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TD/380
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AU-DELÀ DE L'UNIFICATION DES MARCHÉS : UNE COMMUNAUTÉ
MONDIALE DE COOPÉRATION ET DE CONNAISSANCE PARTAGÉE
POUR LA SÉCURITÉ ET LE DÉVELOPPEMENT
Réflexions personnelles
Rubens Ricupero
Secrétaire général de la CNUCED
Il y a des façons plus paisibles de terminer un siècle (et un millénaire)
que par une guerre doublée d'une crise économique de grande envergure et
d'alertes périodiques aux intoxications alimentaires. Cette fin de siècle
apparaît plus orageuse que sereine.
Les guerres, les crises et les psychoses d'intoxication alimentaire ont un
effet commun : elles suscitent toutes peur, anxiété, insécurité, et ce non
seulement en provoquant des souffrances bien réelles, mais aussi en menaçant de
nous priver de tout avenir. Or, comme nous vivons presque autant pour l'avenir
que pour le présent, en nous projetant constamment dans le futur, il est très
difficile d'envisager la vie sans la perspective d'un avenir meilleur.
Mais la vie n'a de sens que si, dans le présent et dans l'avenir, nous
pouvons satisfaire aux deux besoins les plus fondamentaux de l'être humain,
à savoir la sécurité et l'affection.
Les États, les gouvernements et les organisations internationales ont
initialement été créés pour assurer avant tout la sécurité. En sont-ils encore
capables dans ce monde en révolution ?
Jusqu'à ces dernières années, la plus grande menace pour la sécurité
venait du risque d'agression extérieure, de guerre entre les États. Grâce
à divers facteurs, y compris la chance, et, dans une certaine mesure aussi, avec
l'aide d'organisations internationales telles que l'Organisation des Nations
Unies, nous avons tout juste réussi à éviter une "destruction mutuelle assurée".
Toutefois, la guerre froide, "l'équilibre de la terreur", la division en deux
blocs du monde, de l'Europe, de l'Allemagne, de Berlin et du Viet Nam, les
conflits idéologiques et le communisme totalitaire sont désormais des choses du
passé. Ce n'est pas là une mince réussite, et nous devons nous en féliciter.
Cependant, à peine avions-nous écarté la menace d'un anéantissement
nucléaire que nous avons été confrontés à un autre mode brutal de destruction et
de cruauté : les guerres civiles, la purification ethnique et le génocide - au
Cambodge, en Afrique, en Bosnie et aujourd'hui au Kosovo. Ni les Nations Unies,
ni des organisations régionales ou des alliances militaires telles que l'OTAN
n'étaient conçues pour faire face à des guerres intérieures. Comment s'étonner
dès lors qu'elles aient été incapables d'en empêcher le déclenchement et
qu'elles n'aient que médiocrement réussi à les juguler une fois le cycle de la
violence engagé ?