U Quels sont les critères de qualité de vie à prendre

La Lettre du Cancérologue Vol. XXVI - n° 4 - avril 2017 | 159
DOSSIER
Qualité devie
encancérologie
M.J. Paillard
F. Bonnetain
Quels sont les critères
de qualité de vie à prendre
en compte dans les essais ?
What are the quality of life’s criteria
to be considered in trials?
M.J. Paillard1, 2, F. Bonnetain1, 3
1 Unité de méthodologie et qualité
de vie en cancérologie, CHU de
Besançon.
2 Service d’oncologie, CHU de
Besançon.
3 Inserm, UMR 1098, Besançon.
U
n critère de jugement est défini comme un
indicateur permettant de conclure quant à
l’efficacité d’un traitement ou d’une stratégie
thérapeutique. Il sert à définir les objectifs et à en
évaluer l’atteinte.
En cancérologie, il existe 2 types de critères de juge-
ment : les critères cliniques centrés sur le patient,
comprenant principalement la survie globale, et les
critères fondés sur l’évaluation tumorale, comme la
survie sans progression ou le taux de réponse (1, 2).
Le critère de jugement de référence pour évaluer
l’effic acité d’un traitement dans un essai de phase III
est la survie globale. Toutefois, l’avènement des
nouvelles thérapies efficaces a entraîné la nécessité
d’inclure un plus grand nombre de patients dans les
essais ainsi que de prévoir une période d’observation
plus longue, afin d’obtenir des données suffisantes
pour atteindre la puissance statistique requise. Les
critères cliniques centrés sur la tumeur, tels que la
survie sans progression et la survie sans maladie,
sont ainsi très souvent utilisés puisqu’ils peuvent
être évalués plus précocement. Cependant, ils n’ont
pas été systématiquement validés comme critères
de substitution pour la survie globale (3). De fait,
le bénéfice clinique d’un traitement n’améliorant,
par exemple, que la survie sans progression reste
discutable.
Définition
La qualité de vie
Selon l’Organisation mondiale de la santé, la qualité
de vie est définie comme “la perception qu’a un indi
-
vidu de sa place dans l’existence, dans le contexte
de la culture et du système de valeurs dans lesquels
il vit, en relation avec ses objectifs, ses attentes,
ses normes et ses inquiétudes. Il s’agit d’un large
champ conceptuel, englobant de manière complexe
la santé physique de la personne, son état psycho-
logique, son niveau d’indépendance, ses relations
sociales, ses croyances personnelles et sa relation
avec les spécificités de son environnement” (4).
La qualité de vie relative à la santé
La qualité de vie relative à la santé est définie comme
étant “un état de bien-être qui repose sur 2 compo-
sants : la capacité à réaliser des activités journalières
qui reflètent le bien-être physique, psychologique et
social et la satisfaction du patient avec son niveau
de fonctionnement, le contrôle de sa maladie et des
symptômes reliés à son traitement.” Ces aspects
en font un concept multidimensionnel reposant
sur des items objectifs (conditions de vie, santé
fonctionnelle) et subjectifs (satisfaction, bonheur,
bien-être), intégrant les nombreux intervenants et
événements de la vie. La qualité de vie est liée à la
personne dans sa globalité, et à son évolution dans
son environnement (5).
Patient Reported Outcome Measure
La qualité de vie peut être mesurée par le patient.
Les mesures faites par le patient de ses résultats
(Patient-Reported Outcome Measure [PROM]) sont
définies, selon le National Health Service (NHS),
comme des mesures de l’état de santé du patient
ou de sa qualité de vie liée à la santé. Ces mesures
sont généralement courtes, auto-administrées et
concernent l’évaluation de la qualité de vie à un
moment donné dans le temps (6). Les PROM four-
nissent un moyen d’avoir un aperçu de la manière
160 | La Lettre du Cancérologue Vol. XXVI - n° 4 - avril 2017
Points forts
dont le patient perçoit sa santé et l’impact qu’ont
les traitements ou modifications de son hygiène de
vie sur sa qualité de vie (7). Il existe de nombreux
PROM en dehors de la qualité de vie, tels que la
fatigue (échelle MFI20), la douleur (échelle BPISF)
ou l’anxiété-dépression (échelle HADS). Très récem-
ment, une version des scores de toxicités éditée
par le National Cancer Institute (NCI), renseignés
jusqu’alors exclusivement par les médecins, a été
développée à l’intention des patients (PRO-CTCAE)
afin de permettre une évaluation des symptômes
et toxicités subjectives directement par le patient
lors des essais cliniques (8). Une version en français
est en cours de validation.
La qualité de vie
pour démontrer
le bénéfice clinique
Dans les essais cliniques en cancérologie, la qualité
de vie relative à la santé est reconnue comme second
critère de jugement principal par la Société améri-
caine en oncologie clinique (ASCO®) et la Food and
Drug Administration (FDA) en l’absence d’effet d’une
action ou d’un traitement sur la survie globale (9).
Dans la pratique clinique, évaluer la qualité de vie
du patient est bénéfique et permet d’optimiser l’ad-
hésion aux stratégies thérapeutiques proposées par
le médecin (10, 11).
De nombreux articles sont venus encourager l’uti-
lisation de la qualité de vie comme critère de juge-
ment dans les essais cliniques, et particulièrement
en oncologie (12-14).
Les raisons qui expliquent la place de la qualité de vie
en tant que critère de jugement sont nombreuses :
un bénéfice tumoral sans gain de survie globale
et/ou de qualité de vie n’est pas suffisant car le sens
clinique est incertain ;
les critères cliniques standard ne tiennent pas
compte des aspects physiques, psychologiques,
sociaux et environnementaux dans l’évaluation
d’un traitement ;
les nouvelles molécules développées ne
permettent pas forcément un gain de survie, mais
peuvent améliorer la qualité de vie du patient ;
la qualité de vie est utilisée dans le cadre des
analyses médicoéconomiques de type coût/utilité.
Par conséquent, la qualité de vie comme critère
ou cocritère de jugement principal s’impose d’évi-
dence dans un contexte tel que la cancérologie, où
les possibilités thérapeutiques sont parfois limitées
et où les symptômes peuvent être extrêmement
invalidants, et dans un contexte économique global
de remboursement plus contrôlé.
Les outils de mesure
de la qualité de vie
De nombreux instruments ont été développés et
sont maintenant disponibles. Leur caractéristique
commune est qu’ils font appel à l’évaluation subjec-
tive, de préférence par le patient.
On distingue 2 types d’approche :
L’entretien psychologique ou entretien struc-
turé est un entretien au cours duquel la personne
en charge de l’évaluation interroge le patient sur
l’ensemble de sa vie. C’est l’évaluateur qui dirige
la conversation, mais il laisse le patient parler. Si
ce type d’évaluation permet, d’un point de vue
clinique, d’évaluer la qualité de vie du patient dans
son ensemble, les données récoltées sont, quant à
elles, plus difficilement utilisables et transformables
en mesure, parce qu’il s’agit de “réponses-discours”,
donc non standardisées. Il pose ainsi des difficultés
logistiques, de standardisation et donc d’utilisation
dans des études comparatives.
Les outils psychométriques, constitués d’échelles
ou de questionnaires, permettent une évaluation
plus restrictive de la qualité de vie, mais standar-
disée, et sont plus faciles à utiliser. Ils nécessitent des
instruments appropriés, fiables, validés et faciles à
remplir. Parmi ces outils, on distingue les instruments
hétéro-évaluatifs et auto-évaluatifs :
l’hétéro-évaluation : un hétéro-questionnaire est
un questionnaire dans lequel la qualité de vie du
patient est évaluée par une autre personne que le
patient lui-même. La mesure par un professionnel ne
peut pas être considérée comme un gold standard, car
celui-ci a une moins bonne connaissance de la façon
dont le patient perçoit sa qualité de vie et sa santé ;
»
Selon l’OMS, “La qualité de vie est la perception qu’a un individu de sa place dans l’existence, dans
le contexte de la culture et du système de valeurs dans lesquels il vit, en relation avec ses objectifs, ses
attentes, ses normes et ses inquiétudes.”
»La qualité de vie liée à la santé peut être comprise comme la perception par le patient de son propre
état de santé et de ses conséquences sur sa vie quotidienne.
»En cancérologie, la qualité de vie relative à la santé est reconnue comme second critère de jugement
principal par l’ASCO
®
et la FDA en l’absence d’effet d’une action ou d’un traitement sur la survie globale.
Mots-clés
Critères de jugement
Échelles
Qualité de vie
Pronostic
Méthodologie
Highlights
»
According to the World
Health Organization, the defi-
nition of Quality of Life is the
individuals’ perception of their
position in life in the context of
the culture and value systems
in which they live and in rela-
tion to their goals, expecta-
tions, standards and concerns.
»
Health-related quality of
life (HRQOL) includes indivi-
duals’ physical and mental
health perceptions and their
consequences on daily life. The
most accepted definition refers
to a multi dimensional concept
including at least 3 main areas
corresponding to “the subjec-
tive individual’s perception of
their physical, emotional and
social condition after conside-
ring the effects of the disease
and its treatment”.
»
In oncology, HRQOL is reco-
gnized as secondary primary
endpoint by the American
Society of Clinical Oncology
(ASCO) and the Food and Drug
Administration (FDA) when
there is no effect of an action
or a treatment on the overall
survival.
»
HRQOL is a prognostic
factor for overall survival in
many cancers such as breast
cancer, glioblastoma, meta-
static colorectal cancer, pros-
tatic cancer, pancreatic cancer,
lung cancer and hepatocellular
carcinoma.
Keywords
Endpoint
Scale
Quality of life
Prognosis
Methodology
La Lettre du Cancérologue Vol. XXVI - n° 4 - avril 2017 | 161
DOSSIER
l’auto-évaluation : ce mode d’administration du
questionnaire par le patient lui-même doit être
privilégié afin de capter toute la quintessence de
l’évaluation de la qualité de vie. En effet, qui mieux
que le patient peut indiquer dans quelle mesure des
difficultés, qu’elles soient physiques, psychologiques
ou sociales, affectent son bien-être, et avec quelle
intensité ?
Par ailleurs, on peut distinguer 2 grands types d’outils
de mesure de la qualité de vie : les échelles géné-
riques, conçues pour mesurer la qualité de vie chez
des individus présentant ou non une pathologie,
c’est-à-dire quel que soit leur état de santé ; les
échelles spécifiques, qui se focalisent sur l’impact
d’une pathologie et de ses traitements sur la qualité
de vie. Ces instruments peuvent être spécifiques
d’une localisation d’un cancer, d’une population de
patients, de certaines fonctionnalités ou de certains
symptômes.
Les qualités des instruments
de mesure
La validation d’un instrument de mesure doit
permettre de répondre à 2 questions : quel est le
concept mesuré par l’instrument et quelle est la
qualité de la mesure ? Le choix d’un instrument doit
être guidé par ce prérequis en fonction des objectifs
et des patients ciblés de l’étude (15).
La validité : la validité d’un instrument de mesure
réfère au degré auquel l’instrument mesure ce qu’il
est supposé mesurer. On distingue la validité d’appa-
rence, qui vise à déterminer si l’instrument semble
mesurer ce qu’il prétend mesurer, de la validité de
contenu, qui réfère à la représentation adéquate
de l’échantillon d’items utilisés pour mesurer un
comportement ou une caractéristique.
La fiabilité : un instrument de mesure fiable donne
de façon consistante les mêmes résultats lorsqu’il
n’y a pas eu de changements réels. La fidélité d’un
instrument est essentielle afin de distinguer le “vrai”
changement de l’erreur de mesure. Elle est influencée
par l’échelle de mesure, le mode d’administration, la
clarté des concepts à mesurer et la consistance de
l’évaluation. Quatre grands types de fiabilité peuvent
être explorés : la répétabilité, la fidélité intra-juges,
la fidélité inter-juges et la consistance interne.
La sensibilité au changement : c’est la capacité
d’un instrument à détecter un changement dont
l’importance est significative et observable d’un
point de vue clinique. Lévaluation de la sensibilité
au changement est très souvent mesurée en compa-
rant l’amplitude du changement avec l’écart-type
de la mesure initiale.
La “responsiveness” : il s’agit de la capacité d’un
instrument à mesurer un changement ayant un sens
clinique pour le patient.
Les outils utilisés
en cancérologie
et les principales dimensions
à prendre en compte
Parmi les échelles spécifiques au cancer, on note
la prédominance de 2 grands groupes de ques-
tionnaires : le QLQ-C30 de l’EORTC et le FACT-G
( Functional Assessment of Cancer Therapy-General).
Tous deux se présentent sous la forme d’un question-
naire générique accompagné de nombreux modules
spécifiques qui correspondent, pour la plupart, à une
localisation cancéreuse ou à une situation spéci-
fique (par exemple, la fatigue, la neurotoxicité,
etc.) [16, 17] (tableau).
Lévaluation de la qualité de vie des patients atteints
d’un cancer repose, en général, sur 3 domaines
principaux : les domaines physique (qui recouvre le
fonctionnement et les symptômes), psychologique
et social.
Tableau. Questionnaires spécifiques à la cancérologie.
Questionnaires Nombre d’items Dimensions explorées
EORTC QLQ-C30
+ modules spécifiques
28 + 2
Entre 13 et 38
Dimensions physique, sociale, cognitive, fonctionnement
personnel etpsychologique, état de santé global, fatigue, nausées,
vomissements, douleurs, dyspnée, insomnies, perte d’appétit,
constipation, diarrhée, problèmes financiers
FACT-G
+ modules spécifiques
29 + 5
Entre 7 et 20
Dimensions physique, familiale-sociale, rapport avec lemédecin,
bien-être psychologique, bien-être émotionnel
162 | La Lettre du Cancérologue Vol. XXVI - n° 4 - avril 2017
Quels sont les critères dequalité de vie à prendre encompte dans les essais ?
DOSSIER
Qualité devie
encancérologie
Afin de mettre en relation les différents facteurs, et
de préciser les éléments évalués grâce à chacune des
dimensions explorées, B.R. Ferrell et al. ont proposé
le modèle suivant (18) :
Bien-être physique et symptômes : activités quoti-
diennes, fatigue, sommeil et repos, douleur, perte
d’appétit, nausées/vomissements, dyspnée, santé
physique globale.
Bien-être psychologique : anxiété, dépression,
plaisir, attention, détresse psychologique, peur.
Bien-être social : détresse familiale, rôle et rela-
tion avec les autres, affection, isolement, commu-
nication.
Prenons pour exemple les conséquences du cancer
sur la qualité de vie de patientes atteintes d’un
cancer du sein.
Conséquences physiques, liées en particulier à
la chirurgie mammaire et aux gestes axillaires : à la
phase aiguë postopératoire, on retrouve fréquem-
ment la douleur, l’œdème, les problèmes lympha-
tiques, les hématomes et les troubles neurologiques ;
à la phase plus tardive, il peut persister une rougeur
de la cicatrice, des séquelles fonctionnelles et une
fatigue résiduelle.
Conséquences psychologiques, liées à l’image du
cancer, souvent synonyme de souffrance et de mort,
et également à l’image du sein, dont la symbolique
est prédominante (féminité, sexualité et maternité) :
l’anxiété et la dépression sont 2 symptômes très
souvent rencontrés chez les patientes, que ce soit au
cours d’un examen de dépistage ou d’une procédure
diagnostique ou thérapeutique.
Conséquences familiales : lorsque, dans une
famille, une personne est atteinte d’un cancer, c’est
tout le système familial qui s’en trouve altéré. Il est
démontré que l’implication émotionnelle des maris
ou compagnons des femmes atteintes d’un cancer
du sein est toujours une réalité. La majorité d’entre
eux présentent des troubles psychologiques variés
en réponse à la maladie de leur partenaire (troubles
du sommeil, troubles alimentaires, problèmes
concernant leurs responsabilités professionnelles,
symptômes d’anxiété et de dépression, difficultés
sexuelles après l’intervention chirurgicale de leur
épouse). Les enfants peuvent également présenter
des troubles d’adaptation et des difficultés psycho-
logiques.
Conséquences professionnelles : alors que la
plupart des femmes travaillaient au moment du
diagnostic du cancer du sein, la majorité d’entre
elles disent avoir connu des changements dans
leur vie professionnelle à la suite de la maladie.
Ces changements sont caractérisés soit par un
arrêt total de travail ou une diminution du temps
de travail, soit par de longues absences dues à
des problèmes de dépression, soit enfin par une
réorientation ou un changement de profession liés
aux problèmes physiques engendrés par la chirurgie
du sein.
Planification et analyse
d’un essai intégrant
des données de qualité de vie
Les paramètres intervenant dans la méthodologie
des essais concernant l’analyse statistique de la
qualité de vie sont bien spécifiques (19).
La première étape est, à partir de la littérature, la
détermination des dimensions de qualité de vie cibles
et la différence minimale cliniquement importante
(DMCI). La DMCI représente le plus petit change-
ment de score qui est cliniquement pertinent. Elle
est déterminée par des études spécifiques par loca-
lisation et situation thérapeutiques faisant appel
à des méthodes psychométriques (“anchor-based
method”) ou statistiques (“effect size et règle de
Cohen) [20].
Parallèlement, des méthodes d’ajustement du
risque d’erreur alpha doivent être mises en œuvre.
D’une part, les dimensions de qualité de vie mesu-
rées sont très souvent multiples et, d’autre part, les
mesures répétées (appelées aussi mesures longi-
tudinales) donnent lieu à de nombreuses compa-
raisons statistiques conduisant à une multiplicité
des tests, augmentant ainsi le risque d’erreur de
type I (risque de faux positifs). Il faut donc cibler
des dimensions et émettre des règles décision-
nelles pour conclure, a priori, quant aux résultats
de qualité de vie.
Concernant la population d’étude, l’analyse en
intention de traiter (ITT) est la méthode préférable
pour prévenir les biais et permettre de comparer
différentes études. Toutefois, très souvent, l’éva-
luation de la qualité de vie n’est pas réalisée pour la
totalité des patients. Il est donc primordial de définir
une sous-population utilisée pour l’ITT (appelée ITT
modifiée), à savoir tous les patients pour qui l’on
dispose des données de qualité de vie à l’inclusion,
par exemple.
Malgré l’existence de techniques statistiques
permettant de traiter les données manquantes,
il est préférable d’avoir une action préventive pour
éviter l’absence de données à chacune des étapes
La Lettre du Cancérologue Vol. XXVI - n° 4 - avril 2017 | 163
DOSSIER
de la mise en place de l’étude. Dans le cas contraire,
des méthodes statistiques, telles que les modèles
de “pattern mixture” et les imputations simples
ou multiples, sont mises en œuvre pour pallier ce
manque de données. Toutes ces méthodes permet-
tront une analyse de sensibilité en ITT.
Dans le cadre de la qualité de vie, 2 méthodes
d’analyse statistique sont privilégiées : les modèles
d’analyse de variance pour mesures répétées
(modèles mixtes et growth curve model). Depuis
peu, la méthode d’analyse du temps jusqu’à dété-
rioration est également employée (21, 22).
Les modèles à mesures répétées
On entend par “données répétées” des données telles
que, pour chaque individu considéré, on dispose
d’observations à différents instants, autrement dit
répétées dans le temps. La difficulté majeure dans
le traitement statistique de ces données provient du
fait qu’il est impossible de supposer que les obser-
vations réalisées sur un même individu, au cours du
temps, sont indépendantes. Il est donc nécessaire
d’introduire une structure de covariance pour les
variables aléatoires associées à chaque individu,
afin de tenir compte de cette situation particulière.
Ces modèles permettent d’estimer l’effet du temps
(c’est-à-dire les changements de score au cours du
temps), l’effet groupe (c’est-à-dire les différences
de scores entre les bras de traitement à l’inclusion)
et une interaction entre le bras de traitement et le
temps (reflétant une évolution différente du score
de qualité de vie selon le bras de traitement au
cours du temps comparativement au bras de réfé-
rence). Ils contiennent des effets fixes, comme le
traitement, et des effets aléatoires, comme l’effet
patient, prenant en compte la corrélation entre les
mesures faites pour un même patient à différents
moments. L’approche par modèles linéaires sur
mesures répétées présente l’avantage d’être bien
établie, mais nécessite que les scores aient une
distribution normale, ce qui est rarement vérifié.
Par ailleurs, ils sont souvent d’interprétation difficile
pour les cliniciens.
La modélisation
des courbes de croissance
Lobjectif de cette méthode est de décrire l’évolution
des mesures de qualité de vie aux différents temps
par une courbe permettant de relier les données.
Ces modèles sont utilisés de préférence lorsqu’une
grande variabilité individuelle de la temporalité de
l’évaluation est observée et quand les temps de
mesure sont nombreux. Là encore, comme il s’agit de
données répétées pour chaque patient, les données
de qualité de vie sont corrélées. Ainsi, il est requis,
pour modéliser la structure de covariance, d’utiliser
un modèle mixte.
Temps jusqu’à détérioration
de la qualité de vie
Ce type d’approche s’apparente aux données de
survie, habituellement utilisées et maîtrisées par
les cliniciens. En utilisant une modélisation de type
survie à l’aide de la méthode de Kaplan-Meier,
il est possible de produire des courbes de survie
pour décrire longitudinalement la qualité de vie.
La définition de l’événement doit être le prérequis.
Lévénement, dans ce contexte, est l’apparition d’une
détérioration.
La détérioration peut être définie comme : la première
apparition de la DMCI entre une évaluation et le score
obtenu lors de la première éva luation (avant rando-
misation), une différence de 10 ou 5 points entre
le meilleur score obtenu et les scores suivants, ou
encore l’absence d’augmentation constatée après la
DMCI observée (on parle de détérioration définitive).
Une comparaison entre les 2 bras de traitement
peut être réalisée selon le test du log-rank et un
modèle de Cox multivarié afin d’estimer la taille de
l’effet traitement (HR). Cette méthode aurait une
puissance statistique inférieure à celle des modèles
mixtes mais présente l’avantage d’être d’interpré-
tation plus aisée et de faciliter le calcul du nombre
de patients nécessaires pour la planification des
futurs essais (23).
Conclusion et perspectives
Il apparaît aujourd’hui, très clairement, que l’éva-
luation de la qualité de vie chez les patients atteints
d’un cancer s’impose, à la fois dans une optique de
recherche, avec la réalisation d’essais cliniques, et
dans une optique d’individualisation des théra-
peutiques et de prise en charge. Or, actuellement,
en France, les cliniciens ont un besoin réel d’ins-
truments de mesure fiables et validés, facilement
utilisables et facilement interprétables.
La qualité de vie est reconnue par les instances
comme un critère de jugement pour l’autorisation
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