temps, les élites politiques africaines semblent ne pas se soucier d’apporter les vraies réponses à
cette crise. Ce qui justifie que la plupart des Africains sont généralement pessimistes s’agissant de
la capacité des élites à sortir le continent de l’ornière
.
Depuis les indépendances, plusieurs pays africains ont connu une pauvreté, une inégalité et un
chômage croissants. Au vu de leur incapacité à traiter ces problèmes et de leurs échecs dans ces
domaines, certains chercheurs ont décrit les élites politiques africaines comme souffrant de
« paralysie politique ». Ce qui doit être considéré comme une partie des problèmes généraux de
développement de l’Afrique. Selon Patrick Bond (2012), « la paralysie de l’élite est un élément
crucial dans l’injustice climatique ». Au moment où la pression exercée par les organisations de
lutte pour la justice climatique monte sur les Nations unies et les gouvernements africains, les
élites politiques ont montré une préférence inconditionnelle pour les stratégies néolibérales de
traitement du changement climatique. Ces organisations font pression en vue de l’adoption d’un
système de production et de consommation énergétiques qui accorde une faible place aux
combustibles fossiles. Mais l’élite politique africaine demeure peu sensible à cette demande. Elle
est programmée systématiquement pour promouvoir des solutions néolibérales aux problèmes de
société. Dans la mesure où la question écologique prend une part prépondérante sur l’agenda
politique du développement en Afrique, la question de savoir comment en finir avec ces excès est
devenue cruciale.
Dans le contexte d’analyses dialectiques
des interrelations
entre l’économie écologique,
l’écologie politique et les mouvements sociaux en Afrique, les écologistes politiques ont accusé
Marx (1885) d’avoir négligé les questions environnementales – ou la nature – dans son analyse de
la reproduction du capitalisme. Il discute du flux circulaire de la production capitaliste et de la
crise sans la composante constituée par la crise environnementale. D’où une certaine tendance à
considérer la nature comme un don. Cette position a été critiquée par les écologistes politiques
.
Mais la bonne nouvelle est que nous pouvons établir un lien entre le marxisme, l’écologie
politique, l’économie écologique et le processus de formation des mouvements sociaux. Comme
certains chercheurs du mouvement social l’affirment : en l’absence de mouvements ouvriers
révolutionnaires au XXIe siècle, les mouvements environnementaux peuvent jouer un rôle
important dans l’orchestration d’un changement social radical (Clark et Foster, 2010).
Partant de là, cet article examine le rôle que des mouvements sociaux radicaux en faveur de la
justice climatique peuvent jouer en Afrique lorsqu’il s’agit d’atteindre des objectifs politiques,
Le musicien nigérian Femi Anikulapo Kuti représente clairement cette classe d’Africains, si l’on en juge par
sa réponse à une récente interview avec un journaliste. Il s’est exprimé sur la célébration de son cinquantième
anniversaire comme suit : « Je pense que c’est important pour nous parce que la plupart d’entre nous meurent
jeunes ici au Nigéria. Si vous survivez jusqu’à 50 ans, ce n’est pas négligeable du fait du stress dans notre
pays – pas d’électricité, des soins de santé inexistants, on ne peut pas nourrir sa famille, rien ne marche dans
ce pays. C’est si stressant. » (Daily Independent, 2012).
Bien qu’il existe divers courants de la dialectique de nos jours, cette notion est utilisée dans cet article pour
faire référence à la science du mouvement, de la contradiction et de l’opposition qui relaye l’idée de
l’inévitabilité du changement. En tant que moyen de scruter le monde, la dialectique est destinée dans la
théorie marxiste à orienter les mouvements ouvriers dans leurs luttes pour une société juste et équitable.
Selon Rob Sewell, elle est similaire à une boussole ou à une carte qui permet aux gens de s’orienter dans le
tourbillon des événements et leur permet de comprendre les processus sous-jacents qui façonnent le monde
(Sewell, 2002). La théorie marxiste classique de la crise économique suit cette pensée dans laquelle
l’inévitabilité de la crise du capitalisme mènera à des régimes politiques supérieurs et plus qualitatifs. Le
processus est défini par la logique du matérialisme dialectique qui se fonde sur l’idée de la contradiction ou
de l’opposition dans son ensemble (négation de la négation). Voir McNall (1979).
Un aspect de la logique dialectique, c’est la certitude du changement. Quel est le rôle que les mouvements
sociaux doivent jouer dans ce processus ? Ils sont des agents du changement par rapport à leur engagement
direct et indirect dans le processus de changement.
Pour une vision alternative de la pensée marxiste dans sa relation avec l’écologie, voir Foster (2009 ; 2000) et
Burkett (1999).