EDITORIAL
DECEMBRE2011
MERKUR
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Budget de l’Etat 2012:
commesi la crisen’existait pas…
La Chambrede Commerce arenduun avis particulière-
ment critique sur le projet de loibudgétaire pour l’exercice
2012 quiestactuellement discutéàla ChambredesDépu-
tés(voirdossierdans notredernière édition).
En effet, dans le contexte actuel marqué paruneincerti-
tude extrême quantàl’évolutionconjoncturelle futureet quant
àla résolution de la crisedesdettes souverainesen Europe,le
projet de loibudgétaire surprend parsoninsouciance:il existe
unevéritabledéconnexionentrela gravitédesproblèmesstruc-
turelset la complexitédesdéfisàaffronter au Grand-Duché,
d’un côté,et la politiquebudgétaire menéepar la coalition
gouvernementalequicontinue àcreuserlesdéficits.
Le projet de budget remetauxcalendes grecques le
retour àl’équilibrebudgétaire et laisse le pays sans marge
de manœuvre au cas oùla crisedespays de la zone euro per-
durerait.L’Administration centrale luxembourgeoiseaccu-
sera,en 2012,un déficitde 1,143milliardEUR(-2,6%du
PIBou 3,5millionsEUR par jour). Cettesituationrésultede
«l’effetciseaux»quiestdevenu permanent et donc hautement
dangereuxpour notreéconomie de tailleréduiteet largement
ouverte surl’extérieur: nous sommes ànouveauconfrontés à
uneprogressionsignificativedesdépenses (+6,1%parrap-
port à2011), combinée àuneaugmentation insuffisantedes
recettes (+4,9%), alorsquecesdernièresparaissentencore
largement surévaluéesdans un contexte économique desplus
difficiles et incertains.En effet, depuis le dépôtdu projet àla
ChambredesDéputésle 5octobre dernier,lesprévisions de
croissance du PIBpour 2012 ontencore étérevues àla baisse
pour se chiffrer désormais entre0,4%(OCDE),1%(Com-
missionEuropéenne)et 1,4% (Statec),alorsquele projet de
budget 2012 est basé surunecroissance du PIBde 2,1%.
Le soldede l’Administration publique au sens de Maas-
tricht fait état d’un déficitde 330millionsEUR(0,7 %du
PIB),ce quiparaîtfaible en comparaisoneuropéenne.Cepen-
dant,ce résultat estcamouflé parl’excédent artificiel et vir-
tuel de la sécurité sociale, quidégage un surplusde 702,4mil-
lionsEUR, alorsque, dans uneperspectivede long terme, la
sécurité socialeluxembourgeoise fait apparaîtrel’un desdésé-
quilibreslesplus inquiétantsde l’ensemble de l’UE.
Lesdépenses courantescontinuent àprogresser àun
rythme trop élevé –sous l’argument de leur caractère «incom-
pressible»–parrapportàce quepermet la croissance éco-
nomiqueàmoyenterme et leur rythme de progressionest
trop élevéparrapportàla moyenneeuropéenne.La crise
financière et économique et la crisedesdettes souveraines
menacent fortementle potentielde croissance du Luxem-
bourgàmoyenet àlong terme,avec desconséquences néga-
tivessursonsystème de protection sociale. Lescontraintes
internationalesquifrappent de pleinfouetun pays ouvert
vers l’extérieurcommele nôtre, sont renforcées parl’incapa-
cité interne,luxembourgeoise, de freinerstructurellement le
rythme de progressiondesdépenses courantes; unesituation
hautementdangereuse!Le fait de devoir s’endetter encore
davantageau moment oùtous les pays réduisentleur train
de viemontre quele Luxembourg n’apaspris la mesure des
risquesquile menacent et préfère s’enfoncer dans le déficit
plutôtquede se réformer.
Le fait d’ignorerlesrecommandationseuropéenneset
lesréalités macroéconomiques ressemblede la part du Gou-
vernementàuneattitude d’insouciance face àunesitua-
tion de criseextrêmement grave. Même en espérant quele
pire pourra êtreévitéet quela criseen zone euro trouvera
dessolutionssuffisamment ambitieuseset durables,il faut
se demander ce qu’iladviendraiten casde crisedurableet
prolongée. Commentlesautoritéspourraient-elles assurerla
continuité desservices publicsen casde dégradationabrupte
du contexte conjoncturel ou en casde choc surlesrecettes
publiques? Cesinterrogationsessentielles ne sont nullement
traitées par le projet de budget,quise borne, tout en se basant
surdesprévisions de recettes optimistes,àreconduire une
tendance insoutenableauniveaudel’évolution desdépenses
courantes. En cela,le budget n’estquele fidèle reflet de la
politiquegouvernementalequi, dans sonensemble,ne réus-
sitpasàréformer le pays.
Dans sonavis budgétaire du 15 novembre 2011 (cf. www.
cc.lu), la Chambrede Commerce proposetouteunesériede
recommandationset invite lesautoritéspolitiques àadopter
unegouvernancecrédible baséesurdesactionsstructurelles
indispensables cibléeset protégeant lesplus faibles. n
La Chambrede Commerce souhaiteàtous
sesressortissants un joyeux Noëlet de
bonnes fêtesde find’année!