UE 9. Paysage et biodiversité : une méthodologie à inventer

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LICENCE PROFESSIONNELLE
Aménagement et Gestion Ecologique des Paysages Urbains
(AGEPUR)
UE 9. Paysage et biodiversité : une méthodologie à inventer
Dessin de Lierre (Hedera helix) réalisé dans le cadre de la mission Lab
MARGAUX MERIAUX
Promotion 2014-2015
Paysage et biodiversité : une méthodologie à inventer
SOMMAIRE
I. CDC Biodiversité
I.1. une entreprise de la Caisse des dépôts et Consignation
I.2. Le Pôle Paysage et Ingénierie Végétale (PIV)
p. 05
p. 05
p. 05
II. Une approche transversale du métier de paysagiste
II.1. Présentation des projets
II.1.a. Le Lab
II.1.b. Les sites ICADE
II.1.c. La toiture végétalisée du gymnase de Stains
II.1.d. Le jardin de l’hôtel de Pomereu
II.1.e. Le parc du Rû- Gallet de Vaux-sur-Seine
II.2. Revitaliser les espaces
II.3. Chercher
II.4. Illustrer
p. 06
p. 06
p. 06
p. 08
p. 08
p. 08
p. 08
p. 10
p. 10
p. 12
III. Paysage et biodiversité : une méthodologie à inventer
III.1. Revitaliser les espaces
III.1.a. Origine : un travail de recherche
III.1.b. Evolution et enjeux
III.1.c. Fonctionnement
III.2. L’art du diagnostic
III.2.a. Préambule
III.2.b. Le diagnostic paysager
III.2.c. Le diagnostic naturaliste.
III.2.c.1. Le milieu
III.2.c.2. La flore
III.2.c.3. La faune
III.2.c.4. Le sol
III.2.c.5. L’eau
III.2.c.6. Conclusion.
III.3. L’art des préconisations
III.3.a. Une vision transversale
III.3.b. La faune et la flore
III.3.c. La gestion différenciée
III.3.d. Le sol.
III.3.e. L’eau
III.3.f. L’aménagement
III.4. Les plantes bio-indicatrices, outil de diagnostic multiple
III.4.a. Détermination du sol
III.4.b. Calcul
III.4.c. Fonctionnement du document élaboré
p. 19
p. 19
p. 19
p. 21
p. 21
p. 23
p. 23
p. 23
p. 27
p. 29
p. 31
p. 33
p. 33
p. 35
P. 37
p. 39
p. 39
p. 39
p. 41
P. 43
p. 45
p. 45
p. 47
p. 47
p. 49
p. 51
1
Paysage et biodiversité : une méthodologie à inventer
2
Paysage et biodiversité : une méthodologie à inventer
IV. Bilan
p. 53
IV.1. Approche critique de la méthodologie
p. 53
IV.1.a. Difficultés et orientations générales
p. 53
IV.1.b. Le risque du regard systématisé
p. 53
IV.1.c. Retour sur les bio-indicatrices
p. 55
IV.2. Bilan personnel
p. 57
IV.2.a. Le goût des plantes
p. 57
IV.2.b. Le goût du rotring
p. 59
IV.2.c. le goût de la liberté, celui de la confiance et du soutien
p. 59
LEXIQUE
p. 63
ANNEXE
p. 75
LISTE DES REFERENCES
p. 81
3
Paysage et biodiversité : une méthodologie à inventer
Organigramme simplifiée avec les différentes compétences de CDC Biodiversité :
Organigramme nominatif de CDC Biodiversité :
4
Paysage et biodiversité : une méthodologie à inventer
I. CDC Biodiversité
I.1. Une filiale de la Caisse des dépôts
La Caisse des dépôts est une institution financière publique créée en 1816. Il s’agit d’un
investisseur de long terme au service de l’intérêt général et du développement économique
du pays. Elle agit donc en soutien aux politiques de l’Etat et aux collectivités territoriales.
Les priorités du groupe Caisse des Dépôts consistent à mener une action globale au service du
développement des entreprises, en faveur du logement et des mobilités durable tout en
assumant un rôle moteur pour la transition énergétique et écologique (le groupe mobilise ses
modes de financement, et ses outils au service des politiques publiques de la transition
énergétique et écologique).
En 2003, la Caisse met en lumière un constat largement partagé par les acteurs de
l’aménagement : la compensation écologique, pourtant prévue depuis la loi de 1976 relative
à la protection de la nature, n’est pratiquement pas mise en œuvre. Ainsi en 2008 est
envisagée l’idée de créer un opérateur combinant expertise écologique, foncière et financière,
filiale de la Caisse des Dépôts au sein de la Société Forestière déjà dirigée par Laurent Piermont
actuellement Président de CDC Biodiversité. Dès 2008 est lancée la plus grande opération de
compensation écologique d’Europe, pour le compte d’Aliénor, concessionnaire de l’autoroute
Langon / Pau, et lancé dès 2008, en partenariat avec le Ministère de l’Ecologie, la première
« Réserve d’Actifs Naturels » de France. En 2012, CDC Biodiversité s’émancipe de la Société
Forestière et devient une filiale à part entière de la Caisse des Dépôts en tant que Société par
Action Simplifiée Unipersonnelle (SASU). Fille d’un organisme étatique travaillant dans
l’intérêt général, CDC Biodiversité répond au même enjeu avec les impératifs économiques
que connaissent les entreprises privées. Un comité scientifique spécialiste arbitre les
différends dans l’intérêt de la biodiversité et de l’éthique.
CDC Biodiversité est une société de services qui a pour vocation d’accompagner les
acteurs publics et privés dans leurs projets de développement de la biodiversité, en métropole
et outre-mer. En tant qu’opérateur de long terme et dans un rôle de tiers de confiance,
CDC Biodiversité conduit des actions de restauration, reconquête, préservation, gestion et
valorisation de la biodiversité remarquable comme ordinaire.
Cette société est animée par une équipe d’une trentaine de personnes, réparties sur le
territoire national. Depuis le 1er janvier 2014, une antenne est ouverte dans le Sud et déploie
son activité en Aquitaine, dans le Sud Poitou-Charentes et dans le Midi-Pyrénées.
L’équipe, dont les compétences sont à la croisée de l’ingénierie financière et l’ingénierie
écologique, est mobilisée pour des actions positives en faveur de la biodiversité. De fait elle
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Paysage et biodiversité : une méthodologie à inventer
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Paysage et biodiversité : une méthodologie à inventer
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Paysage et biodiversité : une méthodologie à inventer
anticipe, conçoit et met en œuvre les actions de terrain telle que la recherche et la sécurisation
du foncier, les diagnostics écologiques, les plans de gestion, les travaux de génie écologique,
la gestion conservatoire et le suivi scientifique sur le long terme. Ces différentes missions sont
réparties selon cinq compétences agissant le plus souvent en interaction du fait du caractère
transversale du thème de la biodiversité :
•
Le Pôle administratif et financier, garant des démarches et du bon fonctionnement de
l’entreprise.
•
Le pôle Etudes, chargé de conseiller et d’accompagner les entreprises dans leurs
démarches vertes.
•
Le Pôle Projets Opérationnels, spécialisé dans la compensation écologique
•
Le Pôle Paysage et Ingénierie végétale (présenté page 3)
•
Le Pôle Mission Economie de la Biodiversité, soit un pôle de recherche dont le but est
de concilier préservation de la biodiversité et développement économique à travers la
création d’outils techniques et scientifiques.
(Pour mener à bien ses missions, l’entreprise fait également intervenir des prestataires
spécialisés dans l’expertise et la gestion opérationnelle, notamment dans les domaines
juridique et écologique.)
I.2. Le Pôle Paysage et Ingénierie Végétale (PIV)
Le Pôle Paysage et Ingénierie végétale existe depuis 1991 au sein de la Société Forestière
et intervient sur l’ensemble du territoire français. Intégré en 2013 à la société CDC
Biodiversité, il se compose d’une équipe polyvalente: deux paysagistes DPLG (Céline
Desmoulière, responsable du pôle PIV et Caroline Girardière), d’un technicien de l’arbre
(Arnaud Grachet), d’un dessinateur CAO-DAO et SIG (Stéphane Martins), d’une assistante
(Catherine Garrabos).
La double expertise paysage et ingénierie végétale permet de proposer des solutions intégrant
l’ensemble des contraintes économiques, écologiques et sociales. Il s’agit de concilier
pérennité des espaces et maîtrise des coûts, dans le sens propre au développement durable
en proposant des aménagements aussi respectueux du végétal que des usagers.
Allié selon la nature des projets à des architectes ou des spécialistes disposant de
compétences complémentaires, le Pôle Paysage et Ingénierie végétale est en mesure de
mobiliser l’ensemble des experts en écologie de CDC Biodiversité et des chercheurs de la
Mission Economie de la Biodiversité, apportant ainsi le gage d’une mise en œuvre de projets
pérennes et harmonieux. Le PIV collabore également avec les autres pôles en proposant des
diagnostics paysagers et arboricoles ou en soumettant des préconisations d’aménagements
paysagers dans le cadre de la compensation végétale, par exemple. Il propose ses services
auprès des collectivités (communautés de communes, Conseils Généraux, Conseils
Régionaux), des administrations (Parcs Naturels Régionaux, le Centre des Monuments
Nationaux…), des propriétaires (bailleurs, gestionnaires de résidences immobilières…) ainsi
que des entreprises privées.
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Paysage et biodiversité : une méthodologie à inventer
Localisation des projets en Ile de France.
Plan masse de la résidence Les folies, à Choisy le Roi.
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Paysage et biodiversité : une méthodologie à inventer
II. Une approche transversale du métier de paysagiste
Les activités effectuées en entreprise ont consisté à démontrer la liaison entre paysage
et biodiversité à travers six projets différents présentés en II.5. Une conception écologique
s’appuie sur des recherches et des efforts pédagogiques tant auprès des usagers que des
maîtres d’ouvrage. En conséquence, le travail réalisé pour CDC Biodiversité s’est articulé
autour d’une trinité : revitaliser, chercher, illustrer.
II.1. Présentation des projets
II.1.a. Le LAB
Dans le cadre du LAB CDC (« incubateurs de projets innovants »), CDC Biodiversité et
le bailleur social Efidis ont été sélectionnés pour travailler ensemble à l’Aménagement
écologique d’un ilot de logements sociaux situé à Choisy-le-Roi, dans le Val de Marne (94).
EFIDIS, filiale de La Société Nationale Immobilière (SNI filiale à 100 % de la Caisse des dépôts)
est aujourd’hui une entreprise sociale pour l'habitat qui intervient en Île-de-France et gère
51800 logements. Le but du LAB lancé par la Caisse des Dépôts étant de mettre à disposition
une offre réplicable pour la gestion des parcs existants et d’étendre la réflexion aux opérations
neuves et de réhabilitation. Cela se traduit par une offre commerciale pour CDC Biodiversité
et par un exemple d’aménagement possible pour les logements Efidis.
Les bailleurs sont confrontés au défi d’une meilleure gestion des espaces verts et à leur
optimisation pour trouver un juste équilibre entre des coûts maîtrisés, une réflexion sur les
usages (l’amélioration du cadre de vie) et la valorisation de la biodiversité.
Les solutions proposées ont pour ambition d’utiliser la biodiversité comme levier pour
répondre aux besoins des résidents, rendre attractifs les espaces extérieurs et le bâti tout en
étant économe et créatrice de lien social. La résidence « les Folies » à Choisy Le Roi en a été
le support. Elle s’étend sur 37 165 m² dont les espaces extérieurs exploitables représentent
35%.
Sous forme de « sprints » six objectifs ont été atteints en neuf mois (septembre à avril):
-Marquer la frontière piéton/véhicule par l’installation de bacs fleuris à vocation mellifères
(initialement de tranchées végétales, nettement plus écologiques)
-Redonner un sens et des usages aux espaces (aire de pique-nique, jardin partagé)
-Embellir et enrichir la résidence grâce à la présence de rucher, et à l’enrichissement de palette
végétale en place
-Identifier l’entrée de la résidence à l’aide d’une entrée verte (choix de claustra/palissade
comme support des plantations pour créer une porte, et arbres élancés de part et d’autre de
l’allée pour signaler l’entrée).
-Définir des allées piétonnes dans le bois.
II.1.b. Les sites ICADE
ICADE est un acteur majeur du Grand Paris et du développement territorial en tant que
Société immobilière d'investissement cotée, filiale de la Caisse des Dépôts. Ses locaux, situés
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Paysage et biodiversité : une méthodologie à inventer
Carte de localisation des sites ICADE.
Photo du jardin de l’hôtel Pomereu en juin 2015.
Perspective 3D du gymnase de Stains.
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Paysage et biodiversité : une méthodologie à inventer
(93) disposent d’un grand nombre de petits espaces résiduels ainsi que d’un parc. Dans le
cadre de la création d’une convention source de respect de la biodiversité, cette société a fait
appel à CDC Biodiversité pour réaliser un diagnostic complet accompagné d’axes à suivre pour
améliorer la qualité de ses espaces extérieurs.
I.1.c. La toiture végétalisée du nouveau gymnase de Stains
Archi 5, société montreuilloise d’architecture et d’urbanisme s’est associée à CDC
Biodiversité pour répondre à l’appel d’offre lancé par la ville de Stains (93) en 2014. Cette
commune en expansion (plus de 30 000 habitants) souhaitait l’implantation d’un gymnase
avec toiture végétalisée et panneaux solaires dans un quartier en construction et toujours plus
urbanisé (quartier des Tartres). Le bâtiment, semi-enterré et courbe permet une insertion
dans le site intéressante ainsi qu’une réduction de l’emprise des ombres. Ce qui est non
négligeable compte tenu que le bâtiment s’étend déjà sur 2000 m². La faible hauteur rend la
toiture observable des résidences alentours.
II.1.d. Le jardin de l’Hôtel de Pomereu
La société forestière, avait en charge le renouvellement des massifs, les modalités de
gestion ainsi que les petits aménagements de l’Hôtel particulier de Pomereu depuis 2002.
Naturellement, CDC B a repris le flambeau. Situé au 67 rue de Lille dans le 6ème
arrondissement, ce bâtiment se dresse à l'emplacement de deux anciens hôtels particuliers,
l'hôtel de Maillebois et l'hôtel Duret, bâtis sous le règne de Louis XV. L'hôtel de Maillebois fut
détruit par un incendie pendant la Commune, en 1871. Le marquis d'Aligre, propriétaire de
l’hôtel Duret racheta les vestiges du premier et fit reconstruire un seul édifice de de style Louis
XV. Racheté par la Caisse des dépôts et consignations en 1947 l’hôtel a accueilli la création de
la Fondation de France, le séminaire préparatoire du 15ème sommet des chefs d'État du G8,
dit « sommet de l'Arche » etc. Inscrit au titre des monuments historiques, l’hôtel est ouvert à
la visite lors des Journées européennes du patrimoine. Son jardin contient deux plates-bandes
fleuries longues et minces ainsi qu’une orangerie et une fontaine. Des bordures de buis
cernent les cheminements et encadrent une pelouse centrale d’exception.
II.1.e. Le parc du Rû- Gallet de Vaux-sur-Seine
La commune de Vaux-sur-Seine (78) a récemment acquis les terrains d’une ancienne
propriété bourgeoise située entre la rue principale de la ville et la Seine. Aidée du Parc Naturel
Régional du Vexin Français, elle souhaitait valoriser ce lieu, tant d’un point de vue paysager
qu’environnemental, tout en permettant aux habitants et promeneurs de découvrir un site
aux ambiances variées, à la croisée entre espace urbain et berge de Seine.
L’ensemble de ces parcelles reconstituait quasiment les limites d’un ancien parc abandonné
dont la végétation révélait encore la présence. Après, l’établissement d’un diagnostic
phytosanitaire et mécanique, l’avant-projet a redessiné les contours du parc en tenant compte
des richesses paysagères, environnementales et patrimoniales (patrimoine construit et
végétal). Plus qu’un aménagement, il s’agit d’une réhabilitation ou modernisation d’un parc
abandonné. La mission s’est appuyée sur les recommandations du PNR du Vexin Français et
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Paysage et biodiversité : une méthodologie à inventer
Plan masse du jardin partagé à Choisy le Roi.
Proposition d’aménagement de la fontaine du jardin de l’hôtel de Pomereu
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Paysage et biodiversité : une méthodologie à inventer
A établi le diagnostic des espaces concernés de manière à répondre au mieux aux attentes
des élus et des habitants.
II.2. Revitaliser les espaces
La plupart des sites sur lesquels les paysagistes sont amenés à intervenir présentent
des disfonctionnements, l’absence de maillage vert par exemple, ou encore le maintien de
gestion drastique des espaces extérieurs nuisent au développement de la faune et de la flore.
De fait, la conception résout les problèmes soulevés au cours du diagnostic dont les enjeux
sont expliqués au chapitre suivant. Le but du paysagiste est de réanimer un site existant ou
d’insuffler une âme à celui qui se crée. Il doit effectuer un travail d’analyse puis orienter ses
propositions pour que l'ensemble des personnes qui pratiqueront les lieux obtiennent une
réponse à leurs besoins et à leurs souhaits. Les lieux ne seront en effet vécus que s'ils sont
compris, acceptés, donc si chacun est en mesure de se les approprier. La difficulté réside ici à
concilier les désirs humains et les priorités environnementales.
L’expérience du LAB a permis de proposer des solutions pérennes, respectueuses de
l’environnement et des pratiques des usagers, ainsi que de mobiliser le potentiel écologique
du site. Ce dernier présentait un bois abandonné qui inquiétait les résidents. La préconisation
d’éclaircies, de remontées de couronnes et la création d’un cheminement en copeaux issus
des déchets de taille des arbres en périphérie du bois ont donné un second souffle à un espace
auparavant considéré résiduel. La réduction des surfaces de pelouses en proposant
l’aménagement d’un jardin partagé ou encore le remplacement du gazon par des plantes
couvre-sols a appréhendé le changement de gestion des espaces (de la gestion traditionnelle
à la gestion différenciée).
En revanche un site comme celui de l’Hôtel Pomereu nous restreint dans la marche de
manœuvre écologique. Dans la lignée des espaces d’excellence, l’Hôtel Pomereu répond à une
gestion drastique : la pelouse centrale ne dépassant pas les cinq centimètres est arrosée ; les
arbustes sont généreusement taillés, les massifs changés quatre fois par an. Une proposition
d’avant-projet a été émise pour raviver une fontainerie hors service. Celle-ci consistait à
transformer la fontaine en mare écologique et à favoriser le développement d’une strate
muscinale sur la pierre. Les massifs saisonniers devenaient permanents, mais ponctués
cycliquement par des bulbes et des annuelles. L’usage de ces dernières avait d’ailleurs été
recommandé pour les massifs d’automne et d’été afin que la palette végétale même
éphémère, puisse répondre aux besoins nutritifs des oiseaux et des insectes.
Il est plus aisé de porter des aménagements paysagers écologiques dans les nouvelles
constructions qui se conforment aux nouvelles requêtes écologiques.
II.3. Chercher
(Re)vitaliser des espaces dans le respect du vivant, induit un effort d’assimilation de
connaissances sociales et environnementales ainsi qu’une effort de réactualisation de ces
dernières. Pour envisager des projets dignes du développement durable, il convient
d’effectuer des recherches scientifiques. Cela permet de « planter les bonnes plantes aux bons
endroits » et de tester les outils mis à disposition par l’ingénierie végétale, l’hydraulique, les
nouveaux matériaux de construction etc… Nous verrons dans la partie centrale de ce rapport
à quel point les missions confiées ont nécessité l’engagement de recherches.
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Paysage et biodiversité : une méthodologie à inventer
Panneau pédagogique révélant la flore du parc du Rû Gallet à Vaux-sur-Seine
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Paysage et biodiversité : une méthodologie à inventer
De façon générale, les projets menés étaient subordonnés à 8 règles de conception exigeant
des recherches:
- La limitation de l’imperméabilisation des espaces réaménagés.
- La gestion des eaux pluviales et la mise en place de dispositifs permettant leur infiltration,
leur tamponnement et / ou la réutilisation des eaux pluviales participant d’une maîtrise de la
consommation en eau.
- La préservation des écosystèmes et l’enrichissement de la biodiversité par des choix
d’aménagements et d’espèces végétales adaptés.
- La maîtrise de la consommation énergétique des dispositifs d’éclairage ou des éléments de
mobilier ainsi que la production d’énergie renouvelable pour rendre les équipements
proposés autonomes : il s’agit de viser l’équilibre énergétique.
- Une préférence à capacité équivalente pour les matériaux caractérisés par un faible bilan
énergétique notamment les matériaux recyclables et recyclés.
- Un choix d’essences indigènes voire locales, adaptées au contexte géographique et social et
nécessitant peu d’entretien.
- La limitation de l’entretien en l’intégrant cette problématique dès le début du projet.
- Le confort du promeneur, des usagers de tous âges, l'accessibilité aux personnes à mobilité
réduite.
A titre d’exemple, la toiture végétalisée du gymnase de Stains a réclamé un travail de
recherche quant à la qualité environnementale qu’elle pourrait présenter. Afin d’obtenir une
haute performance écosystémique nous avons opté pour la création de petits bassins
pluviaux, l’utilisation de gravières et de bande de terre nue afin de permettre le
développement des mousses et des graines volatiles. Ceci dans l’idée d’augmenter le nombre
de strates végétales déjà dense (strate arbustive, strate herbacée haute, strate herbacée
basse, strate de graminées hautes, strate de graminées basses). L’entrelacement des strates
dont les hauteurs de substrats varient, offre une multiplicité d’écosystèmes. La palette
présente 60 espèces nectarifères et/ou mellifères, résistantes à la sécheresse qui servent à la
fois de gîte et de distributeur de nourriture aux insectes et aux oiseaux. Toutefois, l’usage de
tourbe comme de pouzzolane alors que ce sont des matériaux non renouvelables n’a pu être
évité.
II.4. Illustrer
Le recours au visuel est indispensable dans le métier de paysagiste. Aussi pour
expliquer la conception écologique de la toiture de Stains et de tous les projets, des dessins,
des profils et des coupes ont été fournis. Avec l’apparition des changements de type de
gestion et des nouveaux modes de conception écologique, les panneaux pédagogiques sont
devenus primordiaux. Ils assurent la bonne réception des actions paysagères en expliquant les
fondements et l’intérêt de ces actions pour l’environnement. Ces panneaux illustrant les idées
mises en scène dans les espaces extérieurs, répondent aux questions des usagers ou
vulgarisent des notions de biodiversité. Sans pédagogie au sein du public comme au sein des
maîtres d’ouvrage, l’aménagement urbain écologique ne peut exister. Il se verrait incompris
et donc spolié. On ne saurait accepter, respecter et favoriser ce qui nous est hermétique. Un
panneau constitué de paragraphes pompeux connait bien peu de lecteur, le panneau
pédagogique doit donc être explicite, ludique et beau. Le dessin, pimenté par une mise enpage
pertinente, a l’avantage de réunir les trois. Souvenons-nous du caricaturiste Helbé qui
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Paysage et biodiversité : une méthodologie à inventer
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Paysage et biodiversité : une méthodologie à inventer
délivre son discours par le croquis : « Tout homme a, a eu ou aura besoin d’un dessin pour
faire passer son message ». Olivier Laurain Broca, dit Helbé.
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Paysage et biodiversité : une méthodologie à inventer
ESPECES à RESTREINDRE
Bugs écologiques : Chat domestique, Tortue de Floride, Grenouille taureau, Moustique tigre, frelon
asiatique, coccinelle asiatique, Ver plat de Nouvelle Guinée (peu d’informations, espèce signalée en
2013 par Jean-Lou Justine, professeur au Muséum d’Histoire Naturelle)
Sinanthropes : Pigeon, Cafards, Souris, rat musqué, mouche
Plantes envahissantes: Renouée du Japon, Renouée de Sakhaline, Ailante, Buddleia du père David,
Erable negundo, Ambroisie, Mimosa, Ardisie elliptique, Canne de Provence, Figuier des Hottentots,
Faux-ricin, Clidémie hérissée, Herbe de la pampa, Liane cythère, Berce du Caucase, Balsamine de
l’Himalaya, Imperata cylindrique, Lantanier, Faux mimosa, Salicaire, Niaouli, Paspale distique, Liane
américaine, Amourette, Morelle, Oxalis des Bermudes, Pin maritime, Cerisier d’Automne, Robinier,
Tamaris, Vergerette du Canada, Chiendent maritime.
(Aquatiques) Elodée du Canada, Caulerpe raisin, Jacinthe d’eau, Codium fragile, Fougère de mer,
Jussie.
Mollusques et crustacés invasifs : Escargot géant d’Afrique, limace (Arion vulgaris), Corbicule, Palourde
asiatique, Huître japonaise, Crépidule, Moule zébrée, Couteau américain, Escargot carnivore de
Floride, Ecrevisse de Californie, Crabe chinois,
Insectes envahissants : Fourmi jaune, Fourmi à grosse tête, Fourmi argentine, Capricorne asiatique,
Coccinelle asiatique, Mineuse du Marronnier, Longicorne asiatique, Puceron du cotonnier, Aleurode
du tabac, Cératite, Doryphore de la pomme de terre.
Mammifères envahissants : Ragondin, Mangouste, Vison d’Amérique, Mangouste, Ecureuil gris, lapin.
Poissons, reptiles, batraciens envahissants : Poisson chat, Carpe, Perche-soleil, Sandre, Silure,
Oiseaux envahissants : Bernache du Canada, Erismadure rousse, Ibis sacré, Perruche à collier.
ESPECES à FAVORISER (contexte urbain)
Oiseaux : martinet noir, Hirondelle de fenêtre, Chouette effraie, Rouge-queue à front blanc, Rougequeue noir, Mésange charbonnière, Mésange Bleue, Etourneau Sansonnet, Sitelle Torchepot,
Hirondelle de cheminée, Moineau domestique
Mammifères : Rhinolophe et Grand Rhinolophe, pipistrelle, Lerot, Hérisson d’Europe
Insectes : Papillon citron, Cétoine, Carabe, Coccinelle autochtone (Adalia pibunctata, Coccinella
septempunctata), Araignée, Abeilles, Mille-pattes, Faucheux,
(Papillons zone humide) : Azuré de la sanguisorbe, fadet des laîches
Mollusques, crustacés : cf protection des zones humides (n°71 « Zones humides » Edition Société
Nationale de Protection de la Nature)
Poissons, reptiles, batraciens : Anguille, Truite, Brochet, Crapaud, Gecko, Lézard des murailles,
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Paysage et biodiversité : une méthodologie à inventer
III. Paysage et biodiversité : une méthodologie à inventer
III.1. Présentation
III.1.a. Origine : un travail de recherche
Laurent Piermont, président de CDC Biodiversité et écologue, a perçu la récurrence des
disfonctionnements causés par certains animaux domestiques, des commensaux ou encore
des espèces exotiques envahissantes (EEE) en milieu urbain ou fortement anthropisé. Une
espèce exotique envahissante est une espèce allochtone dont l'introduction par l'Homme
(volontaire ou fortuite), l'implantation et la propagation menacent les écosystèmes, les
habitats ou les espèces indigènes avec des conséquences écologiques ou économiques ou
sanitaires négatives », d’après L’Union international pour la Conservation de la Nature (UICN
2000, McNeely et al. 2001, McNeely 2001). En conséquence, il m’a été demandé d’élaborer
des fiches concernant les espèces problématiques en parallèle de mes activités paysagères.
Ce travail de recherche est rattaché au pôle Mission Economie de la Biodiversité. Mais devait
devenir un outil destiné aux paysagistes, pour faciliter leur lecture environnementale de
l’espace. Pour ce faire, j’ai d’abord construit une liste évolutive et non exhaustive que vous
pouvez consulter ci-contre. Celle-ci s’inspire des listes publiées par le Muséum National
d’Histoire Naturel ainsi que des données de « Plante et Cité », elle répertorie donc les espèces
selon des catégories naturalistes simples. Toutefois, un volet s’attache à traiter des « bugs
écologiques », appellation chère à monsieur Piermont. Il s’agit d’espèces introduites par
l’homme dont le comportement frôle celui des ravageurs et induit davantage de rupture dans
les écosystèmes. La plupart sont déjà recensés parmi les Espèces Exotiques Envahissantes,
d’autres sont tout bonnement des animaux domestiques comme le chat, dangereux tueur en
série. Ces fiches dont vous trouverez quelques exemples en annexe présentent le nom
scientifique et vernaculaire de l’espèce, les principaux risques qu’elle occasionne, son régime
alimentaire, ses prédateurs, son habitat et les caractéristiques de sa reproduction. Ces
informations permettent de faire connaissance avec une faune et une flore dépréciée et
d’éviter ainsi les idées toutes faites même si certaines informations corroborent les légendes…
Un volet rappelle les enjeux écologiques et économiques rencontrés par la présence de cet
individu puis des solutions sont proposées. Elles font état des politiques menées auparavant
(de leur tort comme de leur efficacité) et de celles aptes à respecter les critères
environnementaux et éthiques. Nous ne préconisons pas de politique d’extermination des
rats, par exemple. Nous préférons expliquer comment éviter la présence des rats dans un
bâtiment (fondation profonde) ou comment une plantation de menthe dans une plate-bande
permet de les éloigner. A mi-chemin entre les recettes de grand-mère et les performances
techniques, ces fiches proposent un éventail de possibilités également pour favoriser les
chauves-souris et certains oiseaux urbains comme l’hirondelle de printemps.
III.1.b. Evolution et enjeux
Les missions LAB et ICADE dont il était question plus haut ont permis la construction
d’une offre générique. Celle-ci souscrit au marché dans lequel CDC B s’intègre, celui de la
biodiversité en milieu urbain. Ce domaine devenant de plus en plus concurrentiel, il fallait à
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Paysage et biodiversité : une méthodologie à inventer
Fiche sur les oiseaux urbains à favoriser
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Paysage et biodiversité : une méthodologie à inventer
l’entreprise étendre ses compétences tant en terme de communication avec les lobbys de ce
domaine que dans ses offres. Or, mettre en relation le bâtiment et la biodiversité requiert une
importante phase de diagnostic. L’aménagement paysager et les décisions architecturales
dépendront de ce diagnostic : laisser une brèche dans un mur exposé sud est l’occasion de
conserver le lézard des murailles, au risque de solliciter l’incompréhension des résidents (cf.
I,4 et I,5). De fait, il a fallu à CDC B croiser son savoir-faire naturaliste et paysager dans une
toile de fond urbaine. Les fiches présentées plus haut témoignaient déjà de cette ambition.
Cependant, après la rédaction d’une quinzaine de fiches (rat, le chat, le pigeon biset, la souris,
l’oie bernache, la tortue de Floride, la grenouille taureau, l’ailante, la renouée du Japon, la
verge d’or, le cerisier tardif, la rudbéckie laciniée, l’érable negundo, l’herbe de la pampa et
l’arbre aux papillons), nous nous sommes rendus compte que ces dernières ne seraient
consultées qu’en cas de problème révélé in situ mais qu’elles ne permettaient pas de les
anticiper. D’ailleurs il faut disposer de certaines connaissances pour visualiser les espèces
nuisibles comme pour comprendre les potentialités d’un site à l’installation d’oiseaux citadins
(parfois nuisibles). En parallèle, CDC B ne disposait pas de grille de diagnostic générique. Aussi
l’idée de réaliser un guide de diagnostic suivi de préconisation est-elle née.
III.1.c. Fonctionnement
A l’instar, du Guide méthodologique de conception de projet : conception écologique
d’un espace public paysager de « Plante et Cité », l’outil a pour objectif d’inscrire tous les
aménagements contemporains dans le respect et la valorisation des sites. La première partie
du guide de Plante et Cité intitulée « comprendre » présente les enjeux majeurs et les objectifs
d’un aménagement écologique (sol, eau, faune/flore, fourniture des matériaux). La seconde
partie dénombre les moyens ainsi que les outils mobilisables à la conception d’un
aménagement écologique. Dans la même mouvance, notre guide s’articule autour de deux
axes : diagnostic et préconisation. La méthodologie a pour ambition de tourner sur elle-même
en ce sens que chaque observation au cours du diagnostic doit pouvoir s’accompagner de
solutions paysagères, techniques et écologiques. Elle présente également un volet juridique
indispensable à la protection de l’environnement. Afin de balayer le plus de champs possibles,
une grille récapitulative consigne les étapes du diagnostic que ce soit pour le paysagiste,
l’écologue, l’agronome, le technicien arboricole, l’hydrologue etc…
Cette grille a vocation de chartes de diagnostic et rappelle le caractère aussi collaboratif que
pluridisciplinaire du paysage. Le principe de cet outil est simple, il s’agit tant d’une pioche que
d’un aide-mémoire. Il propose d’évaluer en amont les potentialités et les problématiques d’un
site. Il ne saurait, en revanche, aider le maître d’ouvrage dans ses choix, puisqu’il est question
d’un document interne à CDC Biodiversité au service de tous les acteurs de l’aménagement.
Lesquels pourront dialoguer autour d’un document commun et l’étoffer. Effectivement ce
guide connait une vocation évolutive, compte tenu de la jeunesse du domaine qu’il étudie
mais également en raison des législations changeantes, des découvertes écologiques
multiples et des pressions sociales et culturelles.
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Paysage et biodiversité : une méthodologie à inventer
Détail de la fresque d’Ambrogio Lorenzetti qui orne les murs de la Salla dei Nove à Sienne.
Les effets du bon et du mauvais gouvernement, 1340.
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Paysage et biodiversité : une méthodologie à inventer
III.2. L’art du diagnostic
III.2.a. Préambule
« Bien que la question du paysage ne soit pas récente, sa prise en compte dans la
gestion du territoire fait l’objet de préoccupations nouvelles. Les transformations sans
précédent du territoire ont fait émerger un réel souci quant à leurs implications au niveau du
paysage. L’évolution de ce dernier est encore mal comprise et doit être clarifiée pour parvenir
à élaborer des stratégies cohérentes d’aménagement. » Joël Chételat, Eléments
méthodologiques de diagnostic paysager utilisant les systèmes d’information géographique.
Historiquement, le terme paysage apparait au XVème siècle avec les peintres italiens de
« paeso », « littéralement morceau de pays ». Il n’y a pas à s’étonner de fait, de la précision
faite par la convention de Florence cinq siècle plus tard qui désigne le paysage comme une
partie de territoire telle que perçue par les populations, dont le caractère résulte de l'action
de facteurs naturels et/ou humains et de leurs interrelations ». Nous éluderons l’histoire du
paysage et les débats sur sa définition mais rappellerons que celui-ci est à la rencontre de
différentes politiques sectorielles : agriculture, environnement, équipement (transport et
énergie), industrie, culture, urbanisme et logement, économie. Sans parler des paramètres
naturels en perpétuelle évolution (géographie, climatologie, pédologie) et du poids de
l’histoire. Le paysage fait partie du patrimoine culturel mais il assimile un patrimoine naturel
incontestable. Il abrite un ensemble d’être vivants en interaction entre eux et avec leurs
milieux. Effectivement, un aménagement n’est pas une entité solitaire, il s’insère dans
l’aménagement du territoire et répond à ce titre aux mêmes mises sociales, économiques et
environnementales. En revanche, il est indispensable de distinguer le paysage de
l’aménagement paysager ; le premier étant un espace de conséquences humaines et
naturelles (involontaire) alors que le second exprime des actions volontaires résultant un
caractère prospectif particulièrement affirmé visant la mise en valeur, la restauration ou la
création de paysages. Dans l’idée que la biodiversité constitue en partie le paysage (puisqu’elle
est fortement tributaire des décisions sociales, économiques et culturelles) tout
aménagement paysager doit appréhender le fonctionnement du site dans lequel il va s’inscrire
et non s’opposer. Dès lors le diagnostic constitue la colonne vertébrale d’un aménagement
paysager.
III.2.b. Diagnostic paysager
Différentes écoles de paysagisme initient leurs élèves à cumuler analyse sensible et
raisonnement scientifique à différentes échelles ; d’une étendue délimitée géographiquement
voire politiquement et historiquement (continent, état, région, département, commune,
jardin privé) à un interstice enherbé sur le trottoir d’un quartier. Il s’agit d’un large état des
lieux. La méthodologie proposée n’est que partiellement applicable à l’échelle territoriale.
Elle est pensée pour les petits espaces de verdure qui jalonnent les résidences jusqu’aux parcs
et aux friches. De fait, si le développement du contexte dans lequel le site s’inscrit est
primordial, il n’y a pas lieu d’avoir recours à des experts en climatologie, géographie ou encore
histoire et archéologie (sauf exception pour les jardins historiques).
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Paysage et biodiversité : une méthodologie à inventer
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Paysage et biodiversité : une méthodologie à inventer
Par ailleurs, la typologie établie par l’Association des Ingénieurs des Villes de France définit
trois sortes de patrimoine vert qu’il faut prendre en compte dans le diagnostic :
-
-
-
-
PARCS, JARDINS ET SQUARES Lieu de séjour à caractère horticole, la présence d’une
clôture ne constituant pas un élément déterminant de classement dans cette
catégorie.
ACCOMPAGNEMENT DE VOIES Toute voie de communication, que ce soit de la voirie
ou une voie ferrée ou fluviale (ex : îlots, ronds-points, jardinières).
ACCOMPAGNEMENT DE BÂTIMENTS PUBLICS Espace ayant pour fonction majoritaire
l’accompagnement du bâtiment, qu’il y ait ou non accès du public (ex : mairie, caserne,
musée).
ACCOMPAGNEMENT D’HABITATIONS Exemple : HLM municipaux, résidence pour
personnes âgées.
ACCOMPAGNEMENT DES ÉTABLISSEMENTS INDUSTRIELS ET COMMERCIAUX Abords
de centre commercial, de zone artisanale ou industrielle. Espace vert des
établissements sociaux ou éducatifs : groupes scolaires, maisons de quartier, centres
aérés, crèches, …
SPORTS Rentrent dans cette catégorie les surfaces à destination des clubs sportifs et
leurs abords (sauf surfaces couvertes).
CIMETIÈRES Seules les surfaces gérées par le service des espaces verts sont prises en
compte.
CAMPING Espaces comprenant des structures d’accueil temporaire : terrains de
camping caravaning, aire d’accueil des gens du voyage, villages vacances.
JARDINS FAMILIAUX Il y aura lieu de distinguer les parcelles appartenant à la
collectivité. –
ETABLISSEMENTS HORTICOLES Établissements de production végétale à vocation
publique.
ESPACES NATURELS AMÉNAGÉS Surfaces naturelles dont le mode d’entretien est plus
ou moins sommaire : forêts, prairies, plans d’eau, dunes… (plus rares en milieu urbain).
ARBRES D’ALIGNEMENT Ce sont les arbres situés le long des voies, seuls ou en groupe
et structurant ces voies. Ils sont comptabilisés à l’unité.
Dans un premier temps, on prendra soin de délimiter le périmètre d’étude puis de
comprendre l’intégration du site dans son environnement. Seront demandés : les plans
réseaux, les plans d’urbanisme et les plans des éléments bâtis. Une recherche globale sur la
localité sera menée en parallèle de celle sur la spécificité du site (activités, enjeux, parfois
problématiques). On étudiera la continuité entre le site et son emplacement en observant les
ouvertures et les fermetures ainsi que les constructions permettant les interactions.
Dans un second temps, afin de discerner la nature et la fonction des différents éléments du
site, il conviendra de :
-Décrire les espaces (qualité paysagère, valeurs historiques, culturelles,
environnementales, éléments particuliers …)
-Dissocier les espaces selon leur fonction (exemple simple : dans un parc, cohabitent
généralement, une aire de jeux, une aire de repos, une aire de pique-nique). Les usages qui
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Paysage et biodiversité : une méthodologie à inventer
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Paysage et biodiversité : une méthodologie à inventer
sont faits d’un lieu renient parfois la fonction première d’un site… . Des enquêtes sur les
usages sont conseillées. Plus que dissocier les espaces, il s’agit de bien comprendre toutes les
fonctions des lieux. Sachant aussi qu’un espace peut avoir plusieurs fonctions et une fonction
plusieurs espaces. Dès lors, il est important est de vérifier la bonne corrélation entre usage et
lieu (ex : s’il y a un sentier « sauvage » les chemins sont mal pensés)
-Quantifier les proportions des différentes strates végétales, les déterminer et étudier
leurs interconnexions pour comprendre la structuration des espaces dénombrés.
-Appréhender les mouvements internes afin de rendre compte des circulations entre
les différentes zones (leur sens, leur dessin, leur largeur, leur longueur, leur but, leur
accompagnement) ainsi que des accès au site et de leur matérialisation spécifique.
-Evaluer les minéraux et les matériaux selon le type de surfaces rencontrées (prorata
surface minérales / végétales) et leurs caractéristiques (nature, fonction, état de
conservation). Sans omettre, la description de l’insertion du bâti (dont parking) dans le site et
son état.
Dans un troisième temps, il faudra analyser le type de gestion mis en place à l’aide de
l’inventaire qualitatif réalisé au préalable (type d’espèces, état phytosanitaire, localisation sur
plan). Cela nécessite également de prendre connaissance des surfaces entretenues, de
l’utilisation faite de l’eau (arroseur automatique, cuve de récupération, paillage…) et de la
charge d’entretien : tâche d’entretien, fréquence, matériel utilisé.
III.2.c. Diagnostic naturaliste
Différents domaines se croisent lorsque l’on cherche à définir un site : paysagisme,
urbanisme, mais également écologie, géographie, sociologie, archéologie, ingénierie
environnementale jusqu’au graphisme qui met en exergue toutes ces données.
Le terme naturaliste est ici utilisé consciemment en ce sens qu’il ne s’agit pas exclusivement
de dépeindre la faune et la flore présentes, mais également de traiter du sol, et de l’eau. En
conséquence, le diagnostic naturaliste regroupe différents acteurs : un ornithologue, un
expert généraliste de la faune, un botaniste, un technicien de l’arbre, un agronome, un
hydrologue.
Cette partie est encore peu développée dans la méthodologie notamment en ce qui concerne
la définition du milieu.
Dans tous les cas, les experts définissent un périmètre de prospection avec des
postes d’observation stratégiques mais prennent en compte les protections et les
inventaires du patrimoine naturel déclinées dans un volet juridique de la méthodologie :
ZNIEFF, ENS, réserves naturelles. Les Zones Naturelles d’Intérêt Faunistique et Floristique
recensent puis cartographient les richesses faunistiques et floristiques. Les ZNIEFF de type I
témoignent d’un patrimoine exceptionnel peu artificialisé, rare, fragile et de petite taille. Les
ZNIEFF de type II correspondent aux grandes étendues peu modifiées par l’homme
(plateaux, vallées, estuaires) et accueillent des ZNIEFF de type I. Leur prise en compte doit
être systématique dans les programmes de développement afin d’en respecter la
dynamique d’ensemble. Les Espaces Naturels Sensibles signalent des espaces « dont le
caractère naturel est menacé et rendu vulnérable, actuellement ou potentiellement, soit en
raison de la pression urbaine ou du développement des activités économiques ou de loisirs,
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Paysage et biodiversité : une méthodologie à inventer
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Paysage et biodiversité : une méthodologie à inventer
soit en raison d’un intérêt particulier eu égard à la qualité du site ou aux caractéristiques des
espèces végétales ou animales qui s’y trouvent » (loi 76.1285 du 31 décembre 1976).
Contribuant à la Trame Verte et Bleue, les ENS dépendent des départements jusqu’à la
réforme de ces derniers. Les sites inscrits contribuent également à la Trame Verte et Bleue.
Ce sont des espaces naturels dits remarquables par leur caractère historique, artistique,
scientifique, légendaire ou pittoresque. Leur préservation se fait au nom de l’intérêt général.
Concrètement ces protections se traduisent par une analyse des aménagements souhaités
pour ne pas endommager ces sites qui ne sont pas forcément naturels. D’autres outils
normés de conservation et de valorisation sont à connaître : Natura 2000, Arrêté Préfectoral
de Protection de Biotope, Réserve naturelle… (cf. Lexique)
III.2.c.1 Le milieu
Avant de croiser ces deux diagnostics nous devons saisir l’étroite relation entre les
deux. L’écologue nous renseigne déjà sur les bribes d’écosystèmes en place en explicitant les
habitats rencontrés sur site. Il est difficile en milieu urbain et péri-urbain de définir tout le
fonctionnement des écosystèmes. Dissocions d’abord un habitat naturel d’un habitat
d’espèce. Un habitat naturel se définit comme un ensemble constitué :
- D’un compartiment stationnement (conditions climatiques, roche mère, sol)
- D’une végétation (ne pas confondre avec formation végétale) qui, synthétisant les
conditions du milieu et le fonctionnement du système, constitue le meilleur indicateur de tel
ou tel habitat et permet donc de l’identifier.
- D’une faune associée c’est-à-dire dont la niche écologique occupe partiellement ou
non l’espace observé. Le concept de niche écologique rend compte l'espace occupé par une
espèce qui comprend non seulement l'espace physique mais également le rôle fonctionnel
joué par l'espèce. Une espèce donnée peut occuper différentes niches à des stades différents
de son développement.
Un habitat d’espèce correspond au milieu de vie d’une espèce animale ou végétale, soit
l’ensemble des habitats naturels utilisés par l’espèce pour effectuer les différentes phases de
son cycle biologique. L’espèce y trouve les éléments lui permettant de satisfaire ses fonctions
vitales (alimentation, repos, reproduction, etc…). La préservation d’une espèce passe par le
maintien de son habitat dans un bon état de conservation (alimentation suffisante, quiétude,
etc…). A noter, que La valeur floristique et faunistique est estimée notamment en fonction
des sources suivantes :
-Des annexes de la Directive communautaire Habitats (92/43/CEE) et de la Directive
communautaire Oiseaux (79/409/CEE) qui déterminent les espèces d’intérêt communautaire.
Espèces terrestres ou aquatiques en danger ou ayant une aire de répartition réduite ou
constituant un exemple remarquable de caractéristiques propres à une ou plusieurs régions
biogéographiques et pour inscrite dans les Zones Spéciales de Conservation.
- Des listes réglementaires nationales et régionales de protection des espèces.
- De la liste rouge des espèces végétales d’Ile-de-France.
- Des listes rouges UICN des espèces menacées en France (oiseaux nicheurs, oiseaux
non nicheurs de passage ou hivernants, reptiles et amphibiens, mammifères).
- Des listes déterminantes de ZNIEFF propres à chaque région.
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Paysage et biodiversité : une méthodologie à inventer
Synthèse du diagnostic de la flore et du paysage réalisée pour ICADE
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Paysage et biodiversité : une méthodologie à inventer
III.2.c.2. La flore
•
Méthode :
Déterminer la surface à relever varie en fonction du type d’espace. Pour les végétations
annuelles de dalles rocheuses, de fissures et les végétations flottantes, quelques cm² suffisent.
Une pelouse sera étudiée sur une vingtaine de m², une prairie sur une cinquantaine et une
lande sur une centaine. Les forêts caduques sont observables à partir de 100m².
Le site doit être visité plusieurs fois à un mois d’intervalle à la saison la plus favorable
(printemps) ainsi la combinaison des prospections réalisée garantira un inventaire très proche
de l’exhaustivité.
On notera :
- le numéro de station, les numéros de relevés et la date
- les coordonnées géographiques précises
- l’altitude
- la topographie
- l’exposition
- le type de substrat, la roche-mère (cf. III.4)
- les caractéristiques du sol
- les facteurs biotiques et donc l’ensemble des interactions vivant/vivant, visible par
les relations trophiques (prédation, coopération, compétition, parasitisme, symbiose,
amensalisme, commensalisme, etc.)
L’inventaire s’effectue par strate (arborescente, arbustive, herbacée, muscinale) puis retrace
les espèces végétales considérées comme spontanées ou susceptibles de se naturaliser en ne
retenant pas les espèces horticoles (dénombrées par le paysagiste). Elles peuvent être
adventices, c’est-à-dire non désirées dans un espace de culture donné. Une attention majeure
est portée aux Espèces Exotiques Envahissantes et à leur comportement. Certaines ne
troublent pas forcément le bio-fonctionnement dans la mesure où elles s’implantent dans des
lieux aux conditions difficiles pour la flore indigène ; quand d’autres étouffent la flore en place.
Pour comprendre le poids de chacune des espèces, le coefficient d’abondancedominance de Braun-Blanquet établit le pourcentage de recouvrement de chacune des
espèces. Ainsi il renseigne sur la sociabilité des plantes qui peuvent être en tapis continu (dès
75% de recouvrement), en colonies ou tapis discontinus (50-75%), groupés en tâches (2550%), répartis en petits groupes isolés (5-25%) et enfin simplement isolés (1-5%) Les
formations végétales cartographiées devront être rapprochées des entités typologiques
connues de la région d’implantation du site.
•
Phytosociologie :
S’en suit la description des habitats ainsi que leur matérialisation, sur plan de
préférence. Il s’agit d’une partie synthétisant les observations floristiques. Cette description
s’appuie sur un bataillon d’habitats selon la catégorie de la flore en place, la physionomie de
l’âge de la strate végétale, les activités menées ou passées, le PH du sol, l’exposition… Il en
résulte des formations végétales et des dynamiques de végétation valables à un instant T et
pour une localisation précise à interpréter. En effet, la phytosociologie décrit les associations
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Paysage et biodiversité : une méthodologie à inventer
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Paysage et biodiversité : une méthodologie à inventer
végétales soit l’ensemble floristique forgé par les conditions écologiques abiotiques (facteurs
édaphiques, climatiques, chimiques, topographiques) et leur dynamique (succession de
végétation). Il s’agit de comprendre les liens de causalités entre les différentes unités. Cela
amorce une compréhension du paysage et de son évolution.
III.2.c.3. La faune
Le procédé est assez analogue à celui employé pour la flore. A ceci près que des
prospections diurnes, crépusculaires et nocturnes sont réalisées en plus des diurnes, afin de
localiser les zones les plus favorables aux mammifères (gîtes, corridors, terrains de chasse…).
Il convient donc de visiter plusieurs fois le site et de noter les mêmes paramètres cités plus
haut. Une fois encore il faudra être attentif aux Espèces Exotiques Envahissantes et aux
espèces mentionnées par la liste rouge de l’UICN. Les experts chercheront les familles de la
mégafaune, de la mésofaune et de la microfaune suivantes :
- Mammifères terrestres
- Chiroptères (chauve-souris)
- Avifaune nicheuse
- Avifaune hivernante et migratrice
- Reptiles
- Amphibiens
- Insectes dont Lépidoptères Rhopalocères (papillons de jour), Odonates (libellules),
Orthoptères (sauterelles).
Au cours de ces repérages, sont consignées toutes les observations directes ou indirectes que
sont les traces et les indices (coulées, bauges, souilles, restes de repas, empreintes, fèces,
terriers, nids…).
Bien entendu, les résultats de l’inventaire indiquent la position de chacune des espèces dans
les nomenclatures en vigueur. Attention toutefois, le cas de l’oie bernache atteste de la
rapidité d’évolution des espèces, pas toujours en adéquation avec les décisions
institutionnelles. Ainsi, cette oie est passée du statut d’espèce protégée à celui d’Espèce
Exotique Envahissante en 2011. Elle a subi à ce titre des campagnes d’abattage menées par
L’Office National de la Forêt et de la Chasse.
III.2.c.4. Le Sol
Initialement, les études de sol s’emploient pour l’agriculture et aident à fertiliser
intelligemment les sols. Aujourd’hui il s’agit bien évidemment de terminer un sol mais
également de mesurer les éventuelles pollutions : pesticides / métaux lourds en cas
d’opérations d’aménagement. Il est recommandé d’illustrer sur une carte les sols à fort
potentiel de productivité écologique (qui seront réservés aux espaces verts, au jardinage, à
l’agriculture) de ceux qui présenteraient moins d’intérêt pour le couvert végétal, comme les
sols très minéraux ou rocheux, pollués ou déjà urbanisés. Le diagnostic d’un sol est le pilier de
la constitution d’une palette végétale pérenne à venir, à même d’optimiser le sol et non de le
vampiriser ou même de le transformer par des amendements multiples.
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Paysage et biodiversité : une méthodologie à inventer
Synthèse du diagnostic sol pour ICADE
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Paysage et biodiversité : une méthodologie à inventer
•
Méthode :
Différents prélèvements et coupes sont effectués selon la nature des espaces présents
dans le site. Une fois encore les stations, les coordonnées géographiques précises, la
topographie et l’exposition sont à énumérer. On commencera par observer le profil d’un sol
constitué de différents horizons ou couches. Leur description contiendra des renseignements
sur le drainage, l’altitude, le pourcentage de la pente si présente, la longitude, la profondeur
des racines, le potentiel de compaction, la couleur du sol, l’hydromorphie ou saturation eau
possible, l’aération et la pierrosité exprimée en masse de pierres potentielle en
tonne/hectare. Une analyse physique indiquera la granulométrie, la qualité des argiles et la
quantité de matière organique (MO) présentes dans la texture du sol. La teneur en sable,
limons et argiles d’un sol prévient des capacités de ce dernier. L’agencement de ces fractions
entre elles (la structure) ainsi que l’examen de la capacité de rétention en eau (calcul de la
réserve utile, cf. Lexique) viendront compléter ce diagnostic physique du sol.
Les analyses chimiques affirmeront les considérations premières, si l’on ne peut modifier la
texture d’un sol, la structure peut être améliorée par un réajustement des teneurs en
éléments chimiques. Mesurer l'activité de l'ion hydrogène dans la solution du sol revient à
calculer le PH. Ce fameux indicateur d’acidité ou d’alcalinité est déjà visible par la végétation
qu’accueille un sol. L’agronome a besoin de connaître la Capacité en Echanges Cationiques
pour s’assurer du bon fonctionnement de la structure à travers la qualité de l’humus fabriqué.
Il étudie donc le potentiel de rétention des cations du sol (calcium, magnésium, hydrogène,
potassium, sodium). La disponibilité en oligoéléments ainsi qu’en macroéléments est aussi
mesuré. Elle fait état des « liquidités » en ions minéraux utilisables par les plantes.
Enfin, les activités biologiques de la faune du sol préciseront la qualité du sol. Un sol pauvre
en faune est effectivement un sol peu exploitable par la majorité de la flore en raison de son
infertilité.
III.2.c.5. L’eau
Sans aborder la création de la vie sur terre nous avons besoin de rappeler les trois rôles
essentiels de l’eau auprès de la flore. L’eau assure la transpiration, moteur de la pénétration
des éléments minéraux dans la plante et maintient la turgescence des cellules végétales
responsable de la rigidité des parties souples du végétal. Elle participe au métabolisme et
s’intègre aux composés organiques (de tout être vivant).
•
Méthodologie :
On procédera à l’Inventaire des équipements utilisant de l’eau (fontainerie, piscine,
bassin) puis on en détaillera l’état de fonctionnement de façon à proposer leur optimisation
voire leur remplacement. Visualiser et cartographier les ressources en eau (pluviométrie et
points d’eau) est insuffisant, il faut principalement étudier les sorties d’eau en sachant qu’elle
diffère selon les exigences en eau des êtres et des choses.
•
Cycle de l’eau d’arrosage :
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Paysage et biodiversité : une méthodologie à inventer
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Paysage et biodiversité : une méthodologie à inventer
La pluie ou l'irrigation amène le sol à se saturer d’eau, c’est la capacité maximale de
rétention (quantité maximale d'eau contenue dans le sol avant sa percolation dans le soussol). Seule une fraction de cette quantité est absorbable par la plante, la Réserve en eau
Facilement utilisable ou RFU.
La végétation, la vie dans le sol et le climat consomment cette eau jusqu’au Point de
flétrissement de la plante (état d'humidité du sol ne permettant plus à la plante d'absorber
l'eau). Le rôle du jardinier est de veiller à cet équilibre.
III.2.c.6. Conclusion
Le diagnostic est l’ossature d’un aménagement. Or, il est constitué de nombreux os
aux articulations plus ou moins complexes. Chaque branche du diagnostic en croise une autre.
Il est difficile de parler du sol sans parler de l’eau, impossible de priver les plantes de leurs
milieux dont le sol est emblématique… Le diagnostic d’un site correspond donc à visualiser
l’interaction des éléments qui le constituent. Il n’y a donc pas de hiérarchie dans l’ordre des
expertises. Cependant l’homme est le premier paramètre à prendre en compte. Il faut
comprendre comment il influe sur ces milieux en fonctions de ses besoins (circulation,
stationnement, y compris l’aspect esthétique de son cadre de vie) croisés aux contraintes
techniques et réglementaires qui régissent le bien-vivre ensemble (sécurité pompier, réseaux,
etc.), même ses préjugés, fruits de l’inconscient collectif doivent être inclus (peur des abeilles,
par exemple).
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Paysage et biodiversité : une méthodologie à inventer
Exemple d’un chronoxyle
Plan des couvre-sols en substitution des surfaces engazonnées pour la résidence « les Folies » à
Choisy le Roi (Lab).
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Paysage et biodiversité : une méthodologie à inventer
III.3. L’art des préconisations
III.3.a. Vision transversale
Face à la prise de conscience environnementale actuelle, les métiers du paysage
doivent répondre à plusieurs impératifs parfois légiférés :
•
Limiter l’usage des ressources rares (matériaux non renouvelables, eau, sol) ;
•
Réduire les bilans carbones et les Ilots de Chaleur Urbain;
•
S’engager dans le programme « 0 phyto » ;
•
Concevoir des espaces propices au bien-être des citoyens ;
•
Enrayer la perte de biodiversité dans les milieux urbains et ruraux ;
•
Lutter contre l’artificialisation des sols ;
•
Ancrer les projets dans les programmes de Trame Verte et Bleue ;
• Promouvoir la gestion différenciée.
Nous divisons notre méthodologie de façon partielle, la méthodologie oblige à partitionner
selon des thèmes qui restent intimement liés. Nous distinguons la faune et la flore de l’eau,
du sol et de la gestion différenciée.
III.3.b. La flore et la faune
• Favoriser les écotypes
L’écotype désigne des populations d’une espèce adaptée génétiquement à des conditions
écologiques particulières. Favoriser des espèces végétales régionales permet :
- une production de graines naturelles,
- une utilisation possible du pollen et du nectar par les insectes qui sont dépendants de leur
adaptation aux espèces herbacées locales. En effet, les espèces hybrides et autres cultivars
horticoles répondent à un objectif esthétique: la production de fleurs plus grosses, plus
colorées, à double corolle, ne se ressemant pas (bleuet double bleu, linaire marocaine, mauve
de Mauritanie...). Toutes les modifications ne permettent plus l’accès aux ressources
alimentaires pour des papillons par exemple, dont les pièces buccales sont adaptées à une
pièce florale particulière, ou pour la croissance de la chenille. Il convient donc d’utiliser une
palette végétale locale, peu consommatrice en eau et demandant peu d’entretien. Toutefois
en un lieu donné, et devant une terre mise à nue, malgré les risques que cela comporte, on
peut attendre beaucoup de la banque de semences du sol, voire de la pluie de semences si
quelques praires existent dans les alentours.
• Multiplier les habitats et les ressources
La faune en milieu urbain souffre du manque de nourriture et de gîtes ; de fait ce sont les
espèces les plus promptes aux conditions difficiles qui se développent. Aménagements
possibles :
- Etoffer les palettes végétales (éviter les peuplements mono spécifiques) en place en
les orientant vers les écotypes.
- Créer des haies écologiques; elles constituent des ressources alimentaires pour
l’avifaune et les chiroptères.
- Recouvrir les surfaces nues ou engazonnées par des couvres-sols ou autres végétaux
selon le schéma paysager voulu. Alternatives au gazon, Olivier Filippi.
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Paysage et biodiversité : une méthodologie à inventer
Photo du cheminement sur copeaux de bois issus des déchets de taille de la partie boisée de
la résidence « les Folies » illustrant l’intégration de la gestion différenciée (gestion des
déchets, réduction des interventions humaines et des surfaces imperméables) dans
l’aménagement paysager.
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Paysage et biodiversité : une méthodologie à inventer
- Transformer le plus souvent possible les gazons en prairie. Dans le cas des espaces
résiduels, les planter.
- Garder les arbres morts ou chronoxyles, ils abritent les espèces cavicoles ainsi que les
chauves-souris. Toutefois, rester vigilant quant aux aspects sécuritaires.
- Installer des gîtes pour les oiseaux, les chauves-souris et les auxiliaires de cultures ou
encore un hibernaculum (pierrailles, tuyaux et branches) pour l’hibernation des reptiles et des
amphibiens.
- Favoriser la diversité faunistique et floristique dans l’aménagement induit un
changement de gestion des espaces.
III.3.c. La gestion différenciée
La gestion différenciée ou harmonique tutoie le développement durable. Elle vise à
concilier un entretien environnemental des espaces extérieurs, des moyens humains et du
matériel disponibles avec un cadre de vie de qualité. Au quotidien, cette philosophie est
facilement perceptible notamment dans son approche environnementale : Comment
maintenir la qualité et préserver les ressources en eau ? Comment réduire les consommations
d’énergie et assurer le développement des énergies renouvelables ? Comment réduire nos
productions de déchets et recycler ceux qui peuvent l’être ?
La gestion différenciée consiste à pratiquer un entretien adapté des espaces extérieurs selon
leurs caractéristiques et leurs usages. Il s’agit de faire le bon entretien au bon endroit.
•
Enjeux
- Enjeux environnementaux :
Préserver et enrichir la biodiversité des espaces extérieurs est le moteur de ce type de gestion.
Cela induit une meilleure gestion des ressources naturelles : économies d’eau (cf.III.3.e),
devenir des déchets verts. Limiter les pollutions demeure le nerf de la guerre : produits
phytosanitaires (herbicides, pesticides), bâches plastiques sont remplacés par des traitements
d’origine naturels (purin d’ortie, savon noir, huiles essentielles) pour les maladies. Les
mécanismes naturels de lutte sont encouragés (hôtel à insecte).
- Enjeux culturels :
Cela se traduit par la valorisation de l’identité des paysages (mise en valeur des sites de
prestige et patrimoniaux), la diversification et la transmission du savoir-faire du jardinier.
- Enjeux sociaux :
L’amélioration du cadre de vie des habitants en mettant à leur disposition une diversité
d’espaces conduit également à changer leur regard sur l’environnement, à les sensibiliser
quant aux problématiques environnementales.
- Enjeux économiques :
Parce que les temps sont aux économies, la gestion différenciée recherche la performance des
moyens humains, matériels et financiers. La maîtrise des temps de travail et l’adaptation du
matériel aux tâches d’entretien en sont les fantassins.
• Méthodologie
- Les inventaires quantitatif et qualitatif (cf. III.2)
- La classification par codes d’entretien
42
Paysage et biodiversité : une méthodologie à inventer
Panneau explicatif sur le paillage pour ICADE.
43
Paysage et biodiversité : une méthodologie à inventer
Elle forge le maillon inconditionnel de la gestion différenciée en ce sens qu’une gestion
différente est appliquée pour chacun des codes. Il ne s’agit pas de donner une «valeur» aux
espaces mais de définir précisément les prescriptions d’entretien. Le nombre de codes peut
être plus ou moins important, du plus sophistiqué au plus "sauvage", il est fonction du site.
Exemple :
Code 1, espaces horticoles, espaces de prestige très soignés (ex. abords des bâtiments),
Code 2, espaces jardinés, sollicitant moins d'intervention de l’équipe d’entretien comme les
aires de jeux.
Code 3, espace rustiques d’aspects plus naturels, sans engrais ni traitement phytosanitaire
comme les liaisons piétonnes.
Code 4, espaces naturels, où le jardinier ne fait qu'accompagner la nature (ex. bord de rivière).
Pour chaque code, on déterminera les prescriptions d’entretien : tonte ou fauche, arrosage
ou pas, désherbage manuel ou thermique…
Gestion de la ressource en eau
Nous retrouvons l’importance du choix des végétaux (adaptés peu gourmands en eau : plantes
vivaces, essences locales…) Les plantations en pleine terre avec un paillage biodégradable,
maintenant l’humidité consomment moins d’eau que les jardinières ou les potées suspendues
(Cf.III.3.e)
- Conservation de la diversité floristique et faunistique
Choix des essences locales et diverses, suppression les produits de traitement chimiques et
utilisation des techniques alternatives, fauchage qu’après la montée des graines selon un
calendrier respectueux de l’entomofaune).
- Gestion des déchets
Cela consiste à réduire la quantité de déchets en diminuant ou supprimant certains produits
(ex. bâche plastique), à recycler les déchets verts (déchets de tonte, de taille, les feuilles) en
compost ou en paillage voire en structure mobilière pour le bois issu de l’élagage…
-
III.3.d. Le sol
A chaque type de sol correspond un type d’habitat, des colonies faunistiques et
floristiques variées. Peu de préconisations sont à formuler si ce n’est de respecter la nature
du sol en évitant de créer une palette acidiphile pour un sol alcalin par exemple. Cela suggère
de voir le sol non pas comme une contrainte mais comme la possibilité d’explorer toutes les
potentialités de ce dernier tel quel. Les préconisations font écho à la gestion différenciée des
espaces.
• Méthodologie
- Utiliser des mélanges terre-pierre pour les surfaces nécessitant des fortes portances
comme les parkings.
- Rendre les surfaces perméables, imperméables (gravier, sable). Le béton drainant
aborde le problème de la place de l’eau dans la fabrication des matériaux.
- Protéger le sol et stimuler la vie souterraine par un paillage (fabrication MO)
- Lutter contre l’érosion grâce aux couverts végétaux : la présence permanente d’une
protection physique du sol par le couvert limite grandement les risques d’érosion hydrique.
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Paysage et biodiversité : une méthodologie à inventer
Illustration des risques du labour par le collectif « les semeurs cueilleurs », 2009.
45
Paysage et biodiversité : une méthodologie à inventer
En effet, l’énergie des gouttes de pluies est atténuée par le feuillage (diminuant « l’effet
splash ») et les racines maintiennent le sol en place.
- Eviter les apports même organiques par l’ajout de légumineuses (bonnes productrices
d’azote) et favoriser d’autres symbioses bien connues du sol (mycorhizes).
A proscrire :
- Le labour profond. Il bouscule les horizons du sol et le prive alors des microorganismes. Une dégradation rapide de la biomasse oblige à fertiliser les sols de fait sous
perfusion, plus facilement sujet à l’érosion et au lessivage. Effectué sur moins de 10 cm de
profondeur, le pseudo-labour déchaume, prépare le lit de semences et désherbe
mécaniquement tout en conservant au maximum la structure du sol.
- Eviter les apports même organiques par l’ajout de légumineuses (bonnes productrices
d’azote) et favoriser d’autres symbioses bien connues du sol (mycorhizes).
- Les apports d’amendements par temps de pluie au risque de polluer les eaux lessivés.
III.3.e. L’eau
En milieu urbain, l’eau se rencontre dans les caniveaux, les bassins, les fontaines, les
jets d’eau etc... On évitera tout aménagement coûteux en eau. Cela se traduit également par
le choix de matériaux nécessitant peu d’eau lors de leur fabrication.
Il convient de prévoir un arrosage le plus faible possible ou la restauration de celui en place
en vue de réduire les pertes en eau. L’apport d'eau ou dose, consiste à maintenir la Réserve
en eau Facilement Utile dans le meilleur état possible afin de permettre à la plante de croître
dans les meilleures conditions. La RFU correspond à la quantité d'eau du sol en dessous de
laquelle une plante flétrit, ce qui permet de déterminer les doses d'irrigation. Elle est
directement fonction de l’espèce végétale, de l’état physiologique du végétal, de la texture du
sol, des opérations spécifiques et des saisons. Les apports d’eau seront légers et fréquents en
cas de stress et dosés afin de répondre aux exigences de la culture. Ils sont maximisés à l’aide
d’un substrat filtrant ou compacté. Le piétinement des pelouses et la présence de maladies
accroissent le besoin en eau. Un choix avisé des plantes économise donc l’eau. La
récupération des eaux de pluie par des cuves enterrées ou apparentes demeure une solution
pour l’arrosage à condition que les conditions s’y prêtent et que les moyens financiers
suivent. Le paillage, à coût moindre a la capacité de diminuer la perte en eau des sols.
III.3.f. L’aménagement
Les principaux intéressés, habitants ou usagers méritent des espaces fonctionnels,
sociaux, soient des espaces répondant à leurs besoins recensés au cours de l’enquête. Les
squares multiplient ainsi les fonctions, ils connaissent une vocation sportive, ludique,
divertissante, hygiéniste. Les jardins familiaux entrent ainsi peu à peu dans la capitale portés
par des associations. Enfin, les espaces extérieurs nécessitent un accompagnement
pédagogique pour l’acceptation des nouveaux modes de gestion.
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Paysage et biodiversité : une méthodologie à inventer
Couverture de l’Encyclopédie des plantes bio-indicatrices, Gérard Ducerf
Schéma de l’échelle du potentiel hydrogène
47
Paysage et biodiversité : une méthodologie à inventer
III.4. Les plantes bio-indicatrices, outil de diagnostic multiple
d’après les travaux de Gérard Ducerf
Pour comprendre ce qu’est une plante bio-indicatrice, il nous faut encore traiter du
sol, non comme d’un support de culture quelconque mais comme le fruit d’interactions entre
la biosphère, la lithosphère, l’atmosphère et l’hydrosphère. C’est un complexe vivant en
perpétuelle évolution. Les grandes catégories de sols peuvent être déterminées et visualisées
grâce aux espèces sauvages spontanées qui y poussent. Ce sont elles, les plantes bioindicatrices.
III.4.a. Détermination des sols
Le PH
Le degré d’acidité d’un sol est une des propriétés du sol la plus importante à connaître
avec la texture du sol. La connaissance des deux permet de définir la fertilité d’un sol. Le PH
donne des indications sur les éléments nutritifs et les éventuelles toxicités. A un pH défini
entre 0 et 14, certains éléments nutritifs forment des liaisons différentes que les racines des
plantes sont incapables d’absorber. Des symptômes carentiels apparaissent alors. En cas de
pH trop bas, d’autres éléments, comme le manganèse (Mn), l’aluminium (Al) et le fer (Fe),
sont trop fortement absorbés par les plantes. Pour la plupart d’entre elles, un
empoisonnement surgit suite à l’absorption exagérée de ces éléments. D’autres plantes, en
revanche, désirent une quantité importante de ces éléments. Ce sont celles qu’on qualifie de
plantes acidiphiles. Ces plantes croissent donc de façon optimale sur des sols acides, c’est à
dire à faible pH.
D’un point de vue purement chimique, le pH se situe entre 0 et 14, et on qualifie de
neutre un pH de 7. Un pH inférieur à7 est dit acide, un pH supérieur à 7 est dit basique plus il
y a d’ions H+, plus la solution est acide et plus le pH est bas. Moins il y a d’ions H+, moins la
solution est acide et plus le pH est élevé. Pour les sols de jardins, le pH se situe presque
toujours entre 4 et 8.
-Un sol au PH faible (inférieure à 5) engendre des espèces calcifuges/acidiphiles :
Bouleau blanc (Betula alba), Bouleau pleureur (Betula pendula) Bruyère commune (Calluna
vulgaris), Genêt à balai (Cytisus scoparius).
-Les essences basicoles apparaissent à un PH compris entre 5 et 7 : erable champêtre
(Acer campestre), Aubépine sauvage (Crataegus laevigata), capselle (Capsella bursa pastoris)
luzerne d’Arabie (Medicago arabica), prunellier (Prunus spinosa), herbe au chantre
(sisymbrium officinale), vesce commune (vicia sativa).
-On reconnait un sol alcalin (PH élevé supérieur à 7) aux essences calcicoles suivantes:
brome érigé (Bromus erectus), cornouiller mâle (Cornus mas), picride spinuleuse (Picris
hieracioides), plantain intermédiaire (Plantago media), réséda jaune (Reseda lutea), moutarde
des champs (Sinapis arvensis).
• La matière organique
Une matière organique trop riche en carbone (C/N supérieur à 20), favorisera la
pousse des espèces pré- forestières ou forestières, les ronces (Rubus sp), les églantiers (Rosa
sp), le prunellier (Prunus spinosa), l'aubépine monogyne (Crataegus monogyna), le lierre
(Hedera helix), la garance (Rubia peregrina), le géranium Robert (Geranium robertianum), la
Benoîte des villes (Geum urbanum)….
•
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Paysage et biodiversité : une méthodologie à inventer
A gauche, Bugle rampant (Ajuga reptans) dans une pelouse. A droite, une potentille rampante
(Potentilla reptans).
Plantain lancéolé (Plantago lanceolata).
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Paysage et biodiversité : une méthodologie à inventer
Au contraire, trop riche en azote et en potasse, les espèces nitratophiles et nitritophiles,
comme le grand rumex (Rumex obtusifolius), le liseron des haies (Calystegia sepium), le
géranium à feuilles rondes (Geranium rotundifolium) foisonneront.
• La teneur en eau du sol
L’eau ayant la capacité de remplir les macroporosités du sol, la vie microbienne aérobie
diminue -jusqu’à disparaître totalement dans les sols engorgés-. Les sols en anaérobiose
présentent des hydromorphismes. Le CAH se disloque, les ions aluminium et fer sont libérés
tandis que les bactéries anaérobies produisent des nitrites. Toutes ces substances sont
toxiques pour l’homme et l’animal. Un sol s’engorge naturellement de façon périodique ou
annuelle. L’excès d’irrigation de matière organique animale, le travail du sol par temps
humide, le piétinement du sol ou le surpâturage peuvent provoquer des anaérobioses Des
sols complètement engorgés en eau, en anaérobiose totale, vont favoriser les espèces des
bocages et les nitritophiles comme les joncs (Juncus sp), les épilobes, (Epilobium sp), le liseron
des haies (Calystegia sepium). En Ile de France le bugle rampant (Ajuga reptans) indique une
prairie naturellement humide tandis que la digitaire sanguine témoigne des excès d’irrigation.
• La teneur en air du sol
L’oxygène de l’air contenu dans le sol est inhérent au développement de la vie
microbienne aérobie. La teneur en air du sol est fonction de la teneur en eau du sol. La
vergerette du Canada (Conyza candensis) et la matricaire camomille (Matricaria recutita) se
développent dans des sols limoneux compactés et sujets à la battance. Crépis fétide (Crepis
foetida), potentille (Potentilla reptans) et pissenlit (Taraxum officinale) sont les plantes
emblématiques du phénomène de compactage.
• Les argiles
La quantité et la qualité des argiles peuvent également donner des sols aux
caractéristiques différentes, voire opposées. Un sol bien pourvu en argile et en humus aura
un très fort pouvoir de rétention, sera très fertile, et ne craindra pas la sécheresse ; il favorisera
la fétuque à feuilles de roseau (Festuca arundinacea), la mercuriale vivace (Mercurialis
perennis) et les ails, oignons ou autres poireaux sauvages (Allium sp). S'il contient, au
contraire, très peu d'argile et d'humus, ce qui est le cas dans les sables des fleuves et des
rivières des régions comme la Sologne et les arènes granitiques, il favorisera les espèces des
sols à faible pouvoir de fixation des éléments fertilisants et de l'eau comme la petite oseille
(Rumex acetosella), le souci des champs (Calendula arvensis), la spergule des champs
(Spergula arvensis).
• Les sols équilibrés
Nous pouvons avoir des sols très équilibrés, à pH de 6 à 7, bien pourvus en eau et où
le rapport carbone sur azote de la matière organique, le fameux C/N, est compris entre 13 et
20. Ces sols équilibrés se caractérisent par la présence du mouron blanc (Stellaria media), du
plantain lancéolé (Plantago lanceolata) et de la luzerne tachetée (Medicago arabica).
III.4.b. Calcul
Nous venons de percevoir la richesse d’informations que nous pouvons récolter juste
en observant ce qui pousse spontanément dans le sol. Cependant, il ne faudrait pas avoir de
jugement trop hâtif et dépeindre un sol d’après la présence d’une seule espèce reconnue. Il
convient de procéder à un calcul strict afin de brosser le parfait profil du sol. Ainsi, il convient
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Paysage et biodiversité : une méthodologie à inventer
Dans l’ordre : pâquerette (Bellis perennis), Chénopode Blanc (Chenopodium album), Vergerette de Buenos Aires
(Conyza bonariens).
Dans l’ordre : Chiendent (Elytrigia repens), Géranuim robert (Geranium robertianum), Matricaire (Matricaria
recutita), Luzerne d’Arabie (Medicago arabica).
Dans l’ordre : Mercuriale (Mercurialis annua), Pâturin annuel (Poa annua), Rumex à feuilles obtuses (Rumex
obtusifolius).
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Paysage et biodiversité : une méthodologie à inventer
de procéder au relevé des espaces spontanées selon un zonage, puis d’établir un coefficient
pour chaque espèce :
Espèce présente sur 100% de la surface étudiée → coefficient 5.
Espèce présente à 75% de la surface étudiée → coefficient 4.
Espèce présente à 50% de la surface étudiée → coefficient 3.
Espèce présente à 25% de la surface étudiée → coefficient 2.
Espèce présente de 5 à 25 % de la surface étudiée → coefficient 1.
Espèce présente de 0 à 5 % de la surface étudiée → coefficient 0 à +.
Additionner les coefficients correspondants à une description du sol pour déterminer les
enjeux du sol.
Exemple : Pâturin commun Poa trivialis : coefficient 3, nitrates élevées, MO animale.
Ray grass anglais Lolium perenne : coefficient 3, nitrates élevées, MO animale.
Rumex à feuilles obtuses Rumex Obtusiflius : coefficient 3, nitrates élevées, MO
animale, anaérobiose.
→ On estime le taux de matières organiques parmi les éléments bases, PH, eau, air, matière
organique carbonée, matière organique animale, nitrates, nitrites, blocage du Phosphore,
anaérobioses, fer ferrique, à 9.
III.4.c. Fonctionnement du document élaboré
Nous avons souhaité construire un document de diagnostic des sols d’Ile de France en
milieu urbain utilisable par l’écologue et le paysagiste. Il prend en compte les essences
indicatrices des sols par milieu, en sachant que la même bio-indicatrice peut apparaître dans
différents milieux. Cet outil tourne sur lui-même grâce à un index permettant de considérer
également la plante pour elle-même, voire de connaître les différents milieux dans lesquels
elle s’épanouit. Il permet une analyse rapide du site, puisqu’il recense tous les biotopes
primaires et secondaires, le type de milieu urbain dans le(s)quel(s) la plante croît, les
informations agronomiques que cette même plante dispense et enfin les caractéristiques
écologiques. C’est un avant-goût des expertises naturalistes et paysagères.
La première partie contient les plantes bio-indicatrices trouvables en pleine terre et se
compose de dix points : 1. gazons ; 2. pelouses ; 3. prairies ; 4. talus ; 5.Haies ; 6. plantations
et massifs ; 7. jardins familiaux ; 8. bords des chemins et des routes ; 9. pieds d’arbres ; 10.
Friches.
La seconde présente les bio-indicatrices relatives au minéral : fissures, pieds de mur,
interstices, voies ferrées et ballasts.
La troisième plus restreinte aborde la flore aquatique : canaux, endroits et friches humides,
mares artificielles.
En annexe se trouvent les plantes omniprésentes à prendre en compte dans le calcul de
détermination des sols comme le chénopode blanc (Chenopodium album), le chiendent
rampant (Elytrigia repens), le plantain majeur (Plantago major), le pâturin annuel (Poa annua)
et la vergerette de Buenos Aires (Conyza bonariensis).
52
Paysage et biodiversité : une méthodologie à inventer
53
Paysage et biodiversité : une méthodologie à inventer
IV. Bilan
IV.1. Approche critique de la méthodologie
IV.1.a. Difficultés et orientations générales
Ce guide, qui a l’ambition d’une bible est un travail de longue haleine qui nécessiterait
la concertation de plusieurs corps de métiers. En effet, le paysage est pensé en référence à
l’histoire des villes, aux démarches architecturales et urbanistiques. En outre, le
développement de sa partie « subjective », relative aux perceptions et représentations,
s’effectue par des passerelles avec d’autres disciplines de sciences sociales. Les aspects
techniques doivent être étayés par une équipe constituée d’écologues, d’agronomes, de
paysagistes, de sociologues, de géographes. D’autant plus que le paysage meut dans le temps
et l’espace selon les besoin des usagers, et les politiques diverses menées. Des découvertes
en ingénierie végétales sont attendues, les outils d’appréhension des espaces sont en
perpétuel perfectionnement (logiciel SIG, etc.), et les êtres vivants n’ont pas fini de nous
surprendre. Il est donc ardu de constituer une méthodologie seul et en un court laps de
temps. Il s’agit ici plutôt de pistes de connaissances témoignant d’une vision paysagère de son
époque, en transition écologique. Nous noterons le manque de temps imparti dans cette
mission de recherche qui n’en est finalement qu’à ses balbutiements.
L’objectif écologique que la méthodologie poursuit doit être approfondi par un volet
communication. En effet, il est encore difficile de convaincre les maîtres d’ouvrage quant au
coût imposé par la restauration écologique des espaces. Cependant l’ouvrage proposé par
Plante et Cité traite cet aspect, il serait donc envisageable de créer des partenariats entre les
acteurs de l’aménagement paysager de façon à élaborer une charte d’engagement à même
de prendre en compte les enjeux réels du développement durable. Ceci aurait l’avantage de
garantir la bonne prise en compte des espaces extérieurs existants et de défendre des projets
axés sur la biodiversité dont l’homme fait partie. Nous avons conscience que cela requiert un
grand investissement dans la formation des jardiniers et des paysagistes. Le milieu du
paysagisme est malheureusement trop scindé encore entre « architecte du vivant »
naturaliste et jardinier de formation alors même qu’ils traitent des mêmes interactions. Une
méthodologie réunissant tous ces acteurs autour d’un langage commun et du bien commun
permettrait de pérenniser les actions paysagères centrées sur le bien-être des hommes en
adéquation avec celui de la faune et de la flore.
IV.1.b. Le risque du regard systématisé
Le guide ne s’érige pas en réponse exhaustive à l’aménagement paysager écologique.
Il propose des solutions à titre d’exemple mais ne saurait remplacer le travail de réflexion et
d’innovation nécessaire dans ce domaine. L’un des risques les plus encourus par le paysage
est bien la standardisation. Nous observons de plus en plus l’uniformisation des palettes
végétales à travers la France ainsi que des copier-coller de réalisation (la réutilisation de
friches industrielles en lieux culturels, les transformations des berges en lieux conviviaux ou
encore l’implantation systématique de ronds-points et de portails pour protéger et sécuriser
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Paysage et biodiversité : une méthodologie à inventer
Principe d’aménagement de l’éco quartier Baudens à venir à Bourges (18), Atelier Ruelle,
Principe d’aménagement de l’éco-quartier Montévrain dans les Yveline (77), Paula, 2014
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Paysage et biodiversité : une méthodologie à inventer
les riverains). L’urbaniste Jean Paul Blais rappelle dans un article sur les actualités des modèles
urbanistiques à quel point le paysage est soumis à l’effet de mode, il porte des tendances
lorsqu’il n’est pas simplement un accessoire. Plus encore, les rivalités entre territoire seraient
à l’origine de la banalisation de l’urbanisme. Chaque éco-quartier s’érige en modèle, repris de
part et d’autre, seul un élément de la signature architecturale diffère. Il est entendu que les
territoires présentent les mêmes types repérables d’organisations urbaines, telles que le
rapport centre-périphérie, la sectorisation, les mobilités et les temporalités des villes.
Cependant aborder encore l’espace urbain comme un produit contraint par les réalités d’un
marché soumis à la concurrence relève de l’hypocrisie Les pressions sont multiples : elles
peuvent être politiques, économiques, sociales (la « demande locale ») ou héritées de
simplifications des réalités écologiques. Des gestes d’aménagement urbain apparaissant
comme des idées de bon sens, (transformation d’une autoroute en boulevard urbain, création
d’une trame verte et bleue pour mieux respirer en ville) ont le potentiel des injonctions pétries
de références forgées ailleurs plutôt que des propositions nourries d’une analyse fine des
spécificités du territoire. Aussi ce guide doit-il être manipulé avec intelligence et recul, surtout
en ce qui concerne les préconisations. Une application forcenée de la méthodologie ne
permettra pas de soulever les spécificités d’un espace du point de vue humain et temporel. Il
ne faut pas omettre l’évolution des besoins humains face à l’urbanisation croissante et aux
conditions environnementales dégradées.
IV.1.c. Retour sur les bio-indicatrices
L’élaboration de ce document de travail a été complexe. Habitués à jongler avec des
palettes végétales horticoles, la plupart des paysagistes connaissent peu la flore spontanée.
S’ils distinguent avec facilités les divers types d’espaces urbains, leur savoir naturaliste
demeure lacunaire. Quant aux écologues, la dissociation des espaces et la notion de milieux
urbains sont encore peu inscrites dans leur processus de réflexion. Ces derniers opèrent des
inventaires, indiquent quelques caractéristiques des espèces observées mais ne donnent pas
d’analyse globale des écosystèmes en place. Les bio-indicatrices en tant qu’outil de
reconnaissance du sol et des milieux et compteur de services écosystémiques doit être lisible
par tous, pour celui qui connait la flore spontanée d’Ile de France, pour celui qui la connait
peu ou pas, pour celui qui n’a aucune connaissance en agronomie. La portée pédagogique du
lexique ainsi que la constitution même de cet outil sont primordiales. D’abord classées sous
forme de liste alphabétique, j’ai dans un second temps redistribué les plantes selon le genre
d’endroit dans lesquels on peut les trouver. Cette pratique induit une certaine redondance qui
pourrait obscurcir le document. Ainsi le Cerfeuil des bois (Anthriscus sylvestris) d’abord
originaire des lisières et clairières engorgées en matière organique archaïque se retrouve dans
les terrains vagues, les bords de chemins et de routes ainsi que dans les prairies d’élevage en
milieu plus rural. Lorsque la plante est citadine elle côtoie les pieds d’arbres, les talus, les haies
et les zones délaissées. Admettons que l’observateur décide de chercher chaque plante bioindicatrice et d’en déduire les milieux, il perdra un temps fou et sera dans une quête d’effort
botanique sans fin. L’outil de travail aura complexifié le diagnostic. Or, par souci de rapidité et
d’efficacité, la reconnaissance doit être facilitée tout en permettant des recherches plus
spécifiques. Cet enjeu a fait l’objet de deux réunions avec Céline Desmoulière et Vincent Hulin,
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Paysage et biodiversité : une méthodologie à inventer
Couverture Eloge des vagabondes, Gilles Clément, Nil
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Paysage et biodiversité : une méthodologie à inventer
respectivement chef du pôle PIV et chef du pôle Recherche. Il a été conclu d’agrémenter les
bio-indicatrices de planches de reconnaissance tant pour les plantes que pour les types
d’espaces. Ces planches présenteront un dessin botanique détaillé et des photos in situ, c’està-dire dans tous les endroits aptes à son développement. En parallèle les informations
écosystémiques devront être précisées. Il ne suffit pas d’indiquer qu’une plante est
consommée par un oiseau, il convient également de savoir quels oiseaux…Le plantain lancéolé
si souvent tondu à l’avantage de nourrir la quasi-totalité des oiseaux indigènes et même les
canaris. Une telle précision peut amener un maître d’ouvrage à changer de pratique de
gestion. Faute de temps, ce labeur n’a pu aboutir. C’est donc un outil incomplet que nous
livrons. Toutefois, il constitue une piste non négligeable dans le diagnostic et dans la
compréhension voire dans la prise en compte des interactions entre les espèces et leur
environnement au cours des aménagements.
C’est d’ailleurs, pour cette première raison que je me suis attachée à découvrir et apprendre
cette flore révélatrice de secrets telluriques.
IV.2. Bilan personnel
IV.2.a. Le goût des plantes
Les plantes bio-indicatrices sont pour la plupart des plantes adventices voire même des
plantes exotiques envahissantes (renouée, raisin d’Amérique etc.,). J’avoue avoir un faible
pour ces espèces. Leur manière de croître est impressionnante et me semble témoin d’un
brassage fantastique. J’ai toujours voulu savoir comment elles poussaient et pourquoi. Les
plantes sauvages ont toujours suscité mon intérêt, je souhaitais les aborder à la moindre
occasion. L’éloge des vagabondes de Gilles Clément avait commencé à faire naître cette
tendresse qu’il fallait bien rationnaliser… Cet ouvrage s’intéresse aux fondements des plantes
exotiques envahissantes qui n’ont pas vocation à être appréciée surtout en temps de crise de
diversité. Gilles Clément y expose l’histoire de ces plantes et nous raconte ces rencontres avec
ces « pestiférées ». Pour les défendre, ou ne serait-ce que pour prouver que toute chose a sa
place dans le monde, je devais mieux connaître les plantes et leurs interactions. Je cherchais
des outils pour expliquer qu’une plante adventive est un atome de la diversité. Quant aux
plantes exotiques envahissantes, leurs intérêts écologiques sont présents mais je ne me
hasarderais pas non plus à les ériger comme les maillons garants de la diversité…
Naturellement, en abordant le diagnostic, j’ai pensé à Gérard Ducerf, ce botaniste passionné
qui cherche à démontrer « l’utilité » d’un végétal de A à Z. Ma démarche est assez
opportuniste en ce sens que j’ai pu étudier ce qui aiguisait ma curiosité sous prétexte d’en
faire partager les résultats. J’ai bien conscience que cette soif botanique n’aurait pu être
étanchée dans un bureau d’étude strictement privé. Bien qu’inabouti, cet exercice de
recherche a été bien accueilli par les membres de CDC Biodiversité.
Personnellement, il a orienté mon parcours universitaire. Effectivement j’ai à cœur désormais
d’étudier les plantes dans leur relation avec l’homme. Sans cette année, je n’aurais pu prendre
conscience de mon réel engouement pour le travail de recherche quel que soit mon aptitude
dans ce domaine et dans bien d’autres comme le dessin.
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Paysage et biodiversité : une méthodologie à inventer
Dessin noir et blanc (rotring sur claque) puis dessin en couleur (marker et correcteur, unifiés
sur photosphop). Illustration réalisée pour ICADE (panneau pédagogique)
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Paysage et biodiversité : une méthodologie à inventer
IV.2.b. Le goût du rotring
Le dessin à la main est souvent troqué contre le dessin assisté par ordinateur,
nettement moins chronophage. J’ai appris une technique de dessin consistant à travailler au
rotring, sorte de stylo à encre de Chine dont la pointe très fine et fragile glisse sur les calques
sans baver. Après avoir dessiné, le détail d’une plante, un animal ou un paysage au crayon de
papier puis au rotring, il convient de :
- scanner le dessin,
-le mettre au propre sur « photoshop » (logiciel Adobe retouche, de traitement et de dessin
assisté par ordinateur),
-l’imprimer,
-le colorer.
Il est parfois nécessaire de texturiser les couleurs sur le dit logiciel. Cette technique offre
l’avantage d’avancer élément par élément grâce à la superposition. Le caractère non définitif
de l’image imprimée permet de tester les ambiances et de gommer les erreurs sans retourner
à la case départ. J’ai pris un plaisir fou à ce genre de travaux.
Charles Baudelaire disait au cours du Salon de 1846 « Le dessin est une lutte entre la nature
et l’artiste, où l’artiste triomphera d’autant plus facilement qu’il comprendra mieux les
intentions de la nature. Il ne s’agit pas pour lui de copier, mais d’interpréter dans une langue
plus simple et plus lumineuse ». Mes dessins -éloignés des œuvres d’art- correspondent
finalement à une forme de lutte entre la compréhension du vivant et la retranscription de ce
dernier. Ce n’est pas tant une lutte avec la nature, c’est une lutte avec l’objectivité. Cette
forme de connaissance et de partage m’était jusqu’alors inconnue. J’étais assez complexée
par mon niveau de dessin. Petit à petit, j’assume mes traits y compris dans leur imperfection.
Il n’y a bien qu’en dessinant qu’on apprend à dessiner… En me débridant un peu sous les
recommandations de mon maître d’apprentissage, j’ai pris un plaisir fou à ce genre de travaux.
IV.2.c. le goût de la liberté, celui de la confiance et du soutien
J’ai bénéficié au sein du pôle PIV de chaleureux encouragements. La méthodologie m’a
donné du fil à retordre compte tenu de mon expérience quasi inexistante en matière de
paysagisme. Le secours de paysagistes était le bienvenu, tant dans le fond que dans la forme.
Dialoguer sur les projets en cours de chacun enrichit finalement les projets de tous. Le projet
LAB fut une étape peu agréable : les défauts de communication avec EFIDIS se faisaient
nombreux, la pression des « sprints » nous transformait en cocotte-minute, les arbitrages
cinglants de la caisse des dépôts ne laissaient pas indemne, les désillusions écologiques et
paysagères pullulaient…Ce n’est qu’à la fin que j’ai pu cerner le projet dans lequel je travaillais.
En fait, le projet LAB n’a pas été conçu pour être novateur de biodiversité mais pour tester la
compatibilité entre ce qui existe déjà en aménagement écologique et le quotidien des
résidents. Cette réflexion n’est pas sortie de la cuisse de Jupiter, il a fallu en parler avec mes
collègues pour qu’enfin elle s’immisce dans mon esprit de façon durable. Ils m’ont appris à
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Paysage et biodiversité : une méthodologie à inventer
Dessin d’un pissenlit pour ICADE
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Paysage et biodiversité : une méthodologie à inventer
prendre du recul sur les situations, ils ont réussi à me faire comprendre qu’une approche
frontale et entière était source de conflits inutiles et énergivores.
Tout en me soutenant, ils ont eu confiance en mes capacités. Ainsi j’ai été sollicitée pour
l’élaboration de palettes végétales et de dessins, alors même que mes pieds foulaient depuis
peu l’arène des acteurs de l’aménagement. Ma tutrice me laissait choisir mes techniques de
rendu de projet. J’étais complètement libre, mais pas lâchée en pleine nature. Un solide
harnais de conseils et d’attention concernant le travail que j’effectuais m’a permis de me
tromper de temps à autre –jamais de manière catastrophique- et par là même d’apprendre
durablement. Ayant rencontré des difficultés avec la perspective en dessin, les métrés et
certains logiciels, j’ai toujours trouvé un interlocuteur pour m’aider et m’orienter. Les erreurs,
les appréhensions et même les bonnes idées faisaient l’objet de discussions constructives et
quotidiennes avec ma tutrice.
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Paysage et biodiversité : une méthodologie à inventer
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Paysage et biodiversité : une méthodologie à inventer
LEXIQUE
ACTIVITE BIOLOGIQUE ensemble des interactions des microorganismes du sol avec les
matières organiques et les racines des plantes. Les mesures quantifient, en particuliers,
l’activité enzymatique des bactéries et les champignons. L’activité biologique d’un sol est
comparée à l’activité biologique de référence qu’il faut atteindre pour ce type de sol.
ADVENTICE : Plante spontanée indésirable dans un espace de culture précis.
ANAEROBIOSE : phase caractérisée par l’absence d’oxygène et donc la prolifération de
bactéries anaérobies. La diminution de vie microbienne aérobie rompt les échanges entre le
sol et la roche-mère à l’origine de la régulation de la teneur en eau et en éléments Mg
(magnésium), P, K du sol. Cela entraine inondations, ruissellements, lessivages et érosions.
ARENE GRANITIQUE : résultat de l’altération du granite par hydrolyse (roche plutonique
composée à 60% de feldspaths, à 25% de quartz et à 15% de micas). Sorte de roche meuble
voire de sable constitué de quartz inaltérables, de cristaux de feldspaths altérés et de
paillettes d’argile (silicates d’alumine hydraté).
ARGILES : ce sont les particules les plus fines des sols. Leur nature dépend du climat et de la
composition de la roche mère. Leur extrême importance dans les sols tient à leur nature
colloïdale et à leur structure en feuillets qui déploie une très grande surface permettant ainsi
de mettre en réserve les éléments nutritifs du sol et d’offrir un contact étroit avec les microbes
du sol.
ARRETE PREFECTORAL DE PROTETION DE BIOTOPE (APB): acte juridique interdisant, sur un
périmètre restreint, toute action susceptible de porter atteinte aux milieux abritant des
espèces protégées. L’APB peut concerner un ou plusieurs biotopes sur un même
site (forêt, zone humide, dunes, landes, pelouses, mares...). Il est sous réserve du code rural,
du code de l’environnement, et de la circulaire° 90-95 du 27 juillet 1990 relative à la protection
des biotopes nécessaires aux espèces vivant dans les milieux aquatiques.
BACTERIE AEROBIE : vieilles de 400 millions d’années, elles ont besoin d’oxygène pour se
développer et sont plus fragiles que les bactéries anaérobies. En participant à la mise en œuvre
des oligo-éléments, elles nourrissent les plantes. Elles utilisent l’azote (N) et le potassium (k)
pour décomposer la lignine et la cellulose (actrices de la minéralisation primaire). Leur activité
diminue lorsqu’elles subissent le manque ou l’excès d’eau, d’oxygène ou de MO.
BACTERIE ANAEROBIE : plus anciennes que les bactéries aérobies plusieurs milliards d’années)
et plus résistantes, elles résident dans les couches profondes du sol où elles altèrent la rochemère pour la transformer en sol. Elles régulent la circulation de l’eau (du bas vers le haut en
condition sèche et inversement en période humide) et équilibrent la teneur en éléments
minéraux du sol en cas de carence ou de surplus (migration des horizons). Les labours
profonds détruisent ces bactéries en remontant la terre du « sous-sol » à la surface, laissant
le sol à l’état primitif avant l’arrivée des bactéries…
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Paysage et biodiversité : une méthodologie à inventer
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Paysage et biodiversité : une méthodologie à inventer
BRF : technique consistant à épandre une couche de 4 à 8 cm de bois de rameaux de feuillus
(chêne, hêtre, vigne, etc…), broyé grossièrement. Le BRF stimule l’activité des champignons
du sol, puis de toute la biomasse.
CATION : Atome ayant perdu un ou plusieurs électrons. La charge globale de l'édifice chimique
est alors positive. C’est le cas de l’aluminium (Al3+), du magnésium (Mg2+), du calcium (Ca2+)
et de beaucoup d’éléments fixés par le CAH du fait de sa charge négative
CEC (Capacité d’Echange en Cations) : est la quantité de cations que le sol peut retenir sur son
complexe adsorbant à un pH donné. Chaque sol a une CEC bien précise qui correspond à la
somme des principaux cations : calcium, potassium, magnésium, sodium et ammonium
appelée "somme des bases échangeables". Plus le sol est riche en argile et matière organique,
plus sa CEC est importante. La CEC totale du sol correspond à la somme de la CEC des argiles
ajoutée à la CEC de la matière organique (MO). Elle est exprimée en mEq (milliéquivalents)
par 100 grammes de sol.
COMPLEXE ARGILO-HUMIQUE : aussi appelé "complexe adsorbant", est l'ensemble des forces
qui retiennent les cations échangeables (Ca2+, Mg2+, K+, Na+, etc.) sur la surface des
constituants minéraux et organiques des sols (le mélange de minéraux argileux et d'humus
constituant le "complexe argilo-humique" à proprement parler). Ces cations peuvent
s'échanger avec la solution du sol et les plantes et constituent le réservoir de fertilité chimique
du sol, c'est ce qu'on appelle la capacité d'échange cationique.
CLAIRIERE : (du latin clarus, clair), espace situé dans la forêt, dénué d’arbres et inondé de
soleil.
DESHERBAGE : Retrait mécanique ou manuel des adventices (désherbage chimique
déconseillé). Il peut être curatif ou préventif.
ENGRAIS MINERAUX : d’origine minérale naturelle, ils proviennent de gisements (potasse,
phosphate...) et sont à ce titre non renouvelables ou encore issus de l’industrie chimique. Leur
action « coup de fouet » ne compense pas les précautions à prendre dans le cadre de leur
utilisation (risque de pollution des sols par lessivage ou excès d’engrais, normes européennes
et françaises à respecter).
ENGRAIS ORGANIQUES : Principalement issus de déchets naturels, végétaux ou animaux. Ils
libèrent progressivement les éléments nutritifs (azote, phosphore, potassium) mais aussi les
oligoéléments essentiels à la bonne santé de plantes (cuivre, zinc, fer, bore...). L’assimilation
étant plus lente, il n’y a pas de risque de pollution des sols par lessivage.
ENGRAIS VERTS : principalement issus de déchets naturels, végétaux ou animaux. Ils libèrent
progressivement les éléments nutritifs (azote, phosphore, potassium) mais aussi les
oligoéléments essentiels à la bonne santé de plantes (cuivre, zinc, fer, bore...). L’assimilation
étant plus lente, il n’y a pas de risque de pollution des sols par lessivage.
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Paysage et biodiversité : une méthodologie à inventer
FAIM D’AZOTE : proportion d’azote plus faible que la quantité de carbone.
FORET DE PLAINE ET DE PLATEAU CALCAIRE : milieu productif en biomasse et en MO
végétale, riche en carbone. La surface étant végétalisée en permanence, la minéralisation
s’effectue lentement au profit d’une fossilisation de la MO végétale qui devient alors MO
archaïque. Les plantes herbacées qui poussent sur cet espace apprécient l’ombre (les
héliophiles croissent en lisière ou dans les clairières). Ces espèces ont besoin de MO
archaïque pour lever leur dormance.
FRICHE : dans ce document, qualifie des sites délaissés puis recolonisés par la végétation
spontanée. Synonyme également de terre non travaillée depuis plus d’un an.
FRUTICEE : (du latin frutex, arbrisseau) formation végétale stable dans laquelle dominent les
arbustes (souvent soumise au stress climatique et édaphique).
En basse et moyenne altitude sur les sols superficiels et rocheux on retrouve le buis (Buxus
sempervirens), la lavande (Lavandula angustifolia) et le thym (Thymus officinalis). Le genêt
cendré (Genista cinerea) préfère les anciennes terrasses; la callune (Calluna vulgaris) les sols
profonds et acides.
En altitude, les fruticées correspondent aux landes à argousiers (Hypophae rhamnoides), à
raisins d’ours (Arctostaphylos uvaursi), à myrtilles (Vaccinium myrtillus, Vaccinium
uliginosum), à rhododendrons (Rhododendron ferugineum), à genévriers nains (Juniperus
nana).
Parmi ces arbustes on note également la présence des espèces suivantes : aubépine
monogyne (Crataegus monogyna), carline à feuilles d’acanthe (Carlina acanthifolia),
primevère officinale (Primula veris), épine noire (Prunus spinosa), épine-vinette (Berberis
vulgaris), prunier de Briançon (Prunus brigantiaca), pirole à feuilles rondes (Pyrola
rotundifolia), pivoine officinale (Paeonia officinalis).
GAZON : (de l’aragonais et du crémonais allem waro, gazon bas), formation herbacée de
graminées tondues à 3-5 cm de façon à créer un tapis vert homogène et uniforme d’espèces
rases et fines (pâturin, ray grass, agrostis, fétuque).
GLEY : Horizon ou sol à engorgement prolongé par une nappe d’eau phréatique, privé
d’oxygène (anaérobiose) et de fer, défavorable aux végétaux (asphyxie).
GRANULOMETRIE ou texture correspond à la répartition des particules de minéraux par
catégorie de grosseur. Ces catégories comprennent les argiles (< 2μm), les limons (de 50 μm
à 2 μm), les sables (de 2mm à 50 μm).
HORIZON : couche du sol plus ou moins épaisse et sensiblement parallèle à la surface. Leur
succession constitue le profil du sol.
HUMIFICATION : ensemble de transformations biologiques et chimiques de la litière organique
en humus.
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Paysage et biodiversité : une méthodologie à inventer
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Paysage et biodiversité : une méthodologie à inventer
HUMUS : (terre, en latin), matière organique résultant de la transformation des débris
végétaux, à l’origine de la fertilité des sols et de la stabilité de leur structure (allié à l’argile
pour former le CAH).
JACHERE : (du latin gascheria), autrefois mise en repos d’une terre labourable dont le but était
de détruire « les mauvaises herbes » et les parasites ainsi que de reconstituer les réserves en
eau et en MO. Cela correspond aux terres non travaillées pendant une période inférieure à
une année.
HYDROMORPHISME : processus d’évolution d’un sol saturé en eau régulièrement
(changement des propriétés physiques). Dissociation du CAH, libération d’aluminium, de fer
ferrique et production de nitrites par les bactéries anaérobies (rapidement lessivées). Ces
substances sont toxiques pour tous les êtres vivants.
LISIERE : (de l’allemand, lista, bordure), parties extrêmes d’une forêt ; en sylviculture, désigne
la limite entre deux formations végétales différentes.
MACROELEMENTS minéraux N, P, K : nutriments primaires de la plante
N (azote) : assimilable sous forme d’ion nitrate (No3-) et d’ion ammonium (NH4+),
constituants des acides nucléiques, des protéines, de certaines phytohormones et de la
chlorophylle.
P (phosphore) : assimilable sous forme d’ion phosphate (PO43-), constituant des acides
nucléiques, de certaines graisses, de coenzymes.
K (potassium) : assimilable sous forme d’ion potassium (K+), fonctionnement des stomates et
de la paroi cellulaire.
MATIERE ORGANIQUE VEGETALE/ARCHAIQUE : matière décomposée ou en cours de
décomposition d’origine végétale riche en carbone. Les bactéries aérobies la transforment en
humus (minéralisation primaire), en présence d’azote et de potassium. Privés de ces éléments,
la vie microbienne s’éteint au profit des bactéries anaérobies, qui vont carboniser la matière
organique la rendant ainsi « archaïque » (tourbe, fossilisation MO).
MATIERE ORGANIQUE ANIMALE : matière décomposée ou en cours de décomposition
d’origine animale. Composts de fumier de cheval (riche en carbone, proche MOV, besoin
d’apport de fumier de bovins, de volailles, de moutons pour équilibrer), de moutons (fourni
en azote mais alcalinisant), de volailles (azote, phosphore et potassium, très intéressant pour
les fruitiers), de porcs (dangereux pour la vie microbienne).
MAQUIS ET GARRIGUE : En région méditerranéenne, résultat d’une destruction ou/et d’une
régression des forêts due à l’érosion. Phénomène accru par les incendies sauvages.
MARECAGE ET TOURBIERE : riches en MO se transformant en tourbe et gorgés d’eau
(anaérobiose et hydromorphisme).
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METAUX LOURDS : cuivre, fer, chrome, bore, plomb, mercure, cadmium, arsenic, nickel,
cobalt, vanadium, sélénium, molybdène, titane, manganèse.
MYCORHIZE : symbiose entre un végétal et un champignon. En s’associant au système
racinaire des plantes, les champignons mycorhiziens créent un réseau dans le sol permettant
d’accroître la capacité d’absorption de l’eau et des éléments nutritifs comme le phosphore, le
cuivre et le zinc. Ils protègent également la plante de différentes attaques microbiennes. En
échange le champignon reçoit des sucres. Ceci ayant pour effet d’améliorer la croissance et
d'assurer le développement rapide de chacun. En échange le champignon reçoit des sucres.
NATURA 2000 : Protection européenne de sites naturels européens, terrestres et marins,
identifiés pour la rareté ou la fragilité des espèces sauvages, animales ou végétales, et de leurs
habitats. Elle concilie préservation de la nature et préoccupations socio-économiques. En
France, le réseau Natura 2000 comprend 1758 sites.
NITROPHILE : caractéristique d’une plante qui se développe préférentiellement sur les sols ou
dans les eaux riches en nitrates. Ce nitrate provient généralement de la décomposition
d’apports organiques liés aux activités humaines (engrais, dépotoirs, etc.)
PELOUSE : (du latin pilosus, velu) formation herbacée de graminées ne dépassant pas 30 cm.
Ce tapis de verdure plus ou moins régulier (peut être parsemé) est surtout caractéristique des
terrains calcaires.
PRAIRIE : culture de plantes fourragères (graminées et légumineuses). Cela peut désigner une
pelouse plus ou moins naturelle traitée par des tontes régulières mais espacées.
PRAIRIE, PELOUSE ALIPINES MONTAGNARDES : le climat rigoureux bloque l’activité
bactérienne, provoquant ainsi un engorgement en MO non décomposée.
PRAIRIE DES PLATEAUX CALCAIRES : sol le plus riche en argile, le plus aéré, le plus fertile. Zones
défrichées et transformées en cultures ou prairies d’élevage depuis le néolithique.
Aujourd’hui ce sont des zones de cultures industrielles intensives.
RESERVE NATURELLE : aire protégée classée bénéficiant ainsi d'une réglementation dans le
code de l’environnement permettant leur protection et une éventuelle gestion
restauratrice. On compte 310 réserves naturelles en France.
TOURBE : substrat d’origine naturelle (tourbière) utilisé à la plantation des végétaux pour
améliorer la capacité de rétention en eau du sol, pour enrichir le sol ou encore pour en
diminuer le PH. NB: Il faut attendre 100 ans pour qu’une tourbière fabrique 1 cm de tourbe.
VALLES : (du latin vallis) : dépression allongée plus ou moins évasée comprise entre deux
montagnes. Lorsqu’elle est creusée par une rivière elle prend la forme d’un « V ».
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VALLES ALLUVIALES : zones profondément bouleversées par les crues, recevant en
permanence des apports extérieurs et se décomposant en 4 strates : sables et dunes ; limons
et argiles ; vasières et bras morts ; forêts alluviales (seule strate assez stable).
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ANNEXE
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Panneau pédagogique pour la mission LAB
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Exemple d’une fiche thématique sur les plantes envahissantes
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LISTE DES REFERENCES
-
Dictionnaire des jardins et paysages, Philippe Thébaud.
Eléments méthodologiques de diagnostic paysager utilisant les systèmes d’information
géographique, Joël Chételat.
Encyclopédie des plantes bio-indiactrices volume 1, Gérard Ducerf.
Guide méthodologique de conception de projet : conception écologique d’un espace
public paysager, « Plante et Cité ».
Pratiques environnementales dans les espaces verts, Mairie de Paris.
Sauvages de ma rue, MNHN.
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