ASTRONOMIE Astrosurf Magazine Numéro 64 Septembre/Octobre 2013 La revue des astronomes amateurs francophones Test des correcteurs de coma Skywatcher et Kepler Gérer les détails de vos images avec Photoshop Amas de galaxies : 3 briques du Grand Mur Sous le Soleil de Serbannes - 2ème édition Observatoire Sirene : le ciel pour tous L'observatoire de l'ancien four à pain NGC 7814 vue par Marc Jousset Stellarzac à la plume et au crayon Pourquoi j'aime les mosaïques Hommage à Pierre Bourge Test du Kepler 250/4 CROA : NGC 253 Vues sur la Lune Un club triple A Le Scorpion Photo : Cyprien Pouzenc Vues du Pic 64 Prix : 6 euros rre iP e e rg u Bo 21 9 1 13 0 -2 Astrosurf Editorial Magazine Astrosurf-Magazine 5 allée du Bosc 31470 Saint-Lys Tél. : 05.34.47.10.20 E-mail : [email protected] Web : magazine.astrosurf.com Bulletin d'abonnement : page 74 La "une" d’Astrosurf Magazine (la couverture) est illustrée d’une photo ou d’un dessin parfois en relation avec un article du magazine, parfois sans lien aucun. Dans ce dernier cas c’est juste le plaisir de publier une belle image découverte au hasard de consultations sur internet qui nous guide. Alors forçons ce hasard et invitons nos lecteurs à nous faire parvenir des images illustrant notre passion : corps célestes, instruments, paysages sous les étoiles, ambiance nocturne sur les sites d’observation… Vous pourrez ainsi décrocher la "une". La Rédaction Directeur de Publication : Jean-Philippe Cazard Email : [email protected] Rédacteur en Chef : Christian Sanchez Email : [email protected] Astrosurf-Magazine est édité par : Photo René Loctin Axilone, Sarl au capital de 7622 euros 5, Allée du Bosc 31470 Saint-Lys RCS Toulouse 419 630 488 Dépôt légal à la date de parution CPPAP : 1015 K 83637 En couverture Encart : Un bon de souscription pour l'ouvrage Astrodessin est encarté dans le présent numéro. Annonceurs et partenaires : Meade France : page 2 Ciel en Fête : page 13 Optique Unterlinden : page 19 Astrodessin : pages 26 et 27 Promo-Optique : page 28 Teleskop-Service : page 28 Cosmodiff : page 33 Oversky : page 33 AMDS : page 41 Optique et Vision : page 47 Airylab : page 47 Maison de l’Astronomie : page 53 Skyvision : page 75 Association AIP : page 75 Médas : page 76 Ont collaboré à la réalisation de ce numéro : Maïcé Prévost, Marie-Hélène Desmoineaux, Marie Bignone, Serge Bertorello, Fabrice Morat, Jean Schwaenen, Eric Tinlot, Frédéric Jabet, Guillaume Cannat, Nicolas Outters, Serge Tedesco, Cyprien Pouzenc, René Loctin, Norma Desprez, Jean-Pierre Brahic, Marc Delcroix, François Colas, Christian Viladrich, Gérald Rousseau, Marc Jousset, Lionel Mulato, Hélène Legueil, Association AstroAspach Photo Cyprien Pouzenc. A paraître Astrodessin - Observation & dessin en astronomie Sortie Novembre 2013 Informations et souscription : www.astrodessin.com Impression Onlineprinters GmbH Rudolf-Diesel-Strasse 10 91413 Neustadt a. d. Aisch Allemagne Se terminant à l’aube avec un fond de ciel lumineux, ce filé d’étoiles a été réalisé au travers du cimier de la coupole du T635 de l’observatoire Sirene. Le hasard de la programmation des couvertures du magazine associe les couleurs tricolores dominantes sur cette image à l’hommage rendu à Pierre Bourge qui oeuvra au renouveau de l’astronomie amateur française. Appareil photo numérique Canon EOS 600D avec objectif Canon EF-S 10-22 mm USM utilisé à 11m à f/4,5. Compositage de 90 poses de 30 secondes à 1600 ISO. 3 6 Le ciel en sept. 2013 Retrouvez l'actualité du ciel du mois de septembre 2013 Astrosurf-Magazine N°64 14 Hommage à Pierre Bourge IN MEMORIAM 8 Astro-notes Nuits étoilées d'Auvergne, Planck à Nantes, La Prairie des Filtres, Spectro au Balcon, Quand le courant passe... 10 Actualité cométaire Quatre belles chevelues sont au programme de ce bimestre. par Eric Tinlot Vortex solaire 32 Incroyable image du Soleil en Halpha par Jean-Pierre Brahic 36 Vues du Pic Saturne, Uranus et Neptune vues par le T1m du Pic du Midi Serge Tedesco Pierre est parti dans les étoiles, lors d'un solstice d'été, rejoindre Agnès sa bien-aimée. Un vent de nostalgie souffle depuis dans le Lauragais. 20 Observatoire Sirene : le ciel pour tous OBSERVATOIRES Cyprien Pouzenc Cela fait déjà douze ans que l’observatoire a ouvert ses coupoles sous le beau ciel de Provence. 28 Test du Kepler 250/4 et correcteurs INSTRUMENTS de coma Skywatcher et Kepler Frédéric Jabet 37 Ciel à la carte Après le Skywatcher testé dans l’avant dernier numéro, partons à Taiwan chez GSO pour tester un Kepler 250/4. Nous en profitons aussi pour tester deux nouveaux correcteurs de coma fortement attendus par les amateurs en deuil du Paracorr type 1. Notre sélection d'objets du ciel profond, à découvrir ou redécouvrir. 46 Vues sur la Lune Rimae Hadley par Christian Viladrich 52 CROA : NGC 253 NGC 253 la grande galaxie du Sculpteur, observée et dessinée par Fabrice Morat. 72 Le ciel en oct. 2013 Retrouvez l'actualité du ciel du mois d'octobre 2013 34 Sous le Soleil de Serbannes 2 RENCONTRES è Norma Desprez édition 35 participants, 3 nationalités, 25 instruments et 9 catégories optiques. Les marques solaires : Daystar, Coronado, Lunt, Beloptik, Baader SolarSpectrum, APM, Baader Planétarium, Shelyack Instruments, Valméca … 42 Gérez les détails de vos images avec N O U V EA U TRAITEMENT D'IMAGES Photoshop Nicolas Outters Apprenez à mieux gérer les détails d'une image et à les accentuer tout en évitant quelques pièges classiques du traitement d'image. 48 L'observatoire de l'ancien four à pain OBSERVATOIRES Gérald Rousseau Avec le CD du Texereau offert sur : www.astroshopping.com En 2004 j’ai commencé à aménager mon propre observatoire dans un ancien four à pain. Dix mois plus tard, je faisais mes premières observations à l’intérieur. 4 Astrosurf-Magazine N°64 Sept./Oct. 2013 Septembre/Octobre 2013 54 Le Scorpion CIEL PROFOND Fabrice Morat Si tomber nez à nez avec un scorpion au détour d’un sentier crétois reste un évènement rare, tenter d’observer son effigie céleste la nuit est presque à la portée de tous. 58 Pourquoi j'aime les mosaïques ASTROPHOTOGRAPHIE Guillaume Cannat Photographier le ciel avec un APN est de plus en plus facile, mais vous pouvez améliorer la qualité de vos images en réalisant des mosaïques. 60 NGC 7814 vue par Marc Jousset CIEL PROFOND Marc Jousset En automne, dans la constellation de Pégase, se cache une galaxie dont l’avatar est une véritable star du printemps... 62 Amas de galaxies : 3 briques du CIEL PROFOND Grand Mur Lionel Mulato Abell 1367, 2151 et 1634 : trois amas de galaxies qui vont nous permettre d'appréhender la structure de notre Univers. 66 Stellarzac à la plume et au crayon CIEL PROFOND Hélène Legueil J'ai récidivé ! Il y a des trucs dans lesquels il ne faut pas mettre le nez : le bac de glaces, le paquet de Dragibus, la plaquette de chocolat... et bien le plateau du Larzac, ce gîte astro perdu au milieu de nulle part, le T1000 et l'accueil fantastique de Frédéric Géa, c'est le même combat ! 70 Un club triple A VIE DES CLUBS Association AstroAspach Nombreux sont les visiteurs qui, à la recherche de notre observatoire, passent deux fois devant celui-ci avant de le trouver. Suivez le guide ! Astrosurf-Magazine N°64 Sept./Oct. 2013 5 Le Guide du Ciel Les instruments & le guide de l'astronomie de loisir Vous envisagez, dans un avenir plus ou moins proche, de vous équiper pour observer le ciel. Votre première dépense sera de 18 euros: le coût du petit ouvrage concocté par Guillaume Cannat et consacré aux instruments et à l'astronomie de loisir. Avec Le Guide du Ciel, recueil annuel d'éphémérides, vous savez quoi observer au fil des nuits qui passent. Ce complément vous précise comment vous équiper pour observer. La partie "instruments" est consacrée à un vaste panorama des lunettes, télescopes et autres paires de jumelles proposées dans le commerce. Avant de dresser ce panorama l'auteur explique le minimum nécessaire pour acheter le bon instrument. Comme insiste l'auteur, le bon instrument ne sera pas forcément le plus gros, le plus cher. Le bon instrument sera celui qui vous conviendra le mieux pour mater les étoiles : au préalable il vous faudra bien vous connaître et définir votre projet avec précision avant de vous lancer dans un achat coup de coeur qui finira dans un coin... Occupant un tiers de ce Guide, la partie astronomie de loisir recense par ordre alphabétique, d'actualités à zodiaque une foultitude de renseignements pour vous faciliter grandement la vie d'astronome amateur. Bref! Votre premier instrument d'astronomie sera ce Guide du ciel disponible dans toutes les bonnes librairies. Le ciel en septembre 2013 A voir ou à savoir Dimanche 1er 00:25 Maximum d’activité de l’essaim des Alpha Aurigides Jeudi 5 13:36 Nouvelle Lune Vendredi 6 05:59 Rapprochement entre Vénus et Spica Dimanche 8 16:01/17:17 Occultation de 67-alpha Vir, Spica, (mv = 0,98) 18:23 Rapprochement entre Mars et M 44 Lundi 9 09:07 Maximum d’activité de l’essaim des Perséides de septembre. Mercredi 11 22:11/23:12 Occultation de 4-psi Oph (mv = 4,48) Jeudi 12 19:08 Premier Quartier Samedi 14 17:52 Opposition de l’astéroïde 324 Bamberga avec le Soleil 20:45/21:02 Occultation de 44-rhô1 Sgr (mv = 3,92) Dimanche 15 18:34 La Lune au périgée Mardi 17 21:13 Rapprochement entre la Lune et Neptune Mercredi 18 17:46 Rapprochement entre Vénus et Saturne Jeudi 19 13:13 Pleine Lune Samedi 21 01:59/03:06 Occultation de 71-epsilon Psc (mv = 4,27) Dimanche 22 22:44 Équinoxe d’automne Mercredi 25 03:00 Mercure à son aphélie 20:17 Opposition de l’astéroïde 89 Julia avec le Soleil Vendredi 27 05:56 Dernier Quartier 20:17 La Lune à l’apogée Vers la mi-septembre, la nuit noire dure une huitaine d'heures sous nos latitudes contre une douzaine d'heures pour la simple nuit (période comprise entre le coucher et le lever du Soleil). C'est durant la nuit noire, et en l'absence de toute gêne lunaire, que l'on observe le mieux les objets du ciel profond. Les planètes visibles à l'oeil nu quant à elles sont à rechercher dans le crépuscule du soir pour Vénus et Saturne; en seconde moitié de nuit pour Jupiter et Mars. Le couple planétaire du matin reçoit une belle visiteuse très attendue : la comète Ison ! Quant à Mercure son apparition au-dessus de l'horizon ouest-sud-ouest passera totalement inaperçue, la planète demeurant noyée dans les dernières lueurs du couchant. ISON, la comète de l'automne Brillant très près l'une de l'autre à la fin juillet dernier, Mars et Jupiter se sont éloignées au fil des nuits d'été, la planète géante se levant à la fin du mois trois heures avant la planète rouge. Vers la fin de la première décade le lever jovien 6 Astrosurf-Magazine N°64 Sept./Oct. 2013 Ephémérides données en temps légal (TU+2 heures) et établies pour un site d'observations de coordonnées 47°nord et 3°est. Illustrations tirées du Guide du Ciel 2012-2013 (sauf frise lunaire ) Satellites de Jupiter franchit la barre symbolique du minuit T.U. (2 heures du matin à nos montres). La planète gazeuse se repère aisément dans les Gémeaux avec sa magnitude de -2,2. A l'oculaire, le classique ballet de ses quatre principales lunes agrémente les observations au fil des nuits. Au matin du 28 septembre, de 2h44 à 2h48, les ombres de Io et d'Europe sont perceptibles sur les hautes couches nuageuses de la planète. Mars brille dans le Cancer, avant de gagner en fin de mois le Lion. Elle n'offre qu'un minuscule disque de 4,4" de diamètre apparent. Seul le déplacement de ce point rougeâtre (de magnitude de l'ordre de 2) mérite d'être suivi sur le fond étoilé. Une paire de jumelles se révèlera utile les 8 et 9 septembre pour suivre sa traversée de l'amas ouvert de la Crèche. Mars servira également à repérer la comète ISON qui se déplace sur le firmament de conserve avec la planète rouge. L'éclat de la comète, alliée à une petite taille apparente, devrait vous contraindre à utiliser un 200 mm au minimum pour la discerner sur le fond noir du ciel. Duel au couchant La bande dessinée Lucky Luke se termine traditionnellement par le cow-boy solitaire, sur son fidèle Jolly Jumper, se dirigeant vers un soleil couchant tout en fredonnant sa chanson... Début septembre le célèbre tireur d'élite du Far West, en s'orientant vers l'ouest-sud-ouest, appréciera, le Soleil une fois couché, le rapprochement de Vénus et de Saturne. En premier se déroulera le rapprochement de Vénus et de Spica, l'étoile principale de la Vierge, à compter du 5. Le 8, un mince croissant de Lune viendra s'intercaler entre l'étoile et la brillante planète. Le lendemain, le croissant lunaire brillera au sud-est de Saturne, tandis que Vénus sera sur le point de disparaître sous l'horizon. I'm a poor lonesome cow-boy and a long long way from home... Astrosurf-Magazine N°64 Sept./Oct. 2013 7 J'ai tendu des cordes de clocher à clocher ; des guirlandes de fenêtre à fenêtre ; des chaînes d'or d'étoile à étoile, et je danse. Arthur Rimbaud - Les Illuminations Astro Notes Nuits étoilées d'Auvergne Créées dans le foisonnement de manifestations initiées par l'année mondiale de l'astronomie de 2009, les Nuits étoilées d'Auvergne ont connu une deuxième édition en 2011 et une troisième se profile pour le prochain premier week-end d'automne. Organisée par un collectif d'associations d'astrams (le CARA) la manifestation se déroule sur deux jours et demi, le demi concernant le vendredi aprèsmidi dédié aux scolaires fraîchement rentrés. Les deux autres jours du weekend sont à destination des amateurs avec le panel classique d'activités proposées en la matière : ateliers, lancements de fusées à eau, conférences, observations avec des instruments les plus variés, jeux, stands des clubs organisateurs... Une dizaine de "pôles" permettront au grand public de se familiariser avec certains thèmes de la science des astres. Une vingtaine de conférences sur divers sujets seront organisées, Guillaume Cannat donnera une conférence sur la comète ISON. Point d'orgue de ces Nuits étoilées d'Auvergne : une liaison radio sera établie avec l'ISS lors d'un de ses passages observables. Pour partager la passion du ciel avec les astronomes amateurs de la région Auvergne, et d’autres régions de France, rendez-vous les 28 et 29 septembre 2013 à La Mouniaude, Chatel-Guyon, Puy-de-Dôme (45°55'07" N - 3°04'28" E). Renseignements sur le site du CARA : www.astronomie-auvergne.fr 8 Astrosurf-Magazine N°64 Sept./Oct. 2013 Planck à Nantes La Société d’Astronomie de Nantes inaugure son cycle de conférences 20132014 le vendredi 18 octobre 2013 à 21 heures. Les premiers résultats cosmologiques de la sonde Planck seront exposés par François Bouchet (Institut d’Astrophysique de Paris) dans la salle Le Bretagne (23 rue Villebois-Mareuil, 44000 Nantes) Lancé en 2009, Planck a livré en 2013 les premières cartographies en haute résolution millimétrique du ciel, qui ont affiné l’anisotropie du fond cosmologique, révélant d’infimes variations du rayonnement fossile, empreinte des fluctuations primordiales à l’origine des grandes structures de l’Univers, avant qu’il ne devienne transparent. Ces résultats ont permis d’améliorer les modèles. Planck a modifié la vision de la répartition de la matière (usuelle, matière et énergie noire) et ses dérivées (taux d’expansion, courbure de l’espace). www.san.asso.fr La Prairie des Filtres Spectro au Balcon Que Fabrice Morat, grand initiateur à l'utilisation des filtres, se rassure : nullement question de semer ses précieux auxiliaires d'observation. Cette Prairie des Filtres est toulousaine et tire son nom du filtrage des eaux de la Garonne. L'usine des eaux a quitté les lieux depuis belle lurette mais le nom est resté pour devenir emblématique d'un lieu festif de la ville rose. C'est sur cette partie herbeuse de Toulouse que se déroulera une soirée d'observations (avec filtres colorés éventuellement) organisée le samedi 28 septembre dans le cadre de Ciel en fête 2013. La spectroscopie constitue un outil essentiel pour décoder les rayons de lumière qui nous proviennent du cosmos. Aussi l'association des Pléiades (Latrape, Haute Garonne) organise un stage de découverte et d'initiation à la spectro, stage animé par David Antao, diplômé en astrophysique et grand vulgarisateur de spectres stellaires. Le stage se déroule les 12 et 13 octobre au Balcon des Etoiles, 31310 Latrape, au prix de 250 euros Renseignements, programme et inscriptions : [email protected] Quand le courant passe... entre astronomes amateurs photographes ! Dans notre précédent numéro nous avions publié une photo de Damia Bouic sur la conjonction entre Jupiter, Mercure et Vénus prise au travers d'un pylône électrique. Jean-Baptiste Feldmann nous a fait parvenir une image de la même conjonction du 25 mai prise d'un endroit tout à fait différent au travers d'une ligne à haute tension. Astrosurf-Magazine N°64 Sept./Oct. 2013 9 Observation Quatre belles chevelues sont au programme de ce bimestre : 2P/Encke, 154P/Brewington, C/2012F6 (Lemmon) et C/2012 S1 (Ison), cette dernière méritant d'être surveillée de près car son éclat pourrait nous réserver quelques surprises. Actualité cométaire Eric Tinlot C/2012 S1(ISON) Carte de champ et éphémérides de C/2012 S1(ISON) LEXIQUE Date : Date pour laquelle les paramètres sont calculés à 0h00 Temps Universel RA : Ascension Droite Dec : Déclinaison Δ : Distance Terre-Comète (U.A.) r : Distance Comète-Soleil (U.A.) Elong.: Elongation ou Angle Terre-Soleil-Comète Phase : Angle de Phase de la comète 10 Astrosurf-Magazine N°64 Sept./Oct. 2013 C/2012 F6 (Lemmon) Carte de champ et éphémérides de C/2012 F6 (Lemmon) 154P/Brewington Carte de champ et éphémérides de 154P/Brewington Astrosurf-Magazine N°64 Sept./Oct. 2013 11 2P/Encke Cartes de champ et éphémérides de 2P/Encke Tableaux de visibilité Les cartes de champ de cet article ont été réalisées avec le logiciel PRiSM. 12 Astrosurf-Magazine N°64 Sept./Oct. 2013 Astrosurf-Magazine N°64 Sept./Oct. 2013 13 In Memoriam Pierre est parti dans les étoiles, lors d'un solstice d'été, rejoindre Agnès sa bien-aimée. Un vent de nostalgie souffle depuis dans le Lauragais. Je me sens soudain habité par le devoir de mémoire en repensant à mes premiers pas en astronomie depuis la création de mon club en 1976. Hommage à Pierre Bourge Serge Tedesco La tâche n'est pas aisée tellement son œuvre est riche. En plongeant dans ma bibliothèque j'ai retrouvé divers documents susceptibles de m'aider. Je vous invite à ouvrir avec moi mon album de souvenirs astronomiques. Ciel & Fusées Bien avant la création de mon club, j'ai eu entre les mains au début des années soixante-dix, un exemplaire de Ciel & Fusées, donné par le père d'un ami (figure 1). Dans ce numéro était expliqué comment photographier la Lune avec une modeste lunette (figure 2). Les cratères lunaires étaient donc à la portée de l'astronome amateur au moment où l'homme marchait sur la Lune. Je peux dire que ma vocation a pu naitre à ce moment-là. Association Française d'Astronomie 2. Article de Pierre, sur la photographie de la Lune 1. Ciel et Fusées N°109 Pierre crée cette association en 1971 avec comme objectif de donner au plus grand nombre l'envie et les moyens de pratiquer l'astronomie. De nombreux galas virent le jour avec des échanges très fructueux entre astronomes amateurs (figure 3). Le premier rassemblement entre amateurs et professionnels s'est tenu à Nançay en septembre 1979 sous l'impulsion de Pierre. Je conserve toujours les "réponses Flash" envoyées par l'AFA, toujours bien détaillées avec le souci du détail et de la précision afin que le lecteur comprenne bien. Ciel et Espace Formidable vecteur de communication, Pierre crée la revue Ciel et Espace en 1971 (figure 4). Elle était résolument tournée vers les amateurs avec de nombreux articles sur les instruments et les observatoires réalisés par les amateurs. Il y restera le directeur pendant dix ans 4. Ciel et Espace, créée en jusqu'à son éviction en 1971 par P. Bourge novembre 1981. Nota : Mon club d'astro a bénéficié d'un abonnement gratuit à sa création. Un de mes croquis solaires avait été publié en 1977 à la plus grande joie des membres du club. Aniane A partir de septembre 1977, l'AFA va posséder son observatoire national à Aniane sur la colline de la Lauze. Trois coupoles ont été construites avec un bâtiment servant de laboratoire photo et de laboratoire d'optique. De nombreux stages y ont été dispensés pour le bonheur de 14 Astrosurf-Magazine N°64 Sept./Oct. 2013 5 et 6. Articles sur l'observatoire d'Aniane tous et sous un ciel magnifique. Le site devient très vite la capitale estivale des astronomes amateurs. Il va compter jusqu'à sept coupoles avec des instruments de 210 à 410 mm dont un schmidt de 310 (figure 5 et 6). Situé à quelques encablures de mon lieu de vacances, c'est là que j'ai rencontré Pierre pour la première fois en 1980. Après l'abandon du site après une vingtaine d'années d'activité et son pillage, il revit aujourd'hui une seconde jeunesse pour le bonheur de tous (voir liens). Astro Ciel Pierre crée cette revue en 1985 et la portera à bout de bras jusqu'en juin 1995. Il savait prodiguer des conseils en raison de son expérience dans les domaines de la conception et de la réalisation d'instruments. De nombreux articles montraient en détail le travail d'astronomes chevronnés. J'ai d'ailleurs conservé le dernier numéro N° 55 (figure 7) Triptyque magique Trois ouvrages, écrits ou co-écrits par Pierre, ont longtemps été des références pour les astronomes amateurs. Il s'agit de A l'affût des étoiles co-écrit avec Jean Lacroux (1969), La photographie astronomique d'amateur co-écrit avec Jean Dragesco & Yvon Dargery (1977) et Mon télescope & mon observatoire, pourquoi pas ? Co-écrit avec Jean-Marc Becker (1984). Ces livres ont permis à de nombreux amateurs de concevoir leur instrument et de se lancer dans l'astrophotographie (figures 8, 9 et 10). 7. Astrociel N°55 Carte du ciel et Miniciel Ces deux outils très bien conçus ont été pour tous des outils indispensables pour la connaissance et la lecture du ciel (figure 10). 8, 9 et 10. Les trois ouvrages qui ont longtemps été des références pour les astronomes amateurs Astrosurf-Magazine N°64 Sept./Oct. 2013 15 Newton "de type Pierre Bourge" va naître. La monture, inspirée par l'ouvrage de Texereau, à base d'un roulement de 2 CV et entrainée par un secteur lisse, est fiable et robuste. Pierre Bourge, voyant passer une 2CV, s'était un jour exclamé : «Tiens ! Voilà quatre télescopes qui passent !». De nombreux télescopes de ce type verront le jour au sein des clubs d'astronomie. Chasseur d'éclipses Pierre va parcourir le monde de 1954 à 2006 en passant par la Suède, Canaries, Grèce, Lybie, Kenya, Inde, Sibérie, Java, Maroc, Nouméa, Philippines, Finlande, Nouvelle Zélande, Hawai, Pérou, Mongolie, Guadeloupe, Zambie, Espagne, Egypte. Il est le détenteur du record français des observateurs d'éclipses de Soleil avec 26 déplacements dont le tour du monde en avion à l'occasion de l'éclipse annulaire du 15 11. La carte du ciel réalisée par Pierre Bourges, qui a permis à janvier 1991. Il racontera ses expériences d'observateur d'éclipses en 1999 dans son superbe ouvrage Chasseur de nombreux astronomes amateurs de connaitre le ciel d'éclipses (figure 15) Batisseur de génie CROA du 9 octobre 1933 Pierre a construit son observatoire sur la maison paternelle en 1957 en installant une coupole de 3 mètres et une trappe de 1 mètre de largeur. Le télescope est de type cassegrain de 400 mm sur une monture équatoriale dont l'axe polaire provient d'un moyeu de char détruit en 1944. Un système permettant de filmer les éclipses de Lune à partir d'un objectif américain et une caméra 35 mm y sont fixés. Le système d'entrainement en ascension droite est un vrai travail d'orfèvre. Il est constitué notamment de pièces de "Meccano" (figures 12 et 13) L'observatoire de Saint-Aubin de Courteraie sera accessible aux visiteurs lors par exemple du week-end de la Pentecôte. Extrait de la page 185 du livre Enfants terribles du cosmos : "J'avais douze ans lorsque s'est produite la pluie d'étoiles filantes du 09 octobre 1933. Ce phénomène astronomique exceptionnel, aussi grandiose qu'impressionnant n'a fait qu'aiguiser ma curiosité envers le spectacle du ciel. Il était environ 21 heures et je venais de me coucher. Mon père conduisait le cheval dans un herbage très proche de la ferme lorsque son attention fut attirée par deux météores successifs, ce qui lui sembla pour le moins inhabituel. Après avoir lâché le cheval, il regarda le ciel, il vit encore plusieurs météores. Sur le chemin du retour, il en vit d'autres et ainsi, de plus en plus. Arrivé à la maison, il vint dans ma chambre pour me dire : «il se passe quelque chose d'anormal dans le ciel, si tu veux venir voir... » En quelques instants, je fus dehors et, en compagnie de mes parents, j'assistais à un grandiose feu d'artifice, d'autant plus impressionnant qu'il était silencieux. Des dizaines de Télescope de 200mm météores semblaient émaner de la région Est du ciel, proche du zénith ; Très vite, son livre Mon télescope & mon observatoire, ils se dispersaient en éventail vers l'Ouest. Le spectacle dura environ pourquoi pas ? va faire des émules et le standard télescope deux heures, à raison de 200 météores par minute, au moment du 12 et 13. L'observatoire de P. Bourge, construit sur la maison paternelle, avec un télescope Cassegrain de 400mm de diamètre 16 14. Un télescope "de type P. Bourges" de 200mm Astrosurf-Magazine N°64 Sept./Oct. 2013 Philosophe 15. Eclipse totale de Soleil du 11 août 1999 à Hawaï maximum d'intensité. Très intrigué par ce phénomène, ainsi que mes parents, j'appris par les journalistes, les jours suivants, que la Terre venait de croiser les poussières et débris d'une comète. Mais, ce n'est que plus tard que je compris que notre planète, dans son mouvement autour du Soleil recoupe périodiquement l'orbite de la comète Giacobini-Zinner. Ce soir-là les poussières de cette comète avaient pénétré à grande vitesse dans l'atmosphère terrestre, pour s'y consumer, en nous offrant ce spectacle naturel. Je pénétrais ainsi progressivement dans le domaine étrange et fascinant de l'astronomie." Homme aux mille setups Pierre avait la capacité de concevoir son matériel, totalement adapté aux objectifs fixés. Il savait prodiguer des conseils toujours pertinents à ceux qui comme lui, voulaient fabriquer telle ou telle monture. Voici des exemples parmi tant d'autres qui permettent de photographier des éclipses de Soleil (figure 16) ou de filmer les protubérances solaires (figure 17) et enfin sa toute dernière monture (figure 18). En 2009, il écrit Enfants terribles du Cosmos, le livre qui dérange (Editions Amalthée) dans lequel il porte un regard sur le monde et la place des humains (figure 19). En dernière page, on peut y lire : "La fantastique et majestueuse Voie Lactée embellie par la scintillation des étoiles s'estompe au fil des 19. Enfants terribles années à cause de la pollution du cosmos lumineuse engendrée par l'Homme. Ainsi, dépourvue de ces repères fondamentaux, la pensée de l'Homme s'égare. Oublieux, il devient un étranger à l'Univers alors qu'il en est partie intégrante corps et âme." Astéroïde N°13674 La communauté scientifique lui rend hommage en nommant un astéroïde à son nom le 29 mars 2000 (découvert le 30 juin 1997 à l'observatoire de la Côte d'Azur au centre de surveillance des astéroïdes de Caussols). Extrait de la publication : "On lui a donné le nom de Pierre Bourge (né en 1921), astronome amateur français et popularisateur d'astronomie. Pierre fonda en 1945 une association d'astronomie et une revue qui allaient devenir plus tard l'Association Française d'Astronomie et son magasine Ciel et Espace. Observateur passionné d'éclipses totales de Soleil et constructeur de télescopes, il a été l'inspirateur d'une génération entière d'astronomes amateurs et d'amateurs devenus professionnels." 16, 17 et 18. Divers instruments et montures conçus par Pierre Bourge Astrosurf-Magazine N°64 Sept./Oct. 2013 17 Euroastro Pour terminer cet hommage, je voulais mettre à l'honneur tous ceux qui oeuvrent à la popularisation de l'astronomie dans la pure tradition de l'héritage laissé par Pierre. Et plus particulièrement Régine et Stéphane avec les rencontres Euroastro où Pierre fut présent de nombreuses fois (figure 20 et 21) Prochaines publications Son tout dernier livre devrait sortir prochainement ainsi qu'un DVD intitulé Il était une fois Pierre Bourge, interview réalisée par François Kronenberger. Merci à tous ceux qui m'ont aidé de près 20 et 21. Pierre Bourge, photographié lors de rencontres Euroastro où il fut souvent ou de loin à l'écriture de cet hommage. présent. Je dédie cet article aux enfants de Pierre et à tous ses proches. Je leur souhaite bon courage pour le futur. L'auteur Serge Tedesco Mon observatoire (Observatoire Lauragais Maurice Mary) a vu le jour, il y a peu, après avoir restauré une monture des années 60 (ci-contre). Je me passionne en ce moment pour la spectroscopie. Au sein de mon club Neptunion31 ou dans des ateliers scientifiques dans les lycées, je transmets ma passion aux nouvelles générations. J'ai aussi plaisir à retrouver mes amis astronomes amateurs sous le ciel noir du Lauragais ou sur la terrasse du Pic du Midi. Email : [email protected] Crédits photos Sur le net http://www.astrosurf.com/saf/news/PIERRE_BOURGE.html 4, 5, 6 et 12 : Ciel & Espace http://www.le-perche.fr/13703/pierre-bourge-astronome-amateur-sest-eteint 13 : page 6 d'A l'affût des étoiles http://www.le-perche.fr/13705/pierre-bourge-a-retrouve-ses-etoiles 14 : Luc Arnold http://bourge.pagesperso-orange.fr/pierre 15-22 : Serge Tedesco http://www.astrosurf.com/clubapbourge 17 : page 214 d'Enfants terribles du http://www.dailymotion.com/video/x8ppw6_bourge_people Cosmos http://www.dailymotion.com/video/xajcy4_l-odyssee-de-la-160_webcam 18 : Arnault Legoubé http://www.observatoire-aniane.com 20-21 : Stéphane Hillaire http://ol2m.astrosurf.com/RCE2010/RCE2010-TEDESCO-OL2M 18 Astrosurf-Magazine N°64 Sept./Oct. 2013 Astrosurf-Magazine N°64 Sept./Oct. 2013 19 Observatoires Cela fait déjà douze ans que l’observatoire a ouvert ses coupoles sous le beau ciel de Provence. Observatoire Sirene : le ciel Cyprien Pouzenc Dès le départ, tous les curieux d’astronomie purent s’y sentir à l’aise : nous ne privilégiions aucun public. Ni observatoire de mission, ni repère d’amateurs pointus ou foire au débutant en culotte courte, nous n’étions là que pour permettre l’accès au ciel à chacun. Je vous propose par cet article une rétrospective rapide de ces douze années passées sous le Soleil du Midi ainsi qu’un point sur l’état actuel de nos projets. Quelques retours d'expérience d'utilisateurs réguliers du site compléteront mes propos. Au coeur du Luberon L’observatoire est installé sur les hauteurs des monts de Vaucluse, dans le parc naturel régional du Luberon. Plus précisément, nous résidons sur l’une des dix-huit anciennes zones de lancement de missiles nucléaires du plateau d’Albion. Au printemps 2001, lorsque nous prenons possession des lieux, les militaires ne sont partis que depuis peu. Arrivés à onze cent mètres d’altitude, après avoir gravi les étroits lacets depuis Apt, l’ambiance est étrange. La route, alors large et entretenue, est bordée de zones militaires grillagées et barbelées, abandonnées. Les habitations sont quasi-inexistantes, la nature est entière. Alliée à la transparence d’un ciel de montagne et à l’enivrante odeur de lavande, la vue imprenable sur le mont Ventoux, le massif des Écrins et les prairies environnantes rend le paysage envoûtant. Sirene est une association loi 1901 qui gère l’observatoire. Le lieu appartient à la commune de Lagarde d’Apt et le matériel d’origine à la communauté de communes du pays d’Apt qui est le maître d’ouvrage du projet. Passé cet important investissement financier initial, nous vivons sur le seul revenu de nos prestations. Malgré les allées et venues des membres dans l’association, nous n’avons que rarement dépassé la vingtaine de bénévoles. En effet, le mode de fonctionnement n’est pas celui d’un club. L’objectif premier n’est pas de profiter des installations mais de les tenir à disposition des visiteurs. Sorti de l’animation de soirées d’observations, de visites de jour ou de l’accompagnement d’amateurs, le quotidien d’un « sirénien » est beaucoup moins céleste. Il se résume plutôt à l’entretien du matériel, des réseaux locaux (électriques ou informatiques), et à jouer de la disqueuse, perceuse, pelle, pioche, fer à souder et apéro. Le tout dans une ambiance évidemment exécrable sous le joug d’une directrice tyrannique. 20 Didier Plassard et moi-même avons installé une coupole à Sirene depuis 2010 et nous ne regrettons pas notre investissement. A l’époque, nous cherchions un site exceptionnel loin de toute pollution lumineuse et surtout avec une possibilité de maintenance sur place et des installations électriques et internet évoluées. Solange et toute son équipe de Sireniens sont aux petits soins pour nous. C’est une grande famille là-bas, on s’y sent bien, l’accueil est vraiment le point fort de cette association. Même si notre objectif est de commander notre télescope à distance, revenir sur place est toujours un vrai moment de convivialité et de retrouvailles devant une bonne bouteille et un bon repas. Nicolas Outters et Didier Plassard Observatoire Castor Sirene Astrosurf-Magazine N°64 Sept./Oct. 2013 l pour tous Page ci-contre, une circumpolaire de sept heures pour illustrer la qualité du ciel au-dessus de l'observatoire Sirene. Ci-dessus, vue d'une partie des installations de Sirene, dans la douceur d'un jour finissant, avec en premier plan la coupole ouverte du télescope de 635 mm de diamètre. Sirene est un endroit merveilleux pour l’astronomie. Mais ce n’est surement pas uniquement parce que le ciel y est si souvent superbe. Certes il m’arrive de m’extasier devant la pureté de la nuit, même perçue uniquement à travers l’écran de mon ordinateur depuis Orléans, à plus de 500 km à vol d’oiseau du plateau d’Albion. Mais ce qui en fait aussi un site étonnant, ce sont les rapports humains qui y sont attachés. Le contraste entre la brutalité monstrueuse de ce silo à missiles nucléaires, ayant eu une capacité de mort effroyable, et la gentillesse, la passion, la compétence de l’équipe de Sirene est tout à fait étonnant. Le 17 janvier 2010, je suis allé pour la première fois à Sirene, à la fin d’un stage AIP à St Michel l’Observatoire, avec l’idée d’y installer une coupole, voisine de celle de Nicolas et Didier, afin de partager joies et galères prévisibles. Les routes étaient enneigées. Damien Elisei me guidait. Arrivé à Lagarde, à la tombée de la nuit, il y avait entre 50 et 80 cm de neige sur la route. Mais l’accès à la ZL 1.2 n’était pas dégagé par les chasse-neiges. Et pourtant j’ai pu garer ma voiture devant la yourte. Solange avait dégagé à la pelle la centaine de mètres pour me faire bon accueil. C’est ça l’esprit Sirene. Un T 635 pour débuter Le matériel était originellement constitué d’un télescope Cardoen de 635 mm de diamètre résidant dans une coupole flambant neuve, d’un dobson Meade de 400 mm, d’un Newton Vixen de 200 mm sur monture GP et d’un coronographe Cardoen de 107 mm. Installés sur la dalle en béton de neuf mètres d’épaisseur chargée en son temps de protéger le missile nucléaire d’une explosion mégatonnique, les télescopes jouissent d’une stabilité exemplaire. Le T635 est d’une conception particulière. Par un jeu de miroirs intermédiaires, le flux lumineux est envoyé dans les axes creux de la monture afin de pouvoir profiter d’un poste d’observation fixe. Le principe du foyer coudé au service de l’observation visuelle. Ainsi, tout observateur peut confortablement profiter de la vue, assis sur une chaise ou un fauteuil roulant. Deux montures Trassud, ZX10 et ZX4, sont ensuite venues compléter la panoplie. Aujourd’hui, un T250, deux Celestron 8, un second Vixen 200/800, une monture Vixen GP-DX, une grosse paire de jumelles, une lunette Orion 80ED et toute une foule d’accessoires ont intégré notre parc. Le dernier venu, nommé Virtud, est un télescope prototype de 500 mm de diamètre résidant Olivier Sedan Observatoire Pollux Sirene Astrosurf-Magazine N°64 Sept./Oct. 2013 21 dans la seconde coupole, elle-même en cours de motorisation. Cet instrument robotisé, présentant des innovations technologiques originales et actuellement en phase de test, a été conçu dans le but d’opérer automatiquement des confirmations de transits d’exoplanètes. les plus aguerris du nôtre. Nous avons couramment un ou deux abris de libre permettant d’héberger l’amateur venu avec son matériel pour une ou plusieurs nuits. Sinon, des emplacements spécifiques mis en place récemment avec une arrivée électrique leurs sont réservés. Enfin, les professionnels peuvent également trouver leur compte, ce qui fut le cas avec les chercheurs de l’Observatoire de la Côte d’Azur venus opérer des mesures de turbulence depuis le T635 (et par des lâchers de ballons sondes). Un public varié Jusqu’en 2006, notre capacité d’accueil était très limitée. Nos locaux se résumaient à l’ancien bâtiment militaire accueillant auparavant les groupes électrogènes alimentant l’électronique du missile. Depuis, une yourte et une grande véranda ont considérablement amélioré notre confort ainsi que celui des observateurs. Néanmoins, n’ayant aucun couchage à proposer, ces derniers doivent toujours chercher à se loger dans les environs. Nos visiteurs sont variés. Le grand public est invité à réserver pour des visites de l’observatoire en journée avec observation du Soleil, des balades nocturnes en groupe ou des soirées découvertes personnalisées. Il peut s’agir de scolaires, d’un groupe, d’une famille voire d’une personne seule. Peu importe l’âge ou les conditions physiques et mentales. Les amateurs débutants peuvent venir apprendre à se servir de leur propre matériel, et L'arrivée des "robots" En 2005, Cécil Navick, astronome amateur résidant en banlieue parisienne, émit le désir d’installer à Sirene un instrument robotisé contrôlable à distance. Ce fut alors le début d’une nouvelle aventure, pour lui autant que pour nous. Courageux. D’autant qu’à l’époque, notre connexion internet intermittente et peu fiable n’était délivrée que par l’intermédiaire d’un modem RTC 56K ; l’ADSL n’étant pas attendu avant 2010. Sans oublier notre expérience en la matière, passablement inexistante. Courageux ? Peut-être... Inconscients, indéniablement. Notre robotisé de la première heure ne s’est pas laissé démonter. Nous non-plus. Plusieurs prestataires proposant des services de connexion haut-débit par satellite s’y sont cassés les dents. Cela fini évidemment Vue d'ensemble de la dalle et des abris. La porte du missile nucléaire est visible "sous" la coupole du T635 (coupole de gauche). Une partie des instruments installés sur la dalle béton. 22 Astrosurf-Magazine N°64 Sept./Oct. 2013 Une belle nuit d'observations en perspective. Claudine et JeanMarc Ducretet (en ombres chinoises sur la gauche) ont installé leur matériel, un Dobson de 300 mm pour le visuel et une lunette pour l'imagerie. A l'arrière plan sur la droite, la coupole du T 635 et plus loin la yourte. Image J.M. Ducretet. Installation matérielle robotisée de Cécil Navick sous abri roulant : un Newton Valméca de 400 mm, sur monture Paramount ME, équipé d'une caméra Sbig STL 11000. Sous la coupole de son observatoire piloté à distance, Olivier Sedan a installé un astrographe ASA 10N de 254mm, ouvert à 3,6, sur monture Losmandy G11. Avec cet instrument, il a obtenu, en deux heures de pose, l'image ci-dessous de la comète C/ 2009 P1 Garradd, image ayant eu droit aux honneurs de l'APOD. Astrosurf-Magazine N°64 Sept./Oct. 2013 23 Sirene est un bout de rêve, dans un joli coin de Provence, suspendu entre ciel et terre. Un endroit magique, paisible au milieu de la nature, avec des coupoles, des télescopes, et des astronomes amateurs. Solange, qui assure l’essentiel de la permanence sur le site, en est l’âme et le cœur. Nous essayons, mon amie et moi, de venir une à deux fois par an à Sirene. Nous venons d’Alsace - ce n’est pas à côté - mais cela vaut le voyage. Nous savons que nous pourrons pleinement nous adonner à notre passion pour l’astronomie. D’un côté, l’astrophotographie avec une lunette et une caméra CCD, de l’autre côté le visuel avec un Dobson 300mm. Nous sommes strictement itinérants, et évidemment nous recherchons les plus beaux ciels possibles. Installés à 1 100 mètres d’altitude, nous bénéficions d’une très bonne transparence. La pollution lumineuse est faible et la turbulence globalement bonne (FWHM souvent en-dessous de 2", régulièrement à 1,7", ponctuellement à 1,5"). La valeur courante du SQM pointé au zénith est de 21,6 mag/arcsec2. Le vent est souvent présent, avec une vitesse moyenne sur dix minutes fréquemment supérieure à 10 km/h, mais rarement au-dessus de par fonctionner, de manière étonnamment synchronisée avec la résolution des déboires liés à l’installation à contrôler. Jusqu’au jour où, sans crier gare, notre fournisseur d’accès à internet mis la clef sous la porte. Branle-bas de combat, on pose tout et on recommence. La connexion d’alors avait un débit de 256 kb en descendant, 128 kb en montant, couplée à une latence effrayante et un coût de tous les diables. Puis vint l’ADSL. 512 kb / 128 kb d’abord, 8 Mb / 800 kb aujourd’hui ! Dans la journée le matériel est remisé sous abri, la nuit venue les instruments retrouvent leur élément ! Lorsque nous venons à Sirene, c’est pour 4 ou 5 nuits, en espérant vivement y faire le plein d’étoiles. Nous avons été gâtés jusque là, le nombre de nuits claires étant toujours supérieur au nombre de nuits nuageuses ou venteuses. Nous passons toute la nuit sous le ciel, photographiant et observant avec nos propres instruments, mais de temps en temps, nous retrouvons Solange au T600 pour de belles observations avec un gros diamètre, ou nous faisons une pause à la cafétériabibliothèque, carrefour incontournable où se retrouvent les hôtes de l’observatoire autour d’un café. Sirene, c’est un très beau ciel, mais c’est aussi beaucoup de convivialité, beaucoup d’échanges et de discussions sous les étoiles. On y rencontre toute sorte de profils, de l’amateur au scientifique, du débutant jusqu’au chasseur d’images confirmé. Tout en étant très vivant, le site est calme et presque studieux. La tranquillité que chacun recherche est respectée, que ce soit pour fignoler les derniers préparatifs de sa séance photo ou pour apprécier en toute quiétude les étoiles au firmament. Nous sommes heureux d’avoir découvert cet endroit assez unique en France et nous disons un grand merci à tous les bénévoles, grâce à qui cette belle initiative a vu le jour et qui en assurent le fonctionnement toute l’année. A très bientôt à Sirene ! De par le monde Un robotisé en 2005, un autre en 2009, quatre en 2010 et le dernier en 2012. Ainsi, l’allée des robotisés compte aujourd’hui sept observatoires automatiques. Une vraie ferme de télescopes ! La plupart ont leur propre ligne téléphonique avec leur propre abonnement ADSL. Notre expérience en la matière a bien grandi, et nous pouvons correctement conseiller et accompagner tout nouvel amateur intéressé par l’aventure. Les données météo sont disponibles en temps réel sur notre site web, ainsi que la luminosité du fond du ciel via un SQM pointé au zénith. Une permanence est assurée tous les jours de l’année, et des interventions pour régler le matériel (pointage d’initialisation, collimation, mise en station, mais aussi d’un point de vue informatique, électrique, mécanique...) sont possibles. Chaque membre de l’observatoire ayant des compétences propres, nous pouvons intervenir à tous niveaux, limitant le nombre de déplacements sur place des intéressés. Un contact régulier par internet permet de connaître à tout moment le programme de chacun ou bien les problèmes rencontrés. Jean-Marc et Claudine Ducretet 24 Astrosurf-Magazine N°64 Sept./Oct. 2013 30 km/h. Il ne fait guère plus de 25°C durant la belle saison et cela peut descendre jusque -15°C l’hiver. Bénéficiant du climat provençal, la fréquence de beau temps est nettement supérieure au reste du territoire mais de forts évènements orageux peuvent ponctuer la saison estivale. L’horizon est dégagé sur 360° avec vue directe sur le massif des Écrins. Sous l'obscure clarté qui tombe des étoiles, deux Scopedome veillent dans la magie d'une nuit parfumée à la lavande... Astrophotographe sans poste fixe, il y a quelques années, j’errais tous les étés dans le sud de la France à la recherche d’endroits sympathiques pour y poser mes instruments. Et puis, en 2004, j’ai découvert Sirene : ciel magnifique, abri tout confort pour s’installer plusieurs nuits de suite et surtout un accueil à s’y sentir comme chez soi. Et le tout, au coeur d’une nature protégée, parfumée à la lavande ... Bref, on y est bien, tout simplement... C’est sûrement pour ça que, depuis, j’y retourne plusieurs fois par an. Une GP-DX disponible étant à demeure sur son pilier sous abri, pas besoin de ramener ma propre GP. Juste mes moteurs, mon C8, ma FS 60s et ma Lunt LS35dx sous les bras, et je suis fin prêt pour photographier nuits et jours. Enfin sauf les jours d’orage ou de mistral (oui, tout n’est pas parfait à Sirene... mais pas loin), heureusement le beau temps revient toujours rapidement ! Et puis, pendant que la caméra tourne, il y a toujours moyen de profiter de temps en temps du matériel alentour : un coronographe, un newton de 400 qui picote en ciel profond ou un 635mm qui m’a donné mes plus beaux souvenirs visuels de Saturne ! Et les rencontres aussi bien sûr : les autres amateurs qui viennent également avec leurs matériels, les «remotes» venus faire un petit dépannage sur leur coupole, la disqueuse à la main et des spécialités culinaires de leur région dans l’autre, le public venant découvrir le ciel de Provence toute l’année, et les membres de l’association avec qui l’on se sent comme en famille... Vous ai-je dit qu’on y est bien ? Le matériel concerné est très varié. Coupoles ScopeDome, Sirius, Skyshed ; montures Paramount, Astrophysics, Losmandy, ASA, Vixen ; instrumentation RCOS, ASA, Astrophysics, Takahashi, Officina Stellare, Valmeca, Meade, Vixen, Sbig, Apogee... Principalement pour faire de belles images. Mais nous avons également en Etienne Morelle un adepte de la photométrie stellaire extrêmement productif ! Il faut croire que la "Sirene touch" s’exporte bien. L’un d’entre-nous, Vincent Suc, est parti au Chili depuis plusieurs années pour ses études et a fréquenté les plus grands observatoires qui s’y trouvent. Il est à l’origine du projet Virtud. Quant à moi, je suis parti à la station antarctique Concordia durant un hivernage et trois campagnes d’été (2008, 2009, 2011 et 2012) pour des missions d’astronomie, de météorologie et de glaciologie. Et c’est ainsi que, chaque soir, la magie de Sirene opère. Alors que la nuit tombe et que les oiseaux cessent peu à peu de chanter, les coupoles s’ouvrent, les amateurs s’installent à leurs emplacements, le public arrive et les instruments robotisés se mettent à bouger. Ici, le ciel est à tous avec une place pour chacun. Le site Observatoire SIRENE (SIlo REhabilité pour Nuits Etoilées) 5° 29' 13" Est, 44° 00' 00" Nord Altitude : 1 100 mètres Commune : Lagarde d’Apt (84, Vaucluse) Site web : www.obs-sirene.com Astrosurf-Magazine N°64 Sept./Oct. 2013 Stéphane Poirier 25 So ie t r : e r b m e v o N 3 1 20 Astrodessin : Tout était soit lumière blanche immaculée, soit pure ombre noire. Yann Martel – L’histoire de Pi On a longtemps cantonné l’astronome amateur à dessiner les jeux de l’ombre et de la lumière à la surface de la Lune, avec quelques échappées colorées vers les planètes voisines. Quant au ciel profond, il n’était peuplé que de silhouettes fantomatiques. De nos jours, la démocratisation des instruments de grand diamètre et des instruments dédiés à l’observation du Soleil aidant, tout un univers de couleurs, de formes et de détails s’ouvre à lui : richesse et diversité des paysages lunaires, flamboiements des protubérances solaires, débauche de finesse des bandes nuageuse s de Jupiter, morphologie ciselée des galaxies, suaves tonalités colorées des minuscules nébuleuses planétaires et autres nébuleuses diffuses géantes… Situation paradoxale que de recourir à un moyen d’expression aussi vieux que le monde civilisé à une époque de prolifération d’appareils photos numériques et autres caméras CCD, puissamment secondés par toute une panoplie de logiciels de traitement d’images. Et pourtant, quoi de mieux que le crayon, ou tout autre outil de dessin, pour coucher sur le papier ce que l’on a vu au travers de l’oculaire, ce que l’on a interprété et ce que l’on a ressenti ? Au-delà de la simple reproduction, aussi fidèle que possible soit-elle, le dessin astronomique nous apprend autant sur l’objet dessiné que sur le dessinateur. Bien sûr, tout comme l’astrophotographie, le dessin astronomique nécessite un apprentissage. C’est le but de ce premier tome d’Astrodessin : vous apprendre. Apprendre à observer. Apprendre à comprendre le fonctionnement de votre œil pour l’éduquer à voir le détail fugace dans tel bras d’une galaxie. Apprendre le fonctionnement de votre lunette ou télescope pour l’utiliser à bon escient. Apprendre à utiliser les multiples outils de dessin, du banal bout de craie au traitement numérique d’images. Et qui mieux qu’une bande de copains astronomes amateurs, dynamisés par Serge Vieillard, pour guider les premiers dessins, les premiers coups de crayon du débutant ; pour remotiver ceux qui ont essayé et qui ont abandonné faute de soutien ; pour consolider les connaissances de ceux qui ont appris sur le tas ; et enfin permettre à ceux qui désirent élargir le champ des possibles d’étoffer leurs palettes d’objets observés. Auteurs : Avec les contributions de : Yohan Archambaud Serge Vieillard Xavier Camer Nicolas Biver Pierre Desvaux Alain Gérard Christian Gros Fabrice Morat Bruno Salque Bertrand Laville Yann Pothier Jean-Marc Lecleire Rainer Topler Pierre Strock Frédéric Burgeot Information et souscription : le ciel au bout des crayons Une vie pour observer, un instant pour dessiner Dicton japonais Au célèbre triptyque interrogateur où, quand et comment observer, le tome 1 d’Astrodessin a brillamment répondu. Vient maintenant le temps de savoir quoi observer… et dessiner. Le tome 2 décrit la faune cosmique en respectant la classique dichotomie : objets « faciles » de notre Système Solaire, objets « difficiles » du ciel profond. Nul besoin de vous faire un dessin pour illustrer, par exemple, le gouffre qui sépare la fulgurance du jaillissement de la couronne solaire après le deuxième contact d’une éclipse totale de Soleil de l’immuabilité, à l’échelle d’une vie humaine, des galaxies et autres nébuleuses diaphanes. Soleil, Lune, planètes, comètes, nébuleuses, amas d’étoiles et galaxies : pour chaque grande catégorie d’objets célestes, les auteurs d’Astrodessin vous prodiguent les bons conseils pour en dessiner leurs subtilités intrinsèques. Picasso se plaisait à dire que quand il n’avait pas de bleu, il mettait du rouge. En astronomie la liberté de l’artiste se heurte à la réalité du phénomène physique observé. Ici aussi, les auteurs d’Astrodessin décortiquent les objets du ciel, expliquent les processus physiques sousjacents conduisant à reproduire telle couleur ou telle forme. In fine, ne reste plus qu’à s’interroger quant au « pourquoi dessiner », Le dessein ici est double. Le dessin en astronomie est la meilleure école pour apprendre à … observer. Le premier quidam venu peut « voir » la Lune, à condition de ne pas regarder uniquement le bout du doigt indicateur. « Observer » la Lune requiert en revanche attention et persévérance. Le dessin en astronomie est un bon moyen pour appréhender la nature profonde des objets observés et ainsi à pratiquer un peu de chimie, un peu de photométrie, un peu de spectrographie … Le tout à l’insu de son plein gré. Un conseil : lisez Astrodessin dans son intégralité avant de vous lancer, tel Tartarin de Tarascon s’équipant en chasseur de lions pour traquer la bartavelle provençale, dans le dessin astronomique. Au fil des pages vous vous apercevrez que pour débuter l’équipement en matériel de dessin est dérisoire, la sophistication des méthodes et des outils ne viendra éventuellement qu’après : toute longue marche commence par un simple pas. Tome 1 : Techniques d'observation et techniques de dessin Tome 2 : Objets du ciel à dessiner Format 21 x 29,7 cm - 560 pages Prix public : 49 euros les deux tomes Prix de souscription (*) (pour les deux tomes) : 42 euros : date limite de souscription : 30 septembre 2013 (*) : Pour toute souscription reçue avant le 30 septembre(*)2013 : www.astrodessin.com Instruments Après le Skywatcher testé dans l’avant dernier numéro, nous traversons la mer de Chine pour aller à Taiwan chez GSO avec un Kepler 250/4. Nous en profitons aussi pour tester deux nouveaux correcteurs de coma fortement attendus par les amateurs en deuil du Paracorr type 1. Test du Kepler 250/4 et cor coma Skywatcher et Kepler Frédéric JABET - Airylab Le Kepler 250/4 Le Skywatcher testé dans le dernier numéro était un 200/4 pour environ 700 euros. Nous avions estimé que le rapport performance/prix était excellent. Le newton testé aujourd’hui étant un 250/4 à 490 euros, nous allons vérifier si le record du Skywatcher est battu ! Prise en main Le tube est lourd, c’est une différence de poids (!) en comparaison du léger Skywatcher. Pas de carbone ici mais un tube traditionnel en acier. En astrophotographie nous sommes probablement au-delà de la limite de ce que peut raisonnablement supporter une monture de classe moyenne comme une EQ6. Le maintien du primaire est très basique : pas de triangle de flottaison mais un système classique de maintien périphérique monobloc. L’ajustement de l’assiette du primaire se fait via un système classique de trois vis poussantes / tirantes avec des molettes de bonne taille. Les ressorts de rappel font correctement leur office et la préhension des vis est aisée. La partie avant est classique également et très proche de ce que l’on trouve chez Skywatcher. Les anneaux nous paraissent un peu sous dimensionnés vu le poids conséquent du tube. Suffisants en visuel, il faudra les renforcer par une platine supérieure 3. Araignée, secondaire et intérieur non bafflé et assez réfléchissant pour la photographie et également opter pour une queue d’aronde de type Losmandy plutôt que la dotation d’origine au format Vixen. Le porte oculaire (voir figure 2) est une déclinaison de la version courante du classique GSO que l’on trouve depuis des années sur les télescopes Kepler, Meade et autres avatars. Le tube est une version 3,5 pouces largement dimensionnée : pas de vignetage à attendre de ce côté ci. En revanche l’entrainement est un classique crayford avec un microfocuser. Ce porte oculaire est plutôt agréable et satisfera à une utilisation visuelle ou photographique avec un APN ou une caméra légère. En revanche il fléchira comme la plupart des porte oculaires d’entrée de gamme sous le poids d’une caméra plus lourde ou d’une tête binoculaire chargée et il faudra se faire insistant sur la vis de tension pour éviter de patiner. Le miroir secondaire est correctement dimensionné pour une utilisation mixte en visuel ou imagerie. Il n’y a pas de bafflage du tube ici comme c’était le cas du Skywatcher carbone : nous sommes clairement une gamme en dessous (voir figure 3). 2. Porte oculaire de 3,5 pouces 28 Astrosurf-Magazine N°64 Sept./Oct. 2013 rrecteurs de r 1. Le Kepler 250/4 sur le banc de test L’optique Mesuré à l’horizontale, le télescope montre un astigmatisme de λ/2 du fait de la déformation du primaire sous son propre poids. C’est classique pour un miroir en substrat BK7, Pyrex ou autre borosilicate, il faut aller vers les coûteuses vitrocéramiques (Zerodur, Sitall, Cervit) ou des miroirs épais pour échapper en partie à ce phénomène. Nous allons donc ignorer cet astigmatisme pour les mesures. L’analyse du front d’onde avec le Haso d’Airylab (voir figure 4) donne un résultat d’erreur PTV de 170nm (soit λ/ 3,2 dans le vert) et 29nm RMS (λ/19). Nous sommes donc clairement meilleurs que le critère de λ/10 RMS qu’annonçait GSO à une époque. Le mamelonnage s’élève à 81nm PTV, une valeur plutôt bonne pour un miroir industriel et l’aberration sphérique est négligeable. En revanche au contraste de phase l’état de surface se révèle très médiocre avec une rugosité marquée. Elle reste néanmoins comparable à celle du miroir Skywatcher (voir figure 5). Dans cette gamme de prix il est difficile de demander plus. 5. Rugosité du Kepler à gauche, Skywatcher à droite que pour le niveau de qualité de l’accastillage. Dans l’absolu si l’on met de côté l’argument prix il redevient un télescope juste correct. Nous avons aimé : - le prix très serré, - la qualité tout à fait correcte de l’ensemble de la chaîne optique. Nous avons regretté : - rien en considérant le tarif. Il y a bien mieux, mais c’est bien plus cher ! Conclusion Correcteurs de coma Kepler et Skywatcher 2 pouces Le rapport prix/performances est comme pour le Skywatcher excellent. L’optique est correcte côté forme mais présente un état de surface sans surprise à ce tarif, de même Nous avons profité du test de ce télescope pour mesurer deux nouveaux correcteurs de coma à quatre lentilles. Depuis le retrait du catalogue du Paracorr type 1 il ne subsiste en correcteur de qualité que le RCC1 de Baader. Néanmoins il est parfois difficile de se le procurer et son montage à fort tirage ne convient pas à tous les télescopes. Optique Unterlinden nous a prêté une présérie du Skywatcher et un exemplaire du nouveau correcteur Kepler. Nous nous attendions à recevoir deux clones du même produit, et possiblement eux-mêmes des clones du Paracorr I : ce n’est pas le cas ! Le Kepler et le SW sont bien deux produits complètement différents (voir figure 6). Le bloc optique du Kepler est beaucoup plus court que le Skywatcher. Il est en fait de la même taille que le Paracorr. Côté prix, le Kepler est à 80 euros quand le SW coûte presque le double à 150 euros, les tarifs sont donc très accessibles en comparaison des correcteurs Televue. Si les deux 4. Analyse du front d'onde avec le Haso d'Airylab Astrosurf-Magazine N°64 Sept./Oct. 2013 29 7. Défocalisation en µm en fonction de la position dans le champ en mm. SW en bleu, Kepler en rouge. 6. Correcteur Skywatcher à gauche, Kepler à droite correcteurs présentent des filetages M48 aux extrémités, seul le Kepler est livré avec un adaptateur pour recevoir des coulants 2 pouces. Spots diagrams sans la défocalisation Ces spots (voir figures 8 et 9) montrent la taille de l’image d’une étoile en fonction de la distance à l’axe optique. C’est donc plutôt dans le cas d’une utilisation en visuel. Ces spots prennent aussi en compte l’astigmatisme du télescope luimême : on ne peut pas dissocier celui introduit par le télescope de celui forcément introduit par le correcteur lorsqu’il travaille en dehors de l’axe. Le cercle représente la taille théorique de la tâche de diffraction dans le rouge (environ 6µm). Attention : l’échelle varie, veillez à bien prendre le cercle comme repère ! Analyse sur l’axe optique Les performances sur l’axe sont tout à fait correctes et absolument comparables dans le vert à environ 230nm PTV et 43nm RMS. Les deux correcteurs présentent un léger trefoil dû probablement à une légère contrainte des lentilles. L’aberration sphérique est quasi absente, on peut juste relever un peu de sphérochromatisme pour le SW qui présente des performances légèrement plus faibles dans le rouge (280nm PTV) sans que cela soit gênant. Nous avons donc de bonnes performances sur l’axe sans commune mesure avec les médiocres correcteurs de Ross à deux lentilles comme le MPCC ou le correcteur Telescope Service qui introduisent une importante aberration sphérique. Le Kepler augmente la focale dans les mêmes proportions que le Paracorr, le SW lui, n’a aucun effet : Spots diagrams avec la défocalisation Ce second cas est celui d’une utilisation en imagerie puisque nous prenons en compte la courbure de champ (voir figures 10 et 11). Nous limitons la distance à l’axe à 15mm (soir un capteur de 30mm de diagonale). En effet ces correcteurs ne sont pas destinés à être utilisés avec un capteur de type full frame du fait d’un vignetage important. Sur la figure 12 nous mettons en référence les spots diagram de 0 à 18mm de l’axe du Paracorr type 1 Conclusion Pour le vignetage nous avons assez logiquement l’effet inverse : en allongeant la focale le Kepler limite la perte de flux. Le correcteur Skywatcher est une vraie réussite. Non content de ne pas allonger la focale contrairement au Kepler mais aussi au Paracorr, il délivre de très bons spots diagram aussi bien en visuel qu’en imagerie grâce à une très bonne correction de la courbure de champ et d’une excellente maîtrise de la montée de la coma et de l’astigmatisme. C’est pour nous actuellement le meilleur choix en correcteur deux pouces. Du côté du Kepler nous n’avons pas les performances du Paracorr malgré un gabarit et un facteur d’augmentation de la focale proche et le fait que les deux viennent de Taïwan. La courbure est prononcée, à priori du fait d’un back focus incorrect. Néanmoins dans tous les cas les aberrations de champ sont rapidement gênantes, surtout la coma qui se révèle très mal corrigée. Notre préconisation en correcteur de coma deux pouces est donc maintenant le Skywatcher 4 lentilles (à ne pas confondre avec le modèle précédent qui était un Ross !), puis le RCC1 pour les configurations qui demandent plus de backfocus. Courbure de champ La courbure de champ est un élément critique en imagerie, mais aussi en visuel. L’œil peut compenser cette courbure mais si elle est trop prononcée elle se remarquera quand même. Nous avons mesuré la courbure de champ à 55mm de backfocus, valeur donnée pour les deux correcteurs (voir figure 7). La correction du SW est très bonne avec une défocalisation maximale de 193µm à 21mm de l’axe (capteur full frame). Du côté du Kepler les résultats sont moins bons avec une courbure prononcée. Ce résultat nous amène à douter de la valeur de backfocus recommandée ou du point où nous l’avons mesurée (« metal back « au niveau du méplat du filetage). Il est probable d’obtenir un meilleur résultat en jouant sur cette distance, il semblerait qu’il vaudrait mieux se placer à 75mm mais nous n’avons eu connaissance de cette valeur qu’après les tests. 30 Astrosurf-Magazine N°64 Sept./Oct. 2013 8. Correction Kepler à 0, 9 et 15mm de l’axe optique 9. Correction Skywatcher à 0, 9 et 15mm de l’axe optique 10. Correction Kepler à 0, 9 et 15mm de l’axe optique 11. Correction Skywatcher à 0, 9 et 15mm de l’axe optique 12. Paracorr type 1 (optique 212/3,9) à 0, 6, 12 et 18mm de l’axe optique Astrosurf-Magazine N°64 Sept./Oct. 2013 31 Images du ciel Vortex Solaire Jean-Pierre Brahic Soleil en Halpha Lunette Astro-Physics de 155mm à F/D 8.5 Caméra Bassler ACA 1300 avec Barlow 2X et filtre Halpha 1A°. Modification PST. Compositage de300 images sur 1000 acquises. Photo Jean-Pierre Brahic 32 Astrosurf-Magazine N°64 Sept./Oct. 2013 Astrosurf-Magazine N°64 Sept./Oct. 2013 33 Rencontres 35 participants, 3 nationalités, 25 instruments et 9 catégories optiques. Les marques solaires : Daystar, Coronado, Lunt, Beloptik, Baader SolarSpectrum, APM, Baader Planétarium, Shelyack Instruments, Valméca … Sous le Soleil de Serbannes Norma Deprez Cette année encore, les Rencontres des Observateurs Solaires à Serbannes eurent le succès escompté. Certes les participants ne sont pas très nombreux en regard d’autres rassemblements mais il s’agit d’une réunion purement solaire, la seule à ma connaissance et la fatigue aidant, personne ne se hasarde à une observation nocturne : il y a encore beaucoup à voir et le lendemain y suffira peut-être. Mais d’où viennent donc ces dizaines de passionnés de l’astre du jour ? En premier lieu des quatre coins de France avec l’avantage pour Serbannes d’occuper une position globalement médiane sur l’hexagone mais également des pays limitrophes. Bref on se déplace parfois de loin pour bénéficier de la présence d’un impressionnant panel d’instruments exposés par des amateurs souvent pointus dans leur domaine. Peu d’hélioscopes sont représentés cette année mais l’essentiel est bien là de la lunette standard de 120 mm à la bonne grosse lulu de 150 Istar Optical en passant par les rares hélioscopes à miroir offrant un diamètre allant jusqu’à 200 mm et ce n’est pas le petit Mak 127 (2) qui retint moins l’attention des participants particulièrement séduits par la compacité de cet instrument. Dans la catégorie « lumière blanche » il faut également citer quelques télescopes équipés d’un filtre pleine ouverture ainsi qu’une étonnante paire de jumelles de 150 mm(1), étonnante par sa rareté, stupéfiante par les images offertes. Bien sûr, les filtrations monochromatiques furent richement représentées par les marques (Lunt, Coronado, Daystar et Baader), les modèles ou les combinaisons mais également par les longueurs d’onde. En faire le tour demandait une bonne journée avec force de détails livrés sans compter par les utilisateurs tout heureux de surprendre. De 0,2 à 0,9 Angström, le chaland s’efforçait de comparer les instruments avec le souci de trouver la combinaison de rêve ou plus simplement celle conforme à son budget : « acquérir tel instrument parce que mon voisin possède le même ne me convient pas, je veux voir, manipuler, comparer et seulement ensuite prendre une décision pour le coup motivée. C’est assez onéreux ces petites bêtes …». Nous touchons bien là le but des ROS. Quelques caméras ne manquaient pas d’accompagner tout ce beau matériel . Je ne m’étendrai toutefois pas plus avant sur le sujet : je n’y connais rien mais la qualité des intervenants, bien connus de notre petit monde, ne laissait aucun doute. D’autres matériels étoffaient ce panel pourtant déjà bien fourni et je (1) Attention, un Maksutov ne peut pas recevoir un hélioscope, il s’agit là d’une construction particulière. (2) Construction artisanale. 1. Un hélioscope à miroir de Newton. 2. Norma (coorganisateur) explique et transmet sa passion. 34 Astrosurf-Magazine N°64 Sept./Oct. 2013 4 s - 2e édition 3 3. L'imagerie était également présente. ne résiste pas à vous narrer mon histoire. « Je possède un coronographe Beloptik de fabrication allemande. Il me satisfait et surprend régulièrement à l’occasion d’animations publiques. Or un autre Beloptik servi par une Zeiss Telementor trônait à proximité. Le même jour, au même endroit, dans les mêmes conditions … J’ai perçu immédiatement combien j’avais encore à évoluer ... » Côté conférences, le fonctionnement des ROS peut surprendre : la priorité est systématiquement donnée à l’observation aussi le programme établi ne cesse de varier. Tout le mérite revient aux intervenants qui réussissent à se plier aux caprices météorologiques. L’imagerie fut largement abordée mais aussi les aurores, la collimation des hélioscopes à miroir, l’usinage d’un spectrohéliographe. L’intendance pour sa part se voulait à la hauteur : l’accueil, l’hébergement et la restauration ne déçurent personne. C’est un domaine où l’expérience aidant nous avons d’ores et déjà quelques idées d’amélioration sans toutefois toucher au montant de l’inscription que nous souhaitons maintenir très bas. Nous fîmes la une du journal local (La Montagne) mais la surprise vint de France 3 Auvergne qui nous rendit visite le dimanche. Le JT régional nous gratifia le soir même d’un reportage de quelques minutes suscitant, nous l’espérons, l’éveil à notre passion. 4. De haut en bas: Accès libre à l'oculaire de l'AP 160 équipée d'un filtre Daystar,de Patrick (coorganisateur); observation avec des "draps" solaires de fabrication artisanale pour la circonstance; conférence d'un imageur bien connu; Laurent (coorganisateur) observe avec sa "bino" de luxe. Astrosurf-Magazine N°64 Sept./Oct. 2013 35 Images du ciel Les trois planètes les plus éloignées de notre système solaire imagées au Pic du Midi avec le télescope de 1 mètre le 30 juin 2013 au foyer de 17m avec correcteur de dispersion atmosphérique et un filtre rouge laissant passer l'infrarouge. Vues du Pic du Midi Marc Delcroix, François Colas - S2P/IMCCE/OMP Saturne le 30 juin 2013 à 22h02.8 TU. La vision à plus de 1000x à l'oculaire était magnifique et magique, avec des anneaux superbement détaillés. Caméra ZWO ASI120MM sans binning montrant profusion de spots plus ou moins diffus dans une bonne partie de l'hémisphère Nord sur les latitudes de la grande tempête de 2010 et avec une très bonne vue de l'hexagone polaire et de son vortex central, plus sombre. Téthys visible, Mimas à peine ont été traités à part. Copyright S2P/IMCCE/OMP/François Colas/Marc Delcroix. Uranus montrant deux bandes claires et trois zones sombres, accompagné de Titania (le plus éloigné) et d'Ariel, pris avec une caméra Basler ACA640-100gm. Copyright S2P/IMCCE/OMP/François Colas/Marc Delcroix Neptune montrant son pôle tourné vers le soleil plus brillant, et des zones plus sombres, accompagné de Triton, pris avec une Basler ACA640-100gm. Copyright S2P/IMCCE/OMP/François Colas/Marc Delcroix 36 Astrosurf-Magazine N°64 Sept./Oct. 2013 Le ciel à la carte Les saisons du Caldwell Nous avons présenté en six volets une partie du catalogue Caldwell (Astrosurf Magazine n° 58 à 63). Six fois douze objets ont été ainsi proposés aux observateurs. 72 des 109 objets de déclinaison supérieure à -40° afin de ne présenter que les objets visibles sous nos latitudes. Les amateurs fréquentant les ciels austraux trouveront en fin d'article la liste des 37 objets restants. Notre septième volet porte sur une synthèse des six épisodes précédents. Nous avons opté pour une présentation par saison bien que le catalogue Caldwell ait retenu une classification (et une numérotation des objets) par ordre de déclinaison décroissante. La présentation saisonnière offre l'avantage de proposer à l'observateur les objets au fil des nuits qui passent. Un tableau récapitulatif indique pour chaque objet sa saison de visibilité à des heures raisonnables. En page centrale nous présentons une carte céleste en projection cartésienne qui permet de couvrir tout le ciel avec l'inconvénient de déformer les constellations des régions proches des pôles célestes. Pour ne pas surcharger la carte, seules les constellations contenant des objets du présent catalogue sont nommées. Chaque objet est indiqué sur cette carte sous une représentation symbolique en fonction de sa nature. La symbolique retenue figure en légende de la carte. Sous cette carte, élaborée à partir d'un fond de carte dessiné par le logiciel Cartes du Ciel, quatre tableaux regroupent les objets de Caldwell selon la saison concernée. Les couleurs de la carte ont été choisies en fonction de la charte graphique du magazine. Les tableaux sont positionnés en relation avec les objets indiqués sur la carte au-dessus. Ce qui nous conduit à une présentation qui peut surprendre de premier abord : on remonte le temps partant de l'hiver à gauche, suivi de l'automne du printemps et de l'été! Le célèbre rémanent de supernova au voisinage de l'étoile 52 Cygni, catalogué sous le numéro 34 dans le catalague de Caldwell. Photo : P.Tosi Le tableau indique pour chaque objet du catalogue Caldwell, dans l'ordre croissant des numéros des objets, la saison de meilleure visibilité (Prin pour Printemps, Aut pour Automne et Hiv pour Hiver) et le numéro d'Astrosurf Magazine dans lequel figure la carte de repérage de l'objet. Astrosurf-Magazine N°64 Sept./Oct. 2013 37 38 Astrosurf-Magazine N°64 Sept./Oct. 2013 Astrosurf-Magazine N°64 Sept./Oct. 2013 39 Le ciel à la carte Catalogue Caldwell : au-delà du 72eme Les trente sept objets du catalogue Caldwell de déclinaison inférieure à -40° se répartissent sur 18 constellations, le Centaure avec six objets est le plus fourni. Côté nature des objets nous avons trois galaxies seulement, vingt-huit amas se répartissant à égalité entre globulaires et ouverts, cinq nébuleuses (deux diffuses brillantes et trois planétaires) et une nébuleuse obscure (C99 le célèbre Sac à Charbon dans la constellation de la Croix du Sud). Notre dernier tableau regroupe les caractéristiques de ces trente sept "caldwell" à savoir : son numéro, sa nature physique, sa constellation, son immatriculation dans les catalogues NGC ou IC, ses coordonnées équatoriales rapportées à l'équinoxe 2000,0, ses dimensions, sa magnitude visuelle et enfin pour certains sa désignation commune. 40 Astrosurf-Magazine N°64 Sept./Oct. 2013 Astrosurf-Magazine N°64 Sept./Oct. 2013 41 Traitement d'image Dans cet article, vous allez apprendre à mieux gérer les détails d'une image et à les accentuer tout en évitant quelques pièges classiques du traitement d'image. Gérer les détails de vos ima Nicolas Outters - AIP - www.astro-images-processing.fr Lorsque l'on cherche à rehausser les détails d'une image c'est toujours le fond de ciel et les étoiles qui sont dégradés en premier. Les exemples sont innombrables sur le Net. La manipulation des filtres d'accentuation des détails proposés par Photoshop est très intuitive. Par contre la gestion des masques de fusion, indispensable pour maîtriser l'accentuation des détails sans dégradation des images est assez difficile à appréhender au début. Ouvrez l'image M51 qui est à votre disposition sur le site : www.astrosurf-magazine.com/datas/ M51-RGB-3.psd Cette image qui m'a été gentiment prêtée par mon ami Jérome Rudelle, a été réalisée avec un EOS 350D. Vous constaterez que cette image comporte deux calques, un pour la luminance, l'autre pour la couleur (voir figure 1). Cette image est douce mais manque de contraste et paraît presque floue. Ci-contre, sur les figures 2 à 4, on peut voir un agrandissement de cette image après diverses "accentuations des détails" effectuées à l'aide de filtres de Photoshop. Il est clair que ces trois filtres apportent un plus non négligeable mais en contrepartie dégradent l'image de manière trop importante pour être toléré. Pour pouvoir utiliser ces filtres en ne dégradant pas trop l'image, il est indispensable de savoir créer un calque "étoiles" et de maîtriser les masques de fusion. 2. Filtre "Accentuation" de 37% et de rayon 1000 pixels. L'image est plus contrastée mais le fond de ciel est trop foncé et le cœur des galaxies est saturé et dilaté. Les étoiles sont saturées et plus grosses également. Créer un calque "étoiles" Pour créer un calque "étoiles" vous devez d'abord créer un calque qui soit une fusion des calques Couleur et Luminance. Pour cela, cliquez sur le calque Luminance et appuyez simultanément sur les touches Alt- 3. Filtre "Passe-haut" de 4,5 pixels en mode incrustation. Le fond de ciel est très bruité et les étoiles sont saturées. 4. Filtre "netteté optimisée" de 2,5 pixels et à 500%. L'image gagne en contraste et en détails mais le bruit du fond de ciel et les étoiles sont fortement dégradés. 1. L'image de départ contient deux calques, un pour la luminance, l'autre pour la couleur. Cette image est assez douce et parait presque floue. 42 Astrosurf-Magazine N°64 Sept./Oct. 2013 ages avec Photoshop 5. Fusion puis duplication des calques Luminance et Couleur. Shift-Ctrl-E (voir figure 5, action 1). Faites ensuite une copie de ce nouveau calque à l'aide du raccourci clavier CtrlJ (voir figure 5, action 2). Sélectionnez ensuite le calque du haut et faites un filtre "Antipoussières" à l'aide du menu Filtres/Bruit/ Antipoussières et choisissez un rayon 8. Duplication de la couche qui permet de voir le plus d'étoiles de 6 pour éliminer les étoiles. (voir figure 6). Passer le calque en mode "différence" (voir figure 7) Allez dans l'onglet Couches et choisissez la couche qui permette de voir le plus d'étoiles, dans notre exemple, c'est la couche rouge. Dupliquez cette couche à l'aide d'un clic-droit de la souris (voir figure 8). Cliquez sur la couche Rouge Copie et faites un réglage de niveaux (raccourci clavier Ctrl-L) jusqu'à saturer les étoiles (voir figure 9) Cliquez sur l'icône Récupérer la couche comme sélection (voir figure 10), vos étoiles vont clignoter. Dilatez la taille de votre sélection grâce 6. Application d'un filtre antipoussière 9. Saturation des étoiles 11. Renommage de la sélection 12. Suppression du calque "Fusion CtrlAlt-Shift-E au menu Sélection/Modifier/Dilater de 2 pixels. Faites un contour progressif de 1 pixel, à l'aide du menu Sélection/Modifier/ Contour progressif et mémorisez cette sélection avec le menu Sélection/ Mémoriser la sélection, puis nommez cette sélection "étoiles". (voir figure 11). Jetez à la corbeille le calque du haut, vous devriez voir clignoter les étoiles de votre image en couleur. Copiez et collez cette sélection d'étoiles, ce qui créera un nouveau calque que vous pouvez nommer "étoiles". Jetez enfin le calque juste en dessous (voir figure 12) Désélection du fond de ciel 7. Passage du calque en mode "différence" 10. Icône "Récupérer la couche comme sélection" Astrosurf-Magazine N°64 Sept./Oct. 2013 43 Décochez l'icône en forme d'œil du calque "étoiles" et du calque "couleur" et faites une copie du calque Luminance (raccourci clavier Ctrl-J), nommez-le "Luminance filtre accentuation". Transformez ce calque en masque 13. Création du masque d'écrêtage 16. Modification du masque de fusion pour éviter la saturation du coeur des galaxies 14. Masque de fusion à côté du masque d'écrêtage d'écrêtage à l'aide du menu Calques/ Créer un masque d'écrêtage(voir figure 13). Dans l'onglet Couches, cliquez sur n'importe quelle couche et cliquez sur l'icône ronde pointillée pour "récupérer la couche comme sélection". Dans l'onglet Calques , cliquez sur l'icône rectangulaire pour "ajouter un masque de fusion. Vous devriez voir votre masque de fusion juste à côté du masque d'écrêtage (voir figure 14). Sauvez ce fichier et nommez le M51llrgb-filtres.psd, il vous resservira plus tard. alors le reste est très simple et très intuitif. Les filtres que nous allons passer en revue peuvent être utilisés dans cet ordre mais c'est l'image qui vous guidera avec l'expérience. Soyez donc patient et ne forcez pas les choses lorsque c'est inutile. Filtre "Accentuation des contrastes" J'utilise ce filtre dès le début car c'est celui qui me permet de donner du "peps" à l'image. Cliquez sur le calque Luminance filtre accentuation et activez le filtre "Accentuation" à l'aide du menu Filtres/Renforcement/ Accentuation. Choisissez un gain entre 20 et 50% et un rayon entre 500 et 1000 pixels. Dans notre exemple j'ai choisi un gain de 34% et un rayon de 1000 pixels (voir figure 15). Ce filtre va permettre de contraster la galaxie mais en contrepartie le cœur des galaxies va être saturé et le fond de Filtres accentuation ciel va diminuer d'intensité. Les étoiles sont déjà protégées par le calque Si vous maitrisez bien la création du "étoiles". Il va falloir retravailler le calque "étoiles" et que la gestion des masque de fusion déjà existant en masques de fusion ne vous gêne pas, noircissant les deux cœurs des galaxies. Pour cela choisissez le pinceau de couleur noire dans la boite à outils avec une opacité de 30% cachez les zones centrales sur le masque de fusion en tamponnant plusieurs fois de suite (voir figure 16) Filtre "Passe-haut" Ce filtre est très intéressant car il permet surtout de contraster les zones foncées comme les bandes de poussières dans des galaxies ou nébuleuses mais également certaines zones qui demandent à être contrastées. Commencez déjà par fusionner les deux calques "Luminance filtre accentuation" et "Calque luminance copie" à l'aide du menu Calques/ fusionner avec le calque inférieur et copiez cette fusion une deuxième fois. Transformez ce calque en masque d'écrêtage et modifiez le mode en "Incrustation" (voir figure 17) Faites un filtre "Passe-haut" à l'aide du menu Filtres/Divers/Passe-haut et choisissez un rayon entre 3 et 10 pixels. 18. Application du filtre "Passe-haut" 15. Filtre "Accentuation des contrastes" 17. Passage du masque d'écrêtage en mode "Incrustation" 44 19. Ajustement du masque de fusion noir Astrosurf-Magazine N°64 Sept./Oct. 2013 20. Création d'un masque de fusion à partir d'un masque noir et de coup de pinceau blanc. Filtre "Netteté optimisée" 18. Résultat de l'application du filtre "Passe-haut" 19. Application du filtre "Netteté optimisée" Dans notre exemple, la bonne valeur est 4,5. (voir figure 18). Créez un masque de fusion noir en cliquant sur l'icône et en appuyant simultanément sur la touche Alt. Dessinez avec le pinceau de couleur blanche sur le masque de fusion noir de façon à faire ressortir les bandes de poussières de la galaxie (voir figure 19). Le résultat du passage de ce filtre "Passe-haut" est visible sur la figure 20. 21. Résultat final après application des trois filtres d'accentuation des détails Astrosurf-Magazine N°64 Sept./Oct. 2013 45 Ce filtre est l'un de ceux que j'utilise le plus car il permet de travailler sur d'innombrables petites zones dans l'image. Couplé avec un masque de fusion noir et un pinceau de très petite taille il peut révéler votre image. Pour ce faire, nous devons revenir en arrière dans notre traitement. Fermer le fichier de travail et ré-ouvrez le fichier M51-llrgb-filtres.psd Cliquez sur le calque Luminance filtre accentuation (bien vérifier que le cadre blanc entoure le calque et non le masque de fusion). Faites un filtre "Netteté optimisée" à partir du menu Filtres/ Renforcements/Netteté optimisée. Commencez déjà par un gain de 500% pour voir les zones qui changent, choisissez un rayon entre 1 et 4 pixels en fonction de votre focale ou de votre échantillonnage. Dans notre exemple nous sommes à 160% et à 2,5 pixels de rayon (voir figure 19) Vous pouvez soit utiliser le masque de fusion existant de votre fichier, soit en refaire un nouveau à base de masque noir et de coup de pinceau blanc (voir figure 20) Le résultat final est visible sur la figure 21. Ces trois filtres (Accentuation, Passehaut et Netteté optimisée) sont des filtres très utiles mais ils doivent être bien maitrisés par l'utilisation du calque étoiles et du masque de fusion. Gardez bien à l'esprit qu' un bon traitement ne se voit pas. Aussi, ayez la main légère sur les réglages. Analysez vos images le lendemain après une bonne nuit de sommeil, vous serez surpris de voir que le traitement a été souvent trop exagéré. N'hésitez pas à sauvegarder souvent vos fichiers de travail ! Vues sur la Lune Image de Christian Viladrich prise le 22 août 2008. Celestron 14 avec extender QX1.6 Takahashi équipé d'une caméra Skynyx 2.1M et filtre rouge Astronomik. Compositage de 1000 images avec temps de pose unitaire de 27 ms. Le point rouge indique le site d'alunissage d'Apollo 15. Okay, Houston. The Falcon is on the Plain at Hadley. Longue de 80 kilomètres, cette rainure se développe à partir du cratère Béla, cratère d'une dizaine de kilomètres et à la forme allongée. A mi-parcours la rainure Hadley effleure un cratère d'une quinzaine de kilomètres, puis une dernière courbe et elle repart vers le Marais de la Putréfaction. A proximité de ce dernier coude, le 30 juillet 1971 à 22h16 T.U. Dave Scott posait le Falcon et en avertissait le centre de contrôle de Houston. Débutait ainsi Apollo 15, la plus belle des missions lunaires... La chaîne des Apennins sépare la Mer des Pluies (au sud) de celle des Vapeurs (au nord). Une succession de monts forme cette chaîne montagneuse : Wolf, Hadley, Bradley, Huygens et Ampère. Sur le versant sud un cratère d’une vingtaine de kilomètres, Conon, est largement visible. Le versant nord domine le Marais de la Putréfaction à la surface parcourue par de nombreuses rainures parallèles aux Apennins. Une de ses rainures se distingue par sa forme sinueuse : la rainure Hadley lovée au pied des monts du même nom. 46 Astrosurf-Magazine N°64 Sept./Oct. 2013 Astrosurf-Magazine N°64 Sept./Oct. 2013 47 Observatoires En 2004 j’ai commencé à aménager mon propre observatoire dans un ancien four à pain. Dix mois plus tard, je faisais mes premières observations à l’intérieur. L'observatoire de l'ancien f Gérald Rousseau Mais un observatoire n’est pas quelque chose d’immuable dans le temps. Il y a toujours quelques modifications à effectuer. Ma première modification a été la construction d’un pilier béton avec un plancher en bois « suspendu », c’est-à-dire des bastaings en bois fixés directement dans les murs et non posés au sol. Ce qui évite toute vibration lorsque je marche dessus lors des observations. Ma deuxième modification intervenait en 2010 lorsque je changeais la monture et le télescope. En effet, le tube du nouveau télescope heurtait le mur, le pied colonne n’étant pas situé au centre du local. Pour pouvoir observer vers l’est et le sud, il a fallu décaler le pied légèrement plus vers le nord-ouest. Si mon ancien C8 sur monture GPDX ne rencontrait pas de limitation, il en était autrement avec mon Newton de 250 mm. Il a fallu entailler une partie du mur côté nord-ouest à la meuleuse (les murs ont une épaisseur de 70 centimètres). Ma troisième modification, en été 2011, était plus complexe. J’ai motorisé la trappe de l’observatoire de façon à réaliser du remote. J’ai pour cela adapté une motorisation de porte de garage basculante. Habituellement, cette motorisation est fixée au milieu de la porte ; ici, il a fallu la décaler sur un des côtés. Afin de ne pas créer de déséquilibre, j’ai placé un système de contrepoids du côté opposé. J’en ai aussi profité pour rénover une partie de la toiture dégradée à la suite de mauvaises conditions météorologiques. Ma quatrième et dernière modification en date portait sur le pilotage à distance (remote) de l’installation avec un ensemble de matériel Ethernet. Etat général de la dépendance abritant l'ancien four à pain... avant les travaux de construction de mon installation astronomique. Construction de l’observatoire Le lieu de la construction était la première chose à définir. J’optai pour le meilleur emplacement possible sur mon terrain en tenant compte de la maison et des arbres. Rénover cet ancien four à pain m’aurait coûté aussi cher qu’édifier un nouveau bâtiment. Illustration du déplacement de la trappe de toit de l'observatoire pour accéder au ciel. 48 Astrosurf-Magazine N°64 Sept./Oct. 2013 four à pain Ma seconde option portait sur le choix d’un toit ouvrant au lieu d’une coupole. La coupole avait ses avantages, comme éviter le vent et les lumières parasites du voisinage, l’éclat de la pleine lune... Elle présentait aussi ses inconvénients, car elle ajoutait de la complexité au moment de la conception du remote et demandait un entretien plus important. Mon choix a donc été de réaliser un toit de type allsky. J’évitais la "classique" charpente sur roulettes pour utiliser une porte de garage basculante, porte montée de façon à glisser en suivant une légère pente vers l’ouest. Il aurait été plus judicieux de l’escamoter côté nord mais la maison, située côté est, ne me permet pas d’observer en dessous de 25°. Un système de fixation en trois points évite d’avoir à l’extérieur un support en fer constituant une zone inutile et dangereuse, surtout quand les enfants jouent dehors. En démontant le four à pain, j’ai récupéré les briques que j’ai réutilisées en muret à l’intérieur, tout en conservant sa forme circulaire. C’est ce qui m’a posé des problèmes, par la suite, lors de l’installation du Newton. Le nouveau télescope heurtant le mur, j’ai effectué une découpe dans le mur, coté nord-ouest, pour laisser passer le tube. Si le mur en pierre calcaire de 70cm d’épaisseur est un bon isolant l’été, il n’en est pas de même pour la porte métallique. J’ai donc rapidement calfeutré cette dernière à l’aide de plaques de polystyrène extrudé de 2cm collées. Celles-ci avaient la fâcheuse tendance à se décoller. Je les ai recollées à deux reprises. La meilleure solution fut de les fixer en réalisant un cordon type silicone sur le pourtour. gauche au contrepoids, en passant par deux roulettes de renvoi d’angle. L’ensemble de la motorisation du toit est pilotable à distance, en local avec un bouton poussoir ou par internet à l’aide d’un boîtier d’interface de contrôle. Travaux en cours pour la toiture de l'ancien four (photo du haut) et pour le plancher en bois "suspendu" fixé dans les murs (cidessous). Motorisation de l’observatoire Comme je l’ai expliqué plus avant, le déplacement du toit de l’observatoire a été réalisé à l’aide d’une motorisation de porte de garage basculante. Celle-ci étant généralement placée en milieu de porte, je l’ai déportée sur le côté droit. En ouverture, elle s’arrête suivant un temps réglable et à la fermeture suivant le couple appliqué. Problème : dans l’observatoire, la fermeture se fait vers le haut et donc, l’ouverture vers le bas, contrairement à une vraie porte de garage. J’ai trouvé une astuce toute simple : inverser le sens de rotation du moteur (banale motorisation électrique, en continu, sous 24 volts). Afin que la trappe ne parte pas de travers lors de sa traction, j’ai ajouté, côté gauche, un contrepoids. J’ai placé un tube d’évacuation en PVC de 140 mm en position verticale, fixé le long du mur à l’extérieur, dans lequel j’ai glissé des poids d’haltère en fonte. Un câble en inox relie la porte du côté Astrosurf-Magazine N°64 Sept./Oct. 2013 49 Le télescope est remisé à l'horizontale avant la fermeture de la trappe de toit. Vue plongeante dans l'observatoire. On constate que le piedcolonne n'est pas situé au centre de la pièce. Sous le ciel du Chinonais L'heureux propriétaire des lieux! Mon objectif de disposer d’un observatoire automatisé est atteint. Je ne compte plus le nombre d’heures d’observation. En effet je peux réaliser des acquisitions tout en… dormant ! Mais je songe déjà à changer l’abri par un nouveau système permettant d’accueillir un instrument plus volumineux, toujours de type allsky et en remote. La place ne manque pas, je dispose de plus de deux hectares de terrain ! Mon ancien abri "four à pain sera conservé pour y installer instrument dédié à l’observation du soleil. Mon ciel n’est pas complètement obscur mais il vaut bien celui du Pic-du-Midi et j’en parle en connaissance de cause : je suis situé à plus de 50 kilomètres des grandes villes comme Tours, Poitiers, et Angers. Chinon, située côté nord, est masquée par une colline de quelques centaines de mètres de hauteur. Le temps d’observation annuel à l’observatoire de Chinon est de 800 heures, soit environ une centaine de nuit d’observation. Certes c’est peu par rapport au climat méditerranéen. Toujours est-il que je suis en pleine réflexion afin d'accueillir sur mon site des observatoires en remote pour des personnes désireuses de bénéficier de mes conditions d’observation. L’idée est lancée… Mise en remote La mise en remote a été ma dernière modification. Bien que je puisse piloter l’observatoire depuis n’importe où sur la Terre via une liaison Internet, je me suis contenté de ne le faire qu’en local, ou depuis mon lieu de travail pour lancer la mise en température. Après plusieurs essais, il me semblait nécessaire d’avoir un PC dédié à l’observatoire uniquement. D’abord un netbook, puis maintenant un mini PC sans aucun ventilateur (sur carte mère et alimentation)et équipé d’un disque dur SSD. Ce qui fait qu’on ne l’entend pas tourner. Celui-ci est pilotable à distance, avec le logiciel Teamviewer ou à l’aide d’une carte iKVM branchée sur le port PCI de la carte mère. Cette carte permet d’accéder directement au bouton marche/arrêt du PC et même au niveau du bios. Une carte IP800 V3 permet de commander le reste des alimentations de l’observatoire : lampe, motorisation MCMTII, caméra Audine, motorisation du porte-oculaire, motorisation du toit et système d’alarme. Une caméra IP permet de voir l’intérieur de l’observatoire. Deux points restent à résoudre : le pointage de synchronisation sur une étoile et la mise en parking automatique en fin de pause. ...sans oublier d'aménager un espace de convivialité! 50 Astrosurf-Magazine N°64 Sept./Oct. 2013 Astrosurf-Magazine N°64 Sept./Oct. 2013 51 Observation Au sommaire de ce numéro, NGC253 la grande galaxie du Sculpteur, qui est la plus brillante des galaxies "non-Messier" CROA : NGC 253 Fabrice Morat 10' Impressions visuelles et remarques C'est le plus gros morceau du groupe du Sculpteur qui inclut également de forts jolies galaxies : NGC55, NGC247, NGC300 et NGC 7793. Physiquement et visuellement, elle mérite tous les superlatifs. Son orientation nord-est/ sud-ouest comme sur les atlas saute aux yeux ainsi que son fuseau allongé (avec une inclinaison de 78°). A un 52 grossissement de 45x, son centre brillant m'a paru elliptique avec une faible étoile détachée du noyau. Cette galaxie contient en son coeur un super amas d'étoiles très massif de magnitude visuelle 14, non résolu ici. Les étoiles que j'ai perçues en fond galactique sont à une magnitude visuelle de 13,5 pour les plus faibles. Notez que la faible puissance amplificatrice employée pour ce dessin contribue à prolonger le bras sud-ouest de manière un peu exagérée. Astrosurf-Magazine N°64 Sept./Oct. 2013 Astrosurf-Magazine N°64 Sept./Oct. 2013 53 Observation Si tomber nez à nez avec un scorpion au détour d’un sentier crétois reste un évènement rare, tenter d’observer son effigie céleste la nuit est presque à la portée de tous. Il suffit de soulever à peine le regard pour le voir dans toute son entité. Les pupilles bientôt se dilatent et une faune galactique particulièrement embusquée se dévoile enfin ! Le Scorpion Fabrice Morat Scorpius quand tu nous tiens… Serait-ce ma constellation préférée ? Je ne sais mais quelque chose en elle m’a toujours attiré : ce n’est pourtant pas sa triste position sur l’horizon local de nos contrées. En région alpine, la fenêtre d’observation est pour le moins exiguë et le Scorpion me montre au méridien sud plutôt sa tête, son thorax mais difficilement sa queue. Il faut chercher ailleurs. Il y eut bien des voyages qui m’ont montré toute l’étendue et l’ampleur de cette constellation. Aux Canaries, il faut déjà lever davantage la tête et le Scorpion commence à se fondre parmi les autres constellations de la voie lactée. A bien y réfléchir, ce sont les contrées plus australes comme les Açores, Madère et les jardins méditerranéens les plus au sud qui permettent de ravir l’œil nu. La Crète en fait partie. En effet, la constellation apparaît alors magistrale sur l’horizon - ce peut être la mer -, complètement étirée ; l’animal articulé ne manquant pas de sauter aux yeux. Cette illusion d’optique sur sa taille démesurée est à ranger dans le même tiroir que la sensation de grosse pleine Lune sur un horizon marin. Et puis, ce n’est pas si fréquent de rencontrer une constellation qui ressemble par sa forme à sa dénomination officielle. Cependant, si l’on s’en réfère à ces cartes célestes aux figures mythologiques, on note que le Scorpion se voit amputé de ses pinces désormais perdues dans la Balance. Combien de fois n’ai-je pas songé aux différentes représentations de cette constellation que leur donnent les autres civilisations ? Apparemment, les Perses, les Turcs et les Arabes voient dans cette partie du ciel le même arthropode prêt à se défendre. Toutes les étoiles dessinant l’appendice caudal y sont pour une bonne part dans ce choix. Enfin presque puisqu’en 2006, en plein cœur du Ténéré (Niger), des Touaregs m’apprirent qu’ils y voyaient là un palmier dattier penché, comme un marqueur dans leur calendrier 1. Principales étoiles du Scorpion 2. Carte de champ de la constellation du Scorpion réalisée avec le logiciel The Sky Version 6 54 Astrosurf-Magazine N°64 Sept./Oct. 2013 pastoral. Plus exactement, son apparition dans le ciel des régions sahéliennes indique qu’il est temps pour eux de procéder à la récolte. Toujours chez ce peuple nomade, notre queue du Scorpion représente à leurs yeux l’Autruche femelle, sûrement par opposition à la constellation voisine du Sagittaire qui est leur Autruche. Quant aux Chinois, ne vous fiez pas trop à la dénomination de l’étoile ε Sco (Wei), il est bien plus probable qu’elle désigne plutôt la queue de leur dragon d’azur, symbole incontournable de ce pays. Sur ces dires, il est intéressant de dresser la liste complète des étoiles bien nommées du Scorpion tout en vous aidant de la carte légendée cicontre. J’attire particulièrement votre attention sur la suite logique d’une blessure infligée par cet animal (visez l’étoile Basanismus située à l’est de Shaula/Lesath). Comme si, pour connaître la fin de l’histoire, il fallait suivre le cheminement des étoiles du nord au sud ! Son observation à l’œil nu Ce dessin a été réalisé tranquillement sur 4 nuits de juin (2 à 3h à chaque fois) : les trois premières nuits dans la région de Plakias (côte sud) en bord de mer de Libye et la dernière nuit dans un site d’altitude au pied de la colline de l’observatoire (centre de l’île). Le site marin m’a permis de poser le canevas stellaire et d’y dessiner les parties les plus denses de la voie lactée. L’amas globulaire M4 n’y a jamais été perçu. Le site de montagne m’a aidé à mieux percevoir les contours du cheval obscur, les plus faibles étoiles et à détacher quelques Messier du bruit de fond galactique. Même dans ce dernier lieu assez remarquable par sa transparence, M4 n’a pas été aisé à détacher. Le mode de vision indirecte a été appuyé pour celui-ci. Les nébuleuses obscures ne m’ont pas paru aussi contrastées que dans des contrées plus australes ou à la qualité de transparence supérieure. Par exemple, le Cheval obscur (Dark Horse) était bien plus évident au pied du Toubkal (Maroc) remplissant les deux dernières conditions : plus bas en latitude et ciel encore plus transparent. A noter la couleur inhabituelle que revêt Antarès vue depuis la Crète. Autant en Europe, elle apparaît la plupart du temps orangée ou rouge suivant les vues de chacun et l’état d’absorption atmosphérique. Autant sur l’île, elle m’apparut jaunâtre de façon distincte, au mieux faiblement orangée comme si Astrosurf-Magazine N°64 Sept./Oct. 2013 3. Dessin de la constellation du Scorpion par l'auteur. Version brute en haut, version légendée en bas 55 4. Constellation du Scorpion. Crédit photo Akira Fujii du bras Sgr-Car. Ce chemin laiteux se visite depuis M16 (hors dessin), passe par le duo Trifide-Lagune puis par cette "fausse comète" pour finir en beauté sur la nébuleuse η Car. Antarès profitait de la faible dispersion atmosphérique du site (hauteur plus importante sur l’horizon et hygrométrie peu élevée). Maintenant, tournons-nous vers la partie la plus brillante du dessin (située sur son bord est). Il s’agit du Grand Nuage du Sagittaire, l’une des rares structures internes de notre Voie Lactée à être visible à l’œil nu. Il se situe non loin du centre galactique qui est le centre d’une belle ellipse (tout de même 22° environ de grand axe) englobant le bulbe central galactique. Le Grand Nuage du Sagittaire est justement une partie de ce bulbe. Il apparaît brillant sur le dessin car constitué majoritairement d’étoiles géantes de type spectral K. Les imageurs font mieux ici en soulevant sa teinte jaunâtre. Appréciez particulièrement cette zone rectangulaire car pour le reste, le cœur du bulbe reste insondable dans le domaine du visible. En effet, il reste fortement obscurci par les poussières des bras internes. Pas moins de trois bras spiraux se trouvent sur notre ligne de visée dont le Norma, le ScutumCentaurus et le bras du Sagittaire-Carène. Un peu plus au sud, dans la région de M7, une autre fenêtre galactique s’ouvre également même si le célèbre amas ouvert n’est que superposé au bulbe central tout en étant plus proche de nous de 1000 al environ. Elle apparaît également assez contrastée sur le dessin. Enfin, la « fausse comète » est cette tache rendue floue par la non résolution à l’œil nu de l’amas ouvert NGC 6231. C’est l’un des points de passage obligés Les spots astronomiques de l’île de Crète Si vous patrouillez l’île d’ouest en est, vous serez étonnés d’y découvrir un relief intérieur assez escarpé avec des sommets d’altitude conséquente. Le gros du tourisme se cantonne à la côte nord et tout le sud de l’île contraste par une affluence moindre et son côté plus sauvage. En conséquence, ceux qui veulent rester les pieds dans l’eau, pourront tenter quelques sites maritimes flanqués sous les trois massifs les plus imposants de l’île que sont les monts Lefka (montagnes blanches), le massif de l’Idi et les monts Dikti, chaîne la plus orientale toujours à plus de 2000m. Mon choix s’est donc porté pour des raisons touristicoastronomiques sur la région de Plakias, bien abritée par des massifs côtiers et située au sud-est des montagnes blanches. J’avais bon espoir d’avoir un ciel correct au moins au sud d’autant plus que l’établissement hôtelier était légèrement distant du village. C’était sans compter sur la proximité d’une nouvelle zone portuaire restée éclairée toute la nuit pour des pêcheurs qui travaillent au petit matin. Toutefois, les brumes côtières de ce genre de site 56 Astrosurf-Magazine N°64 Sept./Oct. 2013 5.La grande coupole du télescope d'un mètre trente : gros plan sur l'une des rares balises extérieures qui parsèment la colline rocailleuse. même session. Avec un maximum de 0,23’’ et une valeur médiane rapportée pour le zénith de 0,4’’ (0,65’’ sur une plus longue période dans l’année), ce site n’est pas si ridicule que ça. Du côté de la transparence, le ciel est limpide et exempt de pollution lumineuse sauf dans la direction nord-est, Héraklion étant tout de même assez proche (25km à vol d’aigle). Voici mes mesures au SQM obtenues le 16 juin au cœur des nuits d’assez courte durée. En visant le centre galactique, 21,31 mag.sec -2 , en braquant sur le zénith (présence de la Voie Lactée), 21,34 mag.sec-2 et hors Voie Lactée 21,46 mag.sec-2, ce différentiel étant cohérent avec ce que j’ai pu vivre ailleurs dans le monde. Les professionnels ont mesuré ce site et il semble possible d’atteindre 21,5 / 21,6 à d’autres moments de l’année toujours pour la région zénithale. En tout cas, les rapports sont encourageants puisqu’à chaque fois, les raies de pollution lumineuse (pics en Na et Hg) sont, en intensité, en dessous des raies aurorales les plus émissives (airglow). Même si l’œil peut aspirer à mieux pour le rendu contrasté des nuées obscures, c’est largement suffisant pour produire du bon travail dans un instrument d’astronomie au jeu de l’amplification. furent négligeables. Les valeurs zénithales de mon SQM (Sky Quality Meter) furent si peu remarquables que ma mémoire s’égare (aux alentours de 21). La Voie Lactée était présente mais pas de manière structurée. Il va donc falloir se hisser plus haut… Tous les massifs précités possèdent leur propre plateau et peuvent constituer de bonnes niches pour les astronomes, les sommets environnants jouant le rôle de baffle naturel. Respectivement, vous découvrirez le plateau d’Omalos, celui de Nidas et celui de Katharo le plus oriental. Justement tout près du plateau de Nidas (centre de l’île) se cache un observatoire astronomique. Après une montée sèche au Mont Psiloritis (point culminant de l’île, alt 2456m) ou plutôt sur son col qui précède pour cause de vents violents, il était temps d’aller visiter ces discrètes coupoles. Cet Observatoire Skinakas est naturellement fréquenté par les étudiants astronomes grecs mais aussi par des astronomes allemands. Situé à 1750m d’altitude sur un pic aride et isolé, il ne possède plus désormais qu’un télescope Ritchey-Chrétien modifié de 1,29m, second en taille pour la Grèce ainsi qu’un SchmidtCassegrain de 300mm commandé à distance. La coupole du T610 allemand réputé pour ses excellentes images est partiellement abandonnée : il ne reste plus qu’une "fouille archéologique", les murs seulement, le dôme ayant complètement disparu. Lors de la prise de photos à la mi-journée, le vent était vraiment fort. Heureusement, ces dômes sont conçus pour résister à de fortes bourrasques de vents et les télescopes peuvent rester opérationnels même si les vents soufflent à 95km/h. Pour cette raison, j’ai préféré dessiner le soir bien au pied de ce mont à une altitude de 1480m. Les coordonnées arrondies de ce site sont : L= 24°54’E et φ = 35°13’N. Des études sur le seeing ont montré que la turbulence est vraiment peu fluctuante durant une L'auteur Fabrice Morat, 45 ans, découvre l’Astronomie à 15 ans en même temps que la course à pied (en 2010, il est Champion de France vétéran par équipe de course en montagne). Il commence à dessiner en 2000 et devient rapidement un rédacteur régulier de Ciel Extrême et d'AstrosurfMagazine. Sa devise : "on ne voit rien clairement tant qu’on ne l’a pas dessiné". Il est co-auteur de l'ouvrage Astrodessin (sortie Novembre 2013). 6.L'entrée du domaine et la petite coupole du 300 : le premier mot grec de la pancarte désigne le terme "observatoire" (Asteroskopio). Astrosurf-Magazine N°64 Sept./Oct. 2013 57 Astrophotographie Photographier le ciel avec un APN est de plus en plus facile, mais vous pouvez améliorer la qualité de vos images en réalisant des mosaïques. Pourquoi j'aime les mosaïq Guillaume Cannat Lorsque je passe des soirées ou des nuits à observer le ciel à l’œil nu ou avec mon télescope de Dobson, il est rare que je ne prenne pas en même temps des images de la voûte céleste. D’une part, cela me permet de conserver un souvenir plus précis de la qualité du ciel, d’autre part, j’ai toujours besoin de nouvelles images pour mes différents livres ! Avec l’amélioration incessante des capteurs électroniques, le moindre APN reflex est à présent un outil extrêmement efficace pour l’astrophotographie. Pour peu que l’on se trouve sous un ciel noir avec une Voie lactée perceptible à l’œil nu, il suffit de poser quelques secondes avec un objectif grand angle pour mettre en valeur les contours de notre galaxie. Les règles de base sont : couper l’autofocus et le flash, faire la mise au point manuellement, travailler en mode RAW, diaphragmer l’optique de deux valeurs, ne pas utiliser une sensibilité trop élevée (maximum 1 600 à 3 200 ISO selon les capteurs), utilisez un pied photo et un déclencheur pour éviter les bougés. Le mode RAW permet de récupérer toutes les données enregistrées, sans compression et, normalement, sans prétraitements potentiellement destructeurs comme c’est le cas avec le JPG. Le développement ultérieur d’un fichier RAW permet de corriger la plupart des défauts engendrés par les longues poses à haute sensibilité. Avec le logiciel livré avec votre APN ou avec un autre plus performant comme Aperture, Camera Raw ou Lightroom, vous pourrez même, dans certains cas, corriger les défauts optiques de vos objectifs : déformation, vignettage, aberration chromatique. Selon la focale de votre objectif, vous pouvez poser jusqu’à 15 ou 20 secondes sans que la rotation de la Terre n’allonge visiblement les étoiles. Pour conserver des étoiles ponctuelles, utilisez une monture équatoriale motorisée légère (Astrotrac, Sky Tracker, Polarie). Si je prends toujours quelques images avec un objectif à très grand champ pour commencer, car cela me permet de mémoriser l’ambiance à coup sûr, j’ai pris l’habitude depuis quelques années de réaliser ensuite des mosaïques plus ou moins étendues avec un petit téléobjectif pour obtenir un document final de bien meilleure qualité. Les images cicontre illustrent les avantages de la technique. Si l’image unique à grand champ est plus rapide à prendre, la mosaïque offre une bien meilleure résolution et, lorsqu’elle est rapportée à la même dimension que l’image unique, elle apparaît infiniment plus riche et définie ; l’encart montrant la même portion des deux images est assez éloquent. Il existe de nombreux logiciels (certains gratuits, d’autres payants) pour assembler les images d’une mosaïque, mais je demeure fidèle depuis sa version 1 au logiciel Autopano (Pro puis Giga) de la société française Kolor. Il fait un travail vraiment bluffant en automatique, mais permet également, si besoin, une intervention très précise sur tous les paramètres de l’assemblage. Un petit conseil pratique : n’hésitez pas à prévoir à la prise de vues un recouvrement de 20 % à 30 %. Si votre objectif n’est pas excellent sur les bords, cela vous permettra de recadrer un peu les images pour éliminer les étoiles déformées par les aberrations optiques qui nuiraient à la qualité de votre assemblage final.. L'auteur Guillaume Cannat Email : [email protected] Site : www.leguideduciel.net De gauche à droite : agrandissement à 00 % de l’image faite au 14 mm ; même zone de la mosaïque au 85 mm ; agrandissement de la mosaïque à 100 % dans la région de la nébuleuse de la Lagune. © Guillaume Cannat 58 Astrosurf-Magazine N°64 Sept./Oct. 2013 ques Ces deux images ont été prises le même soir de septembre 2012 dans les Pyrénées (étang de la Coumasse, 2 160 mètres d’altitude) avec un boîtier Nikon D700 non défiltré. Celle de gauche a été obtenue avec un objectif Nikon 14-24 mm réglé à 14 mm et diaphragmé à 4 (60 secondes de pose avec entraînement, 2 000 ISO) ; celle de droite avec un objectif Nikon de 85 mm diaphragmé à 3,2 (30 secondes de pose avec entraînement, 2 000 ISO). L’image de gauche montre seulement une portion du champ de l’objectif, celle de droite est une mosaïque de 12 champs. La lueur orange qui envahit le bas du champ est le halo de pollution lumineuse de l’agglomération de Barcelone, qui se situe pourtant à plus de 120 kilomètres à vol d’oiseau. © Guillaume Cannat Astrosurf-Magazine N°64 Sept./Oct. 2013 59 Ciel profond En automne, dans la constellation de Pégase, se cache une galaxie dont l’avatar est une véritable star du printemps... NGC 7814 vue par Marc Jousset Non, le véritable challenge est de capturer les infimes détails le long de la bande d’absorption. Bon point, le contraste de cette région est très élevé, ce qui facilite le travail de l’astrophotographe. Là où les choses se compliquent, c’est que la taille de ces détails n’est de quelques secondes d’arc… Pour espérer les révéler, on retrouve la problématique de l’imagerie planétaire, à savoir bénéficier d’un ciel stable et utiliser un échantillonnage adapté. Pour ce dernier point, l’usage d’une longue focale et d’une caméra à petits pixels est indispensable. J’ai utilisé mon Celestron C14 de diamètre 356mm et un réducteur de focale Astrophysics donnant une focale de 3 mètres et une ouverture à f/8,4. L’utilisation d’une caméra SBIG STL4022M avec ses pixels de 7,4µm donne un échantillonnage de 0,51"/pixel. Nous sommes bien dans le domaine planétaire… Si mon site souffre de pollution lumineuse, la turbulence est heureusement modérée et l’usage d’une optique adaptative SBIG AOL permet d’obtenir des images brutes avec une FWHM jusqu’à 1,5" voire moins. La brillance de l’objet a permis de limiter les poses à 12x10minutes. Les acquisitions et prétraitements sont réalisés avec le logiciel MaximDL. Le suivi est réalisé avec le capteur de guidage de la caméra et le système AOL. Dans ce cas, le travail de la monture se réduit à laisser l’étoile guide dans le champ de l’AOL, ce qui n’est pas trop contraignant pour ma monture Astrophysics AP1200. Le traitement final est réalisé à l’aide de niveaux, courbes et masques pour ressortir les extensions et limiter le fond de ciel. Les détails sont rehaussés à l’aide de filtres passehaut. L’objet NGC 7814 est une galaxie de type Sab située dans le carré de Pégase à environ 2° de Gamma Pegasi. La singularité de cet objet est d’être vu parfaitement par la tranche. Cela n’est pas sans rappeler sa grande cousine de la Vierge M104, la Galaxie du Sombrero. Située à 40 millions d’années-lumière, NGC 7814 mesure 4,7’ par 2,4’ pour une magnitude de 10,6. Ses dimensions en gros moitié de sa grande cousine et sa ressemblance lui valent le nom de Petit Sombrero. On comprend parfaitement pourquoi ! Ce bel objet est visible en automne, période où son élévation est la plus grande. Au vu de sa taille modeste, un instrument à grande focale est recommandé pour détailler la bande d’absorption qui coupe littéralement l’objet en deux. L’image La magnitude et la compacité de NGC 7814 en font un objet de magnitude surfacique élevée, de l’ordre de 13. Ce n’est donc pas un exploit de pouvoir l’imager. Le moindre instrument révèlera sa présence, même sous un ciel pollué, ce qui est mon cas à moins de 30 km de la Tour Eiffel. L’auteur Je pratique l’astrophotographie depuis l’âge de 16 ans ce qui commence à dater aujourd’hui… Le passage de l’argentique TP2415 vers le numérique s’est fait à l’époque héroïque des webcams modifiées. Depuis, le matériel a bien progressé mais tout devient lourd et les sorties d’un soir en campagne ne sont plus qu’un lointain souvenir. L’imagerie du ciel profond à moins de 30km de la Tour Eiffel est un challenge permanent mais comme je le dis souvent, tant qu’il y a de l’astrophotographie, il y a de l’espoir... 60 Astrosurf-Magazine N°64 Sept./Oct. 2013 Astrosurf-Magazine N°64 Sept./Oct. 2013 61 Ciel profond Abell 1367, 2151 et 1634 : trois amas de galaxies qui vont nous permettre d'appréhender la structure de notre Univers. Amas de galaxies : 3 briqu Lionel Mulato 1. L'amas de galaxues du Lion 62 Astrosurf-Magazine N°64 Sept./Oct. 2013 ues du Grand Mur loin ! Halton Arp s’est servi de ces trois quasars pour tenter de prouver que ces objets étaient éjectés du cœur des galaxies. Cette théorie a finalement été rejetée par la cosmologie moderne, des preuves ont confirmé que ces objets étaient à des distances bien plus lointaines. Abell 2151 : un jeune tas de galaxies Il est admis que l’amas d’Hercule, Abell 2151 (voir figure 3) résulte de l’agglomération de plusieurs petits amas de galaxies. L’amas est à 500 millions d’années-lumière de notre propre Galaxie. L’amas d’Hercule est atypique et se différencie des autres amas par sa forme irrégulière, ses nombreuses galaxies spirales, son faible nombre de galaxies elliptiques. Il n’y a pas encore, au centre de l’amas, de monstrueuses galaxies elliptiques, résultant de nombreuses fusions entre galaxies. Les caractéristiques des galaxies spirales de l’amas d’Hercule ressemblent à celles de galaxies de l’univers lointain. Elles sont riches en gaz et actives dans la formation de nouvelles étoiles. 2. L'amas Abell 1367 3. L'amas d'Hercule Abell 2151 L’Abell et la bête. L’amas de galaxies du Lion (voir figure 1), Abell 1367, dérive dans l’espace à environ 300 millions d’années-lumière de nous. Le centre de l'amas est occupé par des galaxies elliptiques massives, dont NGC 3842 qui renferme un des plus gros trous noirs connus (10 milliards de masses solaires). Le ratio de galaxies spirales/ elliptiques est assez élevé par rapport à celui des autres amas, ce qui indique qu’Abell 1367 se serait formé relativement récemment. La bête est un quasar du fond de l’espace, baptisé [VV96] J114405.3 +195603, tapis en arrière-plan au cœur d’Abell 1367 (voir figure 2). Avec son redshift de z=2,2, il frise les 10,3 milliards d’années-lumière et nous fuit à environ 80% de la vitesse de la lumière. Sa faible magnitude (mv 21) sort tout juste du bruit de fond sur l’image en négatif (identifié QSO 1). Ce quasar n’est pas tout seul, il est entouré de deux autres quasars, annotés QSO 2 et QSO3 plus près, mais toujours bien Astrosurf-Magazine N°64 Sept./Oct. 2013 63 Toutes ces caractéristiques indiquent qu’Abell 2151 est un jeune amas de galaxies. Abell 1656 : un vieux tas de galaxies Abell 1656 (voir figure 4), l’amas de Coma à environ 320 millions d’années-lumière, est un des amas de galaxies les plus étudiés. Les deux galaxies elliptiques au centre sont deux monstres (NGC 4874 et 4889) avec un diamètre de plus de 250 000 al… Elles sont bien plus massives que n’importe quelle autre galaxie de l’amas de la Vierge, dont M 87 dans laquelle nous sommes censés tous finir un jour ! Abell 1656 abrite peu de galaxies spirales (notamment NGC 4921), localisées en périphérie de l’amas. Les galaxies elliptiques occupent en majorité le centre de l’amas tandis que les galaxies lenticulaires sont réparties un peu partout. Cette distribution typique (voir figure 5) atteste d’un grand nombre de fusions entre galaxies au cours de ces derniers milliards d’années. 4. L'amas Abell 1656 5. Les différents types de galaxies de l'amas Abell 1656 La figure n°6 est une comparaison entre une acquisition avec une TSA102 F/8 et celle du VST (Survey Telescope du VLT), montrant les principales galaxies torturées par les interactions gravitationnelles. Droit dans le Grand Mur ! Abell 1367, l’amas du Lion ne voyage pas tout seul. Un pont de gaz rayonnant dans le domaine radio le relie à son proche voisin Abell 1656, l’amas de Coma (voir figure 4). Ces deux amas regroupent la majorité des galaxies du Superamas de Coma. Le Superamas de Coma fait lui-même partie d’une structure encore plus grande incluant notamment l’amas d’Hercule, Abell 2151 (voir figure 3), l’amas de la Vierge, etc. Tous ces amas sont reliés par des filaments, des feuillets, des murs de galaxies, délimitant de vaste portion d’espace complètement vide. Cette structure a été baptisée le Grand Mur. Compte tenu de ses dimensions 600x250x30 millions d’années-lumière, le Grand Mur constitue une des plus imposantes structures observées dans l’Univers. La mise en évidence indiscutable de cette structure est relativement récente (1986) et nous la devons au programme Center of 64 Astrosurf-Magazine N°64 Sept./Oct. 2013 6. L'amas Abell 1656 : imagé en haut avec une TSA102 à F/D 8 et en bas avec le VST (Survey Telescope du VLT) vitesse de fuite des galaxies, ce qui revient en fait à une distance en divisant par la constante de Hubble (environ 73 km.s-1.Mpc-1). Les galaxies les plus lointaines mesurées sur la carte sont donc à environ 700 millions d’annéeslumière. La carte suivante (voir figure 8) est la superposition de six tranches de 6° de déclinaison (CfA 2), représentant le fameux Grand Mur CfA 2. La figure 9 est une vue en plan (coordonnées équatoriales) du Grand Mur sur lequel est représentée la position approximative des trois amas détaillés précédemment. D’autres structures encore plus larges ont été mises en évidence récemment : le Grand Mur de Sloan (2003) et le Huge-LQG (janvier 2013). Astrophysics (CfA) Redshift Survey. La carte ci-dessous (voir figure 7) présente le Superamas de Coma en trois dimensions. Elle indique clairement que la répartition des galaxies dans l’Univers n’est pas homogène : les galaxies du Superamas forment un "grand bonhomme" entouré de vide. Il s’agit en fait de la toute première carte (Cfa 1) des positions des galaxies à trois dimensions. Cette carte présente une tranche du ciel de 6° de déclinaison. Les coordonnées angulaires sont en ascension droite. Les coordonnées radiales expriment la 7. Représentation du superamas de Coma. Crédit : Smithsonian Astrophysical Observatory, Geller and Huchra 1989, Science 246, 897). 9. Vue en plan (coordonnées équatoriales) du "Grand Mur" Cfa2. Crédit : Smithsonian Astrophysical Observatory 1998 Bibliographie 8. Superposition de six tranches de 6° de déclinaison (CfA 2), représentant le fameux Grand Mur CfA 2 Astrosurf-Magazine N°64 Sept./Oct. 2013 65 La référence des sites sur les amas de galaxies : http://atunivers.free.fr L’article « Une tranche de l’Univers » : http://adsabs.harvard.edu/abs/1986ApJ...302L...1D The CfA Redshift Survey : https://www.cfa.harvard.edu/~dfabricant/huchra/zcat Infos techniques sur les images présentées, réalisées avec une TSA102 F/8 et une Atik4000M disponibles sur : https://sites.google.com/site/lionelmulato/Imagerie-CCD Observation J'ai récidivé ! Il y a des trucs dans lesquels il ne faut pas mettre le nez : le bac de glaces, le paquet de Dragibus, la plaquette de chocolat... et bien le plateau du Larzac, ce gîte astro perdu au milieu de nulle part, le T1000 et l'accueil fantastique de Frédéric Géa, c'est le même combat ! Stellarzac à la plume et au Hélène Legueil C’est ainsi qu’aujourd'hui je retrouve avec gourmandise le hameau des Mares, la plateforme consacrée aux instruments et ce ciel à vous couper le souffle. Je n'en reviendrai jamais de la beauté de ce ciel. Si riche qu'il m'en fait perdre les constellations. Si riche que je dois presque me forcer à le quitter pour mettre l'œil à l'oculaire. Ce soir cela semble stable, comme souvent ici, et le SQM va allègrement atteindre les 21,5 malgré cette Voie Lactée superbement allumée. Un ciel magnifique... Mais je crois que je l'ai déjà dit. Je livre ici mes impressions de débutante sur les visions extraordinaires qui m’ont été permises. Il suffira aux observateurs plus chevronnés de se plonger dans les remarquables dessins de Fred Burgeot pour mesurer tout ce qu’un œil plus expérimenté est capable d’en tirer. Allons, plus une minute à perdre. A peine le temps de rêvasser que Le T1000 est installé. C’est un instrument superbe, impressionnant, une réalisation toute en robustesse et en finesse. Un monstre si bien dressé qu’il sait se faire oublier, pour juste devenir le prolongement de l’œil et de l’observateur. L'escabeau est fin prêt lui aussi, il suffit d’y grimper, alors en route pour un nouveau voyage ! Première étape dans le Serpent, à la rencontre de M5. Il ne faut vraiment pas longtemps pour se rendre compte qu'on a changé de dimension. Il n'est plus question ici de cafouiller à essayer de résoudre quelques étoiles sur un centre brillant : on est au cœur de l'amas globulaire ! Les étoiles sont partout, infinies et uniques, couvrant chaque infime partie du champ. C'est un envol, un plongeon. Vertigineux et magnifique ! Dans la foulée, changement de registre lors d’un petit arrêt sur un couple de galaxies, Arp199. Une petite ronde au cœur lumineux surmontée d'une compagne longue et dressée. Je crois que si son surnom ne m'avait pas été soufflé je l'aurais tout de même deviné ! Je ... ne m'étends pas davantage ! Le temps de reprendre mes esprits, voici déjà M101, toujours dans la Grande Ourse. Au T250 sous un bon ciel je l'avais jugée "bien visible, avec quelques irrégularités". La voilà transcendée. Elle est énorme, méconnaissable. Le départ des bras est remarquablement défini. Ils s'étendent, pâles et pourtant tellement présents, si loin qu’il me semble que je n’en trouverai jamais la fin. J'ai irrésistiblement envie de repousser les bords de l'oculaire ! En grossissant davantage, les zones de vide se dessinent encore plus finement. La vision gagne en relief, en profondeur, on se sent pris de vertige. Alors il me faut me raccrocher à ces trois nodosités qui se sont rapprochées, détails incroyables de ces chapelets de zones brillantes qui soulignent cette grandiose galaxie. Reprenons notre souffle, reprenons nos distances maintenant avec le Sextet de Seifert. Au plus faible grossissement se présente un triangle de formes lumineuses, prolongé par deux extrémités qui semblent fuser. Quelques variations d'oculaires plus tard je comprends enfin le positionnement des galaxies. Cet agencement particulier et le jeu des nuances en font un objet vraiment très esthétique. Et comme à chaque passage ici, ce n'est que bien plus tard que je réaliserai la chance que j'ai eue d'y avoir accès ! 1.NGC 6210, petite nébuleuse planétaire située dans Hercule, sans filtre, couleur bleue prononcée, par bon seeing, grossissement 460x. Dessin de Frédéric Burgeot au T1000 66 Astrosurf-Magazine N°64 Sept./Oct. 2013 crayon 2.NGC 6445, nébuleuse planétaire du Sagittaire à la forme très particulière. Dessin de Frédéric Burgeot au T1000 Fred me promet une balade au pays des tachouilles. Direction Abell 2151. La promenade commence tranquillement par un petit arrêt (oui déjà) sur un couple accompagné d'une petite allongée. "Tiens, voilà la télécommande, maintenant débrouille toi" Et la plongée commence. Tu en veux des tachouilles ? Et bien il y en a absolument partout ! De tous les côtés, des rondes, des longues, des floues, des brumeuses, en groupes ou isolées, c'est fantastique ! Je me retiens, tant bien que mal, d'y passer plus de temps, encore beaucoup plus de temps. De l’ombre à la lumière, petit détour pour aller saluer l'Emeraude, la néNGC 6572 dans buleuse Ophiuchus. C'est un petit phare d'une teinte explosive, franche, nette, sublime. D'un beau bleu verdâtre. A moins que ça ne soit d'un magnifique vert bleuâtre ? En tout cas d'une intensité d'une autre trempe que ce que m'en avait livré le T250. Nous voici de nouveau en approche sur Hercule, aux abords de M13. Je l'avais déjà détaillé lors d'une précédente visite. Enorme, envoûtant, je ne reviens pas dessus. Nouvelle vision bien plus nette d'NGC 6207 la petite galaxie voisine, déjà visible au T250 comme une petite forme allongée au cœur plus lumineux. Mais il s'agit ici de capturer une autre galaxie à mi chemin entre les deux. Un nouveau petit fuseau qui se cache au bout d'un alignement d'étoiles rappelant la constellation de la Lyre : IC 4617, de magnitude 15,5. Ca y est, je l'ai ! Hercule nous livre maintenant NGC 6210 la nébuleuse dite de la Tortue. Au T250 je notais "Petite NP d'un joli bleu prononcé". Ce soir Fred me la propose d'abord à fort grossissement pour qu'apparaissent clairement ses deux extensions en crochet. De retour à un grossissement plus "raisonnable". Je suis en mesure de détailler Astrosurf-Magazine N°64 Sept./Oct. 2013 une vraie nébuleuse d'une très belle couleur, marquée d'une centrale extrêmement fine. En fouillant un peu elle me semble auréolée d'une sorte de brume, de diffusions, et des irrégularités apparaissent sur sa surface, avec comme un semblant de croissant plus dense sur un bord. Voilà ma "petite NP" devenue un bel objet complexe et plein de ressources. Un grand saut de puce pour rejoindre M57. Il s'agit de dénicher IC 1296, une petite galaxie de magnitude visuelle 14,8 et de brillance de surface sans doute bien faible : une illusion brumeuse à la base d'un triangle. Oh la vache ! Nous voilà dans de l'infime ... et encore une fois cette montée d'adrénaline, ce frisson sublime face à un presque rien... Et des presque-riens dans le style, accessibles au 1m, il doit y en avoir à en perdre la tête ! Bon... Je remonte en hâte à l'escabeau : j'en avais oublié de saluer l'Illustre Anneau. La nuit avance, inexorablement, il est l'heure d'une petite virée autour du Sagittaire. D'abord NGC 6445 la nébuleuse du Pâté en Croute. Découverte récemment au T250 c'était « Une forme rectangulaire avec un centre sombre ». Ce soir elle est toujours 67 3. M16 et les fameux "piliers de la création", dans le serpent vus dans le T1000 par excellent seeing avec des grossissements de 202x à 270x avec un filtre OIII. Dessin de Frédéric Burgeot sans savoir a postériori s'il s'agissait d'extensions ou d'un embuage intempestif de l'oculaire... NGC 6818, Little Gem, une autre nébuleuse. Mes impressions précédentes au T250 ? « Bien contrastée, un peu verdâtre ». Ce soir le Petit Diamant a pris de l'ampleur et de la valeur : c'est une nébuleuse très dense, toute en nuances et en jeux de matières. Et voici que s'annonce M16. Au T250 comment dire ... Il faut quand même s'arracher l'œil pour essayer de suivre au plus loin les quelques nébulosités accessibles. Ici et maintenant, quasiment en vision directe il y a les Piliers ! Et contempler ces formes sombres drapées dans leur grande voile ça c'est un grand moment ! J'y reste autant que faire se peut. Tout y est : les dimensions impressionnantes, le contraste du cœur, c’est indescriptible. Il me faut tout de même m'appliquer un peu pour bien réussir à individualiser les mythiques formes élancées. Si le reste est évident les contours du troisième pilier me resteront un peu flous. Mais voilà que je chipote. C’est qu’il y en a eu des grands moments ici à l’oculaire du 1m ! Je repense à tous les chocs ressentis face à ces visions quasi photographiques : la Tête de Cheval, énorme, anguleuse, tellement facile, le quasar double où j’ai touché du doigt les limites du temps, les galaxies, les nébuleuses et les Dentelles ! Les Dentelles. Une vision inoubliable. Toute jeune astramette je les découvrais il y a un an, ici, sur le T1000. La Petite d’abord, remontée en suivant ses volutes serrées, enroulées, comme encapsulées dans une gangue invisible. Elles me semblaient se tourner, se tordre, chercher à s’échapper. Je les avais suivies jusqu’à 52 Cygni puis jusqu’à cet évasement soudain, ce déchirement en basse mais bien plus grande. La forme rectangulaire est cette fois plus qu'évidente, bien que certains côtés se révèlent en fait être plutôt arrondis. Le centre s'est rempli d'une concentration diaphane encapsulée dans une coque externe bien définie. Je devine une diffusion autour, 4. Ci-dessus, la grande dentelle du cygne, dessinée en 2011 au T400mm à 88x. A droite, détail des dentelles, dessiné au T1000 à 350x, filtre OIII. Dessins de Frédéric Burgeot 68 Astrosurf-Magazine N°64 Sept./Oct. 2013 mille lambeaux. Une remontée fascinante le long de ce déchainement que j’avais qualifié de spectral. Puis le Triangle de Pickering, phénoménale partie de saute-mouton au cours de laquelle je m’étais perdue, malgré les avertissements de Fred. Et enfin la Grande Dentelle pour une dernière fuite en avant d’un écheveau filamenteux à l’autre, de gués en passerelle, indéfiniment. Inoubliable vous dis-je ! Allez, retour ici et maintenant sur la plateforme… Rassasiée d’M16 je profite honteusement de l'absence de mon guide pour me jeter sur la Pronto de 76 mm accolée au 1m, et m'en servir de chercheur pour trouver M17 la nébuleuse du Cygne. Quelques tapotages sur la télécommande plus tard je remonte à l'escabeau admirer le volatile. C'est à couper le souffle : un foisonnement de filandres lumineuses et de moutonnements à perte de vue. J'apprécie plus particulièrement l'extraordinaire présence, l'extraordinaire relief ainsi offerts aux zones sombres. Je voulais le voir, je ne le connaissais pas et voilà NGC 6888, le Croissant. Et bien je ne l'imaginais pas si grand. J'ai du mal à l'embrasser dans son ensemble, il va me falloir le détailler par quartiers : les deux bords bien définis et nuancés dont l'un est beaucoup plus accessible que l'autre, la bande centrale qui porte l'étoile émettrice, et la multitude des diffusions internes ténues et hachées. C'est également un remarquable objet aux dimensions impressionnantes. Nous voici maintenant papillonnant dans l'Aigle sur NGC 6781. Une curieuse nébuleuse incroyablement dense. Enfin pour un instant encore, car le cercle externe s'efface sur un bord, donnant la sensation que cette phénoménale baudruche est en train de se vider. C'est une constante qui ne se dément pas d'une session à l'autre : le T1000 permet vraiment une approche saisissante de toutes ces petites NP. Et puisqu’il faut bien en terminer voici NGC 7331 dans Pégase, pour finir en beauté sur une galaxie. Un cœur lumineux, une bande plus sombre, un large disque aplati et rayonnant… ça vous rappelle quelqu'un ? Comme me le fait remarquer Fred elle a effectivement de faux airs de M 31 vue dans un plus petit diamètre, avec ses galaxies satellites, ce rayonnement, cette présence éthérée propres à sa grande sœur. L’illustration même de ce que permet de toucher un T1000 comparé à mon vénérable T250. Et pourtant je n'ai déjà plus qu'une envie, c'est de repointer tout ce qui pourra l’être avec mon fidèle destrier. C'en est fini pour cette nuit. Une soirée d'observation extrêmement riche une fois encore, à osciller entre la redécouverte de grands classiques méconnaissables et hallucinants de détails à ce diamètre, et la recherche de tachouilles toujours plus improbables. Vraiment, je souhaite à chacun de venir s’abandonner ici à la beauté sauvage du Larzac, de s'autoriser un passage sous ce ciel magique et sur ce type d'instrument hors norme : un monstre de précision conçu pour s'éclater la rétine, dévoiler les couleurs, transcender les nébuleuses, sublimer les galaxies. Astrosurf-Magazine N°64 Sept./Oct. 2013 Les deux grands Dobsons de Stellarzac où Frédéric Géa accueille les astronomes amateurs depuis 2011 dans un gîte dédié à l'observation du ciel. Les conditions y sont très favorables à l'utilisation de ces grands instruments car le ciel est à la fois transparent et stable. Un bon seeing est un élément clef de la qualité des observations. Site Internet : www.stellarzac.com L'auteur Hélène Legueil, astronome amateur de la région de Béziers dans l'Hérault, est aux commandes d'une petite lunette et d'un dobson de 250mm depuis un peu plus d'un an. Adepte des petites "taches de lumière" lointaines elle passe régulièrement sur le plateau du Larzac pour profiter d'un ciel de bien meilleure qualité. 69 Vie des clubs Nombreux sont les visiteurs qui, à la recherche de notre observatoire, passent deux fois devant celui-ci avant de le trouver. Un club triple A Un petit chez soi vaut mieux qu’un … Pour de nombreuses personnes en effet observatoire astronomique signifie coupole, alors que le nôtre est doté d’un toit coulissant ! Cette option a été choisie par son concepteur, et créateur du club (en décembre 2005), JeanJacques, pour des raisons de facilité d’exécution et d’intégration à un bâti préexistant. Les travaux ont été réalisés par les membres du club ce qui nous a permis de bien nous connaître et à chacun de prouver sa motivation. Nous disposons d’un observatoire sur deux niveaux. A l’étage, une terrasse de 3m X 5m, recouverte d’un toit entièrement coulissant et qui abrite actuellement un télescope Newton de 406mm sur monture Valmeca et une lunette FSQ 106 sur monture EQ6. Au rez-de-chaussée, une petite salle de rangement de matériel, un coin (au chaud) de pilotage à distance des télescopes et appareils photos, un coin café-chocolat et une petite salle de réunion avec vidéoprojecteur. Tout cela est très concentré et le club, fort d’une dizaine de membres ne pourrait donc pas en accueillir beaucoup plus. Au sol, devant l’observatoire nous disposons d’une terrasse dallée pour poser nos autres matériels lorsque le temps est propice. Celle-ci est munie d’une méridienne horizontale qui nous a permis d’orienter les dalles Nord-Sud; la mise en station des montures équatoriales est ainsi grandement facilitée, surtout pour l’observation du Soleil avec notre "Lunt". Georges, notre webmaster a, quant à lui, créé notre site depuis l’autre bout de la France. Salut à toi, Georges ! Que des hommes donc dans ce club, hélas. Isabelle, que nous regrettons beaucoup, ayant dû nous quitter pour des raisons professionnelles. Un petit coucou à elle ! Tout ce petit monde se retrouve tous les vendredis soir, qu’il neige, qu’il vente, qu’il pleuve ou qu’il fasse beau. L’astronomie : un champ d’activités très vaste Dès le départ, nous avons choisi de faire de la photo astronomique pour pouvoir profiter des belles couleurs des nébuleuses, invisibles même à l’oculaire de notre T400. Après quelques mois d’essais peu fructueux avec une caméra CCD, nous nous sommes tournés vers l’utilisation des APN, bien plus faciles d’usage. Les soirées de mauvais temps (très rares en Alsace…) sont ainsi occupées à traiter nos images. Un grand merci en passant à Patrick Lécureuil qui, par ses ouvrages, nous a « mis le pied à l’étrier ». Outre les traditionnelles "portes ouvertes" annuelles et les Pas très nombreux mais motivés ! Les membres du club, tous autodidactes, ont chacun des compétences spécifiques, qu’ils mettent en commun, permettant ainsi à tout le groupe de progresser. Il y a Jean-Pascal qu’on surnomme le « Goto humain » car il pointe notre Dobson plus vite que les systèmes informatisés, Yves et Damien qui sont nos "rois du fer à souder" et résolvent tous nos problèmes électroniques, Etienne qui nous tient au courant de toutes les actualités astronautiques, Maxime qui nous aide à progresser dans le traitement des photos astronomiques, Philippe qui tient en haleine notre public par son art de raconter des histoires, Daniel qui nous aide à maitriser certains logiciels bien utiles, Alain qui par sa bonne humeur maintient le moral des troupes par mauvais temps et Jean-Jacques qui aime à expliquer par quelques calculs le fonctionnement de la mécanique céleste. 70 Astrosurf-Magazine N°64 Sept./Oct. 2013 échanges avec les autres clubs de la région au sein de la F4A (Fédération des associations d’astronomes amateurs d’Alsace), nous accueillons divers groupes (Conseil Municipal, "sponsors", etc.) pour une visite guidée. Mais l’activité qui nous mobilise le plus est depuis trois ans l’organisation de sessions « d’initiation à l’astronomie » qui nous permettent de partager notre passion. Celles-ci ont lieu sous deux formes : Des cycles de cinq séances mensuelles suivis par des groupes d’une vingtaine de personnes, au cours desquelles l’apprentissage de l’utilisation du matériel astronomique et l’observation du ciel sont privilégiés. Par ailleurs nous abordons aussi divers thèmes sous forme de diaporamas : les instruments anciens, quelques incursions dans la mythologie, les mouvements de la Lune et la mécanique céleste, la découverte du Système Solaire, la vie des comètes, la fabrication des atomes au sein des étoiles, les balades de Curiosity sur Mars etc… Capter l’attention des auditeurs et réussir à leur « faire passer le message » est bien gratifiant pour nous ! Une journée d’initiation aux cadrans solaires : un peu de théorie, les différentes sortes de cadrans solaires, le traçage et leur construction. Les participants rentrent chez eux avec un cadran. Astrosurf-Magazine N°64 Sept./Oct. 2013 Des défis déjà réalisés et d’autres à relever Le premier défi a été de se construire un observatoire, petit certes, mais aussi très fonctionnel et accueillant. Nous avons aussi, petit à petit, constitué un groupe de passionnés, dans une ambiance chaleureuse ; nous avons souvent le vendredi soir bien du mal à nous séparer ! Outre de belles photos du "Ciel profond", nous avons capturé l’ISS devant le Soleil, un "gros plan" de la station spatiale ISS, des photos de flash iridium, d’éclipses de Lune et de Soleil. Toutes ces images sont sur notre site sur le web. Les prochains challenges seront la découverte de la spectroscopie et la réalisation d’une coupole hémisphérique qui sera utilisée comme planétarium. Le Club Association AstroAspach 1 rue Bellevue - 68130 Aspach Tél : 03 89 40 62 79 Site : www.astroaspach.fr Courriel : [email protected] 71 Le ciel en octobre 2013 A voir ou à savoir Samedi 5 02:35 Nouvelle Lune Mardi 8 16:30 Maximum d'activité de l'essaim des Draconides 17:46 Rapprochement entre Mercure et Saturne Mercredi 9 06:00 Plus grande élongation Est de Mercure Jeudi 10 07:26 Maximum d'activité de l'essaim des Taurides australes Vendredi 11 01:06 Lune au périgée 07:37 Maximum d'activité de l'essaim des Delta Aurigides Samedi 12 01:02 Premier Quartier Mardi 15 13:29 Rapprochement entre Mars et Régulus Jeudi 17 20:32 Rapprochement entre la Lune et Uranus Vendredi 18 09:18 Maximum d'activité de l'essaim des Epsilon Géminides Samedi 19 01:37 Pleine Lune Dimanche 20 18:34 Opposition de l'astéroïde 42 Isis avec le Soleil Lundi 21 09:47 Maximum d'activité de l'essaim des Orionides Jeudi 24 10:16 Maximum d'activité de l'essaim des Leo Minorides Vendredi 25 00:50/01:23 Occultation de 26 Gem (mv = 5,20) 16:25 Lune à l'apogée Dimanche 27 01:41 Dernier Quartier Jeudi 31 01:23 Opposition de l'astéroïde 10 Hygiea avec le Soleil La fin du mois d’octobre est marquée depuis quelques années par le retour au décalage d’une heure avec le Temps Universel. Cette année le passage de l’heure d’été à celle d’hiver est programmé le dimanche 27 : à 3 heures (heure de nos montres) il est à nouveau 2 heures... Mars, Ison et un trio de Messier Les planètes visibles à l’oeil nu se réduisent à deux paires de deux : Jupiter et Mars d’un côté, Vénus et Saturne de l’autre. Durant la première décade Mercure tente une apparition pour tenir compagnie aux deux planètes visibles au 72 Astrosurf-Magazine N°64 Sept./Oct. 2013 Ephémérides données en temps légal (TU+2 heures et TU+1 heure) et établies pour un site d'observations de coordonnées 47°nord et 3°est. Illustrations tirées du Guide du Ciel 2012-2013 (sauf frise lunaire ) Satellites de Jupiter couchant. On peut ajouter une troisième paire de planètes avec les lointaines Uranus et Neptune. La première citée passe en opposition avec le Soleil le 3, ce qui la rend accessible une grande partie de la nuit dans les Poissons. Quant à Neptune on peut également la localiser aux jumelles dans le Verseau, à la mioctobre elle franchit le méridien vers 22 heures. Au moment où Neptune passe le méridien, Jupiter amorce son lever. Visible en seconde partie de nuit, la planète géante ralentit son déplacement apparent direct, frôlant en début de mois Wasat, une étoile dans les Gémeaux. A l’oculaire le ballet des satellites galiléens accompagne les passages de la Tache Rouge (voir www.astrosurf.com/ephemerides/). En fin de nuit Mars se lève dans le Lion. A l’oculaire la planète n’offre rien de bien intéressant. En revanche son déplacement apparent est accompagné de celui de la comète Ison, comète accessible aux jumelles. C’est dans l’aube du 25 octobre qu’il convient de diriger nos instruments vers le couple planétocométaire qui brille dans le voisinage du trio de galaxies du Lion formé par Messier 95, 96 et 105. Une bonne idée de photographie pour la couverture d’un prochain Astrosurf Magazine. Dernier Quartier vénusien Dans les lueurs du couchant, Saturne nous fait ses adieux. Au soir du 6 elle est en conjonction avec Mercure en direction de l’horizon ouest-sud-ouest en compagnie d’un mince croissant de Lune. En décalant les regards vers le sudouest on trouve Vénus, qui passera en conjonction avec la Lune le 8. Mercure déserte rapidement la scène, puis graduellement Saturne disparaît à son tour dans les lueurs du couchant.Vénus, esseulée dans le ciel du crépuscule, augmente son temps de présence se couchant plus de deux heures après le Soleil le dernier jour du mois. Ce jour-là à l’oculaire, l’étoile du Berger nous présente un disque à moitié éclairé aux allures de dernier quartier. Astrosurf-Magazine N°64 Sept./Oct. 2013 73 74 Astrosurf-Magazine N°64 Sept./Oct. 2013 Astrosurf-Magazine N°64 Sept./Oct. 2013 75