LE PARADIGME DE LA COMPREHENSION DANS LES JEUX DE LANGAGE

Annales FLSH N° 17 Spécial JUOR (2013)
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LE PARADIGME DE LA COMPREHENSION DANS
LES JEUX DE LANGAGE
CHEZ L. WITTGENSTEIN
Par UKUMU ULAR Dieudon
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ABSTRACT
Language is the key of human existence. In interpersonal
reports, articulated language particularly plays the role of first plan by
communication, which always suppose two subjects in interaction: a
sender and addressee or better a transmitter or a receiver and is, the
language under its aspect of communication, does reach its objective
that when the addressee or receiver confirms in a “feedback” that he
understood the message addressed to him by the sender or transmitter.
But the quasi totality of our experience poses a problem of
comprehension of speech and then, the incomprehension. When can
we accept that there is comprehension in an act of speech? This
article answers these two questions in order to identify the
comprehension environment. This analysis provides to linguistics and
grammar all their importance. WITTGESTEIN develops the paradigm
of the communicability by introducing a new conception of meaning
and reason.
To answering this preoccupation, he precedes by the analysis of
speech game theory, of the notion of the use and meaning of words,
the grammar of words and at least the notion of pragmatics.
Indeed, the speech must be understood as a game, because in a
game, people must respect the rules which are used: the words and
their uses are linked by the language. The persons who play a speech
game, in the communication and who play different rules can have the
difficulties to understand each other. Other people can have different
interpretations of the rules or simply use them in the opposite
meanings. Those are some of factors that make incomprehension of
language.
0. INTRODUCTION
Il existe de nos jours un engouement universel de la pensée
autour du langage comme le témoigne la multiplication des sciences
du langage.
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Professeur Associé à l’Université de Kisangani
Annales FLSH N° 17 Spécial JUOR (2013)
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Quoiqu'il en soit, le langage verbal occupe une place privilégiée
dans la vie humaine parce que, dans ses rapports avec le cosmos, c'est
le langage parlé qui différencie l'homme de tous les autres vivants. Le
langage fait l'homme et l'homme est essentiellement un être de
langage. Le langage est la clé de l'existence humaine. Comprendre le
langage, c'est sans doute comprendre l'être de l'homme et ses multiples
relations.
C'est grâce au langage qu'on peut parler de l'homme pensant.
Dans les rapports intersubjectifs, le langage articulé joue un rôle de
premier plan dans l'expression et la communication. Il s'agit du rôle
ontologique du langage.
Les anciens, comme Platon, s'interrogent sur la nature du
langage et s'intéressent au rapport entre langage et nature. Pour Platon,
le langage est une création qui découle de l'essence des choses. Mieux
que Platon, les stoïciens notamment, Sextus Empiricus et Diogène
Laërce, ont porté leur attention sur le langage en marquant l'opposition
entre signification (Semainon) et signifié (Semainomenon). Les
stoïciens préfigurent la linguistique et ouvrent une longue tradition
grammaticale.
Cependant, dans cette situation de langage, mieux dans la
totalité de notre expérience, se pose un problème de "la
compréhension" du langage: tel est le problème philosophique qui
attire notre attention dans cet article. Qu'est ce qui peut faire obstacle à
la compréhension dans un acte de langage et entraîner des
malentendus? En outre, quand pouvons nous affirmer qu'il ya
compréhension dans un acte de langage? C'est à ces deux
interrogations que Wittgenstein tente de répondre à travers son
ouvrage " les investigations philosophiques" (L. WITTGENSTEIN,
1961), afin d'identifier l'environnement de la compréhension et de
chercher à s’échapper à ce que nous disons lors que surgit une
contradiction (je ne l'ai pas entendu ainsi).
De ce qui précède, notre investigation suivra une progression
analytique qui nous conduira vers la conception wittgensteinienne du
langage contenu dans ses deux moments de pensée. En effet, plusieurs
philosophes, de Francis Bacon à Carnap, en passant par Locke,
Leibniz, dénoncent l'inadéquation du langage quotidien et l'abus des
mots. Plusieurs autres, prenant le contre-pied, reposent leur espoir sur
une analyse minutieuse du langage ordinaire pour accéder à des
connaissances incluses dans son usage. C’est justement ce qu'on
appelle la philosophie du langage ordinaire, née de la seconde
philosophie de Wittgenstein et de la critique de Russel par Strawson.
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1. LA CONCEPTION WITTGENSTEINIENNE DU LANGAGE
Wittgenstein est certainement l’un des philosophes les plus
importants et les plus discutés du XXème siècle, mais aussi les plus
difficiles. Notre tâche, ici, vise d'abord à faciliter l'accès à cette pensée
et à faire apparaître non seulement les problématiques centrales, mais
aussi l'unité profonde de la pensée de cet auteur. Pour ce faire, la
seule solution consiste à varier les points de vue, afin de jeter la clarté
sur certains aspects de la conception wittgensteinienne du langage.
En effet, notre analyse considérera les deux moments de la
pensée de notre auteur pour saisir sa conception du langage. Le
premier moment s'inscrit dans le mouvement de l'analyse logique
inaugurée par Frege et Bertrand Russel; le second fonde une analyse
informelle centrée sur les différents types d'usage du langage naturel.
Cette analyse pragmatique du langage, qui opère une rupture radicale
d'avec la conception traditionnelle encore admise par l'approche
logiciste du langage et du monde, sera poursuivie par les "Philosophes
du langage ordinaire" à l'instar de J. L. Austin et J. Searle.
La première philosophie de Wittgenstein est entièrement
contenue dans le "Tractatus logico-philosophicus" qui est le seul
ouvrage publié de son vivant. Dans la préface, Wittgenstein indique
que son propos est de montrer que "La formulation (des problèmes
philosophiques) repose sur une mauvaise compréhension de la logique
de notre langage", et il considère avoir "Résolu définitivement ces
problèmes". (L. WITTGENSTEIN, 1961, p.26).
L'ouvrage se compose de sept aphorismes, rigoureusement
ordonnés en une structure hiérarchique qui se déploie à sept niveaux.
Cependant, c'est dans son quatrième aphorismes ou thèse, que nous
pouvons commencer à ressortir sa conception du langage. A travers
cet aphorisme, Wittgenstein souligne à la fois l'inadéquation d'une
explication psychologique du phénomène, et son lien avec quelques
unes de ses préoccupations. Il développe le rôle crucial joué par le
langage comme mode privilégié de représentation. Le langage, selon
lui, est l'ensemble des propositions qui articulent des signes
élémentaires selon les règles de la syntaxe logique. Les signes
élémentaires nomment les objets, et leur combinaison décrit leur
articulation dans l'état des choses. Aussi la proposition peut-elle
constituer l'image du fait.
A titre illustratif, il considère la proposition aRb. Elle est l'image
du fait a-dans-la relation-R-à-b. Le sens de la proposition souligne
Wittgenstein, est ce qu'elle représente: "un nom est mis pour une
chose, un autre pour une autre, et ils sont reliés entre eux, de telle
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sorte que le tout, comme un tableau vivant, figure un état des choses".
Ainsi, "aRb" montre la relation entre a et b. En tenant à dire cette
relation, l'analyse "tue": si nous disons que cette proposition est
composée de deux objets, a et b, et d'une relation R telle que a en est
le premier élément et b le second; on annule le caractère relationnel de
la relation. De ce constat, déjà fait par Frege et Russel, Wittgenstein
conclut à l'opposition radicale entre dire et montrer: "ce qui peut être
montré ne peut être dit" (L. WITTGENSTEIN, 1961, p.26).
Ainsi, le sens, la pensée vivante, la fonction représentative de la
proposition se montrent par ce qui est dit, mais qui ne saurait se dire.
La philosophie a alors pour fonction d'indiquer la frontière entre le
dicible et l'indicible. Son but est la clarification logique des pensées.
Elle n'est pas théorie mais activité thérapeutique.
L'auteur du Tractatus développe cette fonction de la logique,
laquelle fournit à priori toutes les possibilités de combinaisons des
propositions élémentaires en propositions complexes. Si l'on se donne
deux propositions élémentaires, il y aura plusieurs possibilités de
vérité, les différents opérateurs logiques retenant sélectivement
certaines possibilités.
Les propositions complexes sont ainsi fonctions de vérité des
propositions élémentaires. Il est toutefois un cas remarquable la
structure logique de la proposition complexe est telle qu'elle est vraie
quelle que soit la valeur de vérité des propositions élémentaires: tel est
le principe du tiers exclu. On a alors une tautologie, qui n'est pas
image d'un fait particulier mais, il vaut pour tout fait. En ce sens, cette
proposition valide ne dit proprement rien. Elle n’est pas dénuée de
sens mais simplement de contenu. Les observations ainsi établies nous
permettent de comprendre la théorie du langage de Wittgenstein.
1.1. Le langage: le miroir, le tableau du monde
L'auteur du Tractatus utilise la métaphore du miroir et du
tableau pour désigner le langage. En effet, les mots y remplacent les
choses, mais les deux structures restent les mêmes.
La théorie du langage présentée dans le Tractatus, dont le noyau
se trouve dans la théorie du tableau affirme qu'il y a une
correspondance structurelle entre le monde et le langage.
De même que le monde est l'ensemble des faits, les états des
choses sont des entités complexes, ainsi les propositions sont des
unités complexes. En effet, nous pouvons dire que, dans la structure
du Tractatus, nous trouvons d'abord une ontologie. Ensuite, vient une
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théorie du tableau, enfin une analyse détaillée de la structure générale
du langage.
Le langage est le miroir, le tableau du monde. (L.
WITTGENSTEIN, 1961, p.29). Cependant, l’ontologie s'exprime dans
la première thèse qui stipule que "le monde est tout ce qui arrive" (L.
WITTGENSTEIN, 1961, p.29). Cette thèse est explicitée dans les
propositions suivantes:
a) Le monde est l'ensemble des faits et non des choses;
b) Le monde se dissout en faits. La notion elle même des "faits" est
explicitée dans la deuxième thèse qui stipule: "ce qui arrive, les
faits, est l’existence d'états des choses" (L. WITTGENSTEIN,
1961, p.31).
L'auteur note, encore ici, que le monde n'est pas fait d'individus,
de substances, mais bien "d'états des choses". Cela signifie, selon lui,
que le monde n'est pas ce que nous voyons, c'est-à-dire l'ensemble
d'objets matériels, par exemple poissons, bêtes, etc. Cependant, un état
des choses est une entité complexe, il est fait d'objets. Pour rendre
compte des états de choses, on doit postuler des éléments ultimes,
irréductibles appelés des objets. Toutefois, les objets n'ont pas
d'existence par eux mêmes; ils n'existent que dans le contexte des états
de choses auxquels ils appartiennent. Un état de choses est une
combinaison d'objets.
1.1.1. Le tableau
Le tableau est, pour Wittgenstein, une transposition de la
réalité (L. WITTGENSTEIN, 1961, p. 10). Le tableau réside dans le
fait que ses éléments ont des rapports déterminés. Ces rapports
tiennent à ce que les choses se comportent de la même manière les
unes envers les autres. Cette connexion d'éléments du tableau, nous
pouvons la nommer sa structure. Tandis que la forme de la
représentation ou la possibilité de sa structure est la possibilité que les
choses se comportent les unes vis-à-vis des autres comme les éléments
du tableau. Le tableau est ainsi lié à la réalité. Il est comme un étalon
de mesure qui "colle" avec la réalité. (L. WITTGENSTEIN, 1961,
p.31).
Le fait d'être tableau implique qu'il y ait quelque chose de
commun entre le tableau et ce qu'il représente. Il faut, dans le tableau
et dans ce qui est représenté, qu'il y ait quelque chose d'identique,
pour que l'un puisse être un tableau de l'autre au sens précis du terme.
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