DOSSIER - LA SITUATION ÉCONOMIQUE ET SOCIALE DES FRANÇAIS : LES CHIFFRES CLASSIQUES ET AU-DELÀ
CAHIERS FRANÇAIS N° 396 3
charges de logement n’en nit pas d’augmenter depuis
les années1960. Les ménages sont pris en tenaille entre
le coup de frein du pouvoir d’achat et la progression des
dépenses «contraintes» ou «pré-engagées», lesquelles
réduisent les dépenses «arbitrables» des consommateurs
à une peau de chagrin (graphique 2).
La hausse du poids des dépenses pré-engagées
s’explique essentiellement par une hausse du coût du
logement au cours des dernières décennies. L’insufsance
de construction de logement a conduit à un renchérissement
des loyers. Le poids des dépenses en énergie s’est stabilisé
depuis une dizaine d’années et n’explique pas la hausse du
poids du logement dans les dépenses de consommation.
Un déséquilibre de répartition des
revenus en faveur des plus de 50 ans
La hausse du poids du logement touche particuliè-
rement les classes moyennes et les jeunes générations.
Au même âge, les dépenses de logement par UC sont
plus élevées pour les plus jeunes générations que pour
les générations les plus âgées. Les classes moyennes et
les jeunes générations voient le rêve de l’ascenseur social
s’éloigner, et elles nourrissent une rancœur particulière
à l’égard d’un système social qui, à les entendre, ne les
protège plus des chocs économiques, voire les accable
d’impôts. La crainte du déclassement est grande, de même
que la peur de tomber dans la trappe de la pauvreté. De
fait, 8,6millions de personnes vivent sous le seuil de
pauvreté, avec moins de 1 000 euros par mois.
Le constat d’une inégalité de revenus entre les géné-
rations est apparu au début des années1980. Les travaux
menés au milieu des années 1990 (Chauvel, 1998),
montrent que si les générations nées jusqu’à la Seconde
guerre mondiale avaient eu à chaque âge un niveau de vie
supérieur à celui des générations précédentes, ce n’était
plus le cas à partir des générations nées après 1950. Le
phénomène s’inverse pour les jeunes générations: au
même âge, les jeunes générations gagnent relativement
moins que les générations les plus âgées. Selon la der-
nière enquête Budget des ménages de2011, le constat
reste le même: les jeunes générations gagnent moins
au même âge que celles qui sont nées vingt ans plus
tôt. En2014, les revenus disponibles bruts par ménages
restent plus élevés pour les 35-64 ans (voir graphique 4)
et en 20 ans, les revenus disponibles bruts par ménage
ont surtout augmenté pour les 65-74 ans. La «généra-
tion Hypermarchés», née entre1947 et1956 ans, qui a
entre 60 et 69 en2016, est celle qui possède le plus de
patrimoine en2015 (354100euros contre 269100euros
en moyenne). Ainsi, comme le montre Chauvel (1998),
la répartition des revenus se fait au détriment des jeunes
générations. La faiblesse des revenus des 18-29 ans, ne
s’explique pas par un écart de niveau de diplôme, puisque
les jeunes générations ont un niveau plus élevé de diplôme
Graphique 1. Évolution du pouvoir d’achat
par unité de consommation (indice 100 en 1990)
130
125
120
115
110
105
100
1990
1991
1992
1993
1994
1995
1996
1997
1998
1999
2000
2001
2002
2003
2004
2005
2006
2007
2008
2009
2010
2011
2012
2013
2014
2015
Crise des subprimes de 2008
Crise de 1993
Source : INSEE.
Graphique 2. Coefficient budgétaire des dépenses
« pré-engagées »(1) dans les dépenses de
consommation
30
25
35
40
20
15
10
5
0
33,7 %
14,8 %
1959
1961
1963
1965
1967
1969
1971
1973
1975
1977
1979
1981
1983
1985
1987
1989
1991
1993
1995
1997
1999
2001
2003
2005
2007
2009
2011
2013
2015
(1) Il s’agit ici des dépenses que l’INSEE qualifie de « pré-engagées », et dont les charges liées
au logement représentent la plus grande part.
18 120
31 670
40 110 41 200
39 570
35 310
28 290
36 030
Graphique 3. Revenu disponible brut par ménage
selon l’âge en 2014
45 000
40 000
35 000
30 000
25 000
20 000
15 000
10 000
5 000
0
Source : INSEE, enquêtes Revenus sociaux et fiscaux.
18 à 24 ans 25 à 34 ans 35 à 44 ans 45 à 54 ans 55 à 64 ans 65 à 74 ans 75 ans
et plus
Ensemble
des ménages