Le Saint-Esprit et nos décisions (Actes 15.1-31) Comment le Saint-Esprit agit-il ? Comment nous parle-til ? Dans le livre des Actes des apôtres, le Saint-Esprit se manifeste beaucoup par des signes extraordinaires : prophéties spontanées, guérisons, délivrances de démons, prières de louange en des langues inconnues mais compréhensibles par Dieu, etc. Certains chrétiens pensent que ces signes spectaculaires sont les seules preuves de l’action de l’Esprit. Certains vont même dire que si dans une Église, il n’y a pas de prophétie spontanée ou de miracles, alors le Saint-Esprit n’est pas vraiment présent. Personnellement, je crois aux manifestations extraordinaires du Saint-Esprit telles qu’elles sont décrites dans le livre des Actes. J’y crois parce que j’en ai déjà expérimenté. Je pense qu’il ne faut pas les nier. En revanche, il ne faut pas non plus oublier que le Saint-Esprit agit tout autant à travers des procédures plus rationnelles. L’Esprit ne fait pas que dans le sensationnel. Le spontané et le spectaculaire ne sont pas les seuls signes de l’action du Saint-Esprit. Je vous invite à prendre connaissance du livre des Actes au chapitre 15, les versets 1 à 31. Le contexte est le suivant : l’apôtre Paul et son collaborateur Barnabas prêchent l’Évangile à des non-Juifs dans la ville d’Antioche. Ils exercent leur ministère dans une Église composée de Juifs et de non-Juifs. 1 Quelques hommes venus de Judée enseignaient les frères en disant: «Si vous n’êtes pas circoncis selon la coutume de Moïse, vous ne pouvez pas être sauvés.» 2 Paul et Barnabas eurent un vif débat et une vive discussion avec eux. Les frères décidèrent alors que Paul, Barnabas et quelques-uns d’entre eux monteraient à Jérusalem vers les apôtres et les anciens pour traiter cette question. 3 Envoyés donc par l’Eglise, ils traversèrent la Phénicie et la Samarie en racontant la conversion des non-Juifs, et ils causèrent une grande joie à tous les frères et sœurs. 4 Arrivés à Jérusalem, ils furent accueillis par l’Eglise, les apôtres et les anciens, et ils rapportèrent tout ce que Dieu avait fait avec eux. 5 Alors quelques croyants issus du parti des pharisiens se levèrent en disant qu’il fallait circoncire les non-Juifs et leur ordonner de respecter la loi de Moïse. 6 Les apôtres et les anciens se réunirent pour examiner cette question. 7 Il y eut une longue discussion. Pierre se leva alors et leur dit: «Mes frères, vous savez que, dès les premiers jours, Dieu a fait un choix parmi nous: il a décidé que les non-Juifs entendraient par ma bouche la parole de l’Evangile et croiraient. 8 Et Dieu, qui connaît les cœurs, leur a rendu témoignage en leur donnant le Saint-Esprit comme à nous. 9 Il n’a fait aucune différence entre eux et nous, puisqu’il a purifié leur cœur par la foi. 10 Maintenant donc, pourquoi provoquer Dieu en imposant aux disciples des exigences que ni nos ancêtres ni nous n’avons été capables de remplir? 11 Nous croyons au contraire que c’est par la grâce du Seigneur Jésus que nous sommes sauvés, tout comme eux.» 1 2 Toute l’assemblée garda le silence et l’on écouta Barnabas et Paul raconter tous les signes miraculeux et les prodiges que Dieu avait accomplis par leur intermédiaire au milieu des nonJuifs. 13 Lorsqu’ils eurent fini de parler, Jacques prit la parole et dit: «Mes frères, écoutez-moi! 14 Simon a raconté comment dès le début Dieu est intervenu pour choisir parmi les nations un peuple qui porte son nom. 15 Cela s’accorde avec les paroles des prophètes, puisqu’il est 16 écrit: Après cela, je reviendrai, je relèverai de sa chute la tente de David, je réparerai ses ruines et je la redresserai; 17 alors le reste des hommes cherchera le Seigneur, ainsi que toutes les nations appelées de mon nom, dit le Seigneur qui fait [tout] cela 18 et de qui cela est connu de toute éternité. 19 »C’est pourquoi, je pense qu’on ne doit pas créer de difficultés aux non-Juifs qui se tournent vers Dieu, 20 mais qu’il faut leur écrire d’éviter les souillures des idoles, l’immoralité sexuelle, les animaux étouffés et le sang. 21 En effet, depuis bien des générations, dans chaque ville des hommes prêchent la loi de Moïse, puisqu’on la lit chaque sabbat dans les synagogues.» 22 Alors il parut bon aux apôtres et aux anciens, ainsi qu’à toute l’Eglise, de choisir parmi eux Jude, appelé Barsabas, et Silas, des hommes estimés parmi les frères, et de les envoyer à Antioche avec Paul et Barnabas. 23 Ils les chargèrent du message que voici: «Les apôtres, les anciens et les frères aux frères et sœurs d’origine non juive qui sont à Antioche, en Syrie et en Cilicie, salut! 24 Nous avons appris que des hommes partis de chez nous, mais sans aucun ordre de notre part, vous ont troublés par leurs discours et vous ont ébranlés [en vous disant de vous faire circoncire et de respecter la loi]. 25 C’est pourquoi nous avons décidé, d’un commun accord, de choisir des délégués et de vous les envoyer avec nos bienaimés Barnabas et Paul, 26 ces hommes qui ont livré leur vie pour le nom de notre Seigneur Jésus-Christ. 27 Nous avons donc envoyé Jude et Silas qui vous annonceront de vive voix les mêmes choses. 28 En effet, il a paru bon au Saint-Esprit et à nous de ne pas vous imposer d’autre charge que ce qui est nécessaire: 29 vous abstenir des viandes sacrifiées aux idoles, du sang, des animaux étouffés et de l’immoralité sexuelle. Vous agirez bien en évitant tout cela. Adieu.» 30 Ils prirent donc congé de l’Eglise et allèrent à Antioche, où ils réunirent l’assemblée et lui remirent la lettre. 31 On en fit la lecture et tous se l’encouragement qu’elle leur apportait. réjouirent de Ce passage contient une phrase assez intrigante, au verset 28 : « il a paru bon au Saint-Esprit et à nous de ne pas vous imposer d’autre charge que ce qui est nécessaire ». À aucun endroit dans le texte, il n’est mention de l’Esprit qui donne des instructions. Il est plutôt question d’une décision prise en réunion de conseil et en assemblée générale. Pourtant, quand vient le moment d’annoncer les décisions, les personnes concernés affirment : « il a paru bon au Saint-esprit et à nous de ne pas vous imposer d’autre charge que ce qui est nécessaire ». Comment comprendre cette allusion au SaintEsprit ? Je vous propose de revenir sur la situation de départ et voir comment les choses évoluent. Paul et Barnabas exercent leur ministère à l’Église d’Antioche. Dans cette Église, il y a des chrétiens d’origine juive, ils sont donc circoncis selon la loi de Moïse. Il y a aussi des chrétiens non Juifs qui ne sont pas circoncis. Ils ne respectent donc pas la loi sur la circoncision inscrite dans la Torah, l’Ancien Testament. Et voilà que dans cette Église, des hommes de Judée viennent affirmer que si les chrétiens non Juifs ne se font pas circoncire, ils ne peuvent pas être sauvés. L’intention de ces chrétiens n’était pas forcément malveillante, ils désiraient obéir à Dieu. Il faut rappeler que la circoncision était le signe d’intégration dans le peuple de Dieu. Le Juif qui n’était pas circoncis ne pouvait pas faire partie du peuple de Dieu. Le texte précise qu’il y a de vifs débats et de vives discussions. Cela montre que la question n’est pas si évidente. Quand il n’y avait que des chrétiens Juifs, la question ne se posait pas. Mais maintenant que les non Juifs viennent à Jésus, faut-il leur demander de se faire circoncire ? La question peut aussi être posée concernant toutes les lois rituelles, comme par exemple : ne pas manger de porc, de lapin, de crustacés, de coquillages ou de poisson sans nageoires, etc. (Selon la loi juive, ces aliments étaient interdits au même titre que le porc.) Les chrétiens non Juifs doivent-ils suivre tous les rites Juifs ? En cherchant à résoudre cette question, l’Église d’Antioche s’est retrouvée devant une sorte de vide juridique. La Bible de l’époque, c’est-à-dire l’Ancien Testament, ne donnait pas de solution à cette situation. Aujourd’hui, on pourrait aussi se retrouver parfois dans la même situation. Dans le sens où l’on pourrait avoir des questions sans réponses dans la Bible. Comment ont-ils décidé de résoudre la question ? Tout d’abord, on peut voir que l’Église ne donne pas tout de suite raison à Paul et Barnabas. Ils étaient pourtant leurs pasteurs, ils ont été appelés par Dieu et ils ont même accompli des miracles ! Pourtant, l’Église a préféré prendre plus de temps pour réfléchir et ne pas précipiter les choses. Et l’on verra que l’Église d’Antioche a eu raison de ne pas vouloir vite résoudre la question en interne. Ils ont décidé de faire appel à l’Église mère à Jérusalem, là où résident les apôtres. Il n’y avait pas encore de fédérations ou d’associations d’Églises, mais il y avait déjà cette conscience d’appartenir à une famille plus large. Une fois arrivés à Jérusalem, Paul et Barnabas soumettent la question à l’Église. Dans un premier temps, seuls les apôtres et les anciens se réunissent (v. 6). Paul et Barnabas sont là, mais ils ne vont pas prendre part à la décision, ils vont simplement témoigner de ce que Dieu fait chez les non Juifs. Après leur témoignage encourageant, on assiste à un vif débat. Le verset 7 précise qu’il y eut une longue discussion. Une fois que les apôtres et les anciens ont débattu de leur côté, l’Église est ensuite consultée (à partir du verset 12). Ils prennent ensemble la décision. Verset 22 : « Alors il parut bon aux apôtres et aux anciens, ainsi qu’à toute l’Eglise… », etc… L’étape suivante consiste à communiquer la décision à l’Église d’Antioche. Là encore, la réponse suit un protocole bien défini. Paul et Barnabas sont envoyés à Antioche pour communiquer la décision. Pour attester leurs paroles, il y a une lettre dont on a le contenu des versets 23 à 29. Et comme si cela ne suffisait pas, il y a une délégation supplémentaire : Jude et Silas, des hommes de confiance. C’est dans cette lettre de réponse que nous pouvons lire les paroles suivantes (v. 28): « il a paru bon au Saint-Esprit et à nous de ne pas vous imposer d’autre charge que ce qui est nécessaire: 29 vous abstenir des viandes sacrifiées aux idoles, du sang, des animaux étouffés et de l’immoralité sexuelle. Vous agirez bien en évitant tout cela. Adieu.» En résumé, pas besoin de circoncision pour être accueilli par Dieu. Quels enseignements peut-on tirer de ce texte ? Tout d’abord, on peut relever que l’Église d’Antioche est très humaine. Il nous est parlé de violentes disputes. Il nous est parlé aussi de protocoles pour répondre à la question de la circoncision. Ce sont des procédures longues qui demandent de la réflexion et des débats. Toutes ces procédures ont tout l’air de réunions de conseil et d’assemblées générales. Ne méprisons pas les réunions d’Église et leur aspect administratif. Cela fait aussi pleinement partie du fonctionnement d’une Église. Devenir membre d’une association d’Église et prendre part aux décisions sur l’orientation de la communauté, c’est une forme d’engagement spirituel. À Jérusalem, ces procédures aboutissent à une décision décrite comme une décision inspirée par le Saint-Esprit. Verset 28 : « il a paru bon au Saint-Esprit et à nous de ne pas vous imposer d’autre charge que ce qui est nécessaire », etc. Pendant toutes les étapes de la réflexion, depuis les vifs débats d’Antioche et de Jérusalem, jusqu’à la décision finale, le Saint-Esprit était à l’œuvre. Ce texte nous enseigne que l’Esprit n’agit pas seulement dans les choses extraordinaires. Il agit aussi dans les procédures humaines et ne s’arrête pas sur la vivacité des disputes. On peut même dire que le respect de ces procédures administratives et humaines ont constitué un cadre dans lequel l’Esprit a œuvré. Cela ne veut pas dire que chaque décision de conseil ou d’assemblée générale est inspirée par Dieu. Ce que je veux dire, c’est que la soumission les uns aux autres, les échanges, l’écoute mutuelle, la recherche de la vérité et la fidélité au Seigneur dans les choses terrestres, font partie des procédures qui nous permettent d’être réceptifs ensemble à la voix du SaintEsprit. À l’inverse, quand il y a des rivalités et du manque d’écoute dans une communauté, cela crée un climat qui n’est pas favorable à l’écoute de Dieu. L’esprit s’exprime quand on l’écoute dans une attitude d’humilité et de respect les uns envers les autres. L’action de l’Esprit n’est pas toujours quelque chose de spontané, elle peut prendre du temps. Et l’on ne peut pas imposer une vision en disant juste qu’elle nous a été révélée à nous et pas aux autres. Quand l’Esprit conduit une Église, c’est à la communauté qu’elle se révèle et non pas forcément à une seule personne. Dans la réponse des apôtres, on peut être surpris car certaines pratiques rituelles sont maintenues, comme : ne pas manger de sang. En fait, on sait par ailleurs que les apôtres ont gardé ce genre de pratique pour ne pas choquer les Juifs. Sous la Nouvelle Alliance, donc après la mort et la résurrection de Jésus, les lois rituelles ne sont plus en vigueur. Et concernant les lois morales, elles révèlent toujours la volonté de Dieu. Jésus a révélé leur sens réel dans le sermon sur la montagne. Pour terminer, on peut quand même rappeler l’enseignement important de ce texte. C’est que nous ne sommes pas sauvés par nos œuvres, mais bien par la foi. Pas besoin de se faire circoncire pour être accueilli par Dieu. Ce n’est plus la circoncision mais le Saint-Esprit qui nous intègre dans le peuple de Dieu. Le salut est gratuit. Verset 11 : « c’est par la grâce du Seigneur Jésus que nous sommes sauvés ». Recevons donc cette grâce avec foi et attendons-nous à l’action de l’Esprit dans notre quotidien et dans notre Église. Son action ne se manifeste pas que dans le spectaculaire, mais aussi dans nos activités, dans nos réflexions et dans notre quotidien. Christian Huy