo n° 9 : le tronc temporo-buccal 27 Photo n° 10 : le tronc temporo-buccal (artère maxillaire réclinée) Ht Arr tronc temporo-buccal n. temporal profond antérieur a. maxillaire réclinée n. buccal n. lingual 28 Photo n° 11 : la division du tronc temporo-buccal Ht n. temporal profond antérieur Arr tronc temporo-buccal a. maxillaire réclinée n. buccal n. lingual 29 Photos n° 12 et 13 : le nerf buccal et le muscle buccinateur Ht n. buccal Av m. buccinateur n. alvéolaire inférieur 30 Photo n° 14 : le nerf du ptérygoïdien Ht Arr processus ptérygoïde m. ptérygoïdien médial n. du ptérygoïdien médial 31 Photo n° 15 : nerf du ptérygoïdien médial (m. ptérygoïdien récliné) n. du ptérygoïdien médial Ht Arr résection du m. ptérygoïdien médial (processus ptérygoïde) m. ptérygoïdien médial récliné n. alvéolaire inférieur n. lingual 32 4 - Exploration par imagerie Grâce à l’imagerie en coupe, l’étude anatomique céphalique est devenue très performante. L’IRM a rendu possible une étude directe des nerfs crâniens, d’une grande précision d’analyse, dans tous les plans de l’espace. Il est maintenant possible : de situer précisément leurs noyaux d’origine ou de terminaison et le trajet de leurs fibres dans le tronc cérébral. de voir les nerfs dans leur trajet cisternal intracrânien. de les voir dans leurs orifices ou canaux de pénétration ou de sortie du crâne. d’analyser parfois leur trajet extracrânien. L’injection de produit de contraste (Gadolinium) et les séquences en pondération T2 permettent une caractérisation tissulaire et donc la mise en évidence de pathologies. La tomodensitométrie permet une excellente analyse des structures osseuses (recherche de calcifications, d’une lyse ou d’un processus tumoral). Grâce aux évolutions techniques (récemment avec le scanner multibarrettes), il est maintenant possible d’effectuer des reconstructions dans tous les plans. 4-1 Radiographies standard : orthopantomogramme, défilé maxillaire (cf. plus bas chapitre pathologie) 33 4-2 Imagerie par résonance magnétique trajet dans le cavum trigéminal origine apparente du nerf trijumeau à la face antéro-latérale du pont Trajet cisternal du nerf trijumeau Coupe axiale en pondération T1 Coll. Dr GAYET-DELACROIX Le nerf mandibulaire dans le foramen ovale Coupe sagittale en pondération en T2 (flèche verticale) Coll. Dr GAYET-DELACROIX 34 n. mandibulaire Le nerf mandibulaire dans le foramen ovale Coupe frontale en pondération T1 Coll. Dr GAYET-DELACROIX Le nerf alvéolaire inférieur se dirigeant vers le foramen mandibulaire Coupe frontale en pondération T1 Coll. Dr GAYET-DELACROIX 35 foramens mandibulaires Le foramen mandibulaire Coupe axiale en pondération T1 Coll. Dr GAYET-DELACROIX 4-3 Tomodensitométrie Le foramen ovale ( Coupe axiale Coll. Dr GAYET-DELACROIX 36 ) foramen ovale orbite sinus maxillaire Le foramen ovale Reconstruction sagittale Coll. Dr GAYET-DELACROIX foramens mandibulaires Le foramen mandibulaire Coupe axiale Coll. Dr GAYET-DELACROIX 37 5 - Pathologie Dans le strict cadre de notre sujet, la pathologie est dominée par les tumeurs, les traumatismes et la pathologie d’origine dentaire. Toutefois, le nerf mandibulaire peut être le siège d’affections variées. Citons les pathologies : Inflammatoire : dans le cadre des pathologies dégénératives (SEP) ou des névralgies du trijumeau Infectieuse : pulpite par atteinte carieuse dentaire Tumorale : primitive (schwannome, neurofibrome) ou secondaire (diffusion périneurale de lésions de la sphère ORL) ou par contiguité (kyste mandibulaire siège de poussées inflammatoires ou infectieuses) Orthopantomogramme Vaste kyste de l’angle et du ramus mandibulaires droits développé à partir du sac péricoronaire de la dent de sagesse incluse Coll. Dr DUGUET 38 Traumatique : au cours des fractures mandibulaires canal mandibulaire Défilé maxillaire droit Fracture de l’angle mandibulaire passant par l’alvéole de la dent de sagesse avec décalage de l’image du canal mandibulaire accompagnant une anesthésie labio-mentonnière (signe de Vincent) Coll. Dr DUGUET Iatrogène : dépassement intracanalaire de pâte dentaire, exérèse de kystes mandibulaires, extraction de dents de sagesse, implants, chirurgie orthognathique mandibulaire, sont des actes thérapeutiques fréquents au cours desquels des branches du nerf mandibulaire (nerf alvéolaire inférieur, nerf lingual) peuvent être traumatisées. Cela justifie une information pré-opératoire auprès du patient du risque respectif de trouble de la sensibilité labio-mentonnière et linguale (avec dysgueusie). 39 Arcade dentaire inférieure Corpus mandibulaire rétrodentaire Nerf alvéolaire inférieur Fibres tendineuses du ptérygoïdien médial Ht Av Vue peropératoire du nerf alvéolaire inférieur au cours d’une ostéotomie sagittale du ramus mandibulaire droit Coll. Dr DUGUET Citons pour finir un cas particulier de variation anatomique: l’absence d’émergence du nerf mentonnier au foramen. Ht Première prémolaire Seconde prémolaire G Plaque d’ostéosynthèse de la branche horizontale gauche Site de prélèvement osseux mentonnier avec ostéosynthèses par fil d’acier Vue antérieure peropératoire au cours d’une ostéotomie sagittale mandibulaire avec génioplastie chez une jeune fille porteuse d’une ostéopétrose opérée pour une prognathie mandibulaire Coll. Dr DUGUET 40 6 - Conclusion Cette première approche du travail de dissection nous a permis d’appréhender les difficultés qui y sont liées. Nous avons constaté les obstacles anatomiques qui gênent la recherche du nerf mandibulaire, plus particulièrement dans la fosse cérébrale moyenne. Ses nombreuses anastomoses avec d’autres nerfs crâniens : nerf facial, nerf glossopharyngien, nerf hypoglosse sont à prendre en compte en pathologie dans l’interprétation de l’expression clinique. Le nerf mandibulaire couvre un important territoire sensitif ; cela a des répercussions sur le plan médico-légal en matière d’information du patient des risques encourus. 41 REFERENCES BIBLIOGRAPHIQUES COLLET T. Le nerf lingual. Mémoire pour le certificat d’Anatomie et Organogénèse (C1) 1995-1996 Laboratoire d’Anatomie – Faculté de Médecine de Nantes – Pr LEBORGNE DOYON D. , MARSOT-DUPUCH K., FRANCKE J.-P. Nerfs crâniens. Anatomie, clinique, imagerie Masson, Paris 2002 KAMINA P. Anatomie. Introduction à la clinique. N° 10 - Tête et cou Muscles, vaisseaux, nerfs et viscères – Tome 1 Maloine, Paris 1996 KAMINA P. Anatomie. Introduction à la clinique. N° 10 - Tête et cou Nerfs crâniens et organes des sens – Tome 2 Maloine, Paris 1996 PERLEMUTER L., WALIGORA J., DJINDJIAN M. Cahiers d’Anatomie. Masson, Paris 1980 ROUVIERE H. Anatomie humaine descriptive et topographique. 10ème édition Tome 1 – Tête et cou Masson, Paris 1970 ROUVIERE H. Précis d’Anatomie et de dissection. 9ème édition Masson, Paris 1976 SOBOTTA Atlas d’Anatomie humaine. 4ème édition française Tome 1 – Tête, cou, membre supérieur Technique & documentation, Paris 2000 VIGNAUD F. Le nerf trijumeau. Mémoire pour le certificat de Radioanatomie (C2) 1993-1994 Laboratoire d’Anatomie – Faculté de Médecine de Nantes – Pr LEBORGNE Service de Radiologie – CHU Nantes – Pr de KERSAINT-GILLY 42