Projet de loi n°6350 concernant le budget des recettes et... dépenses de l’Etat pour l’exercice 2012 (3907TCA/WMR)

Projet de loi n°6350 concernant le budget des recettes et des
dépenses de l’Etat pour l’exercice 2012 (3907TCA/WMR)
AVIS DE LA
CHAMBRE DE COMMERCE
Un cocktail budgétaire explosif entre crise mondiale et
insouciance luxembourgeoise
Luxembourg, le 15 novembre 2011
i
Résumé de l’avis de la Chambre de Commerce
Le budget 2012 en un clin d’œil
Le présent résumé propose aux lecteurs les faits saillants de l’analyse de la Chambre de
Commerce sur le projet de loi n°6350 concernant le budget des recettes et des dépenses de l’Etat
pour l’exercice 2012. Après avoir esquissé les grandes tendances quantitatives à l’aide du tableau
ci-après, la Chambre de Commerce présentera son analyse du projet de loi budgétaire à l’aide
d’une dizaine de points saillants, lesquels correspondent aux principaux constats critiques que la
Chambre de Commerce émet à l’encontre du budget 2012 soumis à son avis, conformément à
l’article 2 de sa loi organique du 26 octobre 2010.
L’Administration centrale accusera, d’après les chiffres présentés dans le projet de budget,
un déficit de 1,143 milliards EUR en 2012, état de fait qui résulte largement d’une
progression significative des dépenses (+6,1% par rapport aux prévisions budgétaires
2011), combinée à une augmentation insuffisante des recettes (+4,9%), alors que ces
dernières paraissent, aux yeux de la Chambre de Commerce, encore largement surévaluées.
Le projet de budget 2012 ne constitue donc nullement une étape d’une véritable feuille de
route vers l’équilibre budgétaire.
Le secteur communal verrait une situation budgétaire proche de l’équilibre (+110,8 millions EUR),
alors que la sécurité sociale continue, momentanément, de dégager un large surplus (702,4
millions EUR). Or, dans une perspective de long terme, la sécurité sociale luxembourgeoise fait
apparaître l’un des déséquilibres les plus manifestes et inquiétants de l’ensemble de l’Union
européenne (UE). Le résultat agrégé de l’Administration publique, qui résulte du cumul des trois
soldes partiels susmentionnés, fait état, quant à lui, d’un déficit de 330 millions EUR en 2012,
correspondant à un taux de 0,7% du PIB.
ii
Tableau 1 : Evolution des dépenses, des recettes ainsi que des soldes des différentes
entités faisant partie de l’Administration publique
En millions EUR.
Sources : Projet de budget 2012 et calculs de la Chambre de Commerce.
1. L’environnement conjoncturel mondial: des turbulences économiques et financières
persistantes
Au cours de l’année 2011, l’économie mondiale a dû faire face à une série de chocs plus ou moins
violents, tels que, notamment, les mouvements de réforme en Afrique du Nord et au Moyen Orient,
le tsunami japonais et les tergiversations autour de la dette publique de plusieurs Etats de l’Europe
du Sud, dont, en particulier, la Grèce. Actuellement, l’endettement excessif des pays développés
constitue une des menaces les plus importantes pour la conjoncture mondiale. Les chiffres de la
dette publique, du déficit budgétaire et de la balance courante des pays du G7 illustrent l’ampleur
du phénomène.
penses
2007 2008 2009 2010 2011 2012
Administration centrale 9 711,2 10 577,4 11 454,8 12 258,1 12 949,7 13 739,5
Administrations locales 1 743,8 1 893,9 2 082,1 2 142,9 2 215,2 --
curisociale 5 858,9 6 432,8 6 977,6 7 272,9 7 538,3 8 017,1
Somme des trois entités 17 313,9 18 904,1 20 514,5 21 673,9 22 703,2 21 756,6
Recettes 2007 2008 2009 2010 2011 2012
Administration centrale 10 065,2 10 519,0 10 433,7 11 209,2 12 002,5 12 596,3
Administrations locales 1 882,5 2 064,0 2 035,3 2 135,0 2 281,6 --
curisociale 6 749,4 7 517,0 7 708,1 7 902,6 8 171,6 8 719,5
Somme des trois entités 18 697,1 20 100,0 20 177,1 21 246,8 22 455,7 21 315,8
Soldes 2007 2008 2009 2010 2011 2012
Administration centrale 354,0 -58,4 -1 021,1 -1 048,9 -947,2 -1 143,2
Administrations locales 138,7 170,1 -46,8 -7,9 66,4 110,8
curisociale 890,5 1 084,2 730,5 629,7 633,3 702,4
Somme des trois entités 1 383,2 1 195,9 -337,4 -427,1 -247,5 -330,0
iii
Tableau 2 : Situation financière des pays du G7
Source : Banque de Luxembourg, Perspectives 128, 3e trimestre 2011.
Les principales puissances économiques mondiales affichent pratiquement toutes un niveau de
dette publique proche des 100% du PIB, un déficit budgétaire supérieur à la croissance nominale
de leur économie et un niveau de compétitivité faible reflété par une balance courante déficitaire.
La nouvelle phase de ralentissement conjoncturel que l’économie mondiale traverse aujourd’hui est
toutefois différente de celle de l’après-Lehman. En 2008, les stocks de biens finis au sein des
entreprises étaient à leur plus haut niveau depuis quinze ans. Le déstockage historique qui a eu
lieu par la suite a eu des effets désastreux sur la production industrielle, qui s’est contractée d’une
quinzaine de pourcents dans les grandes économies industrialisées. Aujourd’hui, les inventaires de
la majorité des pays industrialisés sont en ligne avec la demande et un nouveau déstockage massif
n’est que très peu probable1.
Toujours est-il qu’une nouvelle rechute sera douloureuse pour l’économie mondiale. En effet, les
Etats, qui lors de la dernière crise de 2008, avaient pu contrebalancer la défaillance de la demande
privée ne pourront plus absorber de nouveaux chocs, en raison de leur endettement résultant en
partie de la dernière crise.
L’économie mondiale souffre de deux courants d’évolution défavorables qui peuvent
s’alimenter réciproquement. Premièrement, une reprise beaucoup plus lente dans les pays
avancés depuis le début de l’année et deuxièmement une forte augmentation de l’incertitude
budgétaire et financière, particulièrement prononcée depuis le mois d’août 2011. Chacun de
ces courants est préoccupant en soi, mais leur conjonction et leur interaction sont
particulièrement dangereux. Des mesures énergiques s’imposent à court terme pour
améliorer les perspectives et réduire les risques. Le désendettement des économies
(secteurs public et privé, ainsi que dans le chef des ménages) risque de surcroît d’exercer
une forte pression sur la croissance à moyen terme.
Selon les projections du FMI2, la croissance mondiale va se modérer significativement, tombant à
un rythme d’environ 4% jusqu’à la fin de 2012, contre plus de 5% en 2010. Alors que le PIB réel
des pays avancés connaîtra une expansion anémique d’environ 1,5% en 2011 et 2% en 2012, les
taux de croissance des pays émergents et en développement devraient se maintenir encore à un
rythme d’environ 6% en 2012. Ces prévisions datent du mois de septembre et paraissent, de ce
fait, encore relativement optimistes.
1 Source : BCEE Asset Management, Panorama Financier n°3/2011.
2 Source : FMI, Perspectives de l’économie mondiale, Septembre 2011.
iv
Aux Etats-Unis, les derniers indicateurs d’activité sont très mitigés et confirment que la reprise
économique « solide », sur laquelle se basaient de nombreux investisseurs, est plutôt fragile. Les
données révisées de la croissance américaine sur les trois dernières années montrent que
l’expansion économique a été plus limitée qu’espérée. En Europe, les risques de retombées des
difficultés économiques et financières des pays périphériques de la zone euro se sont intensifiés.
La donne économique varie toutefois fortement selon les pays d’Europe.
Le Luxembourg, en tant qu’économie européenne la plus ouverte et dépendante du
commerce extérieur, est touché de plein fouet par la dégradation du contexte financier et
économique mondial. Au Grand-Duché, l’exposition à cette crise est aggravée par une
dégradation continue et endémique des compétitivités-coût et -prix et par des finances
publiques structurellement non-durables à long terme, mettant en question la capacité de
l’Etat à accompagner le développement socio-économique futur et à maintenir, sur le long
terme, un effort d’investissement conséquent afin de soutenir le niveau de croissance
potentielle nécessaire pour garantir la soutenabilité du modèle luxembourgeois à longue
échéance.
2. Les entreprises sous pression - un budget fondé sur des prémisses conjoncturelles
dépassées
Le premier constat que la Chambre de Commerce se doit de dresser est que le projet de
budget 2012 se base sur des prémisses conjoncturelles largement dépassées. Le taux de
croissance du PIB luxembourgeois y est estimé à 3,2%3 pour l’année 2011 et à 2,1% pour 2012. Le
taux d’inflation, quant à lui, est estimé à 2,5%, alors que les tensions inflationnistes restent fortes
sur les marchés des matières premières, et l’effet d’auto-allumage, après la tranche indiciaire
d’octobre 2011 et - le cas échéant, celle de mars ou avril 2012 - continue à jouer.
La croissance, à laquelle le Luxembourg peut désormais raisonnablement s’attendre en 2012,
tourne plutôt autour de 1%, soit à peine la moitié de la croissance sous-jacente à l’établissement du
projet de budget 20124. Le taux de chômage, qui, après s’être quelque peu redressé au cours du
1er semestre 2011, est de nouveau reparti à la hausse et pourrait se situer aux alentours de 6,5%
de la population active à la fin de l’année 2012, soit 0,3% au-dessus de l’hypothèse afférente
retenue par les auteurs du projet de budget 2012.
Il faut du reste noter que le projet de budget a été élaboré avant la révision substantielle de la
comptabilité nationale du 7 octobre 2011, qui a notamment corri vers le bas l’évolution
économique depuis 2008. Cette révision, qui est visualisée grâce au graphique ci-après, a le mérite
de souligner toute l’envergure de la crise économique et financière, un choc profond duquel
l’économie nationale ne s’est toujours pas remise.
3 La croissance au premier trimestre 2011 a récemment été révisée à la baisse pour n’atteindre que 2,9%, au lieu de
4,9%. La première estimation pour le 2e trimestre table sur une expansion de 1,9%. Etant donné la forte dégradation du
contexte économique européen à partir de l’été 2011, un taux de croissance annuel de 3,2% pour l’année 2011 semble
donc difficilement atteignable.
4 « Nombre de clignotants virent au rouge », www.chd.lu, 18 octobre 2011. Voir également les projections de la
Commission européenne de début novembre 2011.
1 / 232 100%
La catégorie de ce document est-elle correcte?
Merci pour votre participation!

Faire une suggestion

Avez-vous trouvé des erreurs dans linterface ou les textes ? Ou savez-vous comment améliorer linterface utilisateur de StudyLib ? Nhésitez pas à envoyer vos suggestions. Cest très important pour nous !