Le moindre glissement de la roue motrice pouvait
accroître fictivement la distance parcourue et entraîner
ainsi une erreur de mesures non négligeable. C'est pour-
quoi, la rame T.G.V. 16 a été dotée de capteurs de vitesse
à dents montés sur essieu porteur.
Parallèlement à cette mesure continue de la vi-
tesse, un relevé au sol s'avérait indispensable pour
valider et homologuer les indications de bord. Après de
multiples recherches dans les possibilités offertes par
les techniques modernes de métrologie, le choix
s'est
porté sur un système utilisant un grand nombre de bases
de mesure ponctuelles. Toutes identiques, elles seraient
réparties judicieusement sur le parcours emprunté par
la rame du record et comprendraient, chacune, deux
détecteurs de passage, espacés de 10 m et un boîtier
d'adaptation qui ne prendrait en compte que le premier
essieu de la rame. Les tops de passage seraient adressés
par câble à un poste central où une baie de concentration
assurerait le traitement des informations provenant de
chaque base de mesure, le calcul des vitesses, l'affichage
et l'impression des résultats.
Le présent article se limite à la description som-
maire du système de mesure de la vitesse au sol, mis en
œuvre spécialement pour l'Opération T.G.V. 100, sys-
tème qui a permis de vérifier la parfaite concordance
entre les mesures linéaires de vitesse faites à bord et
celles relevées ponctuellement à la voie.
Plusieurs mois avant la tentative du record, une
étude de simulation et de faisabilité, tenant compte des
diverses contraintes inhérentes à la voie, et notamment
à l'insuffisance des dévers, précisait le site retenu pour
l'Opération T.G.V. 100 et les grandes lignes du pro-
gramme de montée en vitesse. La rame T.G.V. 16,
allégée de trois voitures, circulerait dans le sens pair sur
la voie 2 de la ligne nouvelle Paris-Lyon entre le viaduc
de Serein (km 192) et la sous-station de Carizey
(km 130). En réalité, le parcours a été limité les 25 et
26 février 1981 au poste T.G.V. de Tonnerre (km 140).
Par ailleurs, un graphique de circulation à la vitesse
plafond était établi en fonction du temps et de l'espace :
il permettait de localiser la zone où l'on pouvait espérer
atteindre 380 km/h et même 390 km/h. Ainsi cette zone
située entre les km 157 et 153 fut choisie pour l'enregis-
trement des contraintes voie exercées par la rame lors de
son passage en vitesse et également pour l'étude des sou-
lèvements de la caténaire par le pantographe.
Quant à la mesure de la vitesse au sol, elle serait
réalisée tous les 500 m, dans la zone à vitesses potentiel-
les supérieures à 360 km/h, c'est-à-dire entre les km 162
et 152. Pour mieux situer géographiquement la zone en
question, on remarquera que les points kilométriques
extrêmes correspondent respectivement au poste de
signalisation T.G.V. de Pasilly et au centre d'appareil-
lage intermédiaire T.G.V. de Sambourg.
Vingt et une bases de mesures furent donc mises
en place dans cette zone, tandis qu'en amont et en aval,
dix autres bases étaient implantées de manière à obte-
nir un suivi en vitesse de la rame et à réaliser un graphi-
que relativement linéaire pour la circulation entière,
facilement comparable à l'enregistrement réalisé à bord.
Au poste de signalisation T.G.V. de Pasilly
(PRS 17) devenu également dans le cadre du record, le
P.C.
des opérations du domaine voie, une baie de concen-
tration et d'interprétation des trente et une informa-
tions de vitesse était mise en œuvre, complétée par des
sous-ensembles et des périphériques, tels que horloge,
compteurs, afficheurs, minicalculateur, imprimante,
table traçante XY.
BASE DE MESURES DE VITESSE.
Chaque base comprend deux détecteurs électroni-
ques de roue, espacés rigoureusement de dix mètres et
un dispositif de mise en forme des impulsions, engen-
drées lors du passage.
Les deux détecteurs Pd 1 et Pd2 font partie de la
famille des pédales électroniques, couramment utilisées
sur les voies et en particulier pour les annonces des cir-
culations aux passages à niveau, équipés d'une signalisa-
tion automatique avec deux ou quatre demi-barrières.
Entièrement statique, ce type de détecteur est capable de
fonctionner à des vitesses très élevées, comme l'ont
montré des essais de simulation. Leur fonctionnement
reste très satisfaisant dans des conditions climatiques
sévères et à des vitesses voisines de 400 km/h. Leur
emploi est d'ailleurs recommandé sur les lignes à grande
vitesse et dans les régions fréquemment enneigées.
Le détecteur électronique de roue comporte
essentiellement un oscillateur et un circuit résonnant
accordé, auquel est associé un amplificateur à seuil. Deux
types existent pour les installations de signalisation:
D 50 et D 39, c'est-à-dire détecteurs accordés respective-
ment à 50 kHz et à 39 kHz. Les bases de mesures «Opé-
ration T.G.V. 100» ne comportaient que des détecteurs
du type D 50.
Le circuit résonnant constitue avec son circuit
magnétique une «tête de lecture» sensible au passage
des roues: le champ créé par ce circuit magnétique
engendre dans la masse métallique du bandage des cou-
rants de Foucault, donc des pertes, qui réduisent notable-
ment la tension délivrée par l'oscillateur et bloquent
l'amplificateur à seuil. Le passage d'une roue se traduit
donc par une absence temporaire du signal à 50 kHz et
ce créneau est ensuite exploité par le dispositif associé au
détecteur.
Tous les essieux de la rame agissent successive-
ment sur les deux détecteurs Pdl et Pd2, mais pour
obtenir le maximum de précision, l'appareillage d'inter-
prétation à pied d'œuvre ne prend en compte que le pas-
sage du premier essieu de la rame.
Un train de deux impulsions de 20 ms est alors éla-
boré et transmis par une paire de conducteurs jusqu'au
poste central de mesures, qui assure le comptage du
temps (tl -12) et en déduit la vitesse.
La base de mesures est alimentée par une pile de
9 V, dont la mise en service est télécommandée depuis le
P.C.
de Pasilly. Une quarte indépendante était donc
nécessaire pour le fonctionnement de chaque base de
mesures : une paire affectée à la transmission des tops de
passage tl et t2, et une deuxième pour les opérations de
mise en charge et de remise à zéro de la prise d'informa-
tion, qui avait mémorisé tous les essieux de la rame.
Des câbles existants ont été utilisés dans la mesure
du possible, mais un grand nombre de liaisons ont été
confectionnées pour la circonstance.
On notera que, par souci d'efficacité et pour mini-
miser les coûts de l'installation, les concepteurs avaient