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Une véritable politique de colonisation économique s’est mise en place au profit de l’axe
Bruxelles-Anvers (3), tandis que naissait déjà un mouvement pour l’indépendance de la Flandre. Des
voix se sont élevées en Wallonie pour dénoncer la flamandisation de l’Etat belge et réclamer, là aussi,
une séparation administrative. La société wallonne avait un dynamisme et des ressources qu’elle n’a pas
entièrement perdus.
Hélas, le fédéralisme est venu trop tard pour la Wallonie. Il a permis d’éviter le pire mais, sans la
maîtrise de son enseignement et de sa politique culturelle, facteurs de cohésion, la Wallonie a raté son
envol. Aujourd’hui, culpabilisée, appauvrie, insultée, elle s’acharne à défendre un pays qui ne lui veut
pas du bien.
On se dit que la monarchie va sauver la Belgique et on fait tout pour que la Belgique sauve la
monarchie. On a perdu le sens des réalités. Si la nation flamande a déjà revisité son histoire, allant
jusqu’à présenter la révolution belge comme une catastrophe nationale pour la Flandre, il reste à la
Wallonie d’aller chercher dans ses racines ce dont elle a besoin pour se développer.
La transformation de l’Europe a rendu la Belgique superfétatoire, inutilement complexe
et paralysante. Pour s’en convaincre, il suffit de voir combien l'Union européenne et la Flandre ont
des projets complémentaires, servis par une classe politique jouant les tout premiers rôles en Europe.
Quand ils ne sont pas ouvertement séparatistes, les Van Rompuy, De Gucht, Van den Brande et
consorts annoncent l'inéluctable évaporation de la Belgique.
Une prise en compte de la dynamique européenne conduirait, par la force des choses, à
reconsidérer les rapports de la Wallonie avec la France et permettrait de réfléchir collectivement à
la meilleure façon d’assurer l’avenir du pays wallon, sur le plan culturel, économique et institutionnel.
Le soutien, la solidarité bienveillante d’un pays comme la France est une opportunité qu’il serait
criminel de rejeter.
Terre romane, en dépit de sa longue immersion dans le monde germanique, la Wallonie
est un pays de frontière. Idéalement située au cœur de l’Europe, elle a désormais vocation de relier les
deux piliers de la construction européenne, la France et l’Allemagne. A condition de mettre en valeur
son savoir-faire et son infrastructure, elle peut regarder l’avenir avec confiance.
La mise en valeur de ses atouts passe inévitablement par une valorisation de son image. C’est une
évidence commerciale autant qu’une réelle nécessité existentielle. Le redéploiement économique ne
dépend pas seulement de la conjoncture internationale. Pour s’épanouir dans une Europe exposée à
tous les vents de la mondialisation, la Wallonie a besoin de trouver sa place.
Il ne faut pas compter sur la Belgique pour assurer la promotion de la Wallonie à
l’étranger. Sur de nombreuses cartes, notamment touristiques, la Wallonie est devenue une espèce de
terra incognita. Au mieux un arrière-pays. Longtemps moteur économique de la Belgique, la Wallonie a
été lâchée au moment où son déclin industriel exigeait des investissements nouveaux. Maintenant, la
Flandre, oubliant que son développement a été financé par de l’argent wallon, fait payer cher le
maintien d’une solidarité qu’elle dénonce à grand bruit.
C’est au nom des priorités socio-économiques que l’on étouffe le débat sur l’identité wallonne,
feignant de ne pas voir que la Belgique a aussi un coût pour la Wallonie.
« Ils nous ont tout pris »
,
écrivait-on déjà en 1912 (1). Parmi les transferts organisés par la Belgique, il faut compter ce qui relève
de la mémoire et du patrimoine culturel, mais la Wallonie a également vu partir des capitaux, des
emplois, des marchés. La Flandre a fait main basse sur la Belgique et sur son économie, avec la
complicité de trop de dirigeants wallons. La Wallonie a finalement perdu ce qui lui restait : l’estime de