L’Encéphale, 2006 ;
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1056-60, cahier 3 Schizophrénies : une reformulation nécessaire de l’offre de soins
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rement le maître d’œuvre. Cette articulation conditionne
la qualité de vie de la personne malade dans son milieu
naturel. L’anticipation et l’accompagnement durable et
rigoureux des stratégies pharmaco-psycho-socio-familia-
les s’accompagnent d’un transfert vers le patient et son
réseau social du fardeau du soin, ce qui nécessite une
coordination fine et un suivi du parcours de soin, de même
qu’une réactivité du sanitaire (7).
Les soins et les services qui pourraient être disponibles
pour la personne, en fonction de ses besoins individuels
évalués, pourraient être classés en 4 types de dispositifs.
Les dispositifs de soins classiques sont centrés sur le
secteur, assurant l’hospitalisation mais aussi le suivi et la
liaison.
Les dispositifs de soins spécialisés proposent à des
temps différents de l’évolution des stratégies de réhabili-
tation, et un dépistage précoce.
Les dispositifs communautaires, d’essence médico-
sociale, concernent l’accompagnement à la vie quoti-
dienne (SAVS : Service d’Accompagnement à la Vie
Sociale, SAMSAH : Service d’Accompagnement Médico
Social pour Adulte Handicapé), les occupations (SAJ :
Service d’Activité de Jour), le travail, la gestion et la pro-
tection des biens. Mais encore des dispositifs autogérés
par les usagers : GEM (Groupe d’Entraide Mutuelle) à
visée de réinsertion sociale.
Enfin, les dispositifs « résidentiels », de type sanitaires,
médico-sociaux, et sociaux, prendraient en charge ces
30 % de patients qui occupent à mauvais escient des lits
de psychiatrie, (hospitalisés « par défaut » du fait de
l’insuffisance de voies de sortie sécurisées), dans des éta-
blissements offrant une gradation de l’intervention de
soins selon l’état de dépendance de la personne : ceux-
ci peuvent aller du foyer d’accueil médicalisé au foyer de
vie à temps partiel ou à temps plein, et aux appartements
dans la communauté.
PLACE DE LA RÉHABILITATION PSYCHOSOCIALE
Face à l’échec de la désinstitutionnalisation, avec en
particulier, dans le cas de l’Amérique du Nord, une
carence du suivi au long cours, un consensus s’est dégagé
sur la définition du handicap psychique d’un malade men-
tal chronique. Le champ de la réhabilitation psychosociale
est apparu comme un ensemble cohérent de théorie inter-
disciplinaire et de programmes crédibles d’intervention
pour les malades mentaux.
En reconnaissant que la plupart des troubles psychia-
triques vont de pair avec un handicap persistant, les modè-
les thérapeutiques des phases aiguës se sont enrichis de
procédures efficaces pour optimiser le pronostic à long
terme des patients. La réhabilitation psychiatrique – pra-
tiquée par des psychiatres, des psychologues, des tra-
vailleurs sociaux, des infirmiers, des rééducateurs et les
patients eux-mêmes et leurs familles – vise à améliorer
autant que possible les capacités des personnes présen-
tant un handicap dans la vie quotidienne et leur adaptation
à la vie sociale, dans l’apprentissage, dans le travail et
dans les relations sociales (4).
Le dispositif de réhabilitation pourrait permettre, au-
delà des services apportés par les structures de soins,
d’offrir les outils pour mettre en œuvre une évaluation fonc-
tionnelle (gestion de la santé, ressources personnelles et
interactivités avec l’environnement) par un diagnostic de
réhabilitation. Il permettrait également de favoriser la mise
en place d’un entraînement cognitif, d’un entraînement
aux habilités sociales, et la mise en situation.
La réhabilitation psychosociale doit promouvoir une
dynamique de projet, en amenant, de façon psychodyna-
mique, la personne à changer, à se prendre en charge,
par la meilleure connaissance de son statut, et par la mise
en place d’un plan d’aide, ce qui implique une disponibilité
et une mobilisation des ressources pour « prendre en
main » sa maladie (6).
La réhabilitation psychosociale suppose donc une éva-
luation des besoins, une précocité des interventions (la
réhabilitation psychosociale a prouvé son efficacité dans
l’amélioration du pronostic fonctionnel de la schizophré-
nie), une répétition de ces soins pour une meilleure qualité
de vie, une lisibilité des programmes de réhabilitation psy-
chosociale dans le cadre des soins au long cours de la
psychose, et une formation des intervenants à orientation
neuropsychologique et à orientation éducative tournée
vers la notion de rétablissement.
La réhabilitation psychosociale est « frontière », elle est
multi- et interdisciplinaire ; ses actions sont centrées sur
les ressources et les capacités du patient et non plus sur
sa maladie. On peut proposer deux orientations, selon la
temporalité et le rythme : une réhabilitation intensive,
visant à la préservation du potentiel cognitif ; et une réha-
bilitation à un rythme plus lent, à des fins de réinsertion
et de compensation du handicap psychique (7).
FIG. 3. — Soins et services.
C
o
o
r
d
i
n
a
t
i
o
n
Dispositif soins
« spécialisés »
PROGRAMME DE SANTÉ COMMUNAUTAIRE
Dispositif soins
« classiques »
Dispositif
communautaire
Dispositif
résidentiel
Réhabilitation
Dépistage précoce
Secteur Hospitalisation
SAVS SAMSAH
SAJ GEM
CAT AP
FAM
Foyer
Temps
partiel
Temps
plein
Suivi - Liaison
Accompagnement
Occupationnel/tp libre
travail
Gestion - Protection
des biens
Sanitaire
Médico social
Social