L'envie de ce spectacle est née de deux idées :
La première est venue en travaillant sur Les Corvidés avec
Jonathan Capdevielle pour les Sujets à Vif à Avignon, où j’ai
développé une écriture plus intime et secrète, à la première
personne du singulier. Dans mes précédents spectacles, il
était question de personnages, mon point de vue était caché
derrière eux, comme sous-jacent et j’ai ressenti l’envie de
mettre ce point de vue au premier plan, comme dans un journal
et d’en faire une sorte de chant.
En faisant ça, philosophiquement parlant, j’ai été étonnée
que cette noirceur fasse rire le public, mais surtout qu’elle
me paraisse infinie, sans espoir, sans limite, se ramifiant
en sujets très différents, traduisant une conception très
noire de la vie, qui n'est pas tout à fait la mienne.
Quelques mois plus tard, en tournant dans un western aux
Etats-Unis, j’ai été amené à travailler avec un cheval. Tout
à coup, tout faisait sens : la beauté de l’animal, sa
complexité de comportement, le calme et l’attention
nécessaires pour entrer en relation avec lui abolissaient la
noirceur et me ramenaient vers quelque chose d’essentiel.
J’ai donc eu envie de faire ce duo avec un cheval, afin
d’opposer ces deux forces, la noirceur de la pensée d'une
sorte de monologue intérieur qui se questionnerait sur soi et
sur l'époque, avec la profondeur et la richesse de la relation
qui se construirait avec l'animal.
En parallèle d'un texte qui parle avec virulence de domination
ou d'asservissement, je voudrais construire un rapport
d'égalité avec lui. Je ne serai que rarement sur son dos ;
plutôt à pied, dans des relations chorégraphiques qui
traduiraient une complicité, comme si nous avions créé ce
spectacle à deux, ou que nous étions deux images d'une même
entité.
Je serai tantôt proche du bestial par la nature du texte aussi
bien dans son fond que dans sa forme, par l'attitude physique,
travaillant parfois sur la gestuelle de la guenon, tantôt lui
pourra être dans des sentiments humains parfois rassurants,
parfois inquiétants.