annexes philosophie de la guerre / etudes polemologiques

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Philosophie de la guerre
Chapitre 1 : La philosophie de la guerre
La réflexion sur la guerre porte sur 3 choses :
1. l’explication de la guerre
2. sur la distinction entre la guerre et la violence
3. sur trois alternatives :
la guerre ou la paix,
la guerre juste ou la guerre injuste,
guerre limitée ou guerre totale
Selon Kenneth Waltz, il existe trois types d’explications de la guerre :
- La nature humaine, la psychologie humaine
- La nature des régimes politiques ( les institutions…)
- La nature anarchique du système international
Pierre Hassner considère que l’antonyme de la paix ce n’est pas la guerre car la guerre n’est
qu’une forme de violence politique ( par ex dans la violence politique on trouve égt la
dictature, la révolution, le génocide..). Dc la paix ne désigne pas l’absence de guerre, mais
l’absence de violence politique.
Dans la réflexion sur la guerre, on trouve trois grandes questions morales ou politiques :
- La guerre peut-elle être dépassée ? abolie ?
- La guerre peut-elle être juste ?
- La guerre peut-elle être instrumentalisée ?
A chacune de ces trois questions, il y a un postulat, un présupposé :
1.
la guerre serait désuète ou illicite
2.
la guerre serait susceptible d’une évaluation normative
3. la guerre est ou serait un moyen au service d’une fin ( politique, économique…)
I.
L’Etat et la violence
L’expression que l’on emprunte à Norbert Elias « le progrès de la civilisation » cad rendre
civil cad démilitariser. Ce progrès de la civilisation a consisté à éliminer peu à peu les
institutions violentes, au fur et à mesure que l’Etat devenait l’unique institution habilité à
employer la force (monopolisation étatique de la force).
L’Etat associe deux choses :
- La relation de commandement et d’obéissance
- Relation de protection et d’obéissance
Mais l’institution qui peut protéger peut également opprimer.
Le Droit constitutionnel vise à empêcher l’oppression grâce à 3 moyens :
- La garantie des droits des gouvernés ( DDHC)
- La distinction des pouvoirs
- Au contrôle juridictionnel des gouvernants par le juge
La monopolisation étatique de la force a fait l’objet de 4 appréciations :
1. cette monopolisation est un progrès définitif ( la position conservatrice)
2. progrès partiel, en attendant la transposition au plan international ( position
libérale )
3. Cette monopolisation est un progrès provisoire en attendant le dépérissement de
l’Etat lui-même comme ultime instance de violence ( thèse marxiste )
4. Selon la thèse anarchiste, ce monopole étatique de la force n’est pas un progrès car
c’est une source renouvelée de violence.
L’Apologie de la guerre :
Selon Norbert Elias et Pierre Chaunu, l’institutionnalisation de la guerre entre Etats a
constitué un facteur tendanciel, sur le long terme, de réduction de la violence. La guerre
interétatique est un progrès par rapport à la violence interindividuelle ( violence
sauvage ). Inversement, la remise en cause du monopole étatique et interétatique de la force,
qui est typique des processus révolutionnaires, s’accompagne d’une régression du processus
de civilisation.
Mais contre ce pt de vue on peut faire remarquer que 2 choses sont négligées, et c’est que
dénoncent les anarchistes notamment :
- Ce pt de vue néglige la persistance de la violence aux marges de l’Etat
- Surtout ce pt de vue néglige la violence d’Etat elle-même et néglige les effets
collatéraux de la guerre interétatique, susceptible d’entraîner un processus de
décivilisation. La guerre, et même la préparation de la guerre s’accompagne parfois
d’autres phénomènes de violence politique, à savoir la dictature, le totalitarisme, ou
encore la guerre peut s’accompagner de l’attaque des populations civiles en raison
de leur identité ou de leur opinion.
II.
De la guerre à la paix ?
Au XXe siècle :
- il y a moins de guerre entre Etats que de violence des Etats contre leurs populations.
- moins de victimes de la violence guerrière que de victimes de la violence totalitaire.
- Le crime contre l’humanité ou le crime de génocide sont des notions juridiques.
 En polémologie, on parlera de violence totalitaire, pour désigner la violence qui ne
distingue ni la paix et la guerre et qui ne distingue pas les combattants et les non
combattants. D’autre part la violence qui vise tel ou tel groupe, du simple fait de ses
opinions ou de son identité.
 En politologie, on parlera de régime totalitaire pour désigner un régime dans lequel,
au nom d’une idéologie et au moyen du contrôle de l’information, un parti unique
commande à l’Etat, à l’économie et à la société, sans qu’il y ai de société civile autonome.
Donc sans qu’il y ai de propriété privée des moyens de production.
Si on suit cette définition, le communisme a été totalitaire ( sauf la NEP ), mais pas le
fascisme qui maintenait la propriété privée. Par contre, le fascisme même si le régime n’était
pas totalitaire, il se livrait à des violences totalitaires ( génocide juif ). Dc il faut bien faire la
différence entre régime totalitaire et violence totalitaire.
 Le lien entre régime totalitaire et violence totalitaire est fournit par un dernier
concept : la terreur. Ce concept signifie l’insécurité juridique, cad la possibilité d’être
arrêté ou interné par tout agent de police habilité, sans mandat, ni jugement, ni contrôle
judiciaire, du simple fait de ses opinions ou de son identité.
III.
Limitation ou prohibition de la guerre ?
La tendance à long terme semble aller vers le déclin de la guerre en tant qu’institution.
Autrefois considérée comme normale, de nos jours au XXe siècle, elle n’est plus admise
qu’à titre d’exception. Mais face à cette vision optimiste s’oppose une vision pessimiste :
des formes de violences pires que la guerre entre Etats se substituent ou s’ajoutent à la
guerre inter étatique.
La participation des juristes au « progrès de la civilisation », a concerné deux choses :
- D’une part la régulation de la guerre ( JIB )
- D’autre part l’ambition d’interdire la guerre
Ces deux logiques sont différentes, voir opposées :
- dans la première logique ( JIB) il s’agit de limiter la guerre pour mieux
l’instrumentaliser.
- Dans la seconde logique, il s’agit d’abolir la guerre pour garantir la paix.
Quoiqu’il en soit de ce débat, deux questions se posent :
1. est-il possible de limiter/maîtriser la guerre ?
2. est-il possible de prohiber la guerre ?
La réponse à la première question est affirmative ; par contre la réponse à la seconde question
parait négative en ce sens qu’une prohibition absolue n’a jamais été énoncée.
A. Les conditions de la limitation de la guerre ( 1ère hypothèse )
La limitation de la guerre comprend trois phases selon François Géré :
1ère phase : la sélection des buts politiques
2ème phase : la régulation des modalités militaires dans le choix des cibles,
mais également la limitation au niveau du choix des armes de combat.
- 3ème phase : le contrôle matériel et rhétorique des effets générés par la violence
réciproque.
 Qu’est-ce qui permet d’évaluer la guerre ? L’outil juridique qui nous sert en polémologie,
le Droit de la guerre, qui permet d’évaluer la guerre. Cette évaluation porte sur les auteurs et
les buts ( auteurs : Etats, MLN ; buts : offensifs, défensifs ). Le droit de la guerre porte égt sur
les acteurs et les moyens. Ainsi, la guerre limitée est celle qui est conforme politiquement
au JAB et stratégiquement conforme au JIB.
Par conséquent, le respect des règles dessine les contours de la guerre limitée. Et au fond, le
respect des règles trace la limite entre la guerre limitée et celle qui ne l’est pas. Evidemment,
la limite peut être franchie en JAB mais pas en JIB. Cad que des buts exorbitants peuvent être
atteints avec des moyens qui ne sont pas exorbitants. Inversement, des moyens exorbitants
peuvent être utilisés pour des buts qui ne sont pas exorbitants.
B. Le problème de la prohibition de la guerre ( 2nde hypothèse)
En droit international, les idéalistes recherchent l’abolition de la guerre, par le grand
projet de « la paix par la Loi ». Cette quête a fait l’objet de deux sortes de critiques :
1. la première critique porte sur la faisabilité du projet. Projet utopique ?
2. la seconde critique est plus intéressante et porte sur la désirabilité du projet.
1). Concernant la première critique : l’idéal de la paix par la loi est utopique. Les auteurs
comme Schmidt ou Aron considère que l’humanité est politiquement divisée. De plus, il n’y a
pas d’autorité universelle capable d’imposer ses décisions avec une force et une légitimité
telle qu’aucun gouvernement n’oserait la défier.
2). Critique de Schmidt : l’idéal de la paix par la loi n’exclue pas le conflit. Cet idéal est
potentiellement tyrannique, ou du moins il est conservateur. Cet idéal est
tendanciellement discriminatoire. Ceci veut dire :
- l’éventualité de conflit entre les Etats dans la détermination du Droit : l’idée d’un
règne du Droit dans les RI suppose évidemment le pouvoir de définir, d’interpréter et
d’appliquer le Droit. Il faut dc une instance de décision. Par conséquent, cette idée
implique l’éventualité d’un rapport d’hostilité entre les Etats sur la définition,
l’interprétation et l’application du Droit. Et dc cette idée exige une coalition de puissances
pour garantir et sanctionner ce Droit.
- Le caractère tyrannique de cet idéal : Si l’on veut échapper au caractère interétatique
de la sanction. Le règne du Droit aboutie à « l’Etat universel ». en langage politique, le
règne du Droit aboutie à l’hégémonie d’une superpuissance dans un monde unipolaire.
- Concernant le caractère conservateur : l’interdiction de l’agression et l’organisation
de la sécurité collective, lorsqu’elles ne s’accompagnent pas du règlement juridictionnel
obligatoire des différents, ni de modalités efficaces du règlement pacifique, finalement
cette sécurité collective ne fait que consacrer le statu quo. Donc cet idéal est au
service des puissances satisfaites.
- Pourquoi dit on que cet idéal est tendanciellement discriminatoire ? l’assimilation de
l’agresseur à un criminel a pour conséquence que les Etats réputés dans leur Droit,
justifieront un emploi extrême de la force contre l’Etat réputé dans son tord.
Parallèlement, ces Etats qui prétendent incarner le Droit romprons l’unité entre le
gouvernement coupable et la population innocente, ceci dans le but de désolidariser la
population de son gouvernement. Conséquence : la montée aux extrêmes du conflit, et la
transformation tendancielle de la guerre inter étatique en guerre civile internationale.
IV.
De la critique du pacifisme à l’axiologie de la guerre
En droit International, les réalistes s’en tiennent à la paix fondée sur la reconnaissance de la
souveraineté et des antagonismes ( reconnaissance des indépendances réciproques, des
ennemis). Julien Freund : on ne fait la paix qu’avec l’ennemi, ce qui implique par
conséquent, de reconnaître l’ennemi tout simplement, négocier avec eux, voir même de
se réconcilier avec l’ennemi.
L’unique solution si l’on veut terminer le conflit est l’anéantissement ou la conversion de
l’ennemi. La critique du pacifisme a revêtu trois formes :
- Une forme anthropologique
- Une forme politologique
- Une forme axiologique
- S’ajoute une critique conjoncturelle à partir de 1945. Au nom de l’entente avec
l’Allemagne, certains pacifistes ont été parmi les plus ardents collaborationnistes.
- Le pacifisme est susceptible de faire l’objet d’une critique morale, l’inaction peut
être immorale. L’action armée peut être illégale mais légitime.
a). critique anthropologique : Léo Strauss nous dit qu’il y aurait une tendance de la nature
humaine à former des groupes exclusifs. Les figures mnésiques de la guerre cad l’ennemi,
le héros, la victime, semblent nécessaires aux groupes humains pour fonder leur unité et
même leur identité.
b). critique politologique : Selon Karl Schmidt, la relation d’hostilité est l’essence du
politique si bien que la guerre est l’horizon du politique et cet horizon est indépassable
tant que l’humanité restera plurielle dans ses identités, ses intérêts et ses idéaux. Le
pacifisme lui-même est politique ( donc hostile ) : face à la guerre ou face aux risques de
guerre, soit les pacifistes manifestent pour ou contre l’un ou l’autre des belligérants ; soit les
pacifistes se trouvent les anti pacifistes dans leurs ennemis ; soit enfin les pacifistes désirent
imposer la paix par la force
c). la critique axiologique : la définition du politique telle que Karl Schmidt la développe, par
les situations d’exceptions peut conduire à deux positions :
- une position libérale : le politique est le risque de la guerre dc le danger, mais il faut
dépasser ce danger et dépasser le risque d’une mort violente par les progrès de la
civilisation.
- et une position anti libérale ( celle de Schmidt, Machiavel..) il s’agira de maintenir ce
risque au nom de valeurs héroïques.
De ce pt de vue là, affirmer la guerre, c’est une position politique mais également, une
position éthique. Cela revient à affirmer que l’Etat prime sur l’individu. C’est aussi une
position éthique qui revient à affirmer la primauté du pro patria mori ( mourir pour la
patrie ). A partir de là plusieurs traditions philosophiques et intellectuelles vont faire l’éloge
de la guerre : la guerre serait une exaltation de la vitalité ( Nietszch ). D’autres exaltent la
citoyenneté ( le vrai citoyen est près à risquer sa vie pour la patrie (Hegel ).
C’est le nationalisme qui a renouvelé l’axiologie de la guerre à l’époque de la société
industrielle de masse. La figure héroïque devient le soldat inconnu. La nation par
conséquent est la cause collective et transcendante, la cause sacrée, au nom de laquelle
les citoyens se déclareraient près à mourir. La fonction de la guerre est d’éprouver la
santé morale et physique des peuples. La Fonction de la guerre est de révéler si les peuples
sont forts ou faibles, courageux ou lâches ( Hegel ).
Sur les 3 ensembles idéologiques qui dominent le XIXe siècle européen : libéralisme,
nationalisme et socialisme.
- Le libéralisme admet la guerre comme une exception
- Le nationalisme admet la guerre comme principe
- Le socialisme admet la guerre comme moyen
Au XXe siècle après la première guerre mondiale :
- il y a radicalisation du marxisme en marxisme léninisme.
- La radicalisation du socialisme donne naissance au communisme et la
radicalisation du nationalisme en fascisme.
- Les points extrêmes du communisme et du fascisme est le bolchevisme russe et
le nazisme allemand.
- Le fascisme hérite du nationalisme une sorte de passion de la guerre. le
communisme lui hérite du socialisme une certaine passion de la révolution. Les deux
passions peuvent se combiner. Le communisme fut en partie guerrier et le fascisme fut
en partie révolutionnaire.
- Bien que fondamentalement antagonistes, le communisme et le fascisme ont eut un
adversaire commun : la démocratie libérale.
Chapitre 2 : Révolution et contre révolution
Après 1789 et 1917
L’époque moderne a connu deux grandes révolutions : la révolution française en 1789
( précédée par la révolution américaine en 1776 ) puis la révolution russe. La révolution
française a servi de référence à la révolution russe. Ces deux révolutions se sont
accompagnées de contre révolutions ; il n’y a pas de révolution sans contre révolution au
plan idéologique comme au plan politique. L’idée de révolution comme l’idée de contre
révolution figure parmi les principales justifications de la violence. Elles figurent égt parmi
les principales motivations pour accéder au pouvoir.
I.
Précisions terminologiques
Constat : La guerre au XXe siècle étant étroitement liée à la révolution, à la dictature et au
totalitarisme.
Conséquence : la réflexion sur la guerre incluse la réflexion sur ces 3 trois notions.
Point commun : ces trois notions ont toutes en commun d’exprimer une relation d’hostilité
plus ou moins violente.
A. La révolution
La révolution se différencie de la révolte et du coup d’Etat.
Pquoi cette différence ? Ces situations de conflit interne ont un pt commun, à savoir le refus
par les protagonistes d’accepter la légalité en vigueur d’où la désobéissance.
 La révolte est une contestation plus ou moins violente du pouvoir qui n’aboutie pas à un
transfert du pouvoir ou à un changement du pouvoir.
 Le coup d’Etat ( le putsh ) est soit un détournement irrégulier du pouvoir lorsqu’il émane
des gouvernés, soit un transfert irrégulier du pouvoir lorsqu’il émane des opposants.
De 47 à 89 on a connu dans le monde 600 coups d’Etats.
Lorsque le coup d’Etat n’aboutie pas à un simple transfert des titulaires du pouvoir, mais
aboutie à un chgt de la nature du pouvoir ( cad un chgt de régime ), le coup d’Etat
s’identifie à une révolution.
 La révolution
- Au sens large, est une transformation plus ou moins violente des structures
idéologiques ou politiques, ou transformation des structures éco et sociales ( dans le
cas de la révolution communiste ) d’un pays.
- Au sens strict, la révolution est un renversement de régime violent ou non violent,
comme dénouement d’un rapport interne d’hostilité, par un mouvement politique
minoritaire ( coup d’Etat ) ou majoritaire ( élections ), au nom de certains idéaux.
Nous avons donc dans la révolution deux éléments clés : le changement et l’antagonisme.
Par conséquent, la révolution partage avec la guerre la relation d’hostilité, pas
nécessairement l’emploi de la violence. En effet, il est des révolutions légales ( modèle
fasciste ) cad des renversements de régime qui s’effectuent à travers un accès régulier au
pouvoir des anciens opposants ( Hitler nommé par le Pdt Edinburgh ). Il y a égt des
révolutions pacifiques ( Europe de l’Est en 1989 ) cad des renversements de régime qui
s’effectuent sans résistance de la part des anciens dirigeants. Enfin il y a aussi des révolutions
violentes : sans guerre civile lorsque l’exercice de la violence d’Etat est unilatéral ; avec
guerre civile lorsque l’exercice de la violence est réciproque entre le pouvoir révolutionnaire
et les mouvements contre révolutionnaires. En cas d’intervention de puissances tierces, la
guerre étrangère se greffe sur la guerre civile.
B. la dictature
En terme mythologique, la révolution est un Janus ( double face ) car elle est associée à deux
choses :
 elle est associée au progrès et à la démocratie ( gauche )
 elle est aussi associée à la terreur et à la dictature ( droite )
 La dictature comprend deux choses : soit la dictature désigne tout gouvernement non
démocratique parlementaire ; soit la dictature désigne une « exception » à la démocratie
parlementaire. Il convient donc de distinguer deux choses :
- les dictatures provisoires constitutionnellement prévues dans tous les régimes
démocratiques parlementaires ( cf article 16 )
- les autres types de dictatures
Les premières relèvent de la « dictature commissariale » ( renvoie à l’article 16 ), à savoir
que le dictateur commissarial détient les pleins pouvoirs qu’il détient discrétionnairement,
pour surmonter une situation de crise, et dans le but de rétablir l’ordre constitutionnel normal.
Les autres types de dictatures, soit suspendent indéfiniment l’ordre constitutionnel et
aboutissent par conséquent à une confiscation du pouvoir de l’équipe en place, soit
établissent un nouvel ordre constitutionnel.
En tant qu’institution révolutionnaire, la dictature signifie la concentration des
pouvoirs, la réduction ou la suspension des libertés publiques, la suspension de la
compétition politique et enfin l’immunité du pouvoir. Tels sont les éléments constants des
dictatures. Tout cela de manière provisoire, pour vaincre la contre révolution ( on retrouve la
relation d’hostilité ) et/ou pour transformer l’ordre social.
En tant qu’institution contre révolutionnaire, les moyens sont identiques (
concentration des pouvoirs…) mais le but est inverse, ici il s’agit de vaincre la menace
révolutionnaire ( cf Pinochet en 1976 ) et/ou rétablir l’ordre social.
Quelques distinctions au niveau des modalités :
- on peut distinguer les dictatures à direction personnelle ou collégiale.
- Les dictatures dont la structure s’appuie sur l’armée ou sur un parti ou sur une
combinaison armée-parti.
Quant à la tyrannie, il s’agit d’un terme ( un jugement de valeur ) qui qualifie/disqualifie
l’illégitimité du pouvoir. Soit que le pouvoir procède d’une usurpation, soit qu’il s’exerce de
manière abusive.
II.
Les points communs entre les révolutions française et russe
Evidemment que les révolutions françaises et russes ont été différentes dans leur
déclenchement, leur développement et leur dénouement. Mais nos deux révolutions ont eu des
pts communs essentiels :
 Les deux révolutions se déroulent dans des pays ruraux et chrétiens, dont la
paysannerie émet des revendications foncières.
 Les deux révolutions sont préparées au niveau des idées et des sentiments par des
intellectuels aliénés, cad des milieux instruits dont la position sociale est dégradée
et dont l’attitude politique est critique vis-à-vis des autorités en place. Dc climat
intellectuel.
 Les deux révolutions débutent ac la défection de l’armée régulière autrement
dit, lorsque les gouvernements en place s’avèrent incapables de réprimer les
soulèvements en place.
 Elles sont conduites depuis les capitales par des citadins ( en minorité mais
instruits ) notamment des membres de minorités confessionnelles, à savoir des
protestants en France, et des juifs en Russie. Ces minorités citadines laissent les
paysans distribuer une partie des terres et liquider la noblesse foncière comme
classe.
 Les deux révolutions se veulent éducatrices, les intellectuels qui préparent la
révolution sont des pédagogues, et se caractérise par la diffusion du français et de
la philosophie des Lumières. En Russie, le nouveau pouvoir alphabétise les
masses. Dc alphabétisation + diffusion de l’idéologie marxiste léniniste.
Aspects idéologiques :
 Les deux révolutions sont donc animées par une idéologie rationaliste, elles se
réclament du progrès. Mais cette idéologie rationaliste se métamorphosa en une
espèce de théologie sécularisée.  demander au prof
 D’un point de vue sociologique, elles promeuvent un changement des
institutions mais aussi des mœurs, dans le sens de l’égalité homme femme. Elles
vont dc dans le sens d’un bouleversement familial et matrimonial.
 Elles désirent rompre ac le passé au nom d’une philosophie de l’Histoire. Idée que
l’histoire a un sens, et que ce sens est le progrès. La révolution sert à accélérer le
sens du progrès, et dans l’espérance d’une ère nouvelle. On veut faire table rase
des institutions du passé.
 Mais d’un autre côté, ces 2 révolutions n’empêchèrent pas une certaine
continuité géopolitique, avec le soupçon que la France révolutionnaire puis
napoléonienne poursuivait les desseins hégémoniques en Europe de la France des
Bourbons ( ou de Louis XIV ). Certes avec des moyens radicaux ( conscription ) et
avec une idéologie nouvelle ( philo des Lumières ). En Russie, on poursuit les
desseins hégémoniques en Eurasie de la Russie, avec des moyens radicaux et une
idéologie nationale du communisme.
 On retrouve dans les deux cas le caractère universel : nos deux révolution
prétendent et veulent s’adresser au monde entier. . Cf texte « la révolution selon
Marx et Engels » ou l’on peut lire « la révolution prolétarienne a une justification
universelle ».
 On retrouve dans les deux cas la capacité de susciter une certaine allégeance
transnationale voir supranationale : « les relations d’amitié ou d’hostilité
traversent les frontières. »
 Dans les deux cas on retrouve la promesse de la paix et de la justice et le
recours à la violence et à la guerre.
 On retrouve égt dans les deux cas l’appel à l’insurrection des peuples.
Aspects polémologiques :
 on retrouve dans les deux cas le régicide. En France, régicide ac procès de Louis
XVI, en URSS le régicide sauvage. Mais au-delà du monarque, il y a un défi
lancé à la tradition, un sacrilège à cette autorité, et qui inquiète ainsi l’ensemble
des monarques du monde.
 Dans le prolongement, on retrouve la vengeance contre les anciennes élites. Il y a
ainsi dans les deux cas des destructions iconoclastes, culturelles et symboliques,
afin de rompre ac le passé.
 Dans les deux cas il y a les émeutes, les jacqueries (émeutes paysannes) et les
mutineries. Dc les violences des foules contre les anciens pouvoirs.
 Luttes entre factions : girondins vs jacobins, bolcheviques vs mencheviques
 En sens inverse, on retrouve la répression et la Terreur, à savoir la violence du
nouveau pouvoir contre les opposants.
Aspects politiques :
 On retrouve la désagrégation de l’ancien Etat, puis la reconcentration
dictatoriale des pouvoirs pour lutter contre les ennemis intérieurs et/ou extérieurs
 Le remplacement de l’ancienne armée par une nouvelle armée et dirigée par des
commissaires politiques.
 On retrouve le paradoxe d’un pouvoir prétendu populaire, mais exercé par des
hommes sans élections concurrentielles périodiques.
 L’anéantissement social des classes adverses
 On retrouve la « guerre contre une fraction de la paysannerie » : en France la
Vendée et en Russie l’Ukraine, et contre le clergé.
 Enfin dans les deux cas, la guerre contre le clergé.
III. Les différences entre les révolutions française et russe

La Révolution française a éclaté dans un pays avancé, en paix et qui était « au
centre de l’Europe ».
 La révolution russe a éclaté dans un « pays arriéré » en guerre, et dans un pays
en périphérie de l’Europe.
Par conséquent, pour les jacobins français, la révolution a éclaté au bon endroit, pas pour les
marxistes qui pensaient que la révolution devait éclater en France, en Allemagne ou en
Angleterre cad ds le centre riche mais pas dans la périphérie retardée.
 Le marxisme est une idéologie occidentale, qui a été élaborée par des philosophes
allemands ( Marx, Engels ) qui la destinait à triompher en Europe occidentale. Mais les partis
se réclamant du marxisme ont accédé au pouvoir dans des pays non occidentaux. Et dans ces
pays, ils ont voulu « construire le socialisme » en luttant contre la société traditionnelle, et en
essayant de rattraper l’occident ( c’est l’aspect nationaliste ).
 Au contraire de la révolution française, il est difficile de dater la
terminaison/la fin de la révolution russe. Si la révolution française a connu un
thermidor ( chute des révolutionnaires radicaux les girondins, en Août 1794 ). En
Russie, les révolutionnaires radicaux, ,à savoir les bolcheviques n’ont jamais chuté
dc il n’y a pas eu de thermidor. Le Parti bolchevique, devenu PC est resté au
pouvoir de 1917 à 1991.
Autrement les différences les plus sensibles, résident dans 4 choses :
1. Le pouvoir constituant : en 1789 en France, une assemblée constituante se réunie.
En 1918 pour le cas russe, l’assemblée constituante est dissoute par le parti
bolchevique qui s’empare dc du pouvoir constituant.
2. Dans la propriété privée : en 1789, le droit de propriété est proclamé mais en 1917
la propriété privée des moyens de production, à l’exception de la propriété de la
terre, est supprimée, si bien que l’économie, y compris l’agriculture passe aux
mains de l’Etat.
3. Le disensus social : la révolution de 1789-91 a engendré une démocratie
bourgeoise créant des inégalités sociales. La révolution russe se voulant
l’héritière de la révolution de 1794 ( de Robespierre ) désirait une démocratie
prolétarienne, à savoir égalité des droits et des conditions ( = égalitarisme ).
- La bourgeoisie française a face à elle par csq la noblesse et le clergé, mais elle
peut s’appuyer sur une grande partie de la paysannerie et des ouvriers artisans.
Par csq, aussi le niveau de violence fut-il plus modéré.
- En revanche, le prolétariat russe a face à lui la noblesse, le clergé, la
bourgeoisie et plus tard ce prolétariat aura face à lui la paysannerie libre.
Aussi, le niveau de violence interne fut-il bcp plus élevé.
 La révolution française a rencontré un certain consensus ; la révolution
russe, du fait d’objectifs plus ambitieux fut plus disensuelle.
 Au niveau économique, les deux révolutions visaient une transformation
économique et sociale. La dimension économique fut plus accusée dans le cas
russe que dans le cas français. Dans le cas français, nous avons une redistribution
de la propriété, nous avons une abolition de la corporation ( décrêt Dalard, loi le
Chapelier ) et enfin nous avons la création du marché national en France. En
Russie nous avons la collectivisation de la société, l’industrialisation planifiée à
partir de 1929, et enfin nous avons la création d’une société socialiste en Russie.
4. Les rapports de force internationaux : La France était la plus grande puissance
de l’époque, elle exporta sa révolution sous la forme de la révolution
étrangère. L’armée en France à partir de 1795 est devenue la tutrice de l’Etat. Dc
processus de militarisation. La Russie n’était pas la plus grande puissance de
l’Epoque, la preuve l’Allemagne bat la Russie ac le tiers de ses forces. Elle ne
réussit pas à exporter sa révolution, elle se ferma pour construire le socialisme
dans un seul pays. Enfin, l’armée rouge resta sous la tutelle du PCUS ( parti
communiste union soviétique ).
IV. Le conflit international de la révolution
et de la contre-révolution dans les cas français et russe


La révolution et la contre-révolution dans le cas français après 1789, conduisent à
la guerre extérieure. Après 1914, c’est la guerre qui conduit et qui permet la
révolution et la contre-révolution.
Même envahie, la France révolutionnaire est d’abord conquérante ; la Russie
révolutionnaire, doit signer la paix de Brest-Litovsk en 1917 avec les puissances
germaniques occupantes ( Allemagne Autriche-Hongrie ). Par la suite, les
tendances révolutionnaires que la Russie de Lénine soutient en Europe échouent
définitivement en 1923.
Ensuite, le conflit de la révolution et de la contre-révolution a suivi une évolution très
différente du cas français par rapport au cas russe :
 Les monarchies coalisées en 1792, luttent contre la France pendant plus de 20
ans ( de 1792 à 1815 ).
En Russie, les interventions des alliés contre la Russie bolchevique
commencent au printemps et à l’été 1918 et cessent dès avril 1919, dc cela ne
dure même pas un an et cela reste périphérique. La normalisation des relations
ac l’URSS, constitué en 1922, s’effectuera de 1922 ( date de la Grande conférence
internationale éco de Gènes à laquelle participera l’URSS ) et en 1924, et
jusqu’en 1933-1934 : le premier geste de l’administration américaine de Roosevelt
est la reconnaissance de l’URSS qui entre à la SDN.
 De 1792 à 1815, l’opposition demeure centrale entre la France et les
monarchies coalisées. De 1815 à 1830, la Sainte Alliance ( Autriche-PrusseRussie ) veille à l’ordre établi contre toutes tendances révolutionnaires.
En Russie, il n’y a jamais eu d’opposition claire et constante entre l’URSS et
les Etats capitalistes de 1917 à 1991, ni même d’alliance internationale contre
la révolution communiste ( il n’ya a pas eu de Sainte Alliance capitaliste ), sauf
une tentative avortée du pacte anti-comminterm ( qui réunissait l’Allemagne, le
Japon et l’Italie ) en 1936-37, le Japon ne participera même pas à la guerre contre
l’URSS. Cela s’explique tout simplement par la configuration triangulaire de
l’Europe :
- Démocraties occidentales ( France, GB ), il y a eu entente germano soviétique
contre Versailles ( référence au Traité ) et Genève ( siège de la SDN ) ;
- une certaine entente franco-soviétique contre l’Allemagne 1934-1938 ;
- enfin Pacte germano soviétique en 1939-41.
- Et enfin nous avons la grande Alliance contre l’Axe de 1941-45, à savoir les
occidentaux et l’URSS contre l’Allemagne fasciste.
 Dc il n’y a pas eu clairement opposition entre pays capitalistes et URSS. Il n’y a même
pas eu de coalition des puissances fascistes ou autoritaires contre l’URSS, le Japon ayant
gardé sa neutralité vis-à-vis de l’URSS. Il n’y aura de coalition mondiale anti-soviétique
qu’en 1955, lorsque après la conclusion de l’Alliance atlantique en 1949 et après l’alliance
japon- Etats-Unis en 1951 et enfin lorsque la RFA entre ds l’Otan en Mai 1955.
Ce qui a sauvé la Russie c’est que l’adversité externe était plus grande pour la France que
pour la Russie. Il y avait un disensus interne plus grand pour la Russie mais une
adversité externe moins importante.
 Au terme des guerres de la révolution et de l’Empire, il y a un rééquilibrage des
puissances et une semi restauration, dc une sorte de stabilisation.
 En revanche, à la fin de la première guerre mondiale, et de la période révolutionnaire et
contre révolutionnaire qui la suit ( 1918-1923 ), il n’y a pas de stabilisation, il n’y a ni
système international homogène, ni système interne homogène. Les gouvernements
établis, certes avec l’appui des mouvements bourgeois mais aussi des partis socialistes,
réussissent à briser les tendances révolutionnaires, qui sont étouffées. Mais la contre
révolution ne l’emporte pas complètement, l’Etat soviétique, mais aussi l’International
communiste se sont constitués. Dans tous les pays européens, des partis communistes
disputent aux partis socialistes l’hégémonie au sein de la classe ouvrière. Dc Hétérogénéité à
gauche, à l’ouest.
 A droite, la contre révolution a pris une forme semi révolutionnaire : le fascisme est anti
libéral au plan idéologique et politique, mais pas au plan éco et social.
Chapitre 3 : Communisme(s) et fascisme(s)
Origine structurelle : l’industrialisation a engendré une nouvelle classe sociale, pauvre,
peu instruite et dc turbulente, à savoir les ouvriers d’usine. Ils étaient présents au cœur et
aux portes des villes. A la fin des années 1880, cette classe sociale devenue consciente
d’elle-même, éduquée par les élites, est largement dominée par le marxisme.
Intellectuellement, le marxisme était supérieur aux autres courants.
Vu de droite, cela représente une énorme menace. Le marxisme menaçait tous les
propriétaires, car il voulait abolir la propriété privée des moyens de production, et parce qu’il
voulait instituer la hiérarchie des classes. Par la même abolition de la religion et de l’Etat luimême.
A gauche au contraire, ce n’est pas une menace mais une promesse, on affirmait que la
révolution prolétarienne réaliserait ce que la révolution bourgeoise a la française avait
promis mais n’avait pas réalisée. A savoir la liberté, l’égalité, la fraternité, la laïcité.
Autrement dit, on affirmait que la révolution prolétarienne poursuivait la démocratisation
du plan politique au plan économique. Bref, la révolution prolétarienne conduirait le
progrès à son terme, et marquerait la fin de l’Histoire.
I.
La première guerre mondiale et la genèse du communisme et du fascisme
 notes : ouvrage de François Furet « Fascisme et Communisme »
Chapitre 1 : Sur l’interprétation du fascisme
La guerre de 1914 a pour l’histoire du XXe siècle le même caractère matriciel que la
Révolution française pour le XIXe siècle.
Le fascisme mussolinien de 1919 peut être conçu comme une « reaction » à la menace d’un
bolchevisme à l’italienne, surgi lui aussi de la guerre, et constitué plus ou moins sur l’exemple
russe. Pour combattre Lénine, Mussolini l’a imité.
Le système libéral est la matrice des deux idéologies, communisme et fascisme : la première à
laquelle Marx a ouvert la voie, porte à l’extrême « transcendance » de la société moderne : par
quoi l’auteur entend l’abstraction de l’universalisme démocratique qui arrache la pensée et
l’action des hommes aux limites de la nature et de la tradition. En sens inverse, le fascisme
veut rassurer ceux-ci contre l’angoisse d’être libres et sans déterminations. Il puise son
inspiration lointaine dans Nietzsche, et sa volonté de protéger la « vie » et la « culture » contre
la transcendance. A partir de là on ne peut pas étudier les deux idéologies séparément, car
elles montrent toutes deux les contradictions du libéralisme, et leur « complémentaritérivalité » a marqué notre siècle.
 extrêmisme universalisme du bolchevisme
 extremisme particulier du nazisme
Tout commence par la question du sens à donner au deuil collectif dû à la guerre.
 A gauche : Culpabilisation des classes dirigeantes.
 A droite : glorification des citoyens soldats
La gauche considère que l’hécatombe entraîne l’obligation de revenir à l’internationalisme
( français et allemands ne doivent pas être ennemis ) et en finir avec le nationalisme.
La position de la droite : elle considère que le sacrifice des soldats entraîne l’obligation de
demeurer fidèle à la cause nationale pour laquelle ils sont morts.
Ces deux positions se retrouvent dans la genèse, la cristallisation du communisme et du
fascisme.
1.
Le communisme
Le communisme est né d’une protestation contre « la guerre impérialiste » et d’une
dénonciation de la trahison de la cause internationaliste par les partis socialistes. ( on
reproche à la gauche d’avoir voté la guerre ).
 A l’ouest, la révolution d’Octobre avait un handicap : elle prêtait à l’accusation de servir
les intérêts de l’Allemagne.
 Mais d’un autre côté, la révolution d’octobre avait un atout : en dénonçant la guerre, la
révolution d’octobre trouvait un immense écho auprès de l’opinion en général, et en tout
cas un immense écho auprès de la gauche en particulier.
2.
Le fascisme
Le fascisme est né d’une affirmation de la guerre et une dénonciation de la cause
nationale par les partis marxismes. C’est précisément sur la question de l’intervention de
l’Italie dans la guerre que Mussolini se sépare du Parti socialiste italien en 1914. Puis il
fonde son journal, « le peuple d’Italie » volontairement belliciste et subventionné par les
français.
II.Les caractéristiques polémologiques
1.
Les objectifs
 L’objectif du communisme est le changement de régime idéologique et politique, et cela
à l’encontre des élites
 L’objectif du fascisme est le changement de régime idéologique et politique sans
changement de régime économique et social, et cela avec le soutien des élites
traditionnelles.
Mise à part cette différence fondamentale, les partis communistes et les partis fascistes, bien
qu’ennemis, ont des caractéristiques polémologiques communes :
- Ce sont des partis qui admettent la violence, comme moyen de la
révolution du côté communisme, comme principe de la politique du côté
fasciste.
- Ce sont des partis qui recourent à la dictature ( au sens conceptuel du
terme ) même si il est vrai qu’il renouvellent les élites, et même s’ils
invoquent aussi tous deux la légitimité populaire.
- Ce sont des partis qui utilisent la légalité pour proscrire leurs opposants.
- Ce sont des partis qui développent le CMI ( complexe militaro industriel )
Chez les communistes comme chez les fascistes, la dictature doit servir à vaincre
« l’ennemi intérieur » ( la bourgeoisie pour les communistes, le marxisme pour les fascistes).
Mais les communistes visent surtout la transformation sociale et comme on est dans des
pays agraire, l’industrialisation accélérée. Du côté fasciste, on vise surtout la conquête
militaire.
 Dc chez les premiers la violence est plutôt intériorisée et chez les second elle est plus
extériorisée.
2.
L’arrivée au pouvoir
Les partis communistes ont toujours accédé au pouvoir par la force, jamais par la voie
électorale. Par ex en 1956 au Vietnam, en 1971 au Chili ( Allende était un communiste pur et
dur ). Coup d’Etat de Lénine et Trotski en Russie en 1917. Présence de l’armée rouge et coup
d’Etat en Europe centrale, cette présence militaire favorise l’essor des PC et la
« colonisation ». En Corée du Nord, en Afghanistan coup d’Etat en 1978 mais qui va mal
tourné par la suite. Autre exemple, guerre contre l’occupant ( allemand ou japonais ) et
surtout guerre civile contre les rivaux en Yougoslavie, en Albanie, et surtout en Chine. Enfin,
guérilla anti coloniale, et /ou guerre civile ( Angola, Mozambique, Nicaragua, Cuba,
Indochine.. ) dans divers pays du tiers monde.
Les partis fascistes ont accédé au pouvoir par « la révolution légale et nationale » :
Mussolini et Hitler sont nommés chefs de gouvernement par les autorités en place ; ou bien
par le coup d’Etat ( Salazar ) ou par la guerre civile ( Franco en Espagne ) ou à la faveur de
l’occupation allemande pendant la seconde guerre mondiale.
3.
L’exercice du pouvoir
Les PC étaient explicitement des partis d’anéantissement social ( on promet
l’anéantissement des classes propriétaires. ) Les Etats communistes ont procédé à la
destruction de classe, au minimum par l’expropriation sans indemnisation ( la spoliation
en droit ), au maximum par la liquidation physique. Dans les pays coloniaux ayant accédé
à l’indépendance par la lutte armée et ayant choisis la voie du socialisme, la révolution s’est
confondue avec l’expropriation sans indemnisation et l’expulsion des européens ( en
Algérie des français et en Angola des Portugais ).
Le nazisme allemand se livrera à un anéantissement racial, à savoir le génocide juif
pendant et sous couvert de la guerre, hors d’Allemagne et en secret.
III. La trajectoire comparée du communisme et du fascisme
A. Au niveau des idées
Points communs :
 La généalogie intellectuelle du communisme comme du fascisme est antérieure à 1914.
Mais pour tous les deux le choc de la guerre ( WWI ) a été décisif ds la cristallisation y
compris dans la cristallisation idéologique.
La différence est flagrante :
 Le communisme se revendique du progrès, et le communisme vise à accélérer ce
progrès, il s’inscrit dans le marxisme-léninisme.
 Le fascisme lui prône une toute autre philosophie de l’histoire : le fascisme prétend
lutter contre la décadence, et il s’inscrit dans le nationalisme.
B. d’un point de vue plus sociologique
 Les partis communistes prônent l’alliance des intellectuels et de la classe ouvrière ( idée
de génie ).
 Les partis fascistes méprisent volontiers les intellectuels.
1. L’histoire des régimes
L’histoire des régimes communistes débute en 1917 par le prise de pouvoir de Lénine. Et
l’histoire des mouvements communistes débute en 1919 avec la scission de la 2 nde
Internationale et la fondation de la 3ème : l’Internationale Socialiste. Trotski suscitera une
4ème internationale en 1933. Il est possible, mais pas certain, de considérer que l’histoire du
communisme s’est achevée avec la disparition de l’URSS ( en Droit international la
scission de l’URSS ) en 1991. Mais après tout subsiste des Etats gouvernés par des PC (
Corée du Nord, Chine…).
Du côté des fascistes, l’histoire des mouvements fascistes débute en 1919 avec la création
des « factio italiano di combativento » les factions italiennes de combat. En 1922, l’accès
au pouvoir de Mussolini qui instaurera progressivement un gouvernement fasciste. Cette
histoire s’achève en 1945 ac le suicide d’Hitler.
L’élite communisme s’est incarnée dans l’Etat soviétique, malgré la reconnaissance et le
développement du polycentrisme du communisme.
L’histoire du communisme en temps qu’idéologie, mouvement et régime, correspond au deux
grandes périodes de l’histoire de l’URSS, c'est-à-dire avant et après 1953, cad la date du
décès de Staline. Donc deux cycles :
- La phase révolutionnaire
- La stabilisation post révolutionnaire
L’histoire du fascisme en temps qu’idéologie, mouvement et régime est plus diverse : elle
s’est incarnée principalement dans deux Etats : l’Italie ( version modérée ) et l’Allemagne (
version radicale ). Là aussi cette histoire se divise en deux périodes : avant et après 1933 (
date de l’arrivée au pouvoir de Hitler ).
- La première période est menée par l’Italie qui demeure membre du
Conseil de la SDN.
- Par contre la seconde période est dominée par l’Allemagne, dont le
potentiel et le dynamisme mettent fin à l’ordre de Versailles puis
précipitent la seconde GM, jusqu’à la défaite totale, suivie par des procès.
Le communisme a été structuré par une internationale avec un comité exécutif, une école
léniniste internationale de Moscou. La capitale de L’Internationale était Moscou et qui était
capable, par le biais du Kominterm, de susciter une allégeance envers l’Etat soviétique.
En revanche du côté fasciste, il n’y a jms eu d’Internationale fasciste, cad qu’il n’y a jms
eu d’organisation centralisée dont la capitale aurait été Rome ou Berlin.
IV. Les Débats au sein de la gauche marxiste
Les débats au sein de la gauche marxiste ont été à l’origine du MCI( mouvement communiste
international ) et par la même de la division entre les socialistes et les communistes (
jusqu’aux années 50, ils ont en commun d’être marxistes ).
A. la question de la propriété privée
 Pour les forces soutenant la démocratisation : la question était de savoir si la propriété
privée des moyens de production était indispensable à la démocratie parce que la
propriété privée signifiait l’autonomie matérielle des individus vis-à-vis de l’Etat. Ou bien
autre position, si la propriété privée était incompatible avec la démocratie parce que elle
signifiait la hiérarchie sociale des classes. C’était la thèse initiale des socialistes. Autrement,
dit, la question était de savoir si l’inégalité économique des individus rendait ou nom
illusoire l’égalité politique des citoyens.
 vu de gauche, l’appropriation publique des moyens de production signifierait que le
peuple ne serait pas seulement souverain politiquement mais économiquement. Toute
l’économie appartiendrait à tout le peuple.
 vu de droite par contre, l’appropriation publique des moyens de production signifierait
la privation des droits individuels et l’omnipotence de l’Etat.
AU début du XXe siècle, une partie des socialistes ( en France : membres de SFIO ) en
Europe de l’Ouest ont accepté l’idée que la situation des travailleurs manuels salariés pouvait
être améliorée dans le cadre de la démocratie parlementaire et dans le cadre de l’économie de
marché, pourvu qu’elle prenne un tour social.
P.csq, l’évolution est la suivante : la sociale démocratie ( comme cela que s’apellaient les
premiers PS ) désignait l’extension de la démocratie dans l’économie et la société.
Autrement dit, le passage de l’égalité des droits à l’égalité des conditions et autrement
dit le passage de la propriété privée à la propriété publique. Désormais avec ce tournant
réformiste, la sociale démocratie désignera le compromis entre le capitalisme d’une part,
l’interventionnisme économique et la protection sociale d’autre part. Ce compromis ne
sera définitivement adopté par les PS qu’après la seconde GM.
Le communisme, ceux qui restent fidèles aux radicaux, continuera d’exprimer la volonté
d’abolir le capitalisme et de réaliser un égalitarisme ( égalité non seulement politique,
mais égt économique et sociale ).
B. L’attitude face à la guerre en 1914-1918
La majorité des socialistes par allégeance nationale vote et soutient la guerre en 1914.
Seule une minorité des socialistes refuse, par fidélité internationaliste. A l’époque, tous
les Etats européens, sauf la Russie ( alliée de la France ) ont un régime parlementaire ou en
voie de parlementarisation. Dc les gouvernements dans ces régimes, ne peuvent déclarer et
poursuivre la guerre sans le vote des crédits militaires. Les partis communistes sont issus
des minorités qui ont refusé « l’union sacrée », qui ont refusé de voter la guerre, qui ont
persévérer dans l’antimilitarisme, qui accusent dc les socialistes majoritaires d’avoir
trahis le programme de l’internationale, à savoir, empêcher la guerre impérialiste par la
grève ou par la mutinerie.
 Par csq, les caractéristiques polémologiques du communisme furent exacerbées : la
perception suivante, à savoir la guerre mondiale était un crime de la bourgeoisie contre la
classe ouvrière, crime dont les socialistes majoritaires s’étaient rendu complices. D’autre
part, pour accentuer les choses, il était probable que cette classe s’accrocherait au pouvoir par
le recours à la dictature contre révolutionnaire. Le recours à la dictature révolutionnaire
afin de vaincre la bourgeoisie se trouve légitimer du pt de vue communiste par cette
perception de la bourgeoisie comme d’une classe criminelle. C’est ainsi que le MCI, est
devenue à la fois un mouvement de protestation contre la guerre impérialiste, et un
mouvement de guerre civile internationale contre la bourgeoisie.
C. La controverse sur la révolution russe
En Russie en 1917, on constate que les bolcheviques accèdent au pouvoir par un coup
d’Etat. Ils le conservent en remportant la guerre civile et en maintenant la dictature du parti
unique, et en concevant la classe ouvrière qui est minoritaire, comme une classe guerrière.
 Réaction des socialistes européens : la révolution bolchevique, ne correspond pas au
schéma marxiste. Cependant, le pouvoir bolchevique prétend établir un régime modèle pour
l’Europe, cad un régime universaliste et internationaliste, se situant ds l’histoire européenne
des idées.
La controverse : Kautsky vs Lénine
 Pour Lénine, le pouvoir doit être pris et conservé par tous les moyens (
pacifiques comme violents ) au nom du progrès de l’histoire et lorsque les
circonstances offrent le pouvoir à une avant-garde, même si l’isolement relatif de
cette dernière impose le recours à la dictature et à la violence ( recours que l’on
dit transitoire et provisoire ). ( demander au prof )
 Pour Kautsky, le renversement de la bourgeoisie par le prolétariat passe par la
conquête électorale et parlementaire du pouvoir ; Cette conquête sera
inéluctable puisqu’il y aura de plus en plus de prolétaires, c’est pourquoi ils
deviendront majoritaires. Il considère au fond que le marxisme participe au
fond du progrès de la civilisation qui permet dc au mouvement ouvrier de se
passer de la violence ( en organisant des élections par ex ). Le bolchevisme au
contraire représente une régression, dans la mesure ou le bolchevisme
remplace la lutte des classes par la guerre civile et remplace la démocratie par
la dictature.
Le problème va être d’interpréter les textes fondateurs : en l’occurrence interpréter une phrase
d’un ouvrage de Marx : La critique du programme de Gotha. Cette phrase a fait l’objet de
tonnes et de tonnes de commentaires : « entre la société capitaliste et la société communiste
se situe la période de transformation révolutionnaire. A cette période correspond égt une
phase de transition politique ou l’Etat ne saurait être autre chose que la dictature du
prolétariat ».
 Dans cette formule, Kautsky ne voit qu’une hégémonie sociale de la classe ouvrière.
 Lénine quant à lui lit dans cette formule la recommandation d’un gouvernement
dictatorial fondé sur un parti unique.
D. La scission de l’internationale
 A l’été 1920, le deuxième Congrès de l’Internationale communiste, adopte les 21
conditions qui font du Kominterm une organisation mondiale centralisée articulée en
sections nationales. Ces conditions ont pour effet immédiat de scinder les grands partis
socialistes européens ( le SPD allemand, le PCI italien, la SFIO en France ) pour créer donc
des partis communistes, à savoir le KPD ( PC allemand ), le PCI en Italie et le PCF français.
Parmi ces 21 conditions, il y en a 2 qui faisaient des Partis communistes « des partis de
guerre civile internationale » à savoir :
- Celle qui exigeait la création d’appareils clandestins à des fins
insurrectionnelles
- L’engagement de soutenir tout Etat soviétique, dc engagement de solidarité
1. Intervient donc la fracture au sein du mouvement ouvrier.
 Entre ceux qui adhèrent à la révolution russe
ac hésitation ou enthousiasme, qui
font allégeance à l’Etat communiste, qui fondent et adhèrent aux PC, et donc que se
regroupent dans l’IC ( internationale communiste ).
 Les autres cad qui n’adhèrent pas à la révolution russe, demeurant fidèles à leur
Etat national, restent dans les PS et dc restent dans l’IS ( Internationale socialiste ).
Jusqu’à la guerre froide, les socialistes garderont ac les communistes une base commune
fondamentale : le marxisme. En 1959, le SPD allemand abandonne officiellement le
marxisme.
 Les seconds, les communistes au contraire des socialistes seront des marxistesléninistes, là et toute la différence, la doctrine sera transformée par Lénine. Lénine relie
Marx, de là naît l’universalisme soviétique.
 Les partis socialistes verseront dans le réformisme, cad qu’on soutient par principe la
démocratie parlementaire. Acceptation du capitalisme mais aussi évolution vers l’Etat de
Droit social, et l’économie sociale de marché. Donc le capitalisme oui, mais corrigé par un
puissant Etat providence.
 Les PC eux par contraste, resteront au moins théoriquement révolutionnaires ( au
moins dans le discours ) jusqu’à la fin de la guerre froide, en apportant un soutien par tactique
de la démocratie parlementaire, refus du capitalisme, maintien de la dictature du
prolétariat en temps que concept et maintien de l’étatisation des moyens de production (
dc fin de la propriété privée ).
2. Les idéaux
La Russie prolétarienne du XXe siècle prend la place et la suite de la France bourgeoise
du XVIIIe siècle pour une nouvelle avancée démocratique. Autrement dit, ce que pense les
communistes c’est que de la déclaration de 1789 à la déclaration soviétique de 1918
« Déclaration des droits des travailleurs » on passerait donc de l’égalité des droits à
l’égalité des conditions, de la propriété privée à la propriété publique et dc de la
démocratie politique à la démocratie économique.
Mais dans tous les pays où les PC accédèrent au pouvoir, les mêmes problèmes ac des
circonstances différentes, les mêmes problèmes se posèrent à des équipes dirigeantes dont
l’idéologie était axée sur l’industrialisation, sur la conscience de classe, sur le
collectivisme gage d’égalité et de progrès et enfin axée sur l’athéisme. Par rapport à ces 4
thèmes se posèrent certains problèmes :
 La paysannerie : comment s’y prendre ac les paysans ?
 La PB des nationalités
 La propriété privée qui peut exister par ex au niveau familial et qui peut poser pb
au collectivisme
 Pb de la religion
La faiblesse de la classe ouvrière a pr conséquence que le projet socialiste n’est soutenu que
par un petit monde intellectuel et en son sein par un petit groupe révolutionnaire. Ce noyau
révolutionnaire, devenu la couche dirigeante à la faveur de la prise du pouvoir dans un
contexte guerrier. Ce groupe a conscience et comprend tout à fait que ce projet
idéologique est voué à l’échec, s’il ne construit pas un Etat ( efficace et modernisateur ) à
la fois subordonné au Parti et capable d’industrialiser le pays. Il s’en suit donc la
formation d’un régime à la fois minoritaire ( et qui sera forcément coercitif ), se considérant
comme assiégé, coercitif du fait de l’ennemi intérieur et extérieur et qui se veut
modernisateur.
La légitimité d’un tel régime fut de s’identifier contre l’impérialisme, et combat pour
l’indépendance nationale et pour le développement.
V. Le fascisme en général
Certains éléments de l’idéologie fasciste sont apparus avant 1914, et d’autres sont apparus
après 1918. Les fascistes maintiennent le principe de l’égalité politique des citoyens ( dc on
conserve les acquis de la révolution française. Par contre, le fascisme exprime le rejet de
l’idéologie des Lumières, dont se réclament au contraire le libéralisme et le marxisme.
Pour que le fascisme apparaisse comme mouvement puis comme régime, il a fallu le choc de
la guerre et de la révolution, cette dernière suscitant la contre révolution.
A. Les éléments idéologiques
En tant qu’idéologie, le fascisme ( italien ) regroupe 3 éléments :
 Le darwinisme social cad l’idée que la lutte et la sélection qui en résulte sont à la
fois inévitables et nécessaire.
 le nationalisme anti libéral et anti marxiste
 le militarisme : idée que le citoyen soldat est exalté, idée de la Nation armée,
exaltation de l’uniforme
Deux slogans sont postérieurs à 1918 :
1. « l’Etat fort » cad la substitution de la domination charismatique plébiscitaire et du
Parti unique à la démocratie parlementaire et au pluralisme des partis.
2. « le socialisme national » cad l’instauration donc dans le cadre de l’Etat fort d’une
économie à structure corporative, supprimant les syndicats et conciliant propriété
privée et économie de marché d’une part, et dirigisme économique et intégration
sociale.
Il y a deux éléments contrastes :
1. Au niveau des mœurs, le conservatisme familial, patriarcal et pénal
2. le style moderne avec l’apologie de la technique ( Mussolini et Hitler adorent la
technologie, l’automobile, la science…) et la puissance que confère la technique,
notamment au plan militaire. Donc modernisme technologique.
S’ajoute une certaine dimension religieuse, cad « une foi politique » à travers laquelle
s’exprime la volonté de créer « un homme nouveau ».
Les deux pbs qui se posent au fascisme :
 gouverner les masses
 intégrer la classe ouvrière à la nation
Pour cela, le fascisme au pouvoir recourt à « la psychologie des foules » cad à l’art de la
propagande.
Au niveau de la politique étrangère : l’instauration du socialisme national, l’éducation
militaire ( idéal du soldat ) visent à donner la puissance nécessaire à la politique étrangère. La
politique intérieure est tournée, subordonnée à la politique étrangère, on est dans une
logique de moyens/fins. La fascisme adopte un vieux thème qui est renouvelé : « le social
impérialisme » cad idée qu’il faut trouver des colonies à donner au peuple, idée selon
laquelle un peuple européen en croissance démographique a le droit de recourir à la
force pour obtenir des débouchés outre mer ( Mussolini voulait un Empire en Ethiopie ) ou
chez les voisins ( Hitler lui voulait s’étendre à l’Est ). Donc volonté d’expansion
impérialiste.
B. La guerre, la révolution et la contre- révolution
L’impact de la guerre : La guerre 1914-18 au plan idéologique a été révélatrice et parait
confirmer, vérifier les thèses du nationalisme darwinien anti libéral et militaire, à savoir
la primauté de l’armée, la primauté de la nation et la primauté de l’Etat, dont les
capacités de planification, de mobilisation, de suggestion ( propagande ) et enfin capacité
de direction, furent donc pleinement révélées. Au plan idéologique, l’expérience de la
guerre se retrouve dans la militarisation de la vie politique après 1918, avec la
multiplication des ligues de vétérans, l’importance du phénomène ancien combattants (
qui sont des jeunes à l’époque ), la création par les partis politiques de formations de
combat.
L’impact de la révolution : avec la révolution russe et la constitution du Kominterm, il est
clair que la « communauté nationale » a pour ennemi principal « l’internationalisme
prolétarien ». Les classes dominantes cherchent une protection face à la menace
révolutionnaire et la trouvent dans un mouvement à la fois anti marxiste et populaire, avec
lequel les classes dominantes sont prêtes à partager le pouvoir politique dès lors qu’il n’y a
pas de transformation des structures économiques et sociales.  C’est la révolution légale et
nationale : le fascisme accède au pouvoir de manière légale ( Mussolini est appelé au
pouvoir par les autorités en place ) non sans la pression des unités de combat qui ont
gagné la rue. Et révolution nationale cad en s’alliant avec les élites traditionnelles à
savoir, l’armée, la haute administration, l’industrie et les grands propriétaires fonciers.
Mais les élites traditionnelles jouent avec le feu car le fascisme n’est pas simplement un
mouvement contre révolutionnaire et anti marxiste, mais il est égt semi révolutionnaire et anti
libéral sur le plan politique et idéologique. En tant que régime, le fascisme poursuit la
logique de la prise du pouvoir en subordonnant ( cas italien ) ou en évinçant ( cas
allemand ) les élites traditionnelles.
VI. Le national-socialisme allemand en particulier
L’Italie n’avait pas le potentiel de puissance, (sa politique étrangère était relativement
modérée) pour permettre au fascisme de déstabiliser le système international. C’est lorsque
Hitler et le NSDAP ( parti national socialiste des travailleurs allemands ) accèdent au
pouvoir que tout change en Allemagne à partir de 1933. Le système international, européo
centré encore à l’époque, va être déstabilisé, parce que l’Allemagne nationale socialiste aura
la puissance et le dynamisme idéologique, diplomatique et militaire pour de grosses
transformations.
Le nazisme ( national socialisme allemand ) est un fascisme mais un fascisme allemand
et surtout qui systématise l’antisémitisme.
A. Le National socialisme en tant que mouvement allemand
En tant que mouvement allemand, le national socialisme constitue une prise de position sur
une interrogation à la fois idéologique et géopolitique qui est spécifique à l’Allemagne.
 L’Allemagne est-elle à l’Est ou à l’Ouest ? ou bien est-elle « central nation » cad
puissance centrale ?
1. L’Allemagne entre l’Est et l’Ouest
En 1914, la masse de la population allemande considère que l’Allemagne lutte pour son
existence nationale. Mais comment justifier auprès des masses ouvrières que la gauche
allemande vote la guerre ?
 la gauche allemande invoque la lutte contre la Russie tsariste qui est considérée comme
« la citadelle de la réaction » ( Marx ).
 La droite allemande quant à elle, invoque la lutte contre les démocraties occidentales.
Du pt de vue de la droite allemande, les démocraties occidentales représentent
« l’impérialisme de la civilisation » ( Thomas Mann, le terme civilisation était péjoratif par
opposition à la culture allemande ).
Après 1919, tous les allemands rejettent le dictat de Versailles. Au niveau intérieur, la
moitié des allemands soutient la République de Weimar, qui a été instauré après la
défaite dc régime de type occidental en Allemagne. L’autre moitié, rejette la République
de Weimar. Pour la droite nationaliste c’est un régime occidental dc ennemi, et pour la
gauche communiste c’est un régime capitaliste dc hostile également.
 Qui sont donc les pro Weimar ? Les libéraux et les socialistes ( le zentrum et le SPD ) qui
souhaitent que l’Allemagne deviennent occidentale avec un régime capitaliste et
démocratique.
 Les communistes eux qui sont anti Weimar veulent que l’Allemagne soit orientale,
tournée vers l’Est et alliée à l’Urss.
 Les conservateurs et les nationalistes souhaitent que l’Allemagne demeure la « zentral
nation » donc ni à l’Ouest ni à l’Est. Autrement dit que l’Allemagne maintienne son
compromis entre tradition et modernité, et qu’elle maintienne son modèle militaire prussien.
Le pb d’une puissance « centrale » ( en admettant que cette voie l’emporte ) est de savoir vers
qui ou contre qui se tourner en priorité, l’Est ou l’Ouest. Donc dilemme diplomatique et
idéologique. Les nationalistes et les conservateurs sont eux-mêmes divisés : certains
préfèrent s’appuyer sur l’occident contre l’URSS, cela revient à s’appuyer sur
l’Occident malgré Versailles. D’autres préfèrent s’appuyer sur l’URSS, malgré le
communisme. Seule la Pologne fait ( quasiment ) l’unanimité contre elle parmi les
allemands : la Pologne est l’ennemi parce que, vue de droite elle possède des territoires
autrefois allemands, à savoir la Prusse occidentale, la Posnanie et la haute Silésie ; et parce
que le corridor polonais sépare la Prusse orientale du reste de l’Allemagne.
Donc nous avons une Allemagne très divisée, en 1933 il y a changement de
gouvernement, puis mise en place d’une autocratie et finalement la voix de Hitler
tranchera le débat.
2. L’Orientation d’Hitler en politique étrangère
Le NSDAP qui est le seul mouvement de masse à droite, est un mouvement tiraillé entre
diverses tendances. Toujours la base nationaliste et conservateur selon laquelle
l’Allemagne est une puissance centrale. Ce qui compte c’est l’opinion du Chef.
 Jusqu’en 1933, Hitler se présente comme le champion de la lutte contre Weimar et
contre Versailles.
 Après 1933, en 6 mois Hitler liquide la République de Weimar. Il entreprend alors la
révision du diktat. Mais cette révision, Hitler la veut partielle. Donc il ne veut pas réviser
tout Versailles, cette révision sera partielle parce qu’elle ne correspond pas à tout son
programme de politique étrangère.
 D’après lui, l’Allemagne doit s’appuyer sur l’Occident et même sur la Pologne pour
conquérir le fameux « lebensraum » ( l’espace vital ) cad un Empire à l’est et détruire
l’Etat communiste.
- Ce dessein est nourrit par une passion, à savoir l’anti judéo bolchevisme.
- Ce dessein est nourrit par une angoisse, issu de la première guerre mondiale, à
savoir la vulnérabilité de l’Allemagne face au blocus naval, due à son manque
de matières premières, donc une Allemagne facile à étrangler économiquement.
Hitler voulait dans un premier temps récupérer la souveraineté militaire, dc abolir les clauses
de désarmement et de démilitarisation du Traité de Versailles. Dc on veut réarmer,
rétablir le service militaire obligatoire et remilitariser la Rhénanie. Ceci pour avoir
ensuite dans un second temps, ce qu’Hitler appelle « l’autodetermination des allemands »
cad le rattachement à l’Allemagne de l’Autriche, des Sudètes et de Dantzig.
La plupart des partis allemands auraient soutenus un tel programme, et la plupart auraient
ajouté la récupération de la Prusse occidentale, de la Posnanie et de la Silésie. Les
nationalistes classiques étaient irrédentistes cad qu’ils auraient voulu récupérer les
territoires germaniques perdus en 1919. Mais Hitler lui, avait un projet spécifique,
uniquement soutenu par une petite partie du NSDAP, à savoir la conquête et la croisade à
l’Est. Pour cela il lui fallait 3 choses :
- Des partenaires
- Le consentement des puissances occidentales
- Il lui fallait transformer la Pologne en puissance tremplin ( il souhaitait
l’Alliance ac la Pologne ce qui pour un nationaliste allemand était inouïe ) vis-àvis de l’URSS.
Aussi Hitler renonça t-il à toute revendication sur tout le reste : refus de revendication sur
le colonies, et sur tous les territoires comme le Sud Tyrole, l’Epen Malmédie, le Nord
Schléswig, sur l’Alsace Moselle, renoncer à toutes revendications sur la Stirye méridionale, le
Burgenland oriental et enfin surtout, Hitler renonça jusqu’en Septembre 1939 sur la
Silésie, la Posnanie et la Prusse occidentale.
 En Janvier 1934, Hitler déjà maître mais pas encore autocrate, signe avec la Pologne
un Traité de non agression, qui scandalisa ses alliés conservateurs et même une bonne
partie de l’opinion allemande, puisqu’il prenait à contre-pied la politique étrangère
traditionnelle.
 De L’Automne 1938 à l’été 1939, Hitler propose au colonel Beck ( ministre polonais
des affaires étrangères ) une alliance anti soviétique en échange d’une revendication
minimale : Dantzig, qui n’était pas polonaise mais il fallait l’Accord de la Pologne, ainsi
qu’une autoroute et une voie de fer extra territoriale pour la relier à l’Allemagne. C’est donc
le refus de Varsovie et la déclaration de guerre franco britannique qui obligeront Hitler
à faire la guerre à l’Ouest et à envahir la Pologne à l’Est.
B. Le National socialisme en tant que mouvement antisémite
On retrouve dans le national socialisme, les éléments constitutifs du fascisme italien. Et
on retrouve, outre les éléments idéologiques, la structuration en mouvements contre et
semi révolutionnaires adoptant la stratégie de la révolution légale et nationale.
Cependant, on trouve des différences, dans le sens d’une radicalisation :
- l’Etat fort signifie le « führer Staat »
- le darwinisme social devient darwinisme racial
- le social impérialisme devient projet de conquête à l’Est
- l’antisémitisme a une importance centrale
- La dimension « religieuse » aboutie quand même à un certain anti
christianisme sous jacent.
Ces éléments constituent le noyau spécifique du national socialisme allemand. A la
différence du conservatisme patriarcal, ces éléments ne rencontraient guère de
consensus dans la société allemande ou même chez tous les membres du NSDAP. Ces
éléments appartenaient avant tout à l’idéologie de la SS.
 Dans les discours électoraux comment Hitler a-t-il pu séduire les masses ? C’est la
révision de Versailles, l’anti marxisme et la critique de Weimar qui occupent la
première place, et non pas le Lebens Raum et l’antisémitisme.
1. l’antisémitisme
Sur le thème de l’antisémitisme, la droite conservatrice des années 20 et 30 était favorable
à l’exclusion des juifs de la fonction publique. Donc on voulait revenir à avant 1918 lorsque
ni les catholiques ni les juifs n’avaient pleinement accès à la fonction publique. Egt
limitation de l’accès des juifs à l’université. Et leur limitation d’accès à certaines
fonctions notamment les professions libérales et les métiers de la presse.
L’antisémitisme était assez répandu depuis les années 1880 en Europe, dans les milieux
d’extrême droite, on leur reprochait d’être des apatrides cosmopolites, mais aussi dans
les milieux d’extrême gauche : le juif était considéré comme « un bourgeois racial ». En
même temps, persistait le vieux anti judaïsme chrétien.
Pour la droite antisémite, la modernité dans ses aspects financiers et dans ses aspects
subversifs était « juive ». Et cette modernité menaçait la tradition cad la structure
rurale, patriarcale de la société. Enfin d’autre part, les juifs n’étaient pas considérés comme
une confession ( c’est là la grande différence avec l’anti judaïsme chrétien ) mais comme une
Internationale et comme un peuple. Un juif, même converti ou même athée, un juif restait un
juif.
Pour Hitler ainsi que les « non croyants » du NSDAP ( les premiers adhérants )
l’antisémitisme était le cœur d’une vision darwinienne et millénariste, cad que la loi du
monde réside dans la volonté de domination. Et le sens de l’histoire réside dans le
combat entre les allemands et les juifs pour la domination du monde. Il ne pouvait pas y
avoir 2 peuples élus, l’un ou l’autre devait céder.
 En 1919-1920 : effervescence très vive, naissance du NSDAP : il avait ceci de spécifique
qu’une partie de ses leaders étaient des allemands originaires des pays baltes qui avaient été
traumatisés par la révolution bolchevique.
 Ses leaders : Eckart, Scheubner-Richter et A. Rosenberg : ils ont assisté aux atrocités
de la révolution bolchevique et ont été marqués.
 Leur idée : parce que le judaïsme mondial était favorable à la révolution soviétique, parce
que de nombreux cadres du parti bolchevique étaient des juifs et enfin parce que ce parti
s’appuyait sur la révolution juive en Russie, dc ces personnages ainsi Qu’Hitler et les non
croyants du NSDAP ont considéré ce mouvement comme dirigé par des juifs.
L’antisémitisme de Hitler est antérieure, mais ces personnages vont apporter à Hitler l’idée
que l’Etat soviétique était un Etat judéo-bolchevique.
 Le judéo bolchevisme signifiait dc le nivellement social, le chaos racial et la destruction
de la culture à travers la liquidation des élites.
En conclusion, face à la foi communiste, il fallait opposer une contre foi si la contre
révolution voulait vaincre la révolution. P. csq il lui fallait donc trouver un coupable
unique, une cause fondamentale : le juif ( = coupable, ennemi ). Le NS allemand à part du
mouvement fasciste ( radical ), mais en tant que doctrine énonçant la culpabilité universelle
des juifs, dans le cadre d’un darwinisme racial et millénariste : le NS allemand est un
mouvement unique.
Chapitre 4 : l’URSS de Staline et l’Allemagne d’Hitler
L’histoire polémologique européen, sous l’angle germano soviétique a pour constat de départ,
une vision de l’Empire germanique de Hitler en Europe orientale, s’est inversée après
1945 dans la réalité stalinienne d’un Empire soviétique en Europe centrale.
Depuis 1989 et 1991, la situation des peuples allemands et russes s’est à nouveau
inversée : l’Allemagne intégrée à l’Occident et réunifiée ( et toujours intégrée à l’Occident
) fait partie des vainqueurs du conflit est-ouest. L’Urss elle, maîtresse d’un Empire au
lendemain de la seconde GM, disparaît au terme du conflit est-ouest.
Par conséquent, les deux plus grands challengers de l’hégémonie libérale anglo saxone furent
les deux plus grands vaincus du XXe siècle : l’Allemagne en 1945 connaît une debelatio et
l’URSS en 1991 connaît une scission, une disparition. Cependant, l’histoire polémologique
du 20ème siècle fut pourtant une histoire germano-soviétique et si on peut personnalisé,
sous angle charismatique, ce fut l’histoire de Joseph Staline et d’Adolf Hitler, les deux
plus grands autocrates.
Autocrate = ils avaient le pouvoir exclusif et plénier, d’une part de déclarer et de conduire la
guerre, et d’autre part ils disposaient de la police politique ( gestapo..).
Section 1 : Histoire
I. La construction de l’Etat soviétique et la montée au pouvoir de Staline ( 1917-1939 ) (
partie polémologique car il y a eu bcp de morts )
La montée de Staline au pouvoir est parallèle à l’histoire de la construction de l’Etat
soviétique. A la bse de cette construction il y a 3 révolutions :
* Celle de Lénine en 1917-21 : cette première révolution se confondit avec le
putsch, la guerre civile et l’anéantissement ( social ) de la noblesse, du clergé et
de la bourgeoisie.
* Après la période de la NEP ( 2nd héritage de Lénine ) et la succession de Lénine :
période de 1922-28 : la seconde révolution économique et sociale, celle de Staline
en 1929-34, consista en l’anéantissement de la paysannerie libre ( cad propriétaire
), la collectivisation de l’agriculture et l’industrialisation planifiée avec
renouvellement des cadres de l’administration et de l’industrie.
* La 3ème révolution politique et sociale celle de Staline en 1936-38, consista en la
purge de l’ensemble des élites soviétiques signifiant à la fois le renouvellement et
l’avènement de l’autocratie ( en 1936 : police politique et en 38 il peut déclarer la
guerre ).
A. La Révolution de février
Le Parti social démocrate russe fondé en 1903 par Blekhanov était divisé en deux
tendances jusqu’à la scission en 1912 :
- la tendance bolchevique ( celle de Lénine ) qui deviendra parti bolchevique,
- et la tendance menchevique ( celle de Martov ).
 Les mencheviques estimaient que compte tenu de l’arriération de la Russie, la tâche était
d’œuvrer en faveur d’une révolution bourgeoise ( on respectes les états ) et plus tard d’œuvrer
en faveur d’une révolution prolétarienne. Il y aurait donc une phase de développement
capitaliste dans le cadre d’un Etat dirigé par le parti communiste ( menchevique ) et
ensuite on passerait au développement socialiste.
 Les bolcheviques eux, si l’opportunité se présentait, voulaient œuvrer pour une révolution
prolétarienne dans la foulée de la révolution bourgeoise, sous l’égide d’un parti discipliné, en
coopération avec la paysannerie, dont les revendications sur les terres avaient un potentiel
révolutionnaire. Il y aurait donc « révolution permanente » depuis la prise du pouvoir
jusqu’au développement socialiste, sans phase capitaliste.
La révolution bourgeoise de Février ( en réalité en mars sur notre calendrier ) des 8 et 15
mars a été déclenchée :
- à partir de la révolution spontanée et massive de soldats exigeants la fin
d’une guerre perdue ( dc mutineries ) ;
- à partir de révoltes de la paysannerie ( dc jacqueries massives)
- et enfin avec la révolte des ouvriers en grève.
Dans la confusion, après l’abdication du Tsar, deux centres auto proclamés se forment et
fondent 2 centres de pouvoir :
- La Douma ( le Parlement ) de Petrograd dominé par les partis libéraux
- Le Soviet ( le Conseil ) de Petrograd dominé par les partis socialistes ( les
Socialistes révolutionnaires non marxistes, les mencheviques et les bolcheviques
qui étaient marxistes ).
 Ces deux centres se mirent d’accord sur la formation d’un gouvernement provisoire,
dirigé par un ancien SR : Kerenski.
 Le 27 septembre 1917, ces deux centres s’accordèrent égt sur l’élection prévue pour le
25 novembre d’une assemblée constituante, afin d’élaborer une Constitution
démocratique pour la Russie.
Depuis Avril 1917, les SR étaient partagés en 2 tendances :
- les SR de droite et les mencheviques ;
- au contraire des SR de gauche et des bolcheviques.
Dans la pratique, le gouvernement ne pouvait faire exécuter ses ordres que si le soviet
l’autorisait. Le Soviet ne se privait pas de donner ses propres ordres, notamment l’élection de
comités de soldats dans l’armée, et la formation de gardes rouges. Enfin, dans tout le
territoire, des soviets se constituèrent dans les villes, dans les villages de Russie cad des
assemblées auto proclamées de militants des Partis socialistes, faisant office de pouvoirs
locaux. Enfin, ces soviets locaux ont finis par élire fin Juin 1917 un Congrès national des
soviets.
B. la Révolution d’Octobre
1). La prise du pouvoir : Grâce aux autorités allemandes, Lénine était arrivé le 3 Avril
1917 à Petrograd depuis la Suisse et le patron des bolcheviques était là. Arrive le putsch
des gardes rouges, le 6 et 7 novembre 1917. Ce putsch réussi et les membres du
gouvernement provisoire furent arrêtés et un nouveau gouvernement fut construit à Petrograd,
sous l’appellation de « Conseil des commissaires du peuple », avec Lénine et ses principaux
lieutenants.
2). Donc le pouvoir est pris mais encore faut-il le conserver : auparavant, avant Novembre
1917, tout devait être subordonné à la prise du pouvoir. Désormais, une fois qu’on a le
pouvoir, tout devait être subordonné à sa conservation. La justification est la même, en
temps qu’avant-garde, le Parti devait agir au nom du prolétariat et du progrès.
L’exercice du pouvoir, excepté l’alliance avec les SR de gauche, l’exercice du pouvoir était
sans partage. Lénine refuse une coalition des partis socialistes cad à une participation des
mencheviques et des SR de droite qui aurait abouti à des compromis.
- Le 25 Novembre, se tenait des élections constituantes.
- Le 5 Décembre, Lénine fit arrêter la commission chargée d’établir et de
compter les résultats électoraux,
- et le 10 janvier 1918, Lénine ordonna la dissolution de l’Assemblée
constituante, dans laquelle les bolcheviques n’avaient que ¼ des sièges (
25%).
Un mois avant avaient été crées : le 2 Décembre : le Conseil Suprême de l’Economie
nationale ( outil économique : le VNSK ) et le 7 Décembre on crée un outils policier : La
Commission extraordinaire chargée de réprimer les activités contre révolutionnaires.
En Décembre 1917 : les Causacs étaient désignés comme ennemis de classes et durant la
guerre civile, ils seront la première population à subir le principe de la « responsabilité
collective ».
3). La transformation : le parti bolchevique ne visait pas simplement à se maintenir au
pouvoir, mais il était animé par une volonté de transformation sociale. Ce parti avait
réussi à se placer à la tête de revendications de masse, à savoir l’aspiration à la paix
d’une grande partie des soldats, mais également l’aspiration à la terre aux paysans.
Globalement Octobre fut la conjonction de mutineries, de jacqueries et de grèves
ouvrières, que un parti minoritaire ( 25 % des voies ) dirigé par des intellectuels a su
utilisé et dominé à des fins révolutionnaires.
Qu’est-ce qui témoigne de ces objectifs révolutionnaires ? Les décrets adoptés par le
gouvernement révolutionnaire :
- La recherche d’un armistice ac les empires centraux et de la conclusion de
la paix : dc cela signifie la rupture politique avec les alliés occidentaux.
- L’expropriation sans indemnisation de la noblesse et du clergé
- La redistribution des terres aux paysans ( décret de février 1918 ).
Mais aussi une deuxième série de décrets plus radicaux :
- L’annulation des dettes extérieures et intérieures : dc rupture économique ac
les alliés.
- Expropriation sans indemnisation de la bourgeoisie
- La nationalisation du crédit ( dc de la banque ), de l’industrie et du
commerce
Au bout d’un an de révolution, les seules classes sociales qui subsistent sont donc les
ouvriers et les paysans. La plupart des individus des groupes dépossédés étaient toujours là,
mais la cohésion de groupe avait été détruite. Ce nivellement social avait pu se produire car la
propriété privée avait été abolie et parce que la société civile russe était très faible ( il y avait
peu de bourgeois et de clercs ). Elle ne comptait au dessus des classes laborieuses et au
dessous des élites dirigeantes qu’une très faible classe moyenne urbaine.
C. De la paix de Brest-Litovsk à la guerre civile ( 1918-1921 )
Question : Faut-il faire la paix avec l’Allemagne ? La poursuite ou l’arrêt des hostilités avec
les puissances centrales fut la première question cruciale qui s’est posée au nouveau
gouvernement, au nouveau pouvoir bolchevique. Au cours de l’hiver 1918, la menace
principale venait de l’armée allemande qui avait repris son avance vers Petrograd. Face
à cela, la direction russe était divisée :
- les SR de gauche déclarait la poursuite des hostilités contre l’armée allemande
sous la forme d’une guérilla, parce que accepter les exigences de Berlin revenait à
sacrifier tous les territoires non russes acquis à l’Ouest par la Russie depuis le 17e siècle.
- Les bolcheviques de gauche hésitaient : Lénine lui était pour la paix, il estimait
qu’il n’y avait pas d’autres solutions que de signer la paix. Pourquoi ? car il ne fallait
pas risquer de perdre le pouvoir, car si l’armée allemande arrivait jusqu’à Petrograd, le
parti bolchevique aurait été dispersé, ou dépassé par le SR.
En même temps, le gouvernement lançait un appel ( appel de Lénine et de Trotski ) au
soulèvement des paysans, des ouvriers et des soldats dans tous les pays belligérants, pour
transformer la guerre impérialiste en guerre civile internationale. Le gouvernement
bolchevique espérait également que les deux coalitions impérialistes ( alliés et les puissances
centrales ) s’épuiseraient mutuellement. Et il espérait que la défaite des empires centraux
face à l’Occident annulerait les clauses du Traité de paix.
Le Traité de paix entre la nouvelle Russie et les empires centraux a été signé le 3 Mars 1918
à Brest-Litovsk, la Russie sort de la guerre.
 Mais le 11 Novembre, les allemands seront obligés par les alliés de renoncer au traité
de Brest-Litovsk et d’évacuer les territoires qu’ils occupaient à l’Est, à l’exception des pays
Baltes jusqu’à la fin de 1919. Donc le plan de Lénine était vérifié.
 La csq immédiate de la signature de la paix : les SR de gauche quittèrent le
gouvernement et appelèrent à leur tour à l’insurrection contre le gouvernement
bolchevique. En même temps des armées blanches se sont constituées, aidées par les
alliés.
 Le 16 juillet le Soviet de L’Oural fit exécuter le Tsar Nicolas II sans jugement, ainsi
que sa famille, confirmant ainsi la responsabilité extra judiciaire collective ( ss
précédent).
 Le 30 Août 1918, l’attentat contre Lénine. Dc la violence monte un peu partout. Après
cet attentat, une campagne de répression est organisée contre tous ceux soupçonnés d’être
opposants. C’est ainsi que le pays glissa dans la guerre civile.
Seconde question : celle de la survie avec le régime ; Comment assurer la survie du
gouvernement ?
- Il fallait battre la contre Révolution en Russie,
- Et il fallait soutenir la Révolution en Allemagne et partout en Europe
D. La victoire bolchevique, le « double commandement »
et la solution au problème des nationalités
Pas de réductionnisme, même à l’intérieur le gouvernement n’avait pas à faire à une coalition,
mais devait affronter :
- L’armée blanche
- une « armée verte » cad les milices paysannes SR,
- mais également devait affronter des expéditions alliées.
Cependant que la Pologne, la Finlande, les Pays baltes, l’Ukraine, la Géorgie, l’Arménie,
s’étaient constitués en Etats indépendants. Une partie des populations musulmanes du Sud
Caucase et d’Asie centrale se soulevaient. Le gouvernement de Lénine ne contrôlait plus
qu’un territoire, équivalent à la principauté de Moscou au XVe siècle. Par quel miracle ce
gouvernement bolchevique a-t-il pu gagné la guerre civile ?
- d’abord 1er facteur : la division des forces anti bolcheviques à l’intérieur (
blancs, verts, séparatistes …) comme à l’extérieur ( il n’y a pas de plans
d’intervention concertée entre les alliés ).
- L’entente avec le gouvernement de Kemal à Ankara pour réduire les
républiques caucasiennes. C’est une alliance qui a compté.
- L’appel à la défense de la patrie socialiste et la création le 15 Janvier 1918
d’une force armée régulière ( l’Armée rouge ), armée de conscrit unifiée,
sous la direction de Trotski.
Ces trois facteurs permirent :
 au « communisme de guerre » de l’emporter et de restaurer l’autorité du
pouvoir central sur toute la Russie, Pologne, Finlande et Pays Baltes
exceptés ;
 de mettre au pas les soviets ruraux, tout en poursuivant l’anéantissement
des classes ennemies.
 Ainsi que la « décausakisation » du Caucase.
 La création de l’armée rouge : avec la guerre civile, les gardes rouges ont donc été
remplacés par l’armée rouge, de son vrai nom « armée rouge des ouvriers et des
paysans », cad une armée permanente basée sur la conscription rétablie le 22 Avril 1918
et encadrée d’une part par d’anciens officiers de l’armée tsariste, qui se sont ralliés par
patriotisme, et d’autre part, encadré par des commissaires politiques dc des agents du partis ;
dc double commandement : technique avec les officiers et politique avec les
commissaires.
Ce système de double commandement fut appliqué à toutes les fonctions administratives et
sociales. Il fallait recourir à des « spécialistes bourgeois » en attendant que soient formés
des « spécialistes rouges ». Mais ces spécialistes bourgeois seraient surveillés par les agents
du parti.
 Pour résoudre la guerre civile il fallait résoudre le problème des nationalités : Selon le
principe de l’auto détermination des peuples par Lénine ( et par Wilson ) l’indépendance
avait été reconnue aux finlandais et aux polonais. Certains bolcheviks critiquèrent la
politique consistant à céder au nationalisme des petites nations, au détriment de la Russie
révolutionnaire. Il y a eu un redéploiement de ce principe par Staline, en accord ac Lénine,
Staline était géorgien et ministre ( des affaires étrangères ) et dc il a réinterprété le droit à
l’auto détermination. Dans la monde capitaliste, l’auto détermination devait signifier
l’indépendance nationale : c’est ce que proclama la fameuse Conférence de Bakou en
1921 réunissant les MLN des pays africains et asiatiques. Dans le monde soviétique,
l’autodétermination devait signifier l’autonomie nationale, sous contrôle du parti
communiste. D’où l’effort militaire réussi pour conserver les territoires non russes dans la
nouvelle russie. L’intégration des nationalités non russes avait une très grande
importance, non seulement au plan territorial mais aussi une importance idéologique.
Cette intégration montrait que la Russie bolchevique certes n’était pas encore une fédération
mondiale, mais qu’elle dépassait les limites ethniques de la seule Russie, devenue URSS, pour
englober d’autres peuples slaves et chrétiens mais aussi des peuples turcs et musulmans, d’où
l’internationalisme.
E. Du « communisme de guerre » à la NEP et au « monolithisme » du Parti
La victoire dans la guerre civile avait permit la survie du régime.
 L’URSS fut officiellement constitué la 30 Décembre 1922, mais 10 millions de
personnes avaient péri du fait des combats, de la famine et des épidémies.
 Mais autre conséquence de la guerre civile : le secteur urbain et industriel représentait
10% de la population en 1914, sortit affaiblit de la guerre civile. Or c’était la base
sociologique sur laquelle devait s’appuyer le Parti bolchevique. A contrario le secteur rural et
agraire s’est renforcé : en 1917-18 une révolution paysanne a eu lieu en Russie entraînant une
redistribution complète des terres, sans collectivisation.
 Un autre effet de la guerre civile : ce fut précisément l’apparition du « communisme de
guerre ».
1). Le communisme de guerre c’est le premier héritage de Lénine : il désigne l’application
de méthodes coercitives, non seulement pour vaincre les forces anti bolcheviques, mais aussi
pour commander à la société et à l’économie russe. Notamment, réquisitionner les surplus
alimentaires chez les paysans, afin d’approvisionner les villes ( rouges ) et l’armée rouge.
Ces pratiques ( la réquisition forcée ), furent abandonnée avec la NEP en 1921. Le
communisme de guerre fut considéré par la plupart des bolcheviques, comme l’époque
héroïque de l’histoire du bolchevisme.
2). De 1921 à 1928, l’histoire de la Russie fut dominée par l’ambiguïté des rapports entre
le pouvoir et le monde paysan. Officiellement, le régime restait fondé sur l’alliance
révolutionnaire des ouvriers et des paysans, symbolisée par le marteau et la faucille. Mais
cette alliance était tout de même précaire et délicate. Seul le prolétariat industriel pouvait être
l’instrument du progrès. A l’inverse, les paysans, dès lors qu’ils avaient obtenu la terre,
n’avaient plus guère d’intérêt à la poursuite de la Révolution.
Rappel : Lénine a su jouer de la division interne entre les blancs et les verts. De plus le
gouvernement bolchevique a su rallier une bonne partie de la paysannerie. La paysannerie en
effet craignait que la défaite des rouges ne soit suivie d’une restauration par les blancs de
l’ordre ancien et dc d’une restitution des domaines fonciers à leurs anciens propriétaires.
En 1921, Après la victoire bolchevique, une certaine opposition monte dans les campagnes.
En même temps, une nouvelle opposition est apparue dans le secteur urbain et industriel, avec
une double revendication :
1. coalition des anciennes formations socialistes ( mencheviques et SR ) à la place du
parti unique
2. l’autonomie des syndicats vis-à-vis du Parti.
Quel était donc le choix du gouvernement ?
La contestation ouvrière fut réprimée, et par conséquent la NEP ( Brest Litovsk paysan ) fut
instituée en faveur des paysans. Donc paradoxe par rapport à l’idéologie, le régime a choisi,
au moins provisoirement, de s’appuyer sur les paysans plutôt que sur les ouvriers. En même
temps, début 1921 fut crée le Comité d’Etat pour la planification : le Gosplan.
L’objectif restait la construction du socialisme. Mais cette construction passait par une phase
de « développement » ( dc finalement ils ont repri en partie le programme des mencheviques
) mi-socialiste, mi-capitaliste, dans lequel un Etat à parti unique disposait des gds
secteurs économiques, à savoir la propriété de l’industrie lourde, de la banque, du
commerce extérieur et transports.
Tandis que au dessous existait un petit capitalisme de commerçants, d’artisans et surtout de
paysans. Non seulement la propriété privée demeurait admise dans l’agriculture, mais en plus
l’initiative et l’entreprise privée était réintroduite dans le petit commerce, la petite industrie et
en plus on invitait le capital étranger ( firmes occidentales ) à venir en Russie.
En compensation de cette option semi menchevique, Lénine ordonna de briser l’église
orthodoxe ( décret du 19 Mars 1922 ) et surtout le rôle dirigeant du parti fut réaffirmé et son
unité fut consolidé par l’interdiction de tout « fractionnisme » donc choix du
monolithisme du parti. Puisque le parti était minoritaire dans un pays plus ou moins hostile,
lui-même encerclé par un monde hostile, il importait de renforcer la discipline du parti en la
combinant avec sa démocratie interne au parti. Autrement dit, il y avait place pour le débat et
pour le vote mais ensuite, une fois la ligne fixée, il fallait la suivre sans plus de critiques. Pour
devenir une formation monolithique, le parti avait besoin d’une gestion quotidienne
systématique. Cette tâche n’intéressant pas des intellectuels comme Trotski, Kamenev,
Zinoviev ou Boukharine, donc Lénine a confié cette tâche à Staline. Et par conséquent,
Staline qui était Commissaire aux nationalités, est devenu Secrétaire général du Parti. Il
était donc le représentant du gouvernement avec qui les chefs locaux du parti dans les
républiques fédérés non russes devaient traiter. Et il est devenu le représentant de la direction
du parti avec qui les comités locaux du parti devaient traiter, hors Petrograd et Moscou. En
bref, Staline était à l’interface du centre et des chefs du Parti dans les Républiques fédérées
non russes d’une part, et à l’interface du centre et de la base du parti en province. C’est à
travers cette fonction de Secrétaire général que Staline s’assura d’abord le contrôle du
parti, puis le contrôle du pouvoir ( en 1929 il devient N°1 ) jusqu’à l’autocratie en
Décembre 1938. Notamment, il a veillé au fichage des membres du parti, tâche qui relevait
de la section secrète du Secrétariat, mais avant 1936 il ne dispose pas encore de la police
politique. Autrement dit, pour diriger l’Etat, le Parti devait d’abord se diriger lui-même, à
travers un appareil, en l’occurrence à travers un Secrétariat, qui est devenu le cœur du pouvoir
jusqu’à la fin de l’URSS.
F. La bataille pour la succession de Lénine (1922-1929 )
L’échec définitif de la Révolution allemande en octobre 1923 pose une 3ème question cruciale
au gouvernement : faut-il maintenir la pression révolutionnaire internationale ? Ou bien
fallait il construire le socialisme dans un seul pays ? 2 positions :
- La position radicale de Trotski qui est internationaliste
- Position de Staline qui était pour la NEP et qui était plu réaliste
Cette question se posa parallèlement à la bataille pour la succession de Lénine, bataille
qui s’amorce en Mai 1922 et qui s’enclenche en 1925.
En 1925, cette question fut tranchée en faveur du socialisme en un seul pays : Trostki
démissionne du Commissariat à la guerre en 1925.
Une quatrième question se pose : fallait-il construire le socialisme en continuant la NEP
favorable aux paysans, ou en accélérant l’industrialisation donc en renouvellent « le
communisme de guerre » et cette fois-ci au détriment des paysans ?
Lénine avait laissé deux héritages :
- Le communisme de guerre ( 1918-21 )
- La NEP ( 1921-28 )
Le pb était de savoir lequel de ces deux héritages indiquait la vraie voix menant au
socialisme ?
1. Examen du système politique soviétique
Selon la Constitution de l’Etat fédéral soviétique de Décembre 1922,
 le gouvernement appelé Conseil des Commissaires du peuple ( Sovnarkom
) était donc l’organe exécutif du Soviet suprême ( le Parlement ).
 Le Parlement était composé du Soviet de l’Union qui représentait l’ensemble
des citoyens de la fédération et du soviet des nationalités.
 Le Parlement bicaméral élisait un Présidium ( chef d’Etat collectif )
composé d’un président ( chef d’Etat individuel sans grand pouvoir ) et de 12
vices présidents ( un par république fédérée ).
 A son tour, le présidium élisait les membres du gouvernement.
 tel est la structure de l’Etat
 Mais cette structure étatique était doublée par la structure du Parti :
 les comités locaux élisaient les membres du soviet.
 Le Comité central du parti proposait les membres du Présidium, mais cette
élection se fait sur la base de listes proposée par le Comité central. Enfin le
Politburo s’identifiait largement au Sovnarkom.
 Le Politburo était donc l’instance suprême réelle. Le Politburo est élu par
le Comité central du parti ; le Comité central était élu par le Congrès du
Parti, or le Congrès du parti était composé par des délégués des comités
locaux dont les membres en province étaient en pratique nommés par le
Secrétariat général, dont le Chef siégeait lui-même au Politburo.
 Les membres du Politburo décidaient en tant que dirigeants du parti, et ceux du
Sovnarkom faisaient appliquer les décisions en tant que dirigeants de l’Etat.
Dans les années 20, l’administration était composée de fonctionnaires de la Russie Tsariste
qui avaient survécu et qui s’étaient adaptés. On a maintenu ces fonctionnaires car le Parti en
avait besoin jusqu’à ce qu’une nouvelle génération soit formée.
2. la succession de Lénine
Lénine ne désigna pas de successeurs, il pensait à une direction collégiale entre Trotski,
Kamenev, Zinoviev, Boukharine, Rykov, Tomski et Staline.
Staline n’était donc pas le favori. Le successeur évident pour la plupart des membres du
Parti était Trotski. Il avait en effet le charisme, il avait fondé l’armée rouge ( prestige
militaire, prestige de la victoire dans la guerre civile ) et étaient jusqu’en 1925 ministre de la
guerre.
Mais depuis la guerre civile, cette fonction militaire avait moins d’importance et elle ne
pouvait retrouver son importance qu’en cas de regain des tensions internationales. Trotski
était donc pour exporter la révolution et dc pour maintenir les tensions, c’était un
belliciste.
En face, Staline était Secrétaire général du PCUS. Kamenev était président du Soviet de
Moscou ( Maire de Moscou ) et Président du Politburo. Zinoviev était président du
Soviet de Leningrad et président du Kominterm.
 Donc Staline tenait la province, les 2 autres tenaient les 2 Capitales. Tous les 3 se
méfiaient de Trotski en qui il redoutait un nouveau Bonaparte et ne fasse un Coup d’Etat.
Donc ils vont se liguer contre Trotski pour que celui-ci démissionne.
La bataille entre les héritiers de Lénine se déroule de 1923 à 1929. Parallèlement, elle se
doublait d’un débat sur la NEP qui était poursuivie.
Le résultat : en 1929 commence la série des grands anniversaires de Staline. Pour son
cinquantième anniversaire, Staline a chassé du Politburo ses rivaux, après les avoir
isolés, en s’alliant avec les uns :
- d’abord il s’allie à la droite pro-NEP ( Boukharine ) pour battre les autres,
à savoir la gauche ouvriériste ( Zinoviev, Trotski )
- pour ensuite se retourner contre les premiers et revenir au communisme
de guerre.
 Ceci grâce à la nomination des membres des comités locaux du Parti, qui eux-mêmes
envoyaient les délégués au Congrès du Parti, Staline pouvait s’assurer une majorité au sein
des Congrès du Parti et par conséquent accuser l’opposition de fractionnisme.
Tous les membres du PCUS croyaient que le marxisme léninisme fournissait le guide
pour la construction du socialisme. Le jeu pour le pouvoir consistait donc à prétendre
exprimer la position exacte par rapport à la doctrine, à gagner une majorité et à accuser
l’opposition de fractionnisme. Staline est donc parvenu à faire ce tour de force. Il réussit à
apparaître comme le véritable héritier de Lénine et parallèlement l’hostilité initiale de
l’ensemble du politburo contre Trotski lui permit d’ériger le « trotskisme », comme
hérésie anti léniniste.
Tous acceptèrent que les litiges soient confinés aux échelons supérieurs du parti. Ainsi, cette
auto restriction montre la force de l’idée selon laquelle l’avant-garde du parti devait
commander à un peuple encore arriéré et par conséquent la crainte qu’un appel aux masses
mette en péril l’existence même du régime.
G. La collectivisation de l’agriculture et l’industrialisation planifiée
En 1929, 12 ans après la révolution politique, manquait toujours la base économique,
cad qu’il y avait un Etat socialiste mais sans société socialiste.
 Une telle société ne pouvait être créée sans développement de l’industrie. Mais à son tour,
l’industrialisation ne pouvait s’effectuer sans modernisation de l’agriculture, cad sans
excédents alimentaires pour nourrir les ouvriers et sans excédents humains pour aller
travailler dans les usines.
Par conséquent, au sein du Parti les débats portaient sur la question de savoir comment
amener les paysans à fournir ces excédents ?
- Soit par des mesures incitatives : augmenter les prix des denrées pour les
amener à vendre, et leurs fournir des biens manufacturés.
- Soit par des mesures coercitives.
Autrement dit l’alternative était de poursuivre le NEP pendant au moins 20 ans, au détriment
de la classe ouvrière : c’était la solution Boukharine
Ou bien, l’autre solution était de réutiliser les méthode du communisme de guerre pour
soumettre rapidement la paysannerie : la solution Trotski
1. La débat Boukharine/Preobrajenski
 La NEP était conçue par Boukharine comme une longue période de coexistence entre
les grands secteurs de l’économie publique, le marché libre des produits agricoles, les petites
entreprises de l’artisanat, du commerce, de l’industrie privés, et enfin les investissements
étrangers, le tout sous l’égide du plan.
 En face, la gauche ouvriériste dénonçait dans la NEP une solution menchevique, un
sacrifice de la classe ouvrière et on dénonçait également un abandon du vrai socialisme.
Par conséquent, la gauche ouvriériste a élaboré un autre programme dont le penseur fut
Preobrajenski, à savoir l’industrialisation par un investissement massif et rapide dans le
secteur industriel public au dépend des secteurs agraires et privés.
La droite pro-NEP et Boukharine étaient accusés de favoriser une nouvelle classe de paysans
capitalistes : les Koulaks ; et de favoriser un nouvelle classe de spéculateurs bourgeois : les
Nepmen
A l’inverse la droite pro-NEP a répondu et accusa la gauche ouvriériste et préobrajenski de
remplacer l’alliance des ouvriers et des paysans par une dictature du prolétariat urbain
sur la paysannerie. Au début la droite pro-NEP et Boukharine avait le soutien de Staline.
Toutefois un point commun : chacun des deux groupes prétendaient exprimer la fidélité au
Léninisme. Les uns en invoquant l’héritage du communisme de guerre, et les autres en
invoquant l’héritage de la NEP.
2. la décision de Staline et de la majorité du Parti
fin 28- début 29, Staline a tranché le débat : il a décidé de reprendre le programme de
Trotski et de rompre avec la NEP pour mener ce que réclamait la gauche ouvriériste pour
mener la collectivisation de l’agriculture ( on a appelé cela « l’octobre rural » ) et
l’industrialisation planifiée.
- Le motif implicite était de mettre fin à l’autonomie de la paysannerie libre
vis-à-vis du Parti-Etat.
- Le slogan proclamé était de mettre fin à l’arriération russe et de rattraper
les puissances occidentales.
- le ressort était la menace virtuelle que faisait peser le monde capitaliste sur
l’unique Etat socialiste.
En 1929, Staline est N°1 du Parti mais il n’est pas encore autocrate. Il a besoin de l’appui de
la majorité du Parti. Or la majorité des membres du PCUS était plutôt hostile à la paysannerie,
classe sociale condamné à l’extinction.
Par conséquent, il a fallu remobiliser le parti en usant de 3 thèmes :
1. le retour à l’époque héroïque du communisme de guerre
2. la présentation de la collectivisation et de l’industrialisation comme la vraie
construction du socialisme, suivant le concept de la révolution permanente.
3. la lutte contre un nouvel ennemi de classe : le Koulak, le Nepmen
3. La collectivisation et la « dékoulakisation »
La solution trouvée au pb de l’accumulation socialiste se fut :
- L’expropriation ( sans indemnisation ) de la paysannerie libre
- La conversion des fermes familiales en fermes publiques ( kolkhozes )
- La livraison de quotas alimentaires et en échange la fourniture d’outils et
de machines.
En cas de résistance, les paysans et leurs familles seraient déplacés, internés et utilisés pour de
grands travaux publics forcés, notamment en Sibérie. Ce programme d’anéantissement
social de la paysannerie devait affecter la vie de 120 millions de personnes qui vivaient
dans 600 000 villages en réunissant leurs 25 millions de propriétés en 250 000 Kolkhozes
ou fermes publiques. Ensuite on mécaniserait l’agriculture de manière à transformer les
paysans en ouvriers d’usines agricoles. L’idée sous jacente était d’abolir le clivage entre villes
et campagnes. Parallèlement, la collectivisation induit une « nouvelle campagne » contre la
religion orthodoxe, qui était considérée comme le centre d’une culture paysanne tenue pour
réactionnaire.
 En 5 ans le résultat est visible en fin 1934 : 75% des surfaces agricoles étaient sous
régime collectif. 95% en 1936.
Réaction de la paysannerie : elle prit sa revanche quelque part en réduisant sa
coopération avec l’Etat au strict minimum et donc réduction de sa productivité.
En 1936, Le régime dû concéder aux paysans des lopins familiaux et donc tolérer un petit
marché libre des produits agricoles.
C’est en Ukraine que la dékoulakisation fut la plus dramatique : en effet, la République
fédérée ukrainienne bénéficiait d’une autonomie culturelle et linguistique. Mais pour Staline,
cette autonomie ukrainienne il y avait là la perception d’un danger séparatiste et par
conséquent, la collectivisation des terres fut liée à l’élimination de la déviation nationaliste.
Par conséquent, les réquisitions, les résistances des paysans et la répression provoquant
famine, causèrent la mort de 5 millions de morts en Ukraine ( sur 20 millions ). Auxquels il
faut ajouter 1 million au Kazakhstan.
4. l’industrialisation et le remplacement des « spécialistes bourgeois »
La collectivisation de l’agriculture fut menée en même temps que le premier plan
quinquennal, en même temps que le renouvellement des cadres de l’administration et de
l’industrie et en même temps enfin que la suppression de l’ensemble du secteur privé, qui
mettait l’ensemble de l’économie entre les mains de l’Etat-Parti ( le Gosplan ).
A partir de 1929 et la mise en place du plan quinquennal, on assiste à une révolution
industrielle unique, car intervenant sur ordre du pouvoir, à travers une lutte de classe menée
par une minorité urbaine armée contre une majorité rurale désarmée.
Le résultat :


le contraste avec la collectivisation de l’agriculture ( désastreuse du pt de vue de
la productivité ) fut très nette, le plan quinquennal a réussi le saut qui a
permit à la Russie de passer d’une société agraire à une société industrielle.
Second contraste entre la Russie et l’Europe : l’industrialisation s’était déroulée
en Europe de manière progressive, de manière décentralisée. En Russie,
l’industrialisation s’est accomplie de façon brutale et centralisée avec pour
résultat. On a assisté en Russie à une super modernisation, un super
rattrapage, au cours duquel des classes sociales qui en Europe n’avaient
fait que passer en arrière plan ( paysannerie, artisanat ) et bien en Russie ces
classes sociales se trouvèrent anéanties.
En même temps qu’un Etat industriel fut crée une puissance militaire perçue comme
énorme menace par les anti communistes, et plus généralement par la bourgeoisie
européenne. Perception d’autant plus forte que l’URSS était l’Etat le plus vaste et le plus
peuplé du monde. D’autant que cet état était quasiment autarcique. D’autant que entre 1929 le
monde capitaliste est en pleine crise et s’enfonce dans la dépression. Avec cette crise
économique, les partis communistes montaient dans l’électorat ouvrier.
Le remplacement des « spécialistes bourgeois » : nous avons donc une nouvelle société
industrielle socialiste, qui résolue à sa manière deux problèmes :


Le problème des cadres : une grande partie des spécialistes bourgeois fut
remplacée par de nouvelles recrues issue de la scolarisation soviétique cad
remplacée par des spécialistes rouges. Conséquence : l’Etat-parti disposait
désormais de sa propre classe de cadres administratifs et techniques. Ceuxci recevaient des avantages matériels proportionnés à leurs responsabilités. Ces
responsabilités étaient réparties par les Comités du parti, à partir d’une liste des
postes à pourvoir aux différents niveaux ( liste des postes = nomenklatura ).
Donc l’Etat parti dispose de sa propre classe de cadres rouges.
Le problème de la main d’œuvre : le problème de la force de travail fut résolu
par deux choses : déjà par le stakhanovisme et d’autre part par le contrôle
centralisé de la répartition et de la circulation de la main d’œuvre (
déplacements spéciaux, passeport intérieur…). Parallèlement, le GULAG ( la
direction centrale des camps des détenus, qui était l’un des départements du
NKVD ( ministère de l’intérieur )), constituait un énorme réseau pénitentiaire
qui rassemblait entre 5 et 10% de la main d’œuvre de l’URSS, et qui équivalait
à un système de travail forcé.
H. Les grandes purges et l’avènement de l’autocratie
La collectivisation et le premier plan quinquennal furent suivies par une reprise de la
Révolution par le haut/par le centre, qui culmina dans les purges. Par vagues successives
d’arrestations la Terreur fut dirigée par Staline via le GUGB ( direction centrale de la
sécurité d’Etat = police politique, qui était un autre département du NKVD )
- sur le Parti lui-même, et sur l’ensemble des élites soviétiques, qui furent
ainsi renouvelées.
- Parallèlement, les purges s’accompagnèrent également de déplacements de
populations (ou de déportations ethniques), dites socialement dangereuses vers
l’Asie centrale ou la Sibérie ( cela a touché des polonais, des baltes, des
finlandais) .
- Enfin, les purges touchèrent également les communistes étrangers qui
trouvèrent refuges en URSS. Le Kominterm lui aussi devait avoir Staline pour
unique maître.
En 1934, l’opposition à Staline monta ainsi que la volonté de réduire la coercition, la volonté
de se réconcilier avec les anciennes fractions. Et enfin la volonté de satisfaire les aspirations
de la population en privilégiant dans le plan les biens de consommation et l’agriculture. Mais
Staline lui voulait maintenir la priorité de l’industrie lourde, concrètement le complexe
militaro industriel, donc maintenir le sacrifice de la consommation civile qui rendait
nécessaire évidemment le maintien de la coercition. Donc deux politiques économiques se
font face.
 Cette opposition se manifeste lors du Congrès d’Octobre 1934 : ce fut la dernière
réunion de la « vieille garde bolchevique » cad les hommes qui avaient été les compagnons
de Lénine, entrés au parti avant la révolution. Au cours de ce Congrès il fut question de
réduire le pouvoir du Secrétariat général et de revigorer par la même la démocratie interne au
Parti ; donc des attaques lancées contre Staline. Mais il montra à nouveau sa maîtrise de
l’intrigue politique, jouant les factions les unes contre les autres, et usant de son contrôle de la
base provinciale. Donc il réussi à maintenir l’hégémonie du Secrétariat sur le parti.
 La purge des SA en Allemagne fin juin 1934 a interpellé Staline. Il n’y avait jamais eu
rien de tel au sein du PCUS. En même temps, cette purge des SA convaincu Staline que Hitler
l’avait définitivement emporté en Allemagne et qu’il détenait le pouvoir absolu. Par
conséquent, pour pouvoir rivaliser, Staline devait lui aussi détenir le pouvoir absolu.
 6 mois plus tard, pt de départ des purges : l’assassinat de Kirov, Président du Soviet de
Leningrad, le 1er Décembre 1934 fut le pt de départ originel du processus des grandes purges.
L’argument de Staline était que cet assassinat faisait parti d’une vaste conspiration anti
soviétique. Les purges ne commencèrent effectivement qu’à l’été 1936 lorsque la
conjoncture internationale est devenue trop menaçante. La conjoncture devient menaçante
et donc on peut justifier de la pression étrangère pour justifier la coercition, le complot.. mais
aussi lorsque la victoire du front populaire à Paris assura à Staline qu’il n’y aurait pas
de coalition des puissances capitalistes contre l’URSS. Staline invoqua donc l’urgence
des circonstances pour obtenir des pouvoirs d’exception. En même temps, les purges
affaibliraient l’URSS mais l’arrivée de la gauche au pouvoir en France et le tampon polonais
permettrait à l’URSS de conserver une relative sécurité.
 Les pouvoirs d’exception : Staline obtint du Politburo le rattachement du GUGB au
Secrétariat du Parti. Dc la police politique se trouve à disposition du Secrétaire général le
25 septembre 1936.
Staline désirait vaincre au sein du parti l’opposition à sa politique économique cad la priorité
à l’armement. Au-delà de cette querelle relative à la politique économique, Staline voulait
déraciner le potentiel d’opposition qui résidait dans la structure même du parti, cad dans sa
direction collégiale, cad sa démocratie interne. Au sommet, ce que l’on a appelé la
« conspiration hitlero-trotskiste » fut donc la formule d’accusation des grands procès
spectacle au cours desquels les accusés devaient avouer leur culpabilité. A la base, les purges
allaient atteindre l’ensemble du parti et chacune des sphères du système soviétique ( tactique
du salami ) : l’administration, l’industrie, l’armée rouge elle-même et la police politique ellemême Iejov a été exécuté. Au terme du processus presque tous les membres de la vieille
garde bolchevique avaient été arrêtés, inculpés, jugés, condamnés, exécutés. Donc la
vieille règle selon laquelle au sein de l’élite communiste on ne se tue pas les uns les autres a
été violée. Les rivaux de Staline ont été exécutés, lui permettant d’accéder à l’autocratie,
Trotski parviendra à s’enfuir au Mexique. Il n’y avait plus aucune sécurité des fonctions,
la peur devait être permanente pour prévenir le développement de toute opposition, laquelle
signifiait l’internement, voir une condamnation à mort. Face à la Terreur, il n’y eu
pratiquement pas de résistance de la part de l’élite du Parti communiste. Pourquoi ? 3
raisons :
- Chacune des factions du PCUS puis chacune des sphères du système
soviétique furent visées les unes après les autres ( technique du salami ).
- Ceux qui remplaçaient les victimes des purges et qui accédaient aux plus
hauts postes devenaient complices.
- Les communistes furent d’autant plus désarmer moralement car ils étaient
auto inhibée. Eux-mêmes avaient participé à des actes de violence massive ou les
avaient approuvés. Très peu avaient protesté donc contre les internements,
déplacements et les exécutions des victimes non membres du PC. Mais surtout
aucun d’eux n’avait remis en question le droit des dirigeants du parti de décider
qui était un ennemi. Par conséquent, boomerang de la violence, et les pratiques
qu’ils avaient accepté se retournèrent contre eux. « le Parti a toujours raison » cf
Trotski
Conclusion : la seconde révolution de Staline en 1936-1938, à savoir les grandes purges,
consista finalement en la liquidation quasi-totale de l’ancien parti de Lénine. Sur 2
millions de membres en 1938 il y a 1,5 million de nouveaux membres. La vieille garde
bolchevique qui pesait 5% du Congrès du Parti en 1934 ne représentait plus que 2% en 1939.
C’est l’avènement de l’autocratie de Staline. Staline était libre désormais de conduire la
politique étrangère qui lui semblait conforme à l’intérêt de l’URSS, y compris une alliance
avec Hitler, chose qui aurait été impensable dans l’ancienne direction collégiale.
II. La montée au pouvoir d’Hitler et l’édification de l’Etat national-socialiste ( 1929-1939 ) :
partie politologique
La victoire de Hitler se confond avec la crise finale de la République de Weimar ( 1929-33
) mais elle se confond également avec l’édification du führer Stadt ( 1933-38 ). Cette
édification emprunta le modèle de la Révolution légale et nationale, avec le processus de
l’alliance ( 33-36 ), de la subordination puis enfin éviction des élites traditionnelles ( mais
jamais exécution ).
A. La configuration de crise de l’Allemagne weimarienne ( 1929-32 )
La crise économique de 1929 créa les conditions permettant à 2 mouvements de guerre
civile tout deux fondés en 1919 ; l’un hostile à la bourgeoisie, l’autre hostile au marxise ;
de recruter des partisans en grands nombre.
 Donc il y a eu une croissance du KPD ( à gauche, parti communiste allemand ) et du
NSDAP ( à droite, parti national socialiste allemand ).
 Quelle est la situation en Allemagne en 1930-32 ?
L’Allemagne est clivée en 5 partis politico-militaires :
1. le KPD et sa formation de combat : le front rouge qui regroupe 1 million de militants
rassemblés sous le drapeau rouge.
2. le SPD ( le parti social démocrate ) et le front gris : qui regroupe 2 millions d’hommes
sous le drapeau noir rouge or de la République de Weimar.
3. le Zentrum ( formation catholique centre droit ) et les organisations catholiques
4. le DNVP ( parti national allemand ) et sa formation de combat le Stahlhelm ( le casque
d’acier donc avec beaucoup de vétérans ) qui regroupe 1 million d’hommes sous le
drapeau de l’ancienne Allemagne de Guillaume II.
5. le NSDAP et les SA : 500 000 hommes sous le drapeau à croix gammée. Donc c’est la
formation la moins nombreuse mais la plus combative.
Les groupements et les clivages sont les suivants :
- il y a d’abord confrontation entre les nationaux socialistes et les
communistes ( NSDAP vs KPD ) mais aussi collusion contre Weimar. Donc
d’une certaine manière ils ont une certaine complicité, ils ont en commun d’être
contre Weimar.
- « La coalition de Weimar » composée de la SPD et du Zentrum, ils
soutiennent le régime de Weimar.
- Les conservateurs et les nationaux socialistes, tour à tour rivaux et
partenaires, car ils ont conclu des alliances ( front de Artzbourg ).
- Les socialistes et les communistes se réclamant du marxiste et ils sont
pourtant divisés.
 Au parlement, la coalition de Weimar ne serait majoritaire qu’avec l’appoint du
KPD impossible puisque la stratégie dite de « classe contre classe » dresse le KPD contre
le SPD.
 A l’inverse, le front de Artzbourg ne serait majoritaire qu’avec le Zentrum mais
là encore impossible car le centre catholique défend la République.
L’antagonisme des partis a rendu caduque le système parlementaire prévu par la constitution (
pas de majorité stable…).
 Le système prévu par la constitution : un chancelier nommé par le Président qui
gouverne soutenu par une majorité positive au Reichstag. Ce système a été rendu
caduque par l’antagonisme des partis et par l’impossibilité de dégager une majorité.
Aussi, ce système parlementaire a-t-il cédé la place à un système présidentiel prévu en
cas de crise ( cf article 48 de la constitution allemande ).
 Le système présidentiel : un chancelier nommé par le Président qui gouverne en
recourant à l’article 48 tant que une majorité négative au Reichstag ne vote pas la
méfiance, au risque de la dissolution. De 1919 à 33 tous les Reichstag ont été dissout.
L’Allemagne connaît plus largement, au-delà du système politique central, deux types de
domination politique :
- Au niveau du Reich, de l’Etat fédéral, dominaient les élites traditionnelles,
sous la forme du gouvernement présidentiel, soutenues par l’armée et la
haute administration.
- Au niveau des Lander par contre, dominaient les coalitions SPD et zentrum qui
contrôlaient les forces de police et les forces administratives locales.
Dans cette situation là, le gouvernement présidentiel empêchait la guerre civile d’éclater, mais
il n’était pas durable car la situation n’était pas tenable à terme.
1. première solution : Il aurait fallu recourir à l’armée pour briser le SA et le front
rouge
2. seconde solution : coaliser les gauches et ne proscrire que le seul NSDAP. Mais il
fallait pour cela que le SPD et le KPD s’entendent ; il fallait également que les élites
traditionnelles acceptent de se priver d’un éventuel renfort face à la gauche.
3. troisième solution : coaliser les droites et proscrire le seul KPD. Il fallait pour cela
que le DNVP et le NSDAP s’entendent ; que les partis de Weimar acceptent de se
priver d’un éventuel renfort face à la droite ; et surtout qu’il n’y ai pas de grève
général appelée par le KPD.
Les trois solutions présentaient donc des risques pour la République :
- la guerre civile et la dictature militaire ;
- la subversion à gauche dans le sens du communisme
- la subversion à droite
 La solution retenue par Hindenburg le 30 janvier 1933 fut la coalition des droites.
Hitler devient chancelier d’un gouvernement de coalition.
B. La « révolution légale et nationale »
Pour Hitler, la lutte pour le pouvoir a pris un tour décisif à partir de la crise économique de
1929. Avec la Parti, il disposait :
- d’un programme multi classe ( pouvant séduire différentes classes sociales ),
- d’une structure ( le führer prinzip ),
- il disposait d’un instrument à savoir les SA et enfin,
- il disposait d’une méthode, à savoir la propagande,
- mais surtout une voie : la campagne électorale permanente.
 Les buts :
- le but immédiat de Hitler était de créer un mouvement organisé de masse à
droite.
- Le but intermédiaire était de conquérir la rue.
- Et enfin le but final était d’accéder au pouvoir.
Avant 1933, il y avait une multitude de courants au sein du NSDAP, et par conséquent la
cohésion du pouvoir reposait sur la loyauté des cadres et des militants envers l’unique
dirigeant, à savoir Hitler. Donc facteur personnel.
 Le succès du mouvement reposait sur les démonstration de force des SA et sur l’art
oratoire d’Hitler. Et enfin, le Chef du NSDAP avec ses troupes avait la capacité de rallier
les masses, et c’est pourquoi il séduisit la fraction des élites traditionnelles qui désiraient en
finir avec le marxisme et en finir avec la République.
 A partir de 1930, le but immédiat est atteint : nous avons un mouvement de masse
organisé ; le but intermédiaire continue à se heurter au KPD ; le but final est en vue.
La question qui se pose à ce moment là est de savoir comment transformer les gains
électoraux au gouvernement national socialiste. Deux solutions se présentent :
1. la voie parlementaire : le NSDAP emporte la majorité des sièges et par conséquent
Hitler serait nommé chancelier
2. le coup d’Etat
Mais la solution trouvée fut la combinaison des deux à la fois, à savoir la Révolution légale.
 La révolution légale, expression paradoxale, désigne le détournement du droit par les
gouvernants pour abolir pacifiquement le régime existant et lui en substituer un autre.
 Cette révolution légale fut une révolution nationale, cad en alliance avec les élites
traditionnelles. Cette alliance avec les élites traditionnelles fut d’abord politique : elle
s’effectua jusqu’au 24 mars 1933 dans le cadre d’un gouvernement présidentiel, sous la
tutelle de Hindenburg, et dans le cadre d’une coalition des droites.
Après 1934, le gouvernement continua de compter des personnalités qui n’étaient pas
membres du NSDAP ( par ex le ministre des finances était un conservateur ). Enfin l’armée,
la haute administration, l’aristocratie foncière, la bourgeoisie industrielle conservèrent leur
position éminente socialement, même si cette position n’était plus dominante politiquement
après 1936.
C. Structure et évolution du Führerstaat
L’Etat national socialiste n’a jamais eu de constitution national socialiste ( dc différent
avec l’URSS qui le 30 Décembre 1922 possède sa propre constitution ) mais un ensemble de
lois fondamentales, réalisant en partie ou dépassant en partie le programme du NSDAP.
Il y a eu en Allemagne une révolution idéologique et politique, mais pas de révolution
économique et sociale. Les partis et les syndicats furent éliminés ( dc plus de société civile
politique ), mais aucune classe sociale ne fut anéantie. L’armée, l’administration, la
magistrature conservèrent une certaine autonomie et une certaine collision. Les entreprises
privées et la propriété privée des moyens de production continuèrent à exister, malgré le
corporatisme, le dirigisme. De même, continuèrent à exister les églises protestantes,
catholiques, qu’il n’était pas question de briser ( contrairement en URSS ). Les juifs jusqu’en
1939 furent incités sinon contraint à émigrer.
L’objectif d’Hitler n’était pas la révolution économique et sociale à l’intérieur, l’objectif
d’Hitler était la réunion de tous les allemands en un seul Etat et la conquête d’un
Empire à l’Est ( le Lebensraum ), ac renonciation aux irrédentismes ( on renonce aux
petits territoires anciennement allemands ). Par conséquent, pour réaliser ce programme de
politique étrangère « il fallait rendre le peuple allemand de nouveau capable de porter les
armes » ce qui n’était pas facile 15 ans après la première guerre mondiale, autrement dit il
fallait réarmer au plan industriel et psychologique. Le régime avait donc besoin de deux
choses :
- de la coopération des élites militaires, des élites administratives et des élites
économiques ;
- ainsi que la coopération en bas de la classe ouvrière et de la jeunesse.
L’édification d’une armée industrielle de masse implique de rallier les salariés de l’industrie
lourde qui vont produire les moyens de la guerre, et les jeunes conscrits qui vont faire la
guerre. Or, le problème est que si la jeunesse allemande était favorable au national socialisme,
le marxisme dominait depuis longtemps le prolétariat allemand. De plus, les élites
traditionnelles étaient fort peu national socialiste.
 Pour réaliser le consensus, le régime s’appuya sur le contrôle des moyens
d’information et de communication. S’appuya sur le front du travail et enfin s’appuya
sur les jeunesses hitlériennes. Quant aux élites traditionnelles, elles furent à la fois
conservées, subordonnées et évincées.
 Par conséquent, pour atteindre les objectifs de politique étrangère, il fallait mettre en
place un régime interne spécifique.
Le IIIe Reich a combiné au fond deux choses : füherprinzip et policratie ( qualifié de tel par
Franz Neumann en 1944 ) car cette structure hybride s’explique à la fois par l’autocratie
d’Hitler et d’autre part l’existence de « hiérarques » ( leaders ) au sein du Parti (
Goebbels, Himmler…) et l’alliance avec les élites traditionnelles de l’Etat, qui ont été
certes évincées mais conservées. A cela s’ajoute la persistance d’une société civile
économique, de même que les églises. Donc au plan politologique, on ne pouvait pas parler de
totalitarisme.
Section 2 : Comparatisme
I. Les deux chefs
A. Les points communs


Staline et Hitler sont nés aux marges des nations dont ils sont les chefs (
Staline était géorgien et Hitler autrichien ) puis ils se sont identifiés à ces
nations.
Les deux hommes partent au bas de l’échelle sociale.









Ils croient en la volonté et au pouvoir. Staline croit surtout au pouvoir de la
peur et Hitler croit surtout au pouvoir de la force.
Les deux personnages ont un Ennemi à dimension métaphysique, à savoir
« le Bourgeois » ennemi de Staline, et « le Juif » pour Hitler.
Tous deux ont la certitude de posséder la clef de l’histoire, à savoir le
matérialisme dialectique chez Staline, le darwinisme racial chez Hitler
Ils savent donc exploiter les circonstances, ils ont l’art de l’opportunisme,
ce sont des machiavéliens, mais sans perdre de vue les objectifs finaux. Les
circonstances chez Staline : la division des classes capitalistes et des puissances
capitalistes. L’objectif final est la fédération soviétique universelle. Chez Hitler
les circonstances : la recherche des élites traditionnelles d’un parti populaire de
droite face à la gauche, et la recherche par les puissances occidentales d’un
barrage face à l’URSS. Mais Hitler ne saura pas bien exploiter ce contexte
international, d’où sa défaite finale. Son objectif était de construire un empire
germanique à l’Est.
Les deux personnages pensaient que l’histoire leur pardonnerait les
sacrifices qu’ils exigeaient, à savoir l’anéantissement de la bourgeoisie et
du judaïsme, pourvu qu’ils sortent vainqueurs.
Leur position de 1923 à 29 est contrastée : le PCUS est au pouvoir mais
Staline n’en est pas le Chef, inversement Hitler est le Chef incontesté du
NSDAP mais celui-ci n’est pas au pouvoir. Néanmoins les deux personnages,
au-delà de ce contraste, conservent un élément commun, aucun d’eux ne songe
à accéder au pouvoir par un Putsch. Tous deux songent à la voie légale.
Tous les deux se hissent du pouvoir à l’autocratie en exploitant une
position initiale « constitutionnelle » ou « légale » : à savoir Staline était
secrétaire général dans un parti unique, quant à Hitler était chancelier dans un
gouvernement présidentiel de coalition des droites. L’avantage de la voie légale
était de s’appuyer sur l’ordre établi et concrètement le maintien formel de la
légalité garantissait l’obéissance des agents publics.
En 1938 au bout du processus Hitler et Staline ont atteint une position
unique, n’admettant aucune opposition : le premier grâce à l’éviction des
élites traditionnelles ; le second grâce à la purge des élites soviétiques
Tous les deux sont morts en défiant leurs adversaires : à savoir Hitler prive
les alliés de la satisfaction de le traduire en justice ( il réussi son suicide ) ;
Staline prive ses collaborateurs de tout espoir de prendre sa place.
B. Les différences
1. le rapport à l’histoire :
 Staline, marxiste convaincu, a tjs eu le sentiment qu’il luttait pour promouvoir une
révolution sociale qui allait dans le sens de l’histoire. Il lui fallait donc soutenir le progrès
et finalement qu’en jouant les Etats capitalistes les uns contre les autres, il assurerait à l’URSS
la sécurité d’abord, l’hégémonie ensuite.
 Hitler lui par contre, nationaliste convaincu, il a tjs eu le sentiment qu’il luttait pour
défendre une certaine culture germanique menacée par le cours de l’histoire. Il lui fallait
donc enrayé, freiner la décadence ( opposé au progrès ) et que la seule chance de
l’Allemagne avant que le rapport des forces ne bascule en faveur de l’URSS était de conquérir
un Empire à l’Est, avec le consentement des puissances occidentales. Il voulait donc exploiter
l’anti communisme en espérant que les puissances occidentales le laisserait faire.
 Donc on voit bien le rapport différent à l’Histoire : d’un côté on pense en terme de
progrès ,de l’autre en terme de décadence ; Staline considère qu’il faut aller dans le sens
de l’histoire, tandis qu’Hitler cherche à freiner l’histoire, la modernité qui est nocive à
l’Allemagne.
2. l’itinéraire :

Staline a 10 ans de plus qu’Hitler. A 20 ans, Staline est un séminariste en rupture de
banc , il a fréquenté les écoles chrétienne, et il s’engage à 20 ans dans la vie politique pour
devenir un révolutionnaire professionnel et finalement membre en 1912 du comité directeur
du parti bolchevique fondé par Lénine. Son expérience existentielle décisive a été l’exil
sibérien. Il fut arrêté 7 fois, évadé 5 fois. En 1913 il est condamné à 4 ans d’exil dans un camp
sibérien. Il ne fut donc jamais un combattant, même s’il fut l’un des chefs bolchevique durant
la guerre civile russe, et même s’il devient Maréchal de l’union après la seconde guerre
mondiale.
 Hitler, à 30 ans en 1919, artiste raté, s’engage dans la vie politique pour en devenir un
professionnel, chef du parti national socialiste. Staline mettra 13 ans pour devenir lieutenant
de Lénine, alors qu’en 2 mois Hitler est chef de parti. Son expérience existentielle décisive est
l’expérience du front français lors de la première guerre mondiale, mais il ne sera jamais
promu à un grade supérieur que Caporal. Il ne devint chef militaire qu’une fois cumulé les
fonctions de chancelier, président et ministre de la guerre ( février 1938 ).
 Donc pour les deux il n’y eut pas de carrière militaire à proprement parler.
3. le style
Staline, l’ancien militant clandestin, est un homme d’appareil, c’est un aparatchique un
pur bureaucrate. La conspiration ou l’intrigue dans le monde clos des échelons supérieurs
du parti, fut donc son activité politique centrale.
Hitler lui, l’ancien soldat inconnu, est un orateur. La réunion publique de masse au cours
de multiples campagnes électorales ( campagne électorale permanente ) fut son activité
politique centrale.
Staline appartient au genre « bureaucratique de la politique » dans une tradition de
gauche favorable à la collégialité et au débat et donc il n’alla jamais au peuple, il fonda
une domination d’appareil et il publia des livres à teneur marxiste.
Hitler lui par contre, appartient au genre « artiste » de la politique dans une tradition de
droite favorable à la personnalité et à l’autorité. Il alla au peuple, il fonda une domination
plébiscitaire ( relation du peuple et du chef…) et il se contenta de publier un manifeste tenant
à la fois du bréviaire, du programme et de la prophétie : « Mein Kampf ».
4. la carrière
Staline se voulait l’interprète du marxisme léninisme et le successeur de Lénine.
Hitler lui par contre, n’avoua jamais à quelle source il avait tiré ses idées ( pan germanisme ?
darwinisme ? ) et il s’est convaincu qu’il jouerait le rôle du « führer » cad le guide et non le
successeur.
La chance de Staline fut la maladie et la mort prématurée de Lénine, après la victoire
bolchevique.
La chance d’Hitler se fut évidemment la caducité du système présidentiel en 1933, après
la caducité du système parlementaire depuis 1930.
 Après avoir exploité et détourné la légalité, pour conquérir le pouvoir, les deux
hommes devinrent autocrates en 1938, dc pt commun. Mais la différence, selon les textes,
Staline n’était que Secrétaire du Parti ( jusqu’en mai 1941, c’est sa seule fonction, ensuite il
devient chef du gouvernement ) dans une structure politique qui était « totalitaire », le parti
unique commandait à l’Etat, l’Etat commandait à la société, dc ce seul titre lui suffisait pour
être autocrate. Hitler, lui devait multiplié les titres pour être autocrate : il était chef du parti,
chef du gouvernement ( 1933 ), chef de l’Etat ( août 1934 ) et chef de l’armée, dans une
structure politique qui n’était pas totalitaire ( il y avait la propriété privée, l’église…).
 Staline avait réalisé une révolution économique et sociale ( bcp de tué, c’est pourquoi
on l’a étudié en polémologique ), tandis qu’Hitler lui avait réalisé une révolution politique
et idéologique ( plus politologique, pas bcp de morts ).
 Staline était à la tête d’une Internationale : le Kominterm, ce qui n’était pas le cas d’Hitler.
Au niveau de la politique étrangère, Hitler entrepris de réviser un traité de paix (
Versailles ) avant et afin d’édifier un Empire. Son échec précipita le génocide juif,
parallèlement à la guerre d’usure en 3 dimensions : terre, mer, air et à la lutte contre les
partisans. Staline lui édifia un Empire quasiment jusqu’aux limites d’avance de l’armée
rouge. Son succès entraîna un bouleversement des frontières géographiques et
démographiques, a entraîné la guerre froide, et la séparation de l’Europe de l’Est du
reste de l’Europe.
5. la position
Staline, entouré de rivaux a du surmonté l’hostilité du parti communiste à toute espèce
de personnalisation. Et par conséquent, il a préféré initialement rester dans l’ombre.
Hitler exigea publiquement la direction du parti qu’il obtint presque d’emblée et cette
position ne fut presque jamais contestée. Par conséquent, la position unique d’Hitler
comme führer explique que le NSDAP ne connut jamais la série de purges que Staline imposa
au PCUS ( la purge des SA est anecdotique par rapport à ce qui s’est passé en URSS ). Staline
liquida la vieille garde bolchevique du PCUS, Hitler au contraire protégea la vieille garde du
NSDAP. Staline n’avait guère confiance en ses collègues, l’autre par contre faisait confiance
en ses lieutenants les plus proches, au point qu’il autorisa certains de ses lieutenants (
Goebbels, Goering, Himmler…) a avoir de larges prérogatives. Autrement dit, Hitler ne
créa pas chez les élites allemandes une insécurité semblable à celle que Staline installa
pour les élites soviétiques.
6. le destin
 Pour Hitler, l’année 1945 fut celle de l’histoire du miracle ( cf miracle de la maison de
Brandebourg ) et celle de la défaite totale.
 En revanche, Pour Staline, l’année 1945 fut celle de l’apothéose, la victoire marqua le
pt culminant de ses relations avec son peuple, de même que Yalta puis Potsdam
marquèrent le pt culminant de sa reconnaissance par la communauté internationale.
Hitler a été vaincu après avoir remporté des victoires exceptionnelle ( Pologne, France, URSS
) mais il laisse un héritage de défaite : la débellatio.
Staline lui a été vainqueur après avoir essuyé des défaites exceptionnelles, mais il a laissé un
héritage de victoires à savoir un Empire jusqu’en 1989.
 Hitler s’est suicidé dans son bunker le 30 Avril 1945 dans Berlin en ruine. Son corps
fut incinéré, il n’eut jamais de sépulture. Hitler devint ainsi un fantôme, il nous hante toujours.
 Staline quant à lui est mort dans son lit d’une agonie des suites d’une hémorragie
cérébrale, le 4 mars 1953. Son corps repose dans un mausolée au côté de Lénine. Sa mort fut
suivie de 3 jours de deuil national, dans tout le bloc soviétique. il est donc mort plus puissant
que jamais. Il est donc devenu une momie, c’est son statu posthume.
Les deux hommes figurent donc, l’un comme le plus grand vaincu ( Hitler ), l’autre comme le
plus grand vainqueur du XXe siècle ( Staline ).
II. Les deux régimes
A. La prise du pouvoir
 La nomination d’Hitler à la chancellerie le 30 Janvier 1933, puis l’adoption de la loi
sur les pleins pouvoirs le 24 Mars 1933, apparaissent comme les homologues du Putsch
du 7 novembre 1917, puis de la dissolution de l’assemblée constituante le 10 Janvier 1918.
A cette différence, que le processus allemand fut légal alors que le processus russe fut illégal.
La semi révolution nationale socialiste de 1933 à 1934 ne fut pas la révolution bolchevique de
1917-1921. En effet, la semi révolution nationale socialiste ne conduisit pas à une guerre
civile. La suppression du pluralisme politique ou syndical en Allemagne, et la répression
qui frappa la gauche en Allemagne, cela n’équivalait pas à la destruction ou à
l’élimination des classes capitalistes, ni à la dékoulakisation ( 1924-29 ), ni enfin aux
grandes purges ( 1936-38 ). Malgré les révocations politiques ou antisémites, la fonction
publique et la magistrature en Allemagne restèrent quasi identiques. De même que l’économie
et les églises. L’armée ne fut pas remplacée par la SA contrairement à l’armée tsariste
remplacée par les gardes rouges puis par l’armée rouge. Il y eu enfin un nouvel Etat en
Russie, pas en Allemagne. La semi révolution nationale socialiste ne rompit pas les liens de
l’Allemagne avec le reste du monde, il n’y a eu aucune rupture des relations diplomatiques
avec les pays étrangers.
B. La structure du pouvoir
L’URSS et l’Allemagne sont deux Etats à parti unique.
A la différence des nationaux socialistes en 1933, les bolcheviques étaient membres d’une
organisation clandestine en 1917. A la différence du PCUS, le NSDAP n’a jamais eu besoin
de faire ses preuves au cours d’une guerre civile.
 Le NSDAP était un parti dirigé par un chef dont le but était de gagner des voies, des
adhérents, des élections en agissant dans la légalité, non sans démonstration de force dans la
rue. Il devint un parti de masse, puis il devint le parti unique de l’Etat. Ce parti garda un
caractère multi-courants sans connaître aucune purge.
 Le PCUS avait une direction collégiale avant 1929. Son but était de mobiliser les masses
mais sans dépendre d’elles, et cela afin de prendre le pouvoir par tous les moyens.
Devenu parti unique, le PCUS est resté un parti élitiste : en 1939, le PCUS représentait 2%
de la population alors qu’à la même date, le NSDAP représentait déjà 9% de la population. Le
PCUS prétendait devenir monolithique ( à la différence du NSDAP multi- courants ) et
donc il subit des purges massives.
Les liens entre le Parti et l’Etat : le NSDAP coexistait avec l’Etat, cad avec
l’administration, la magistrature et l’armée. Sa domination politique sur l’Etat était en réalité
beaucoup plus théorique que pratique. Hitler n’était pas uniquement chef du Parti, il était
aussi chef de l’Etat ( chancelier + Président ). Le PCUS lui commandait à l’Etat, Etat qui
subit lui aussi des purges massives et renouvelées.
Concrètement, la composition du Politburo, était identique ou quasi identique à celle du
Sovnarkom. Or la composition du gouvernement du Reich ne correspondait pas au corps du
NSDAP. Enfin, Lénine et Staline n’étaient que chef de parti et cela suffisait.
Les liens entre le Parti et la société : en Allemagne, le pluralisme politique avait été abolit,
donc plus de société civile politique, mais il subsistait une certaine société civile éco et
sociale en Allemagne avec la propriété privée et l’église. En revanche, en URSS, l’Etat
soviétique était propriétaire de l’économie et des moyens de production au contraire de
l’Allemagne.
Le rapport entre le parti et l’armée : l’armée rouge était commandée par le PCUS via
d’abord le système des commissaires politiques, via la quasi identité entre le Conseil de
défense et le Politburo et enfin via l’attribution de la Présidence du Conseil de Défense par le
Secrétaire général du PCUS. Au contraire, l’armée allemande, la Reichvehr puis la
Vermacht avaient conservées leur autonomie vis-à-vis du NSDAP : les soldats et les
officiers prêtaient serment à Hitler mais en temps que Chef D’Etat. Le serment commence en
Août 1934 lorsqu’il remplace Edinburgh. L’armée avait ses propres tribunaux. Et enfin,
l’appartenance au parti était suspendue le temps du service militaire. Certes, l’armée de terre
allemande eut progressivement pour concurrente la WaffenSS. Or celle-ci n’a jamais recruté
que des volontaires et il y eut en tout 800 000 hommes dont 160 000 étrangers. La Vermacht
elle, armée de conscrit a enrôlé 15 millions d’hommes dont 800 000 étrangers.
Au contraire, les Komsomol ( la jeunesse soviétique ) dans l’armée rouge, la jeunesse
hitlérienne n’avait pas de section dans la Vermacht.
C. La conservation du pouvoir
1. L’idéologie : Les deux régimes étaient idéologiques, l’idéologie permettant de
légitimer mais aussi à mobiliser. Mais la légitimité était plus charismatique et
plébiscitaire que idéocratique en Allemagne, au contraire de l’URSS.
2. La propagande : les deux régimes contrôlaient les moyens d’information et de
communication de masse, contrôlaient l’éducation, la culture et les arts, contrôlaient
enfin les organisations de travail et de jeunesse. Il s’agissait donc de prendre et de
conserver le pouvoir dans la société et pas seulement dans l’Etat, en imprimant
l’idéologie dans la société et pas seulement dans l’Etat, avec pour objectif de créer
« un homme nouveau ». La tâche était bcp plus difficile en Allemagne, nation
avancée, à haut niveau d’instruction, au cœur de l’Europe, avec économie privée,
relations internationales développées, avec des églises toujours bien présentes, avec
autonomie des corps de l’Etat. Donc tout cela rendait difficile d’imprimer l’idéologie
nationale socialiste dans cette société allemande. En URSS, la première tâche du
PCUS dans les campagnes russes était d’alphabétiser la population russe. Dans les
deux cas, quoiqu’il en soit, on retrouvait la volonté « d’organiser l’enthousiasme » (
expression de Raymond Aron ). Mais en Allemagne subsistait une société civile en
tout cas au plan économique, ce qui n’était pas le cas en URSS.
3. La Terreur : les deux régimes recouraient à la Terreur symbolisée par la police
secrète et par le camp de concentration. Un gouvernement autocratique nécessitait un
instrument spécial, responsable devant le seul autocrate et organisé pour exécuter ses
ordres, sans égard pour la loi. L’autocrate a à sa disposition la police politique : en
URSS, il s’agit du GUGB ainsi que le GULAG ; en Allemagne, la SS et les KL (
Koncentrazion lagger ). En 1936-38, dans le GULAG nous avons de 4 à 8 millions de
détenus dans le système soviétique. En Allemagne, à la même époque, entre 6000 et
24 000 détenus.
Le droit pénal était évidemment un instrument de lutte contre l’ennemi intérieur. Par
conséquent la privation des droits était la situation dans laquelle il fallait réduire les
opposants. Mais en Allemagne évidemment, ce qu’on appelle « l’Etat de droit » avait
une tradition bien plus établie qu’en Russie. Ainsi par exemple, la responsabilité
pénale collective appliquée dès le début en Russie bolchevique, avec l’exécution sans
jugement de Nicolas II et de sa famille, ne le fut en Allemagne qu’à partir de Juillet
1944 ( attentat de Hitler ) et qu’ à l’encontre des personnes soupçonnées d’être
impliquée dans l’attentat de Hitler. Dc mise en place progressive de la responsabilité
familiale, alors qu’en URSS elle existait dès le départ
D. La résistance au pouvoir
Le régime nazi bénéficia d’un plus large consensus que le régime bolchevique. On peut
mesurer le degré d’opposition des divers groupes politiques ou sociaux à un régime en
observant ou en comptant le pourcentage de personnes issus de ces groupes qui résistent ou
qui émigrent ou qui sont victimes de la répression il y a résistance politique lorsque
l’opposition pacifique légale n’est plus possible du fait de l’exclusivisme du régime. Il ne
reste donc le choix qu’entre la clandestinité ou bien l’exil ou encore le silence.
L’émigration russe avec déchéance de la nationalité, fut la plus ample que le monde ait connu
depuis la révolution française, à savoir que 1 million de personnes ont quitté la Russie
soviétique. elle fut la plus diversifiée au plan politique puisqu’elle toucha les représentants de
toutes les tendances, des monarchistes jusqu’aux trotskistes.
En Allemagne, les dirigeants communistes quittèrent presque tous l’Allemagne. La moitié des
cadres socialistes ( SPD ) quittèrent l’Allemagne mais très peu de membres du Zentrum et de
libéraux. Mais de nombreuses personnalités culturelles et scientifiques quittèrent l’Allemagne,
notamment les personnes de confession juive. Au total, 70 000 personnes quittèrent
l’Allemagne.
La plus forte opposition au régime hitlérien se manifesta dans les milieux ecclésiastiques mais
aussi dans les échelons supérieurs de l’armée, comme en témoignent les multiples projets
d’attentats et de Putsch contre Hitler. Au contraire en URSS, le système des commissaires et
des purges garantissait la docilité de l’armée rouge.
E. La violence du pouvoir et son impact
Le potentiel objectif de violence du bolchevisme russe était plus grand que celui du nazisme
allemand. Le bolchevisme russe visait l’anéantissement social ( et parfois physique ) de
classes entières ( la noblesse, le clergé, la bourgeoisie et la paysannerie libre ). Mais le
nazisme allemand visait essentiellement les juifs à l’intérieur et au plan extérieur visait
l’URSS. En tant de paix en Allemagne, la violence du régime national socialiste ne pouvait
être que limitée pour 2 raisons :
 D’abord la grande majorité des élites allemandes n’était pas antisémite de
manière virulente.
 Les juifs représentaient 0,8% de la population de l’Allemagne en 1937.
En revanche en temps de guerre et d’occupation, le nazisme allemand a déchaîné une violence
totalitaire contre des polonais, les membres du PCUS, les juifs à l’échelle de l’Europe : 5,1
millions de juifs ont été exterminés.
L’impact subjectif de la violence du nazisme allemand ne pouvait être plus grand que celui du
bolchevisme russe pour des raisons médiologiques et idéologiques.
1. les raisons médiologiques
Au contraire de l’URSS, l’Allemagne qui était ouverte et au cœur de l’Europe, ne pouvait
fermer ses frontières. En plus cette Allemagne s’attaquait à des internationales
(Internationales communiste, socialiste et franc maçons ) mais également à une diaspora
immense : les juifs. Enfin et surtout, l’Allemagne a été vaincu, son territoire a été administré,
les archives allemandes ont été livrées, les dirigeants allemands ont été jugés. Ensuite des
photos ont été prises, des films ont été tournés. La mémoire du génocide juif a été entretenue
par les institutions juives, par Israël, par les Etats occidentaux…mais par contraste en URSS
très peu de traces. La destruction de la civilisation paysanne et orthodoxe russo-ukrainienne a
sombré dans l’oubli. De plus, la définition du crime contre l’humanité et de génocide ne prend
pas en compte la notion de crime social.
2. les raisons idéologiques
Il devait être proclamé qu’un régime ennemi en 39-45 opposé aux Lumières, avait été
responsable de la mort de millions de personnes pour « raisons de race ». il ne devait pas être
dit qu’un régime ami en 41-45 se réclamant de l’héritage des Lumières avait été responsable
de million de morts pour « raisons de classe » ( expression de Nolte ).
Le fascisme italien : Une 50n de condamnations à mort entre novembre 1922 et Juillet 1943
Le fascisme allemand : 16000 condamnations à mort entre 1933 et 45, 14000 par les
tribunaux militaires et 7000 exécutions extra judiciaires.
III. Les deux politiques étrangères
De 1933 à 1937, la préoccupation centrale d’Hitler était d’éviter la guerre jusqu’à ce que
l’Allemagne se soit réarmée. Les débuts de la politique étrangère de Hitler ne furent pas
révolutionnaires.
- Hitler a quitté la SDN en octobre 1933
- mais pour compenser il conclu le Pacte à 4 en Juillet 1933 avec la GB, la France
et l’Italie. Ce pacte à 4 n’a pas été ratifié par les autres puissances mais il a servi
lors des accords de Munich en 1938.
- Hitler a confirmé le Traité de Locarno en 1925 qui garantissait le statut quo
territorial à l’Ouest.
- Il conclut également le Pacte de non agression avec la Pologne en Janvier 1934.
Donc l’orientation anti soviétique était déjà perceptible.
A l’intérieur, Hitler avait brisé le marxisme pour renverser la République de Weimar, en
s’alliant avec les conservateurs. A l’extérieur, il voulait réviser partiellement le Traité de
Versailles pour préparer la conquête du Lebensraum à l’Est, en utilisant l’anti communisme.
Son objectif était donc que les puissances occidentales laissent à l’Allemagne « les mains
libres à l’Est ».
Du côté de Staline : de 1929 à 1939, Staline lui aussi voulait éviter la guerre, parce que
l’URSS n’est pas prête ( en 1929 elle n’est même pas encore industrialisée ) et la priorité était
de renforcer l’unique Etat socialiste ( seconde révolution avec le premier plan quinquennal qui
visait à industrialiser et à collectiviser l’URSS ) et à instaurer l’autocratie.
La crainte fondamentale de Staline était la constitution d’une coalition occidentale anti
soviétique autour de l’Allemagne.
La vision stalinienne des rapports entre l’URSS et les puissances capitalistes ( vision en tout
point conforme à la doctrine marxiste léniniste ) était ambivalente : d’un côté, les Etats
capitalistes tendaient à s’allier contre l’Etat socialiste ; d’un autre côté, les contradictions
internes au monde capitaliste maintenaient les conflits entre Etats capitalistes. Par
conséquent, toute la politique étrangère de l’URSS avant comme après Staline visa à
empêcher cette alliance et à exploiter ses contradictions.
Jusqu’ à l’invasion allemande, l’idée maîtresse de Staline entre 39 et 41 fut de rejeter puis de
maintenir le conflit armé à l’Ouest. L’URSS n’interviendrait qu’au moment où les belligérants
capitalistes européens seraient épuisés par leur conflit armé. C’est donc à la faveur de la
guerre qu’est né l’URSS et la révolution bolchevique ( après la 1 ère GM ) et c’est à la faveur
de la guerre l’emporterait ( guerre à l’Ouest, épuisement capitaliste et intervention victorieuse
des soviétiques ) tel était le scénario envisagé par les soviétiques.
A. Les configurations politiques possibles
Il y avait en Europe 2 Etats à parti unique.
 Le concept clé du premier Etat ( l’URSS ) était l’antifascisme
 Le concept clé du second ( Allemagne ) était l’anticommunisme
Tous deux avaient des alliés transnationaux dans toute l’Europe :
 Les PC pour l’URSS à l’Ouest
 Les minorités allemandes à l’Est
Cependant ces deux Etats avaient en commun l’hostilité à la Démocratie libérale. Dc les
démocraties occidentales représentaient le 3ème facteur.
 donc il y avait un duel entre les deux, mais une configuration en triangle.
L’une des puissances qui rallierait les démocraties occidentales aurait un avantage décisif sur
l’autre.
A l’ouest l’enjeu de la compétition germano-soviétique fut précisément de savoir qui
l’emporterait. Pesaient des raisons idéologiques, comme par ex en faveur de l’URSS la
filiation entre le marxisme et les Lumières, mais égt des raisons géopolitiques. Ces raisons
firent pencher la balance du côté de l’antifascisme, du moins dans les populations, sinon
chez les élites.
 l’événement clé sera la guerre civile espagnole qui a entraîné une bataille de l’opinion.
Franco a gagné la guerre civile mais le MCI ( mouvement communiste international ) après
avoir soviétisé la République d’Espagne, a gagné la bataille de l’opinion.
Pour que Hitler rallie les puissances occidentales, il aurait fallu rejeter l’antisémitisme et
modérer les ambitions extérieures.
L’anticommunisme et le Lebensraum s’oppose au pt de vue diplomatique : l’Allemagne
pouvait s’attirer des alliés dans la lutte contre le communisme, mais non pas s’attirer
des alliés dans la conquête du Lebensraum, car la géopolitique de l’équilibre des
puissances l’interdisait. D’où la contradiction.
Staline lui su modérer ses ambitions pour rallier les démocraties occidentales. Déjà,
l’URSS était membre de la SDN depuis 1934 et il proposait de combattre le fascisme et
non pas de propager la révolution. En Espagne, le Komminterm soulignait que le parti
communiste espagnol luttait pour vaincre l’insurrection franquiste et protéger la république, et
non pas pour l’instauration de la Dictature du prolétariat en Espagne.
B. La Pologne et les pactes germano-soviétiques
Le 5 Novembre 1937, Hitler présenta son programme d’expansion au ministre des
affaires étrangères et au chef des armées. Ce programme envisageait d’annexer l’Autriche,
de détruire la tchécoslovaquie et de conquérir un Lebensraum à l’Est à la faveur de la
passivité occidentale et de la complicité polonaise. Or Hitler constata l’opposition des
représentants des élites traditionelles, notamment l’opposition des chefs militaires et du
ministre des affaires étrangères. Par conséquent, Hitler remania son commandement militaire.
 En Février 1938 l’armée est sous sa coupe dc il est véritablement autocrate.
Il réussi l’Anschluss en Autriche, il réussit à supprimer la Tchécoslovaquie.
Par csq, l’Allemagne acquit l’hégémonie en mars 1939 après le coup de Prague.
Donc l’équlibre des puissances est rompu et l’Allemagne s’attire l’hostilité de la GB, suivie
de la France.
 Staline devint ainsi l’arbitre de l’Europe, celui vers qui l’Occident et l’Allemagne
devaient se tourner.
Au printemps 1939 va se jouer le destin de la Pologne.
1. L’état-tampon
La Pologne servait d’état-tampon entre l’Allemagne et l’URSS.
Si l’URSS voulait intervenir contre l’Allemagne ou inversement, il fallait que la Pologne
accorde un droit de passage et de stationnement à l’armée rouge ou à la Vermacht. Mais il
n’en était pas question à Varsovie. Le gouvernement polonais comptait sur les forces
franco-britanniques.
 Depuis l’occupation de la Bohème-Moravie et de la satellisation de la Slovaquie et
donc la violation des Accords de Munich et le coup de Prague de mars 1939,
Chamberlain n’avait plus confiance en Hitler, si bien que la GB suivie par la France
donnent à la Pologne une garantie d’assistance militaire.
Mais les franco-britanniques n’avaient guère les moyens militaires de soutenir la Pologne car
ils s’en tenaient à une stratégie défensive d’usure. Ainsi donc, les franco britanniques se
trounaient vers l’URSS.
- Or les polonais refusaient toute entrée de l’armée rouge sur leur territoire
- Le gouvernement soviétique n’entendait pas faire la guerre pour le compte
des franco-britanniques ou des polonais.
L’URSS à l’époque avait un gouvernement révolutionnaire. Il voulait diviser les puissances
capitalistes pour rejeter le conflit armé à l’Est. Il prit dc l’initiative d’un Pacte avec
l’Allemagne. Proposition à laquelle Hitler répondit le 26 Juillet 1839. Le Pacte sera
ensuite signé un mois plus tard.
A cette date, le gouvernement polonais avait refusé les propositions allemandes, à savoir :
- Le rattachement à l’Allemagne de la ville de Dantzig
- La création d’une autoroute et d’une voie ferrée vers l’Allemagne,
- La garantie de l’indépendance des frontières polonaises,
- L’adhésion de la Pologne au Pacte anti Kominterm
- Perspective d’une extension territoriale
Le colonel Beck, ministre des affaires étrangères polonais refusa ces propositions de Hitler
car il se sentait en sécurité à l’Est comme à l’Ouest. Il avait les garanties franco
britannique, et du côté de l’Est, il était persuadé que l’anti communisme de Hitler et
l’anti fascisme de Staline empêcheraient toute alliance entre Allemagne et URSS.
Mais ce fut une grosse erreur.
2. L’inversion de la politique de Hitler
Avec le Pacte germano soviétique de non agression du 23 août 1939, Hitler voulait isoler la
Pologne et obliger les franco birtannique a admettre la vanité de leurs garanties vis-à-vis de la
Pologne. S’il y parvenait, c’est en vain que Staline aurait signé le pacte car il se retrouverait
seul face à Hitler. Mais Hitler commis une erreur en pensant que les britanniques et les
français ne bougeraient pas.  cf Déclaration de guerre franco britannique.
Staline quant à lui a eu raison de prévoir que les puissances occidentales tiendraient
leurs engagements.
 La guerre se trouvait rejetée à l’Ouest, et l’URSS confirmait sa position d’arbitre vis-àvis des puissances capitalistes.
Donc inversion de la politique d’Hitler :
 En politique intérieure, Hitler a éliminé le marxisme révolutionnaire avec le
soutien des élites traditionnelles.
 En politique étrangère, il voulait transposer cette recette en luttant contre le
terrorisme de l’URSS en s’appuyant sur les démocraties occidentales.
Mais l’équilibre des puissances a été rompu en 1933. Hitler représente désormais un ennemi
plus puissant que Staline. Par conséquent, fin Août 1939/début Septembre, il y a eu
inversion de la politique allemande et Hitler passa donc alliance avec la puissance
révolutionnaire et les puissances conservatrices sur lesquelles il devait s’appuyer lui
déclarèrent la guerre.
Staline lui voulait le retour des frontières de l’URSS à celle de la Russie de 1914.
Autrement dit, il se souvient de ce que la Russie avait perdue en 1918-1921 et il voulait les
récupérer. Tel était le sens des protocoles secrets sur :
 La Pologne orientale
 La Finlande
 Les pays Baltes
 La Bessarabie ( actuelle Moldavie )
Tous ces Etats avaient des gouvernements contre révolutionnaires et dc anti soviétiques.
3. Le partage de la Pologne
 Le Pacte germano soviétique de non agression du 23 Août 1939 puis le second Pacte, le
Pacte d’amitié du 28 Septembre. Ces deux pactes et surtout le second étaient des alliances de
guerre, de partage et d’anéantissement de la Pologne.
 En 1939, on assiste ainsi au quatrième partage de la Pologne.
Après la debelatio en Septembre 1939, le traitement de la Pologne illustre bien les similitudes
et les différences entre les deux régimes.

Hitler avait songé à laisser subsister un petit Etat polonais en espérant que
la GB et la FR l’accepteraient comme forme de règlement pacifique. Cette
initiative fut abandonnée après le rejet de l’offre de paix par la Fr et la GB.
Donc la guerre a été confirmée.
 A l’Est, les autorités soviétiques procèdent à l’annexion du territoire, non
érigé en République soviétique de Pologne mais incorporé. Annexion du
territoire ac abolition de la propriété privée, collectivisation et déplacements des
polonais.
 A l’Ouest, les autorités allemandes procédèrent à l’annexion d’une partie :
le Warkhland ( une minorité allemande mais une majorité de polonais ). De
plus les autorités allemandes instituèrent un gouvernora général pour les
polonais, dans lequel les polonais seraient concentrés ( 1 million de polonais
seront expulsés du warkhland vers le governora général + 1,6 millions de juifs
polonais seront tués ) et les polonais juifs seront consignés.
 Des deux côtés l’ordre social polonais fut détruit et les élites traditionnelles
furent décimées par les agents du Parti ( PC et NSDAP ) et de la police.
Mais les objectifs furent différents :
- Du côté allemand, cela se fit à des fins de colonisation avec germanisation des
polonais de bonne race.
- Du coté soviétique cela se fit à des fins de collectivisation pour rallier les
polonais de gauche.
La différence c’est que du côté allemand on voulait exterminer les juifs polonais alors que les
soviétiques voulaient rallier les polonais à la révolution.
Des deux côtés, l’église catholique polonaise fut le pôle principal de résistance.
C. La guerre germano-soviétique
La seconde guerre mondiale fut essentiellement germano soviétique ac avantage pour
l’Allemagne que le régime soviétique était impopulaire mais égt avantage pour l’URSS que
l’Allemagne subsistait un second front à l’Ouest.
1. les objectifs d’Hitler
 Quels sont les buts de guerre ?
Hitler prophétisait pour l’avenir un Empire colonial germanique jusqu’à l’Oural. Mais
qu’entendait-il par colonisation ?
Selon Hitler, « ce que l’Inde a été pour l’Angleterre, les territoires de la Russie le seront
pour nous. »
 S’agissait-il du type de colonisation au sens de la domination politique d’une minorité
hologène ( étrangère ) sur une majorité autochtone, sans transfert de population ni de
propriété foncière ( sauf minière ) ? Donc c’est le type de colonisation pratiquée en Inde et
en Asie. Pas de transfert démographique mais domination politique.
 Ou s’agissait-il d’une colonisation au sens d’une substitution démographique et de
propriété foncière, cad implantation des membres d’un peuple sur le territoire d’un
autre peuple ? ( type de colonisation romaine ).
Selon ce qu’on a appelé le Document allemand, « les principes généraux de
politique économique dans les territoires de l’Est » adopté le 8 novembre 1941 :
l’ensemble de la propriété publique de l’état soviétique deviendrait propriété du Reich.
Or la propriété publique de l’URSS était presque toute l’économie du pays du fait de la
collectivisation. Les recettes qui se dégageraient de la vente d’une partie des biens conquis,
permettraient de couvrir les dépenses de guerre, y compris les dettes et c’est ainsi que les
dépenses militaires ne seraient pas improductives.
En attendant, deux commissariats furent ainsi crées :
- l’un dans les pays baltes
- l’autre en Ukraine
Deux autres étaient prévus pour la Moscovie et pour le Caucase. La cogestion de ce
territoire conquis fut confiée à Rosenberg et à Baurmann pour l’administration
générale, à Himmler pour la sécurité et à Goering pour l’économie.
La Vermacht avec les WaffenSS tenaient le front et les axes de communication. Les
territoires à l’arrière relevaient du RSHA ( sipo, kripo, gestapo..). les forces étaient
chargées en territoires occupés du maintien de l’ordre et de la lutte contre les partisans avec
comme soutien les unités affectées à l’armée de terre.
2. Conquête ou libération ?
opération Barbarossa : ce fut à la fois une guerre préventive contre l’URSS, une guerre
de conquête pour le lebensraum et une guerre idéologique contre le communisme
comme l’illustra le fameux ordre de liquidation des cadres du PCUS.
Au contraire de la guerre pour le Lebensraum, la guerre contre le communisme pouvait être
présentée comme une guerre de libération avec 2 versions :
- La libération des populations vis-à-vis de la domination communiste
- La libération des nationalités non russes vis-à-vis de la domination russe.
Hitler et ses lieutenants partageaient l’objectif de détruire l’Etat communiste. Mais
Rosenberg, l’idéologue officiel du Parti avait d’autres conceptions que ses collègues. Il
pensait que l’Allemagne en se comportant en libératrice face au judéo bolchevisme, en
décollectivisant les terres, en rétablissant les cultes, en offrant aux nationalités non russe la
possibilité de se constituer en Etats « autonomes » sans protection allemande, l’Allemagne
obtiendrait la coopération de millions d’habitants de l’URSS.
Mais il ne fut pas écouté, et Hitler pensait vaincre l’URSS en une campagne sans l’aide des
populations slaves. Mais ces deux aspects étaient contradictoires.
Quand il est devenu évident que la guerre éclair cédait à la guerre d’usure ( hiver42- hiver43 )
le haut commandement de l’armée de terre, Goebbels et Himmler cherchèrent à rallier les
populations non russes voir même les populations russes elles mêmes.
 C’est ainsi qu’entre Février 1942 et juin 1943 furent rétablies la propriété des terres
et la liberté des cultes. Donc Rosenberg ne fut écouté que trop tardivement.
Hitler, Bormann ou même Goering demeurèrent très réticents à l’idée d’armer des
mouvements nationaux slaves anti communistes russes. Le droit de porter des armes devait
être réservé aux allemands, car il signifiait le droit à la domination politique. Par
conséquent, Rosenberg ne fut pas écouter ou du moins pas suffisamment ou pas assez tôt.
Cette politique ne fut appliquée que dans les pays baltes et au Sud caucase. Elle fut appliquée
avec succès puisqu’une partie des populations baltes et turcophones collaborèrent pour
l’autonomie, l’autonomisme, la liberté des cultes et la décollectivisation. Mais par la suite les
turcophones ont fait partis des peuples punis par Staline. Responsabilité pénale
collective, ils ont trahis l’URSS et donc ont été déportés après la guerre.
 Pour le reste, mis à part les pays baltes et le sud Caucase, la guerre à l’Est s’apparenta à
une guerre d’asservissement contre les slaves et à une guerre d’anéantissement contre
les juifs.
Donc conquête ou libération ? Plutôt conquête.
3. La montée aux extrêmes des hostilités
Les enjeux : Avec l’invasion allemande en Juin 1941, l’existence de l’Etat soviétique était
en jeu. A l’inverse, avec la contre offensive soviétique à partir d’août 1943, ce fut
l’existence de l’Etat national socialiste qui fut en jeu.  Par conséquent, la radicalité des
enjeux dictat la montée aux extrêmes des moyens.
Les moyens : la terre brûlée, l’intensité des combats, les rigueurs de l’occupation, la
guérilla et la contre guérilla, la guerre civile résistants et collaborateurs, la liquidation
des juifs, les famines, les épidémies, expliquent l’énorme mortalité à l’Est. ( on estime
environ 22 millions de morts en URSS ).
 Du côté allemand, Les considérations idéologiques se mêlèrent aux considérations
stratégiques. La planification militaire allemande visait une victoire rapide sur l’URSS (
guerre éclaire avec trio char/avion/radio ). Pour cela, la planification militaire allemande
devait résoudre 2 problèmes :
- D’abord l’insuffisance de la logistique, du fait de la médiocrité des transports
ferroviaires soviétiques ;
- L’insuffisance des effectifs car refus imposer à la population une trop forte
mobilisation. ( seulement 3,5 million )
Par conséquent l’armée allemande ne pouvait espérer avancée vite et profondément en URSS
qu’à deux conditions :
- Si on écarte du ravitaillement tout le superflu notamment les denrées ; Mais
comment nourrir les soldats ?
- Si le maximum de soldats était affecté aux opérations de guerre au détriment
des taches d’occupation de l’arrière pays conquis.
Par conséquent, il était prévu que les unités affectées à cette tâche de l’armée de terre
s’emparerait des produits des kolkhozes ( fermes publiques ), provoquant ainsi la famine
parmi la population civile.
Les unités affectées du RSHA ( police allemande ) mettraient en œuvre une politique de
terreur pour sécuriser les arrières des forces allemandes.
 Or le haut commandement soviétique connaissait les vulnérabilités de l’ennemi et donc
organisa de quoi paralyser l’armée allemande, rendant plus difficile l’occupation en
pratiquant la terre brûlée et la guérilla. Dc on va détruire tout ce qui peut être utile à
l’armée allemande. Par conséquent, la pop des territoires qui allaient être occupés, se voyait
privée de biens essentiels qui étaient donc détruits ou déplacés à l’Est, cependant que du côté
allemand, les ressources alimentaires et minérales restantes seraient donc enlevées par
l’occupant.
Aux attentats, aux embuscades, aux sabotages répondirent du côté allemand les
exécutions sommaires des partisans capturés. Mais également les prises d’otages ;
répondirent également les évacuations ou même les exécutions préventives des hommes en
âge de porter les armes ; et enfin, répondirent « les villages brûlés » à savoir que les
habitants de localités n’ayant pas signalés la présence de partisans connaissaient des mesures
de rétorsion.
La politique de terreur : A partir de l’hiver 1942 et plus encore hiver 43, on se rend
compte qu’on entre dans une guerre d’usure, les autorités allemandes toujours en
manque d’effectifs s’efforcèrent de remplacer leur politique visant à susciter la terreur
par une politique visant à susciter des collaborateurs. Donc on commence à écouter
Rosenberg, et à chercher à rallier les populations. Les résultats furent mitigés : en 1942, les
formations anti partisans en URSS étaient composées de 150 000 allemands et de
250 000 auxiliaires locaux.
Le cas des prisonniers de guerre soviétiques : dans la montée aux extrêmes des hostilités, le
cas des prisonniers de guerre soviétique a été révélateur. D’abord, le nombre énorme de
soldats de l’armée rouge qui s’était rendu ( 3,9 millions soit plus que le nombre de soldats
allemands présents en URSS, ce qui était d’autant plus étonnant que le droit militaire
soviétique interdisait les rééditions ). Ce nombre important de rééditions avait montré que les
troupes et donc la population n’avaient guère envie de se battre pour son propre état. Ce qui
prouve l’impopularité du régime soviétique.
Mais du côté allemand :
- la recherche d’une avance la plus rapide possible ( or s’occuper de bcp de
prisonniers pd du temps ),
- les difficultés logistiques couplées à celles de prendre en charge des masses
de prisonniers de guerre,
- la négligence coupable,
- le fait que les soldats soviétiques n’étaient pas protégés par les conventions
internationales, car l’URSS n’avait pas signé la Convention de Genève de
1929,
 tous cela a fait que de l’été 1941 à l’hiver 1942, 2,6 millions de prisonniers de guerre
sont morts d’épuisement, de mauvais traitements, de maladie, mais aussi du fait de
l’exécution des commissaires politiques, des membres du PCUS, des fonctionnaires, par
les commandos du RSHA. Il y aurait eu sur 2,6 millions de prisonniers morts, on estime
environ 600 000 fusillés.
Le traitement des prisonniers de guerre soviétique par l’armée allemande commença à
changer à partir des instructions du 6 mai 1942 qui avaient pour objectifs de favoriser les
désertions et les rééditions dans l’armée rouge.
4. la « guerre civile internationale »
 La guerre germano soviétique se répercuta dans toute l’Europe. En Effet, la résistance à
l’occupation n’était soutenue que par la stratégie indirecte britannique. Dc à partir du 3
Juillet 1941 et l’appel de Staline, la résistance à l’occupation a pris une nouvelle tournure
avec l’implication des partis communistes obligeant l’armée de terre allemande et la
RSHA à s’impliquer dans les tâches de police administrative et les tâches de police
judiciaire ( répression ).
 Par conséquent éclata au sein de la guerre interétatique, une guerre civile
internationale. En effet, de nombreux mouvements dans l’Europe occupée se rangèrent soit
aux côtés de la Grande Bretagne, soit aux côtés de l’URSS, soit de l’Allemagne contre leurs
propres gouvernements.
 Staline qui avait besoin du soutien de la population de l’URSS, et qui avait
besoin de l’alliance des anglo américains, n’a pas appelé au socialisme et au soulèvement
du prolétariat mais il en a appelé au patriotisme russe et slave, et d’autre part il en a
appelé à l’antifascisme élargi à la droite anti collaborationniste.  D’où la dissolution du
Kominterm le 22 mai 1943.
Pour la première fois, avec la guerre contre le nazisme allemand, le régime soviétique et le
gros de la population avaient un but commun. C’est pourquoi le souvenir de « la grande
guerre patriotique » fut à ce point cultivé en URSS après 1945.
L’Etat soviétique, qui se réclamait de l’internationalisme, a pu susciter une allégeance
nationale. Le gros de la population a soutenu le régime soviétique et dc à partir de 194243 il y a une solidarité nationale.
 De son côté, l’Allemagne nationale socialiste aurait elle la capacité de susciter
une allégeance non seulement nationale, mais internationale ? Réponse mitigée : il existait
en Europe un grand nombre de mouvements fascistes qui s’étaient rangés aux côtés de Hitler.
Il était cependant difficile de créer une internationale des nationalistes. Par conséquent
la solution trouvée fut la suivante : l’idée européenne a joué un rôle catalyseur, on crée
un « nationalisme européen » contre l’URSS.  Cela a été un des grands thèmes de la
résistance, mais surtout de la collaboration contre le communisme et contre le
capitalisme anglo saxon.
En conclusion, la guerre de l’URSS contre l’Allemagne fut évidemment une guerre
internationale en raison de la « grande alliance » contre l’Axe ( URSS, EU, GB ). En sens
inverse, la guerre de l’Allemagne contre l’URSS fut elle aussi une guerre internationale :
- du fait de la participation des partenaires italiens, slovaques, finlandais, hongrois,
roumains, croates ;
- du fait également de l’envoi par l’Espagne de Franco de la légion de Azul.
- du fait de l’enrôlement de volontaires ou d’auxiliaires étrangers dans la WaffenSS
et dans la Wehrmacht. En tout l’armée allemande a enrôlée 800 000 ressortissants
étrangers.
 La question des volontaires issus de l’URSS fut cruciale. Il y a eu bcp de volontaires
ou d’auxiliaires soviétiques dans les forces allemandes, militaires et paramilitaires (
600 000 ). Il y avait des russes et aussi des non russes. En septembre 1942, l’un des
généraux soviétiques les plus connus, le général Vlassov fut capturé et il proposa de
collaborer ac les allemands. Ce n’est qu’en novembre 1944 que Vlassov a reçu l’autorisation
de former « une armée russe de libération » et de créer « un comité de libération des peuples
de Russie » dc tourné contre le régime soviétique.
D. Le génocide juif
1). Pendant le temps de paix : Le NSDAP avait inscrit dans son programme l’exclusion
politique des juifs : ils seraient déchus de la citoyenneté allemande, révoqués de la
fonction publique et exclus de la presse. Au pouvoir, d’avril 1933 à octobre 1938, (les juifs
représentaient 0,8% de la pop allemande), on met en œuvre la phase de la discrimination et
de la ségrégation.  Cf Lois de Nuremberg qui interdisent tout mariage et rapports sexuels
entre juifs et allemands. L’objectif était de pousser les juifs à l’émigration vers la Palestine ou
bien et surtout à partir de 1935, soucieux de ménager les arabes on ne pousse plus à
l’émigration vers la Palestine mais on voulait que les juifs partent ailleurs.  On fait dc
comme si les juifs étaient un peuple étranger à la germanité, dont l’assimilation était
impossible. Cependant que les critères utilisés pour savoir qui est juif reposent sur la
confession des grands parents ( on combine donc la confession et l’hérédité ).
 En novembre 1938, arrive la phase de l’expropriation avec faible indemnisation ( pas
de spoliation, on nationalise les biens juifs mais les indemnisations étaient ridicules ). Cette
phase vise à accélérer l’émigration mais aussi vise à contribuer au financement du
réarmement.
 Avant la guerre, les juifs étaient donc privés de leurs droits, pas encore de leur vie. En
août 1939, les 2/3 des juifs ont quitté l’Allemagne.
2). L’entrée en guerre marque un tournant : en 1939 un décret secret d’octobre 1939
prévoit l’euthanasie des malades et des handicapés physiques et mentaux incurables. On
a appelé ce programme T4 qui était un programme eugénique, économique ( du fait de la
pénurie d’infirmières et de médecins pour les blessés de guerre ). Ce programme fut anti daté
au 1er septembre suggérant ainsi que le seuil de la guerre franchi, bcp de choses deviendrait
possibles, qui ne l’aurait pas été en temps de paix ( 70 000 tués ac ce programme T4 ). Ce
programme fut abandonné en août 1941 car on euthanasiait des grands blessés de
guerre, après des protestations publiques des églises confirmant encore l’influence de ces
dernières.  Hitler en tira la conclusion qu’il ne devait plus courir le risque de procéder
à des homicides collectifs planifiés en Allemagne même.
Effectivement les génocides collectifs planifiés par la suite se déroulèrent en Pologne
occupée et sous le sceau du secret et de la SS. La SS qui contrôlait la police via le RSHA,
avait pour mission de défendre le régime contre ses ennemis intérieurs et extérieurs en
Allemagne et dans l’Europe allemande. Ce rôle de police politique était redoublé par
l’idéologie de la SS et notamment son principe de dureté : obéissance inconditionnelle aux
ordres et volonté de dépasser les limites physiques, de dépasser les inhibitions morales dans
l’exercice de la violence ( l’homme SS devait être capable de tuer froidement ). Mais
également par sa vision des juifs comme peuple ennemi par nature.
En Allemagne, dès septembre 1939, un gd nombre d’opposants potentiels ou présumés
furent arrêtés et internés en camp de concentration. Par la suite dans chaque pays occupés,
décrêt nacht und neble ( nuit et brouillard ) appliqués à la fin d’octobre 1941, les
personnes convaincues, ou suspectes ou susceptibles de résistance purent être arrêtées et
transférées et garder au secret en Allemagne ( dc pas seulement dans leur propre pays ) au lieu
d’être internées et jugées sur place.
 De Septembre 1939 à l’hiver 1942 : le nbre de détenus en camp de concentration en
Allemagne est passé de 25 000 à 100 000, puis à 700 000 en 1945.
Côté soviétique, immédiatement après l’invasion allemande en juin 1941, le GUGB procéda
à l’exécution d’une grande partie des détenus politiques. Le MKVD ( ministère de
l’intérieur ) entrepris en Août 1941 le déplacement forcé ( on ne parle de déportation que
s’il s’agit de déplacement d’étrangers) des allemands de la Volga vers l’Asie centrale.
La conséquence de la guerre ( 1941-44 ) : au fur et à mesure de la conquête de l’Europe, des
millions de juifs tombèrent au pouvoir de l’Allemagne ( en cas d’occupation directe ou
indirecte en cas d’Etats fantoches ou partenaires de l’Allemagne ), cependant que les
possibilités d’occupation étaient bloquées.
 En décembre 1941, second tournant, l’échec devant Moscou et l’entrée en guerre des
EU marquent un second tournant à savoir que la guerre éclair cède à la guerre d’usure
avec mobilisation totale, et risque de défaite totale. Or, les gros contingents du judaïsme
européen se trouvaient précisément en Pologne, qui était l’espace de transit de la logistique
allemande vers le front russe. De plus, ces gros contingents se trouvaient en Biélorussie et en
Ukraine qui furent les principaux théâtres des combats entre allemands et russes, mais aussi
les théâtres de la terre brûlée.
En Europe, la spoliation des juifs ( on n’indemnise plus ) fit partie des procédés d’exploitation
des territoires occupés ou satellisés ( dc aspect de prédation économique ) aux fins de soutenir
l’effort économique de guerre allemand. De plus, les juifs servaient fréquemment d’otages
dans la lutte contre les partisans.
La pratique des otages : cette pratique a été décisive dans la montée aux extrêmes de la lutte
entre occupation et résistance à l’occupation. Elle visait à prévenir et à réprimer les attentats
perpétrés contre les troupes d’occupation, en appliquant un principe de responsabilité
pénale collective.  Au cas où un attentat serait commis contre des soldats allemands
sans que les auteurs soient appréhendés, les autorités militaires avertissaient la
population que un certain nombre de personnes condamnées, ou écrouées ( pas encore de
jugement ) pour des activités supposées clandestines, seraient exécutées. Par conséquent,
les détenus politiques assumaient donc en tant qu’otages, la responsabilité des actes de
violence commis à l’encontre de soldats allemands. Qui était d’otage ? Des listes d’otages
étaient constituées par les services de police allemands, avec pour chaque personne un dossier
exposant les griefs à charge. Mais pouvait être otages les personnes appartenant à certains
groupes :
- les communistes,
- les juifs
- des membres de l’administration de la police ou de la magistrature locale
En URSS, la liquidation des juifs fit partie à la fois de la campagne contre le judéobolchevisme, la préparation de la germanisation et de la lutte contre les partisans. Cette
liquidation en URSS fut essentiellement menée par les Ersatz grüppen ( 4 groupes mobiles
totalisant 4000 hommes ce qui est très peu ) au moyen de fusillades de masse : entre 41 et
44 ils ont tués 700 000 personnes. Pour le reste c’est dans le gouvernorat de Pologne qu’eu
lieu le génocide juif, à savoir la liquidation des juifs polonais, ainsi que les juifs d’URSS et
d’Europe qui y furent déportés en Pologne.
 Outre les épidémies de typhus, celle liquidation s’effectua au moyen de fusillade et au
moyen du gazage qui a eu lieu de février 1942 à octobre 1944.
Concernant les camps : en Allemagne et dans le reste de l’Europe, le camp de
concentration était un camp d’internement et de travail pour :
- les criminels de droit commun
- les opposants
- les résistants
- les civils suspects ( très larges )
En Pologne par contre, le camp de concentration était un camp d’internement pour
populations hostiles ( les juifs et les communistes étaient considérés comme tel ). C’était
un camp de travail forcé et un camp d’extermination. Mais ce qui est unique sont les
modalités. Avec le gazage dans les camps, l’homicide collectif se détache du théâtre
d’opération pour devenir :
- un procédé autonome, cad sans lien avec les opérations militaires,
- pour devenir un procédé administratif ( identifier, saisir et déporter les juifs ),
- pour devenir un procédé logistique ( acheminer les juifs dans les camps ),
- et enfin pour devenir un procédé industriel ( gazage, on construit des
installations particulières et on fait appel à des produits chimiques ).
 Question : Quand, où, comment, par qui et avec qui, les décisions de spolier les juifs, de
les exploiter comme main d’œuvre, de les évacuer à l’Est, et de les exterminés comme
peuple ennemi, furent-elles prisent et appliquées ?
Sur le dernier point ( l’extermination ), on a jamais trouvé d’ordres écrits. Par conséquent :
quand ? janvier 1942, où ? Dans un quartier de Berlin, qui ? Il est probable que Hitler
est donné un ordre oral à Himmler et que celui-ci se soit chargé de l’organisation du
judéocide, en mettant au point un langage codé, en mettant au point une méthode de
déportation, une méthode de liquidation physique efficace ( le gazage ), une méthode de
récupération des biens et surtout, en mettant au point une méthode de disparition des
corps ( la crémation ) afin de faire disparaître les traces. Cette entreprise de destruction des
juifs d’Europe « vengeresse » devait rester secrète ( pas d’ordres écrits, langage codé,
disparition des corps…).
Voir ouvrage Christian Destremo : ce que savaient les alliés, p.212, 213. Les britanniques
n’ont rien trouvé lorsqu’ils ont essayé de décrypter les codes allemands.
Examen : oral 10 min préparation, 10 min exposé
ANNEXES
PHILOSOPHIE DE LA GUERRE / ETUDES POLEMOLOGIQUES
Les « guerres en chaîne » en Europe (1914-1990)
En 1914 comme en 1939, l’Europe, avec ses Etats rivaux, est à mi-chemin. Elle est déjà une société
démocratique (au sens sociologique), scientifique, industrielle et urbaine, avec ses passions idéologiques ;
elle est encore une société aristocratique (au sens sociologique), religieuse, agraire et rurale, avec ses
inégalités sociales ; les mentalités traditionnelles et les mentalités modernes se cotoient. D’où les clivages
internes et le dynamisme externe qui les accompagne. L’Europe dispose déjà de moyens de mobilisation et de
destruction énormes ; elles disposent encore d’hommes jeunes en abondance habitués à une existence
rude. Bref, existe l’infrastructure démographique, économique, sociologique et psychologique qui rend
possible de « grandes guerres ». On ne se bat pas longtemps sans foi et sans chefs. Or, l’Europe a foi ,
non seulement en son droit de dominer et en son devoir de civiliser le reste du monde, mais en des religions séculières :
patrie et nationalisme, progrès et socialisme. Et en des temps d’exception, des chefs d’exception ne
tarderont pas à survenir.
Dans l’Europe mi-démocratique mi-aristocratique, mi-industrielle mi-agraire, un conflit local (austroserbe) se transforme, par le jeu des alliances, en guerre européenne. Celle-ci, par suite de l’échec de la
« guerre éclair » allemande à la fin de l’été 1914, devient une guerre d’usure à l’échelle continentale
avec blocus naval et course sous-marine, mobilisant la population, l’industrie, la propagande, la
science, entraînant l’intervention d’abord économique puis militaire des Etats-Unis. Le génocide
arménien est perpétré par l’Empire ottoman. La « guerre totale » finit par provoquer la révolution chez
la Puissance la plus arriérée économiquement et culturellement, mais la plus vaste géographiquement
et la plus nombreuse démographiquement (la Russie des Romanov). Les empires multinationaux
s’effondrent (Autriche-Hongrie, Empire ottoman). Mais la révolution échoue partout en Europe, notamment
en Allemagne et en Italie. Seule la Russie voit la victoire du PC à l’issue de la guerre civile. L’URSS se
constitue, ainsi que l’Internationale communiste. Puis l’Etat soviétique collectivise l’agriculture et se
lance dans l’industrialisation planifiée. L’Amérique continue de disposer du premier potentiel de
puissance du monde. Quant à l’Allemagne, même réduite, ruinée et désarmée, elle garde le premier
potentiel de puissance d’Europe.
La crise de 1929 fait sauter l’ordre, péniblement rétabli, des monnaies et des économies. Avec l’appui
des élites traditionnelles, un mouvement à la fois contre- et semi-révolutionnaire accède au pouvoir à
Berlin, désireux de restaurer la puissance militaire allemande, de réunir tous les Allemands puis de
conquérir un empire à l’Est. La France et la GB tentent de conserver leur statu quo hégémonique.
L’URSS aspire à la révolution mondiale. L’Europe se trouve déchirée par les conflits idéologiques
entre partis, ainsi que par les rivalités territoriales et commerciales entre Etats. La guerre éclate en
1939. Une nouvelle fois, l’échec de la « guerre éclair » allemande, fin automne 1941 puis fin été 1942,
mène à la guerre d’usure à l’échelle mondiale, à trois dimensions (terre, mer, air), avec mobilisation
totale. L’enjeu porte à la fois sur l’hégémonie en Europe : Allemands, Soviétiques ou Anglo-Saxons ? et sur l’identité
idéologique de l’Europe : fascisme, communisme ou libéralisme ? La guerre des Etats-nations, menée par des
combattants réguliers, avec le nationalisme comme idée principale, s’est muée en guerre des Etatscontinents, menée par des soldats et des partisans, avec « l’antifascisme » et « l’anticommunisme »
comme idées principales. D’où l’apparition d’une « guerre civile internationale » (entre résistants et
collaborateurs) se greffant sur la guerre interétatique (entre l’Axe et la « Grande Alliance »),
cependant que le génocide juif est perpétré par l’Allemagne.
En 1945, l’Allemagne comme le Japon sont écrasés. La France et même la GB sont surclassées.
L’Amérique et l’URSS acquièrent la prépondérance, la seconde édifiant un empire en Europe centrale.
La suprématie soviéto-américaine en 1945, non la domination allemande, a remplacé la suprématie anglo-française de 1919.
Le macro-conflit Est-Ouest qui s’ensuit en 1947, englobant de multiples conflits régionaux et locaux,
est à la fois idéologique et géopolitique : des superpuissances s’affrontent pour l’hégémonie mondiale
au nom du libéralisme ou du communisme. L’Allemagne est l’épicentre du conflit. Du côté soviétique,
il s’agira de rattraper les Etats-Unis au plan économique, de consolider et d’étendre le bloc
communiste, de « découpler » l’Europe de l’Ouest de l’Amérique du Nord pour la « finlandiser » à
terme, de soutenir la subversion au Sud. Du côté américain, il s’agira de maintenir la supériorité
économique sur l’URSS, d’endiguer le communisme en attendant le regime change à Moscou, de
construire un « ordre occidental » qui serait « mondialisé » à terme, d’empêcher la subversion au Sud.
Le point d’accord fondamental des deux côtés fut l’arms control nucléaire, afin de prévenir la guerre
nucléaire d’une part, la prolifération nucléaire d’autre part. En 1989-90, le dénouement de la « guerre
froide » sera la « victoire froide » de l’Ouest sur l’Est : en termes étatiques, la victoire des Etats-Unis
et de la RFA sur l’URSS.
La révolution selon Marx et Engels
Malgré leur division, l’ensemble des socialistes de 1830 à 1880 partagent la même révolte et
la même vision : la société est essentiellement clivée en deux classes, la minorité qui possède
sans travailler (la bourgeoisie), la majorité qui travaille sans posséder (le prolétariat). En
résulte une tension révolutionnaire latente. Marx (1818-1883) et Engels (1820-1895) pensent
ce clivage et cette tension de manière systématique. Leur œuvre se présente comme une
explication globale de l’histoire humaine. Elle analyse le présent : la société bourgeoise, sur la
base de la critique du capitalisme, dont Marx et Engels soulignent cependant qu’il a été un
facteur de progrès. Elle analyse le passé et le futur : l’histoire des sociétés (esclavagiste puis
féodale hier, capitaliste aujourd’hui, socialiste puis communiste demain), sur la base du
matérialisme dialectique (l’histoire comme développement des forces productives et des
contradictions sociales). Cette orientation à la fois économique (à partir de, et contre, Smith et
l’économie classique anglaise) et philosophico-historique (à partir de, et contre, Hegel et
l’idéalisme allemand) converge dans la théorie de la lutte des classes, moteur de l’histoire. Au
sens politique, celle-ci est à la fois nationale et transnationale : elle se déroule au sein de
chaque Etat ; elle substitue l’appartenance de classe et les oppositions de classe à
l’appartenance nationale et aux oppositions nationales. Les relations d’amitié ou d’hostilité
traversent les frontières.
Marx et Engels furent les théoriciens de la révolution. Celle-ci intervient lorsque le
développement de l’économie (l’évolution des modes de production) entre en contradiction
avec la structure de la société (avec la hiérarchie sociale). Les contradictions sociales sont à
elles seules insuffisantes à enclencher le processus révolutionnaire. Celui-ci requiert un parti
révolutionnaire, qui exprime une « conscience de classe » et qui agisse politiquement. Mais
l’activisme politique est prématuré lorsque les contradictions sociales font défaut. La
révolution socialiste doit intervenir après le développement du capitalisme, par le jeu de la
polarisation sociale d’une part : le clivage prolétariat/bourgeoisie, qui aura absorbé toutes les
autres classes du fait de l’extension du salariat et de la concentration du capital (« lois du
capitalisme »), de la rupture politique d’autre part : la prise légale ou insurrectionnelle du
pouvoir. La révolution prolétarienne a une justification universelle. Parce que le prolétariat
n’a rien -ni propriété, ni instruction, ni patrie, ni religion- et qu’il tend à absorber la quasitotalité des hommes, il a le droit de conduire une révolution totale. Les révolutions peuvent
n’être que partielles, tant qu’elles substituent la domination d’une classe à celle d’une autre :
ainsi des révolutions bourgeoises, qui substituent la domination de la bourgeoisie à celle de
l’aristocratie, en masquant cette domination derrière l’idéologie des « droits de l’homme ». La
révolution prolétarienne, elle, supprimera la propriété et la domination. Il y aura d’abord une
phase de transition : le socialisme, caractérisée par l’étatisation des moyens de production et
la « dictature du prolétariat ». Après cette phase, le dépérissement de l’Etat, du fait de
l’abolition de la division en classes, permettra de passer au communisme, stade final de
l’histoire, qui verra la réconciliation de l’humanité dans une nature maîtrisée.
Jusqu’en 1871, les socialistes européens, continuant à se référer à 1792, pensent que la France
est la patrie de la révolution : ils espèrent qu’un conflit entre une France républicaine d’une
part, les Puissances monarchiques d’autre part, déclenchera un processus révolutionnaire à
l’échelle du continent. Après la défaite de la France et l’écrasement de la Commune de Paris,
Marx et Engels tirent la conclusion du changement de l’équilibre des puissances : c’est
l’Allemagne qui doit devenir la patrie de la révolution. Les socialistes européens s’attendront
à ce que la révolution éclate d’abord dans ce pays*, qui aura de 1880 à 1933 le mouvement
ouvrier le plus puissant d’Europe. Or, en 1917, c’est en Russie que la révolution a éclaté : si
Février était conforme au schéma marxiste (la bourgeoisie renversant la monarchie et
l’aristocratie dans un pays pré-industriel), Octobre (la révolution prolétarienne dans un pays
n’ayant pas connu un développement du capitalisme) ne l’était pas. Lénine (1870-1924) était
convaincu que la révolution prolétarienne, commencée au point le plus faible du « système de
l’impérialisme », serait condamnée à terme si elle ne s’étendait pas aux peuples européens, et
Seule une minorité (Rosa Luxemburg) comprendra en 1905 que la révolution se déplaçait d’ouest en est, de
Berlin à St-Pétersbourg.
*
d’abord en Allemagne. Or, c’est là qu’elle échoua, brisée par l’alliance de l’armée et des
socialistes (SPD) au pouvoir.
L’échec de la révolution allemande (1918-23)
Lénine était persuadé que le sort du communisme se jouerait en Allemagne : la révolution
russe deviendrait européenne et marxiste à l’instant où la révolution éclaterait dans les pays
capitalistes avancés. La révolution en Russie avait semblé ouvrir la voie à la victoire
allemande au printemps 1918 ; la défaite allemande à l’automne semblait ouvrir la voie à la
révolution en Allemagne. La République avait été proclamée ; le Kaiser avait abdiqué ; 10000
conseils de soldats et d’ouvriers s’étaient constitués ; ceux de Berlin avaient élu un conseil
exécutif -équivalent du soviet de Petrograd- qui disputait le pouvoir au Conseil des
commissaires du peuple, i.e au gouvernement provisoire composé des chefs du SPD et de
l’USPD (créé en avril 17 à la suite de la scission d’avec le SPD dont la majorité continuait à
soutenir la guerre)*. Mais au contraire de l’USPD, le SPD ne voulait pas d’une révolution
sociale, en tout cas pas dans la violence ; il voulait une république démocratique et
parlementaire. Il s’appuya sur l’armée et les corps francs (ligues nationalistes) pour briser
l’extrême-gauche, dont les membres quittèrent le gouvernement ; il s’allia avec le Zentrum
catholique pour gouverner la République de Weimar. En janvier 1919, une assemblée
nationale constituante fut élue, qui élabora (à Weimar) une constitution et qui ne fut pas
dissoute. Elle donna naissance à une république démocratique et parlementaire. La
bourgeoisie allemande continua cependant de craindre une révolution. Le 1er janvier, avait été
fondé le parti communiste d’Allemagne (KPD), qui avait repris l’ancien programme de la
sociale-démocratie désormais gagnée au réformisme : l’abolition de la propriété privée des
moyens de production et de la société de classes. L’impression que la révolution avait échoué
de très peu, fut entretenue par le KPD. Celui-ci répétait que si le mouvement ouvrier n’avait
pas été divisé et « trahi » par le SPD, la révolution aurait réussi ; il répétait aussi qu’elle
vaincrait une prochaine fois si la classe ouvrière s’unissait derrière le KPD. C’est à cette tâche
qu’il se consacra : rassembler derrière lui la classe ouvrière en évinçant, en absorbant ou en
neutralisant le SPD. Début 1933, il semblait près du but.
Contrairement au SPD d’avant-guerre, le KPD devait regarder en direction d’un parti frère qui
dirigeait déjà un grand Etat. Si le KPD voulait devenir le « frère aîné » du parti bolchevik
conformément au schéma marxiste, il devait vaincre en Allemagne puis aider le parti russe.
Mais ce fut l’inverse. Le parti russe l’emporta dans la grande guerre civile russe ; la petite
guerre civile allemande vit la défaite du parti allemand. A la différence de la Russie, la
volonté de paix de la grande majorité n’était pas tournée contre le gouvernement, puisque
celui-ci avait signé l’armistice le 11 novembre. L’administration continua de fonctionner ;
l’armée fut ramenée en bon ordre dans le pays puis démobilisée. En Allemagne, au contraire
de la Russie, le gouvernement issu de la révolution républicaine s’entendit avec les forces
contre-révolutionnaires (administration, armée) pour étouffer toute révolution communiste.
Ebert et Noske s’appuyèrent sur les corps francs pour écraser les spartakistes : c’est comme si
Kerenski et Kornilov avaient agi de concert pour briser le parti bolchevik ! Les chefs
communistes allemands, Eisner, Liebknecht, Luxemburg, furent tués : c’est comme si Lénine,
Trotski et Staline avaient été tués en Russie ! Les corps francs réussirent ce que ne réussirent
pas les Blancs en Russie : vaincre la révolution. En novembre 1918, une République
polonaise avait été proclamée par Pilsudski à Varsovie et Dmowski à Paris. Du début 1919 à
la fin 1920, de sévères combats opposèrent la nouvelle Pologne à la Russie bolchevique. En
mai 1920, les Polonais, alliés aux nationalistes ukrainiens de Petlioura, s’emparèrent de Kiev*.
Mais en juin, les Russes reprenaient la ville et entamaient la contre-offensive. Celle-ci
renouvela le processus révolutionnaire : pour la première fois, l’Armée rouge franchit des
frontières internationales, en visant Berlin par-delà Varsovie* ; en même temps, le
Fin 1918, la révolution allemande en était à sa phase Kerenski : l’avènement de la démocratie parlementaire
avec Ebert ; début 1919, Liebknecht devait être le Lénine allemand : l’avènement de la dictature du prolétariat.
*
Pilsudski voulait recréer une grande fédération polono-lituano-ukrainienne de la Baltique à la mer Noire
(comme au XVIIème siècle).
*
Trotski voyait s’approcher le moment où les Germano-Russes livreraient ensemble aux Franco-Britanniques la
grande bataille du Rhin.
*
gouvernement de Lénine appelait les ouvriers à empêcher tout transport de matériels
militaires vers la Pologne. Mais le général Weygand, dépêché par la France, l’emporta sur la
Vistule, obligeant l’Armée rouge à battre en retraite fin août. Les bolcheviks avaient gagné en
Russie ; le MCI avait échoué en Europe (Allemagne, Italie, Hongrie...). Il échoua à nouveau
en 1923, dernière année convulsive de l’après-guerre mondiale.
La doctrine soviétique (marxiste-léniniste) de la guerre
Marx et Engels prévoyaient que, par le jeu du suffrage universel, le parti de la classe la plus
nombreuse -le parti socialiste- accèderait au pouvoir, s’en emparerait dans sa totalité et
mènerait la transformation révolutionnaire de la société. Mais cette prévision ne se réalisa pas.
Selon Trotski, « la révolution violente (devient) une nécessité parce que les exigences
immédiates de l’histoire ne (peuvent) pas être satisfaites par la démocratie parlementaire ».
L’originalité de Lénine est d’avoir combiné Marx et Engels, Clausewitz, Machiavel : la guerre
est la continuation de la lutte des classes par le moyen de la violence armée et l’instrument du
parti révolutionnaire utilisé en fonction de l’opportunité des circonstances. Le marxismeléninisme est pacifiste au niveau des finalités ; il ne l’est pas au niveau des moyens. La
pacification de l’humanité est un but ultime qui dépend de l’abolition de la division en
classes, donc de la propriété privée*, autrement dit, de la réalisation du socialisme universel. Il ne saurait y avoir
de paix sur la base de rapports d’exploitation ou de domination ; l’exploité ou le dominé a le
droit de se révolter ; il existe des guerres justes*. Pour abattre le capitalisme, donc instaurer les
conditions d’un nouveau « progrès de la civilisation », il n’est pas question de compter
uniquement sur des moyens pacifiques, légaux ou réguliers. « La solution n’est pas le
pacifisme, mais l’armement du prolétariat, afin de désarmer la bourgeoisie » (Lénine).
L’adhésion au pacifisme impliquerait de juger la guerre en soi, en référence à une éthique
transcendante (« tu ne tueras point »), donc en dehors de tout critère moyen/ fin et objectif/résultat.
Mais la guerre étant un moyen, elle doit être jugée par rapport au but et par rapport à
l’adéquation au but : il s’agit d’évaluer son efficacité. Le pacifisme limite les moyens mis à la
disposition du prolétariat ou des peuples colonisés pour renverser le capitalisme ou le colonialisme : il les
désarme objectivement. Aussi sert-il le conservatisme du statu quo ; c’est pourquoi il est qualifié de « théorie bourgeoise ». Le
MCI ne surestime pas le rôle de la violence, il n’en fait pas l’apologie*. Il veut le pouvoir, non
la guerre, et il utilise la guerre à cette fin, lorsque la résistance des forces contrerévolutionnaires empêche la révolution*.
L’importance de la réflexion sur la guerre dans le MCI a été historiquement amplifiée dans le
contexte de la naissance et de la croissance de l’URSS : la Première guerre mondiale, la
guerre civile, la Seconde Guerre mondiale, la guerre froide*. Après l’échec de l’exportation
armée de la révolution puis la « construction du socialisme » dans un seul pays, la doctrine de
l’inévitabilité de la guerre avec les Etats capitalistes fut remplacée par celle de la permanence
de l’antagonisme entre capitalisme et socialisme. Dans ce contexte, l’URSS a développé une
science et un art de la guerre spécifiques. La perception d’un monde divisé en deux systèmes
sociaux eut pour conséquence un examen approfondi des formes et des contenus de la
belligérance. La pratique soviétique était déterminée par référence à une doctrine écrite.
Celle-ci s’articulait sur un système d’interprétation de l’histoire fourni par le marxismeléninisme*. La doctrine soviétique de la guerre faisait partie du « matérialisme dialectique ».
L’histoire étant le développement des contradictions sociales, la guerre trouve son fondement
dans la division de la société en classes antagonistes. De l’état de paix à l’état de guerre, le
Pour obtenir la paix, il ne suffit pas de renoncer à la guerre, il faut s’attaquer à ses causes ; or, celles-ci procèdent de la division en classes,
elle-même due à l’appropriation privée des moyens de production.
*
« La valeur de la paix ne signifie pas que les marxistes-léninistes se prononcent pour la défense de n’importe quelle paix et soient prêts à
accepter pour elle n’importe quel compromis. Ils ne transigeront jamais avec leurs principes quand il s’agit par exemple d’une paix injuste
qui ne peut pas subsister éternellement et qui, tôt ou tard, sera inévitablement enfreinte par les classes et nations opprimées, comme elles en
ont pleinement le droit » (Marxisme-léninisme sur la guerre et l’armée, Moscou, Editions du progrès, 1976). Cf. Bertrand Lang : « Discours
soviétique sur la guerre », Stratégique, n°35, 3/1987, pp.25-76.
*
Il « s’efforce d’utiliser avant tout les moyens pacifiques pour transformer de façon révolutionnaire le régime politique ». Il « oriente les
masses vers la violence armée uniquement à condition qu’elle soit historiquement nécessaire, quand il n’y a pas d’autre issue pour
remporter le succès ».
*
Plus la bourgeoisie s’affaiblit du fait du développement des contradictions sociales, plus elle accroit sa résistance, passant de la démocratie
libérale à la dictature fasciste par exemple, et plus elle impose l’exigence de la lutte armée pour la briser.
*
Au poids de la guerre dans les théories et pratiques de Lénine, Staline, Tito, Mao, Ho Chi Minh, Castro -autant de leaders qui doivent leur
stature charismatique au fait qu’ils furent chefs de guerre- répond aussi le poids du CMI dans l’économie soviétique.
*
« La doctrine marxiste-léniniste de la guerre et de l’armée est une doctrine cohérente qui englobe les origines et l’essence de la guerre, son
caractère et ses types, les causes de son apparition, les lois et les facteurs qui commandent le déroulement et l’issue de la guerre, l’attitude à
son égard des différentes couches de la société, la nature sociale et la destination de l’armée ».
*
changement n’est pas la lutte des classes, mais l’emploi de la violence armée comme moyen
spécifique. La doctrine soviétique de la guerre est clausewitzienne. Elle partage avec la
doctrine occidentale moderne le même fondement de pensée : la guerre comme moyen
militaire au service d’une fin politique. Mais, étant marxiste, cette doctrine n’est pas centrée
sur l’Etat, elle est centrée sur la classe sociale donc sur le parti révolutionnaire : la guerre
n’est pas la continuation de la politique d’Etat (l’Etat comme auteur et l’intérêt de la nation
comme but), elle est la continuation de la politique du Parti (le Parti comme auteur et l’intérêt
de la révolution comme but). En même temps, « l’internationalisme prolétarien » exprime la
solidarité des forces « progressistes » mondiales.
Sur la base d’une société divisée en classes, l’Etat est dirigé par la classe dominante et sa
politique exprime les intérêts de celle-ci, ce qui peut l’amener à la confrontation avec les
intérêts d’autrui. « La guerre est avant tout la continuation de la politique intérieure, ellemême reflet de la structure de classe de la société ». Elle est aussi « la totalisation de la
politique », car ce sont les intérêts les plus importants qui doivent être attaqués ou défendus
par la violence armée. « Les buts politiques de la guerre concentrent... les buts politiques
essentiels des classes dominantes ». Comme la politique est lutte des classes et la guerre
instrument politique, la guerre est la manifestation violente de la lutte des classes, autrement
dit, l’exacerbation de la politique. « La guerre est le plus grand révélateur de toutes les
contradictions sociales... entre les classes ». Par son statut d’expression la plus totale de la
politique, la guerre non seulement regroupe l’utilisation des moyens qui lui sont propres -la
violence armée- mais assujettit à ses fins -la réalisation des buts politiques- tous les autres
moyens de la politique. C’est autour de la violence, en fonction des contraintes liées à son
emploi, qu’est organisée l’utilisation des moyens non violents. Bref, la guerre mobilise les
forces militaires, mais aussi économiques, morales et diplomatiques. C’est pourquoi la
direction de la guerre dépasse le cadre purement militaire. Faire la guerre revient à organiser
l’ensemble des moyens au service de la politique selon un plan qui s’articule autour de
l’emploi de la violence armée, cette dernière étant le « contenu principal de la guerre », son
« indice décisif ». La guerre est donc l’ensemble des activités en vue de l’utilisation optimum
de la violence armée pour le succès des buts essentiels de la politique, en tant que celle-ci est
l’expression des intérêts d’une classe.
La guerre étant une continuation de la politique, la classification des guerres s’effectue
suivant le type de politique qui les provoque. Les buts politiques déterminent la nature ou le
caractère de la guerre. L’histoire étant décrite comme un progrès à travers la lutte des classes,
les guerres ont un rôle qui est fonction de la dualité « progrès-réaction » : une guerre est
progressiste, donc juste, lorsqu’elle est faite par/ pour une classe sociale qui représente une
organisation sociale avancée ; inversement, une guerre est réactionnaire, donc injuste,
lorsqu’elle est faite par/pour une classe sociale qui représente une organisation sociale
dépassée ou arriérée. Toute classe se situe par rapport à une autre, dans le référentiel de
l’histoire. Il en va de même de la guerre. Ce positionnement relatif détermine le caractère
juste ou injuste de la guerre que mène chaque belligérant. « Selon son contenu social, son
orientation politique et ses buts, la violence peut présenter un caractère réactionnaire (et
injuste) ou au contraire un caractère révolutionnaire (et juste) ». Les guerres injustes sont la
continuation de la politique de la bourgeoisie visant à entraver le cours du développement
social ; les guerres justes sont la continuation de la politique du prolétariat visant à favoriser le
cours du développement social. Nécessairement, le prolétariat sera victorieux, car le
développement des forces productives condamne le capitalisme et rend objectivement
inéluctable le passage au socialisme. La guerre peut être « l’accoucheuse » de la révolution.
Elle ne doit pas être une « aventure » : « les partis communistes ne peuvent engager le combat
décisif pour le renversement du régime bourgeois qu’en présence d’une situation
révolutionnaire ». Tout est question d’opportunité : « pas un seul parti communiste ne peut
avoir une ligne stratégique juste s’il ne tient pas compte du rapport des force de classe à
l’échelle internationale ». Au contraire des maoïstes chinois, les Soviétiques admettaient la
possibilité de voies pacifiques vers le socialisme*.
« La lutte de classes comprend non seulement des rapports qui s’expriment sous forme de violence, mais également des rapports qui se
caractérisent par telles formes de collaboration et de compromis, aussi bien à l’intérieur de pays différents que dans l’arène internationale
entre systèmes sociaux opposés. Selon la situation internationale concrète et le rapport des forces de classe, l’antagonisme entre socialisme
et capitalisme se manifeste par des moyens pacifiques ou non » (V. Denissov).
*
La doctrine soviétique distinguait également les conflits armés d’après le type de belligérants.
Il y a les guerres entre systèmes sociaux opposés ; les guerres civiles entre prolétariat et
bourgeoisie ; les guerres de libération nationale entre peuples colonisés et Etats coloniaux ; les
guerres entre pays en développement ; les guerres entre Etats capitalistes. Evidemment, la
guerre pour la défense de la patrie soviétique est la plus juste des guerres *. Une guerre
mondiale entre systèmes sociaux opposés serait la plus intense des luttes de classes à l’échelle
internationale ; elle serait une guerre juste d’un côté, injuste de l’autre ; tous les moyens
seraient employés, y compris les armes nucléaires ; elle ne pourrait déboucher que sur la
disparition de l’un des deux systèmes. Les guerres civiles que mène le prolétariat contre la
bourgeoisie sont justes, de même que les guerres de libération nationale que mènent les
peuples colonisés contre les Etats coloniaux*. Quant aux deux autres types de guerre, la
justice est du côté des défenseurs et l’injustice, du côté des agresseurs. Le critère de
l’agression et de la légitime défense -le critère du droit international- ne vaut que pour ces
guerres là, pour lesquelles l’URSS (membre permanent du CSNU) serait prête à s’engager du
côté du droit. Pour les autres, joue le critère du « progrès » ou de la « réaction ». Les guerres
menées par/pour le socialisme peuvent être offensives aussi bien que défensives : elles restent
« justes »*. De même, le principe de non intervention ne joue que dans le monde capitaliste :
dans le monde socialiste, l’URSS a un droit d’intervention (« doctrine Brejnev », dite « de la souveraineté
limitée ») lorsque le socialisme est menacé, suivant l’idée que tout acquis du socialisme doit être
irréversible. Du moins jusqu’en 1988, date du tournant vers la « nouvelle pensée »
gorbatchévienne, l’Union Soviétique n’adhérait ainsi au droit international que sous réserve
de ses propres principes.
Le programme du NSDAP et la « constitution » de l’Allemagne nationale-socialiste
La structure du IIIème Reich s’exprime par un ensemble de lois fondamentales qui forment sa
« constitution », elle-même inspirée par le programme du NSDAP et ses 25 points.
Quel est le contenu de ces 25 points, considérés depuis 1921, date de leur adoption, comme la
charte intangible du mouvement ? 1) La politique étrangère et de défense est résumée dans les
points 1, 2, 3 et 22 : réunion de tous les Allemands en une seule Allemagne (point 1) ; égalité
des droits et abolition des traités de Versailles et de Saint-Germain (point 2) ; restitution des
colonies et revendication d’un « espace vital » (point 3) ; création d‘une armée nationale et
licenciement de l’armée de métier (point 22). 2) La conception de la nationalité et de la
citoyenneté est fixée dans les points 4, 5, 6 et 9 : seul peut être citoyen celui qui est de sang
allemand, à l’exclusion des Juifs (point 4) ; celui qui n’est pas citoyen doit être considéré
comme un étranger (point 5) ; seuls les citoyens jouissent des droits politiques et ont accès
aux emplois publics (point 6) ; tous les citoyens ont les mêmes droits et les mêmes devoirs
(point 9). 3) Le programme économique et social est fixé dans les points 7, 8, 10 à 17, 20 et
21 : l’Etat doit assurer du travail et des moyens d’existence aux citoyens (point 7) ; les
ressortissants étrangers doivent être expulsés et l’immigration stoppée (point 8) ; le premier
devoir du citoyen est de travailler et de servir la communauté (point 10) ; le revenu qui n’est
pas le produit du travail et le prêt à intérêts doivent être abolis (point 11), les bénéfices de
*
« Quand nous étions des représentants de la classe opprimée, nous étions les aversaires de principe (de la défense de la patrie dans la
guerre impérialiste). Devenus les représentants de la classe dominante qui a commencé à organiser le socialisme, nous exigeons de tous une
attitude sérieuse envers la défense du pays » (Lénine).
*
Marx et Engels interprétaient différemment l’impérialisme européen. S’ils critiquaient la rhétorique de la conquête au nom de la
civilisation, il ne doutait pas de la supériorité de la civilisation occidentale et du caractère « historiquement nécessaire » de cette conquête. En
détruisant les structures traditionnelles des sociétés afro-asiatiques et en permettant l’accès de ces sociétés stagnantes au monde moderne,
l’impérialisme européen favorise la « mondialisation » du capitalisme, donc de la lutte des classes et du passage au socialisme. S’il est
illégitime en tant que domination, il est légitime en tant que processus historique : il est le corollaire du processus d’« unification » du monde
sous une forme bourgeoise et européenne. Par la suite, ceux qui se réclameront du marxisme condamneront l’impérialisme et appelleront à
l’alliance entre le prolétariat européen et mouvements de libération nationale afro-asiatiques.
*
Le caractère « juste » d’une guerre offre une grande force morale aux combattants et à la population. L’URSS est dans son droit, elle
représente le progrès, elle vaincra : autant d’éléments qui doivent galvaniser les soldats et les citoyens de l’URSS, et leur faire accepter les
sacrifices que pourrait exiger la patrie socialiste. Le combattant soviétique est « héroïque » en double sens : il est prêt au sacrifice, il sert une
juste cause. La doctrine soviétique allie pro patria mori, « matérialisme historique » et universalisme. Mais elle n’est pas « chevaleresque » :
l’ennemi est un ennemi absolu, que l’on hait (« la formation morale et politique des soldats soviétiques développe en eux la haine de classe
pour l’ennemi ») et contre lequel la guerre totale est justifiée jusqu’à sa destruction totale (non pas extermination physique des populations
des Etats bourgeois, mais destruction de l’Etat bourgeois).
guerre confisqués (point 12), les trusts nationalisés (point 13) ; les salariés doivent participer
aux bénéfices des grandes entreprises (point 14) ; le régime des retraites doit être refondu
(point 15) ; une « classe moyenne saine » doit être constituée et les petites entreprises
soutenues (point 16) ; l’intérêt foncier et la spéculation immobilière doivent être supprimés, la
loi permettre l’expropriation sans indemnité du sol pour des buts d’intérêt public et une
réforme foncière mise en place (point 17) ; l’Etat doit promouvoir un nouveau système
d’instruction publique basée sur l’égalité des chances et le mérite (point 20) ; il doit protéger
la famille, la jeunesse et la santé publique (point 21). 4) La réforme du droit pénal, dans le
sens d’un renforcement de la répression, est prévue dans le point 18. 5) La reconstruction du
droit est envisagée dans le point 19 : le droit romain doit être remplacé par un droit commun
allemand. 6) La règlementation et le contrôle de la presse, des arts et de la littérature, sont
l’objet du point 23, qui stipule que les directeurs et collaborateurs des journaux allemands
doivent être de « sang allemand », que la presse « non allemande » ne doit paraître qu’avec
l’autorisation de l’Etat et ne doit pas être imprimé en allemand. 7) Le point 24 expose les
principes spirituels du national-socialisme : celui-ci défend un « christianisme positif » ; il
protège la liberté des confessions pour autant qu’elles ne menacent pas l’Etat et n’offensent
pas les sentiments de la race germanique ; il combat « l’esprit matérialiste juif ». 8) La
réforme de la structure de l’Etat dans un sens unitaire et corporatif est stipulée dans le point
25.
Le programme du NSDAP a été en partie réalisé et en partie dépassé par l’évolution politicojuridique des années 1933-1936. Ce sont essentiellement une quinzaine de lois fondamentales,
successivement adoptées et complétées, qui forment la « constitution » de l’Allemagne. 1) La
loi du 24 mars 1933 complétée par celle du 30 janvier 1934 et prorogée le 30 janvier 1937,
accorde au gouvernement du Reich le droit de légiférer. 2) Les lois du 31 mars et du 7 avril
1933, complétées par celles du 15 décembre 1933, du 30 janvier 1934, du 14 février 1934 et
du 30 janvier 1935, abolissent la structure fédérale de l’Etat et la remplacent par une structure
unitaire et centralisée (réalisation du point 25). 3) La loi du 7 avril 1933 puis celle du 26
janvier 1937 réorganisent la fonction publique allemande en garantissant sa fidélité au
national-socialisme. 4) L’Erbhofgesetz du 14 juin 1933 et la loi du 13 septembre sur la
Reichsnährstand (« corporation agro-alimentaire du Reich ») restructurent l’ensemble de la
paysannerie allemande (réalisation du point 17). 5) La loi du 14 juillet 1933 donne le droit au
gouvernement de consulter le peuple par référendum. 6) La loi du 14 juillet 1933 sur la
constitution de l’Eglise protestante et le Concordat du Reich avec le Saint-Siège du 20 juillet
organisent les rapports entre l’Etat et les Eglises (réalisation du point 24). 7) La loi du 14
juillet 1933 consacre le NSDAP comme parti unique et celle du 1er décembre garantit l’unité
de l’Etat et du Parti. 8) La loi sur la Chambre de Culture du Reich du 29 septembre 1933 et
celle sur les rédacteurs de presse du 4 octobre organisent et placent sous le contrôle de l’Etat
et du Parti l’ensemble des professions culturelles, artistiques et de presse (réalisation du point
23). 9) La loi sur l’Organisation du Travail national du 20 janvier 1934 et le réglement du 24
octobre sur le Front du Travail, complétés par la loi du 26 juin 1935 sur le Service du Travail,
fixent la structure corporative de la société et de l’économie allemandes (réalisation des points
7, 10, 14 et 25). 10) Les lois du 24 avril 1934, du 20 décembre 1934 et du 28 juin 1935,
assurent la protection pénale de l’Etat et du Parti, et modifient les principes mêmes du droit
pénal (réalisation du point 18). 11) La loi du 2 août 1934 réalise l’unité de la direction
politique au sommet de l’Etat en supprimant le dualisme du chef de l’Etat et du chef de
gouvernement, et en transférant au Chancelier les pouvoirs du Reichspräsident. 12) La loi du
16 mars 1935 rétablit le service militaire obligatoire et celle du 21 mai organise la nouvelle
Wehrmacht, dont le commandant suprême est le Führer (réalisation du point 22). 13) Faisant
suite à la loi du 14 juillet 1933 sur le retrait des naturalisations et la déchéance de la
nationalité allemande, les lois de Nuremberg du 15 septembre 1935, complétées par le
réglement du 14 novembre, définissent la nationalité et la citoyenneté allemandes, tout en
excluant les Juifs (réalisation des points 4, 5, 6, 8 et 9).
14) Après la loi sur la stérilisation
obligatoire du 14 juillet 1933, la loi sur la santé et le mariage du 18 octobre 1935 fixe les
principes eugéniques, moraux et raciaux de la législation allemande en matière sanitaire et
matrimoniale (réalisation du point 21). 15) La loi sur les Jeunesses Hitlériennes du 1er
décembre 1936 embrigade la jeunesse allemande dans les organisations nationales-socialistes
(réalisation des points 20 et 21).
La montée au pouvoir d’Hitler et l’édification de l’Etat national-socialiste (1923-1938)
Après le putsch du 9 novembre 1923, Hitler, d’agitateur local, devient une figure de la vie
politique nationale, et le parti national-socialiste (NSDAP) acquiert un prestige qu’il n’avait
pas auparavant. L’ère des coups d’Etat est close. C’est par le suffrage universel que le
NSDAP s’emparera du pouvoir, en restant sur le terrain de la légalité, non sans utiliser la
violence pour conquérir la rue. La légalité, obstinément suivie par Hitler, est l’arme qu’il faut
pour lutter contre la République, sans s’attirer l’hostilité de la Reichswehr. A l’issue de son
procès, Hitler est condamné à cinq ans de forteresse, pour haute trahison. Mais il est amnistié
par le gouvernement bavarois, le 20 décembre 1924. Pendant ses treize mois de détention, il
rédige Mein Kampf. Après sa libération, il procède, lentement, à la reconstitution d’un parti
miné par ses dissensions intérieures, dont la refondation a lieu le 27 février 1925. A la fin de
l’année, il compte 27000 membres, deux ans plus tard, 70000. Mais l’année 1928 est marquée
par le retour offensif des partis de gauche : aux élections législatives du 20 mai, les socialistes
(SPD) l’emportent avec 153 sièges, contre 73 aux nationaux-conservateurs (DNVP), 62 au
Centre catholique (Zentrum), 54 aux communistes (KPD) et 12 seulement au NSDAP. En
juin, le Chancelier Marx (Zentrum) est remplacé par Müller (SPD), assisté par Severing et
Hilferding ; le général Groener, qui a succédé depuis le 20 janvier à Gessler, conserve son
poste de ministre de la Reichswehr, et Stresemann, celui de ministre des Affaires étrangères.
Devant l’échec manifeste du NSDAP, les partis de gauche se rassurent : l’interdiction de
parler en public promulguée contre Hitler est levée en Prusse le 28 septembre 1928 (elle l’a
été en Bavière quelques temps auparavant). Mais l’ère de prospérité factice inaugurée en 1924
par la création du Rentenmark touche à sa fin. Dès l’été 1929, le chômage passe à 1,2 million,
et à la recrudescence de l’agitation ouvrière s’ajoute la révolte des paysans de l’Allemagne du
Nord.
1) La campagne référendaire contre le plan Young La Grande Dépression de novembre
1929 emporte l’économie allemande dans la tourmente. C’est à nouveau la ruine des classes
moyennes avec son cortège de faillites, de misère, de troubles sociaux. Le chômage passe de
1,2 million à l’été 1929 à 3,2 à l’hiver 1930, puis 4,8 à l’hiver 1931, et 6,3 à l’hiver 1933. La
paysannerie est ruinée et écrasée sous le poids de ses dettes. Le mécontentement général
profitera au KPD et, plus encore, au NSDAP. Pour l’heure, en 1929, c’est le Stahlhelm, dirigé
par Seldte et Düsterberg, et le DNVP, emmené par Hugenberg, qui entrent en lice. Président
du conseil d’administration des aciéries Krupp, Hugenberg est l’un des plus importants
patrons de presse, et il possède l’UFA, la plus importante compagnie cinématographique.
Disposant de moyens publicitaires considérables, il s’en sert pour réaliser un programme
politique qui n’est pas sans analogie avec celui du NSDAP : renverser la République, abattre
la gauche, réviser le Traité de Versailles. Il décide de lancer un référendum d’initiative
populaire contre le plan Young relatif aux réparations allemandes. Il demande à Hitler de lui
prêter son concours. Malgré la désapprobation de l’aile gauche du parti emmenée par Strasser,
celui-ci accepte, désireux de profiter des énormes moyens de diffusion d’Hugenberg. Le
« comité national » réunissant Stahlhelm, DNVP, Ligue pangermaniste (L. Class) et NSDAP,
lance le 4 août 1929 un appel public en faveur d’une votation contre le plan Young. Le 25
novembre, la pétition obtient les voix requises à l’établissement du référendum. Le 22
décembre, celui-ci recueille 6 millions de voix sur 42 millions d’inscrits, soit 14% au lieu des
50% nécessaires. Le plan sur les réparations pourra alors être adopté par le Reichstag. Mais
les adhérents affluent au NSDAP, qui compte 176000 membres à la fin de l’année. Il en
comptera 806000 à la fin de 1931. La campagne référendaire a véritablement lancé le
mouvement national-socialiste. Dès janvier 1930, se pose le problème de la participation des
nazis au gouvernement de nombreux Pays ainsi qu’à Dantzig.
2) La période Brüning Le 27 mars 1930, le Cabinet Müller est renversé. La Chancellerie
Brüning commence (mars 1930-mai 1932). Son histoire se divise en trois phases articulées
autour de la dissolution du Reichstag (septembre 1930), puis de la présentation de la
démission de son premier Cabinet au Président Hindenburg qui le charge immédiatement d’en
former un second (octobre 1931). Ne disposant pas d’un soutien parlementaire suffisant,
Brüning tente de faire face à la crise financière et à la montée du chômage à coup de décretslois. Mais il doit rapidement faire face au refus du Reichstag de voter son programme de
déflation. Faisant alors usage de l’article 48, il promulgue par décret les impôts nécessaires à
l’équilibre du budget. Une seconde fois, le Reichstag s’oppose en exigeant le retrait de ces
mesures. Ne pouvant sortir de l’impasse, Brüning demande alors au Président de dissoudre
l’Assemblée. Les élections sont fixées au 14 septembre. Elles marquent un triomphe du
NSDAP et le début de la fin pour la République. Le parti national-socialiste devient le second
parti politique du Reichstag : il passe de 800000 voix à 6,5 millions et de 12 sièges à 107 ; le
SPD en obtient 143 (-10), le Zentrum, 68 (+6), le KPD, 76 (+22), le DNVP, 41 (-31). Durant
l’année 1931, l’opposition nationale, groupée après le 11 octobre dans le « Front de
Harzburg », ne cesse de s’opposer au Cabinet présidentiel Brüning, en exigeant l’abrogation
des décrets-lois et la dissolution du Reichstag, ainsi qu’au gouvernement socialiste prussien
Braun-Severing.
Le Cabinet Brüning est renversé fin octobre 1931, après la constitution du « Front de
Harzburg ». Mais le Président lui conserve sa confiance, puisqu’il lui demande aussitôt de
former un nouveau gouvernement. Néanmoins, 1932 s’ouvre sous de sombres auspices. A la
catastrophe économique et sociale et à la banqueroute financière vient s’ajouter, pour le
Chancelier, un nouveau motif d’inquiétude : le septennat du maréchal Hindenburg touche à sa
fin et il va falloir procéder à des élections présidentielles. C’est en vain que Brüning demande
à Hitler (chef du second parti au Reichstag) que le mandat du Président soit renouvelé par un
simple vote de l’Assemblée (selon la procédure de révision constitutionnelle). Hitler réclame
au contraire ces élections et exige que le Chancelier lui cède la place s’il n’est plus à même de
gouverner. Le 15 février 1932, le Maréchal annonce officiellement qu’il repose sa
candidature. Mais alors qu’il était en 1925 le candidat des partis de droite, il est soutenu cette
fois-ci par le SPD et le Zentrum, qu’il abhorre ! Les milieux conservateurs hésitent d’abord à
prendre position, puis le DNVP et le Stahlhelm annoncent qu’ils voteront contre lui, qu’ils
formeront un « bloc de combat noir-blanc-rouge » et que leur candidat sera Düsterberg. Après
avoir lui aussi hésité à affronter le Président sortant, Hitler engage à son tour la bataille
électorale. Hindenburg recueille 18,5 millions de voix (49,6%), Hitler, 11,3 (30,1%),
Thaelmann (KPD), près de 5 (13,2%), Düsterberg, 2,5 (7%). Quelques jours plus tard, le
Chancelier ordonne la fermeture des permanences SA. Le 10 avril, jour du second tour,
Hindenburg est élu avec 19,3 millions de voix (53%), Hitler en recueille 13,4 (36,8%) et
Thaelmann, 3,7 (10,2%).
Lorsque le gouvernement apprend qu’Hitler a obtenu 13 millions ½ de suffrages, il prend
conscience de l’ampleur du danger. La seule manière de l’empêcher d’accéder au pouvoir est
de briser son parti. Le général Groener, qui cumule les fonctions de ministre de la Reichswehr
et de ministre de l’Intérieur, se charge de lui porter le coup de grâce. Le 13 avril, sous la
pression du gouvernement socialiste prussien et d’autres Pays, il publie un Décret pour la
sauvegarde de l’Etat qui prescrit la dissolution immédiate des SA. Furieux, Röhm parle de
marcher sur Berlin ; Hitler doit user de toute son autorité pour l’en retenir. Le projet de
Groener fera long feu. Schleicher, alors secrétaire d’Etat au ministère de la Reichswehr, fait
savoir à Hitler qu’il s’est désolidarisé de son ministre, et Hindenburg demande à ce dernier
d’appliquer à la Reichsbanner le même traitement qu’aux SA. Groener est stupéfait par la
demande du Maréchal : la Reichsbanner n’a-t’elle pas soutenu sa candidature (pour faire
barrage à Hitler) ? Quelle commune mesure peut-il y avoir entre l’organisation d’Hörsing, qui
s’emploie à défendre le régime, et l’organisation de Röhm, qui s’efforce de le renverser ?
Aussi refuse-t’il de souscrire à la demande du Président. Plus encore, il publie un nouveau
décret qui vise, cette fois, le Stahlhelm, auquel les généraux sont résolus à ne pas laisser
toucher. Le 12 mai, malgré le soutien de Brüning et bien que le Reichstag ait repoussé une
motion de censure par 287 voix contre 257 (« droite nationale »+KPD), Groener est contraint
de donner sa démission, sous la pression du corps des officiers. Quinze jours plus tard,
démissionne à son tour Brüning, qui n’a pas de majorité au Reichstag et qui n’a plus la
confiance du Reichspräsident. Groener est remplacé par Schleicher et Brüning, par Papen, qui
lèvent le décret d’interdiction des SA. Le problème des SA a donc provoqué un conflit décisif
au sein du corps des officiers, entre Groener, qui leur est hostile, et Schleicher, qui refuse leur
dissolution. La tendance Schleicher l’a emporté.
3) La période Papen Le gouvernement Papen est un gouvernement présidentiel en ce sens
qu’il s’appuie exclusivement sur l’autorité du maréchal Hindenburg et sur l’article 48. Avec
ce « Cabinet de barons », c’est le DNVP qui accède au pouvoir. Brüning avait traité les
nationaux-socialistes comme des révolutionnaires, qu’on écarte de l’armée et de
l’administration, dont on dissout les formations, auxquels on interdit le port de l’uniforme et
les manifestations sur la voie publique. Selon les nouveaux dirigeants, c’est là une erreur ; ce
qu’il faut, c’est non plus barrer la route au NSDAP, mais l’intégrer à la politique allemande,
l’associer à l’exercice du pouvoir en le mettant au pied du mur. Schleicher est « l’homme
fort » du nouveau Cabinet. Il entend : primo, canaliser les forces du national-socialisme pour
les mettre au service de l’Etat, en obtenant la participation du NSDAP au gouvernement et
celle des SA à la protection des frontières orientales ; secundo, aligner le gouvernement de la
Prusse sur celui du Reich, d’où le « coup d’Etat » du 20 juillet 1932, qui met fin, avec l’appui
du NSDAP, au gouvernement socialiste Braun-Severing, remplacé par un commissariat du
Reich dirigé par Papen, qui sera à moitié désavoué par l’arrêt de la Cour constitutionnelle de
Leipzig du 25 octobre.
Hitler, dont les 107 députés peuvent s’opposer à l’investiture du nouveau gouvernement,
n’accepte sa création qu’à deux conditions : primo, Papen dissoudra le Reichstag et procédera
à de nouvelles élections ; secundo, il retirera le décret interdisant les SA. Sur ces deux points,
Papen accepte de donner satisfaction à Hitler, puisqu’ils vont dans le sens de la politique
d’« intégration » souhaitée du NSDAP. Le 4 juin, l’Assemblée est dissoute et les élections
fixées au 31 juillet. Le 15 juin, les mesures d’interdiction sont annulées. De véritables
combats de rues éclatent entre SA et communistes. Dix jours après le « coup d’Etat » contre la
Prusse, les élections législatives marquent un nouveau triomphe du NSDAP, qui remporte 230
mandats et devient le premier parti du Reichstag ; le SPD recueille 133 sièges (-10), le KPD,
89 (+13), le Zentrum, 70 (+2), le DNVP, 40 (-1). Avec ses 13,7 millions d’électeurs, ses 1,2
million d’adhérents et ses 500000 SA et SS, Hitler est aux portes de la Chancellerie. Le 13
août, il est reçu par Papen qui lui propose le poste de vice-Chancelier : il s’agit de donner aux
nationaux-socialistes quelques portefeuilles de second plan, de les atteler au Cabinet, mais
sans leur donner la direction des affaires, qui devra rester entre les mains des conservateurs.
Hitler rejette ce compromis défavorable. C’est le premier échec de Schleicher dans sa
tentative d’intégrer le parti en l’associant au gouvernement. Un deuxième entretien a lieu
entre Hindenburg et Hitler ; étant le chef du plus important groupe parlementaire, celui-ci
réclame le droit de former le nouveau Cabinet, mais le Maréchal refuse de lui donner
satisfaction. Est alors rompu le « Front de Harzburg » que la lutte pour la présidence avait
déjà altéré, mais que l’avènement de Papen, en mai, avait paru ressouder. Le duel qui
s’engage entre les nationaux-socialistes et les conservateurs se poursuivra jusqu’à la défaite
complète de ces derniers (au printemps 1933). Le 12 septembre, s’ouvre une séance
mémorable au Reichstag : l’Assemblée, présidée par Goering, est décidée à renverser Papen ;
lorsque ce dernier dépose le décret présidentiel portant dissolution (préventive) du Reichstag,
le n°2 du NSDAP, se dressant en défenseur des droits du Parlement, refuse de lire le décret
avant la fin du scrutin qu’il déclare commencé ; ce scrutin est défavorable au gouvernement
puisque le Cabinet est mis en minorité par 513 voix contre 32 ! Mais celui-ci ne se soucie pas
du vote, ni ne donne sa démission, puisque le Reichstag est déjà dissous.
Une nouvelle campagne électorale commence donc, cependant que la grève dans les
compagnies de transports de Berlin, soutenue par les communistes et les nationaux-socialistes,
prend une tournure insurrectionnelle. Le résultat des élections législatives confirme les
prévisions du Chancelier sur la lassitude des électeurs et l’essoufflement du NSDAP, dont les
caisses sont vides. Il perd deux millions de voix et régresse de 230 à 196 mandats (il reste le
premier parti du Reichstag) ; le DNVP, lui, passe de 40 à 62 sièges, le Zentrum en obtient 76
(+6), le SPD, 121 (-12), le KPD, 100 (+11). A gauche, on mesure l’érosion du parti socialiste
(de 153 sièges en 1928 à 121 en 1932) et la montée du parti communiste (de 54 à 100).
Malgré les progrès du DNVP, Papen reste sans majorité parlementaire, puisqu’il ne peut
compter sur le NSDAP. Le 17 novembre, il remet sa démission au Président. Le 21,
Hindenburg se tourne une nouvelle fois vers Hitler et lui propose de former un nouveau
gouvernement, avec le DNVP en position de force. Celui-ci décline encore la proposition.
4) De Schleicher à Hitler Le 1er décembre, le Maréchal décide de confier la formation d’un
nouveau Cabinet au général Schleicher, qui conserve le portefeuille de la Reichswehr. Jusquelà à l’arrière-plan, ce personnage accède au-devant de la scène. Sa position exceptionnelle,
tout au long de la République, tient à ce qu’il est placé à l’intersection de la Reichswehr et du
Cabinet, position devenue officielle en 1929 lorsque le Chancelier Müller le nomme secrétaire
d’Etat au ministère. A ce point stratégique de la vie politique allemande, qui lui a permis de
faire tomber Groener puis Brüning, il sert de trait d’union entre l’armée et le gouvernement,
entre le gouvernement et la présidence. Toutefois, il sait que le pouvoir se trouve dans les
masses. Aussi cherche-t’il à négocier avec les syndicats socialistes et chrétiens, et à entraîner
la gauche nationale-socialiste auprès de lui, ce qui précipiterait la chute du parti. Mais il reste
isolé. Après avoir échoué à intégrer le NSDAP, il échoue à le faire éclater et à attirer la frange
du parti emmenée par Strasser (la défection de ce dernier n’entraîne pas la scission espérée du
mouvement). A son tour, il voit se nouer des intrigues contre lui.
Le 4 janvier 1933, Papen et Hitler s’entendent pour dresser les grandes lignes d’un nouveau
ministère. Cette fois-ci, l’ancien Chancelier accorde au chef du NSDAP ce qu’il lui avait
refusé six mois plus tôt : Hitler sera Chancelier et Papen, vice-Chancelier. De son côté,
Schleicher entend constituer un Cabinet de « front populaire », avec Strasser vice-Chancelier,
qui s’appuierait sur l’aile gauche du NSDAP et sur certains éléments du SPD ; le Reichstag
serait dissous, les SA interdits -il reprend, trop tard, le projet de Groener !- et Hitler écrasé
dans la prochaine bataille électorale, car Strasser présenterait ses propres listes. Mais
Hindenburg ne montre aucun empressement à entrer dans ces vues, d’autant moins que Papen
lui propose la formation d’un Cabinet de « concentration nationale », majoritairement
conservateur et DNVP, qui n’aurait pas besoin des socialistes et pourrait gouverner sans
dissoudre l’Assemblée. Le 15 janvier, des élections ont lieu dans le petit Pays de Lippe : les
nationaux-socialistes recueillent près de 40% des suffrages et enlèvent 9 sièges sur 21, dans
une Diète où ils n’en possédaient jusqu’alors aucun. Pour Hindenburg, c’est sûr, il n’y a pas
de désagrégation du NSDAP. Schleicher a échoué ; Strasser n’est d’aucune utilité. L’agitation
sociale, avec la grande misère qui règne en Allemagne, prend une tournure extrêmement
grave, en janvier, d’autant plus qu’elle s’accompagne d’une sorte de divorce entre l’armée et
la police. La première est soumise à l’autorité du ministre de la Reichswehr et du
Reichspräsident ; la seconde dépend des Pays, qui sont en majorité socialistes ou
SPD/Zentrum, et qui sont hostiles au gouvernement central depuis qu’il a nommé un
commissariat en Prusse ; il y a donc une dangereuse opposition entre le Reich et les Länder.
Le Chancelier joue alors son va-tout : il demande au Président de dissoudre le Reichstag,
d’interdire le KPD et le NSDAP, d’instaurer la dictature militaire. Mais le Maréchal refuse : la
dictature militaire équivaudrait à un putsch qui serait brisé par la grève générale. Comment
gouverner sans l’appui des masses, c’est-à-dire sans l’appui, soit du NSDAP, soit du SPD ?
Rejeté par la droite comme par la gauche, n’ayant plus la confiance du Président, ne pouvant
ni dominer ni dissoudre le Reichstag, Schleicher finit par donner sa démission, le 28 janvier.
Le 30, le Président nomme Hitler Chancelier. Le nouveau gouvernement ne comprend que
deux autres nationaux-socialistes : Goering, ministre du Reich sans portefeuille et
commissaire-adjoint pour le ministère de l’Intérieur de Prusse ; Frick, ministre de l’Intérieur
du Reich. Le reste du Cabinet est composé de la manière suivante : Papen, vice-Chancelier et
commissaire du Reich en Prusse ; Blomberg, Reichswehr ; Neurath, Affaires étrangères ;
Gurtner, Justice ; Krosigk, Finances ; Rübenach, Postes et Transports ; Seldte, Travail ;
Hugenberg, Economie et Agriculture. Avec cette « coalition des droites », Hindenburg croit
avoir constitué un Cabinet d’union nationale et Papen pense tenir Hitler. Il s’agit en vérité
d’un changement révolutionnaire.
5) Du 30 janvier au 23 mars 1933 La première conquête du Reich -l’accès au pouvoir- s’est
faite de l’extérieur pendant quatorze ans ; la seconde -l’élimination de toute opposition
politique et l’édification du pouvoir total- se fera de l’intérieur en six mois. L’évolution vers
le Führerstaat peut se diviser en trois étapes : 1) l’accroissement des pouvoirs du
gouvernement de « concentration nationale » et la mise hors de combat des partis de gauche
grâce à l’article 48 (du 30 janvier au 23 mars 1933) ; 2) la liquidation de l’Etat de droit fédéral
et l’instauration de l’Etat unitaire à parti unique grâce à la loi des pleins pouvoirs voté par le
nouveau Reichstag (du 24 mars au 14 juillet 1933) ; 3) l’institutionnalisation du Führerstaat
(du 15 juillet au 2 août 1934), qui passe par la purge des SA. Tous les éléments structurels de
l’Etat de droit fédéral, démocratique et parlementaire weimarien ont été supprimés :
suspension des droits fondamentaux (décret-loi du 28 février 1933), abolition de la séparation
des pouvoirs (loi d’habilitation du 24 mars 1933), liquidation du pluralisme politique (décrets
de mai, juin, juillet 1933, lois du 14 juillet et du 1er décembre 1933) et social (lois du 2 mai
1933 et du 20 janvier 1934), abolition du dualisme Président/Chancelier (loi du 2 août 1934),
suppression du fédéralisme et fusion administrative des Pays et du Reich (lois du 31 mars et
du 7 avril 1933, du 30 janvier et du 14 février 1934).
« L’encadrement » des nationaux-socialistes semblait réussi. Mis à part Goering et Frick, tous
les ministères et secrétariats d’Etat -armée, diplomatie, justice, finances, économie- étaient
aux mains de conservateurs ou de membres du DNVP, cependant que dans la rue le Stahlhelm
faisait contrepoids aux SA. Aussi les partis de gauche et du centre, dans l’opposition au
gouvernement du Reich mais qui tenaient la plupart des Länder, virent en Hitler l’instrument
et l’otage des élites traditionnelles, et dans ces dernières les véritables vainqueurs du 30
janvier. Elles acceptaient Hitler comme Chancelier, elles lui refusaient cependant les leviers
de commande, tout en s’assurant la possibilité de réprimer la gauche. Mais en quelques
semaines, le rapport des forces au sein de la « coalition des droites » fut renversé. Dès le 31
janvier, le nouveau Chancelier exige la dissolution du Reichstag, qu’il obtient du Président le
1er février, grâce à l’appui de Papen et d’Hugenberg. La promulgation du décret de
dissolution et la fixation des élections pour le 5 mars constituent un premier succès pour
Hitler, car ces élections ne doivent pas seulement neutraliser la gauche et le Zentrum, comme
l’espère le DNVP, mais désigner ceux qui au sein de la coalition gouvernementale disposent
du pouvoir réel. Au-delà, il s’agit de permettre au Chancelier de se faire accorder les pleins
pouvoirs. Parallèlement, un nouveau commissariat du Reich s’est constitué en Prusse, avec
Papen, Hugenberg, Popitz et Goering. Mais il ne dispose pas non plus d’une majorité à la
Diète et il se heurte à l’opposition des partis de gauche et du centre. Pour modifier le rapport
des forces, il décide le 5 février de dissoudre le Landtag et les Diètes provinciales (les
élections sont fixées, elles aussi, au 5 mars). Puis, le 6 février, Papen obtient d’Hindenburg un
décret-loi transférant au commissariat toutes les attributions dont disposait encore l’ancien
gouvernement Braun-Severing, qui restait le gouvernement légal en vertu de l’arrêt de la Cour
de Leipzig du 25 octobre 1932. Face à ce nouveau « coup d’Etat », les socialistes en appellent
une nouvelle fois à la Cour constitutionnelle, mais la lenteur de la procédure et la rapidité de
la Gleichschaltung rendront inutile l’action en justice.
Légalité, propagande et terreur se combinèrent dans la « révolution nationale », à la fois
« destruction du marxisme », renversement de la démocratie libérale et abolition du
fédéralisme, avec le soutien des élites traditionnelles et de larges fractions populaires.
L’utilisation révolutionnaire de l’article 48 (décrets des 4, 17, 22 et 28 février, des 1er et 3
mars), l’exploitation des pouvoirs de la puissance publique, aussi bien la radio et la presse du
Reich que la police prussienne, la conquête de la rue par les SA et les « formations
auxiliaires » de la police, permettent d’écraser le parti communiste (arrestation des élus et
dirigeants, fermeture des locaux, interdiction des publications) et de neutraliser le parti
socialiste, sans que les syndicats ouvriers, subjugués, proclament la grève générale. La mise
sous contrôle de la Prusse à la suite du « coup d’Etat » du 20 juillet et l’attribution à Goering
du ministère de l’Intérieur prussien (l’un des ministères les plus puissants du Reich puisqu’il
contrôle les deux tiers de la police allemande) s’avèrent décisives pour la conquête du
pouvoir, puisque c’est à l’administration des Pays que revient l’application des décrets-lois,
dont la flexibilité des clauses offre de larges possibilités pour réduire au silence les
adversaires du gouvernement. Plus encore, le décret-loi du 28 février, pris au lendemain de
l’incendie du Reichstag, ne fait pas qu’instaurer l’état de siège et suspendre les droits
fondamentaux, il autorise le gouvernement du Reich à assumer les pouvoirs (notamment de
police) des autorités des Länder lorsqu’elles ne prennent pas « les mesures nécessaires au
rétablissement de la sécurité et de l’ordre publics ». Toutefois, jusqu’au 5 mars, les mesures
d’exception prises par le gouvernement de « concentration nationale », en vertu de la thèse de
la culpabilité communiste et de la co-responsabilité socialiste dans la préparation d’un
soulèvement révolutionnaire, restent encore comparables à celles décrétées par les premiers
gouvernements de la République, sous Ebert. Mais cette fois, elles ne visent plus à protéger la
République, mais à la renverser. Autre différence, de taille, les camps pour détenus politiques
constituent d’ores et déjà un domaine de la SA et de la SS (puis de la seule SS après le 30 juin
1934) soustrait à tout contrôle judiciaire.
Durant tout le mois de février, Hitler se consacre entièrement à la campagne électorale, où la
puissance de l’organisation de masse nationale-socialiste joue à plein. Le NSDAP recueille
17,3 millions de voix (44% des suffrages, avec un taux de participation de 88%) et 288 sièges
(211 au Landtag de Prusse), le DNVP, 3,1 millions de voix (8%) et 52 sièges (-10) ; chez les
partis adverses de la coalition gouvernementale, le Zentrum obtient 70 sièges (-6), le SPD,
118 (-3), le KPD, 81 (-19). Présentés comme une victoire du seul NSDAP et comme une
décision révolutionnaire, les résultats électoraux sont le vrai point de départ de la
Gleichschaltung. Les mandats communistes au Reichstag et au Landtag de Prusse devenus
vacants, le NSDAP y dispose de la majorité absolue sans l’appoint du DNVP. Faisant usage
de la violence et/ou des pouvoirs de police auxiliaire, les commandos SA occupent des
mairies, des syndicats, des journaux, etc. et procèdent à de nombreuses arrestations. En même
temps, l’union entre les formations de combat nationales-socialistes et la police transforme
cette dernière en instrument du parti. Les administrations, notamment en Prusse, se plient aux
exigences du NSDAP, c’est-à-dire à des démissions forcées et à de nouvelles occupations de
postes (qui profitent surtout, à vrai dire, aux éléments conservateurs). Usant de l’intimidation,
de la coercition et de la répression contre les partis de gauche et du centre, le mouvement
national-socialiste s’assure un monopole politique de facto, avant même la légalisation du
processus. Le 12 mars, un décret présidentiel supprime le drapeau noir-rouge-or de la
République de Weimar, remplacé par l’ancien emblème impérial. Le même jour, est créé le
ministère de l’Information et de la Propagande, sous la direction de Goebbels, qui entre ainsi
au gouvernement du Reich. L’une de ses premières tâches est d’organiser la « journée de
Potsdam » du 21, grande préparation psycho-politique de l’opinion préalable à l’adoption de
la loi des pleins pouvoirs.
6) Du 24 mars au 14 juillet 1933 La loi des pleins pouvoirs du 24 mars est décisive. En
donnant au gouvernement, c’est-à-dire au Chancelier, le droit de légiférer (y compris en
matière conventionnelle et constitutionnelle), elle remplace le régime des décrets-lois
présidentiels par la concentration des pouvoirs législatif et exécutif entre les mains d’Hitler.
Seul le SPD, largement hors de combat, refusa de voter la loi. Le KPD était entré dans la
clandestinité. Les partis de droite (dont de nombreux membres cherchaient à rejoindre le
NSDAP, qui accepta au début ces « convertis de mars ») et le Zentrum (séduit par le projet
d’un Concordat entre le Reich et le Vatican) votèrent oui. La loi du 24 mars et celle du 31, qui
autorise les gouvernements des Pays à légiférer sans la participation des Diètes, signifient
avant tout que les partis politiques ont perdu leur raison d’être. A l’interdiction pratique du
KPD succède sa liquidation légale le 26 mai. Un traitement identique est réservé à la
Reichsbanner et au SPD : de février à mai, il n’y a pas d’interdiction générale du parti
socialiste (ni du parti communiste), mais arrestation des cadres, occupation des bureaux et des
syndicats, émigration des dirigeants ; l’activité du SPD à l’étranger (publication du Neuer
Vorwäts à Prague le 18 juin) fournit le prétexte pour mettre hors la loi, le 22, un parti qualifié,
lui aussi, d’« ennemi de l’Etat et du peuple ». Reste un problème majeur pour le NSDAP : son
conflit avec le DNVP. Tandis que la tendance Seldte se rallie au mouvement nationalsocialiste et remet la direction du Stahlhelm à Hitler, la tendance Düsterberg rebaptise le
DNVP en Deustche National Front ; celui-ci ne peut toutefois empêcher la multiplication des
ralliements au NSDAP, ni l’intégration du Stahlhelm à la SA, ni la disparition du DNF luimême. Le Zentrum, dernier parti politique, est sacrifié par les responsables catholiques au
Concordat, dont les négociations se déroulent depuis avril à Rome ; il doit se résigner à
accepter sa dissolution le 5 juillet. Neutralisant la force d’opposition potentielle représentée
par le catholicisme face au national-socialisme, le Concordat du 20 juillet est un très grand
succès pour Hitler. Le 14 juillet, le gouvernement promulgue la « loi contre la reconstitution
des partis », qui fait du NSDAP la seule formation politique légale en Allemagne et punit
toute tentative de maintenir ou de fonder un autre parti politique. La suppression du
pluralisme politique a été précédée par l’épuration de la fonction publique (loi du 7 avril) et
par la dissolution des syndicats dans le Deutsche ArbeitsFront (loi du 2 mai).
7) Du 15 juillet 1933 au 2 août 1934 Le 6 juillet 1933, Hitler peut déclarer la révolution
terminée, puisque « le Parti est devenu l’Etat » (sic). Il se heurte désormais à Röhm et aux
chefs SA, qui réclament une seconde révolution, nationale-socialiste. Pour le Chancelier, il
faut maintenant stabiliser le régime, s’attaquer aux problèmes économiques et sociaux qui
accablent le peuple allemand, et réarmer. Pour cela, il a plus que jamais besoin de la
collaboration, non seulement de l’armée et de la fonction publique, mais aussi de la grande
industrie et de la grande propriété foncière, toutes deux hostiles à l’agitation qu’entretiennent
les miliciens bruns. Le dernier problème, de plus en plus aigu, porte donc sur la SA, plus
précisément sur les rapports entre la SA et la Reichswehr, qui a assisté passivement à la
« révolution nationale » mais qui conserve sa position centrale dans l’Etat.
Dès la loi sur la fonction publique, le 7 avril, Hitler et ses alliés conservateurs ont cherché à
limiter les tendances révolutionnaires du mouvement. Mais ils avaient encore besoin des SA
pour abattre les partis de gauche et du centre. Ce n’est plus le cas en juillet. En août, les
« formations auxiliaires » de la police sont licenciées. C’est le divorce entre les chemises
brunes et la police d’Etat. Le 25, un décret stipule que seuls les chefs de peloton SA auront le
droit de porter des armes. Plusieurs sections se mutinent et sont dissoutes. Des procès sont
intentés contre certains miliciens. Survient la décision du retrait de l’Allemagne de la SDN, le
14 octobre, suivi du référendum couplé avec l’élection d’un nouveau Reichstag (dissous ce
même 14 octobre). 95% du corps électoral se prononce en faveur du « oui » et 92% en faveur
de la liste unique nationale-socialiste (l’Assemblée ne comptera plus que 661 députés
nationaux-socialistes). Ces élections marquent la liquidation complète de l’Etat démocratique,
libéral et pluraliste. Auparavant, l’ensemble de la presse et des professions culturelles et
artistiques ont été placées sous le contrôle de l’Etat et du Parti (loi du 29 septembre). Par la loi
du 1er décembre sur l’unité de l’Etat et du Parti, Hitler pense intégrer les SA au nouvel Etat,
et pour marquer la place qui leur revient, il élève Röhm au rang de ministre du Reich. Mais sa
présence au gouvernement accentuera le conflit entre les forces conservatrices et les
tendances révolutionnaires du mouvement. Un désaccord violent dresse le général Blomberg,
ministre de la Reichswehr, contre le chef des chemises brunes. La question centrale qui se
pose, au vu de la tournure des négociations à Genève (à l’occasion desquelles Hitler a garanti
le caractère non militaire des SA et SS), du retrait de la SDN et du réarmement, est la
suivante. De quoi sera faite la future armée allemande et qui la commandera ? Röhm entend
incorporer en masse les SA à la Reichswehr et exige le poste de chef d’état-major ou de
ministre de la Guerre. Mais le corps des officiers refuse de telles revendications, au nom de
son autonomie et de sa cohésion. La Reichswehr entend rester l’unique force armée de l’Etat
et continuer à se tenir à l’écart des luttes politiques. Elle considère les SA comme une milice
de guerre civile. Or, cette milice n’a cessé de progresser. Forte de 450000 membres en janvier
1933, elle en compte 3 millions au printemps 1934, d’où une perte d’homogénéité et un
relâchement des liens avec le Parti. L’Etat-Major, de son côté, sous la direction du général
Fritsch, dresse les plans de la future armée nationale, qui excluent toute pénétration des SA ou
du Parti. Dans ce conflit, Hitler est du côté de Blomberg contre Röhm. Il entend maintenir
séparées la Reichswehr, force armée (apolitique) de l’Etat, et la SA, instrument (politique) du
Parti. Mais tant que le conflit avec les SA ne sera pas résolu, l’armée gardera ses distances
avec lui. Or, la succession d’Hindenburg, c’est-à-dire le transfert des pouvoirs présidentiels,
notamment le commandement de l’armée, est à l’ordre du jour.
Au printemps 1934, les intrigues de certains éléments de la droite conservatrice (Schleicher,
Papen) avec certains éléments de la gauche nationale-socialiste (Strasser, Röhm), l’agitation
des SA et les rumeurs de coup de force, inquiètent les milieux industriels et financiers, nuisent
à la politique étrangère de l’Allemagne et à la reconstruction de son armée. Hindenburg puis
Blomberg répètent à Hitler le même conseil que Mussolini : « mettre de l’ordre dans sa
maison ». Le 6 juin, il prescrit un mois de vacances aux SA, à dater du 1er juillet, avec
interdiction du port de l’uniforme, des défilés, des réunions et des manifestations. Isolé face à
la police de Goering, aux SS d’Himmler et à l’armée de Blomberg, Röhm a transformé les SA
en une puissance autonome, s’administrant elle-même, séparée de l’Etat et du Parti. Dans la
seconde quinzaine du mois, la tension monte et les avertissements d’Hitler, de Goering ou de
Hess deviennent plus péremptoires : il n’y aura ni restauration (à l’adresse de Schleicher ou de
Papen) ni seconde révolution (à l’adresse de Strasser ou de Röhm). Mais le problème est le
suivant. Si Röhm et son état-major n’exécutent pas l’ordre de congé, ils se mettront hors la loi
et ils provoqueront l’intervention de l’armée, mise en état d’alerte le 27 juin ; s’ils résistent,
l’Allemagne sombrera dans la guerre civile, avec les risques d’intervention étrangère dans un
pays encore désarmé. Le 30, Hitler se résout à l’action. Il se rend à Munich pour arrêter les
chefs SA. A Berlin, Goering étouffe l’insurrection puis entame la répression. Il y aura une
centaine de victimes en raison des réglements de compte personnels livrés sous le couvert de
la purge. Celle-ci, en mettant fin à toute « seconde révolution », a scellé dans le sang
l’alliance du NSDAP avec les élites traditionnelles, même si elle a aussi éliminé les éléments
conservateurs qui auraient voulu contrecarrer Hitler en s’appuyant opportunément sur Röhm
ou Strasser. Le 1er juillet, l’état de siège est levé. Le 3, le gouvernement adopte une loi dont
l’article unique légalise les mesures prises le 30 juin, en vertu du « droit de légitime défense
de l’Etat ». Après cette date, un décret sépare les SA et les SS, sous les ordres respectifs de
Lutze et d’Himmler. Hindenburg et Blomberg félicitent Hitler d’avoir écrasé les « menées
séditieuses ». La Reichswehr lui en témoignera reconnaissance, assure le ministre. Chose faite
après la mort du Maréchal. Avec l’accord de l’armée, la loi du 2 août 1934 fusionne les
fonctions de Président et de Chancelier. L’institutionnalisation du Führerstaat s’achève ainsi
à l’été 1934. Elle est ratifiée par le plébiscite du 19 : par 38,3 millions de voix (89% des
suffrages), le peuple allemand entérine la loi du 2 août. Sept mois plus tard, le 16 mars 1935,
Hitler rétablit la conscription, prétendument en réponse à la prolongation du service militaire
en France d’un an à deux ans, en promulguant la « loi sur la reconstruction de la
Wehrmacht ». La loi du 21 mai organise cette Wehrmacht, force armée et école militaire de la
nation, selon les principes suivants : le service militaire est pour tout citoyen allemand un
devoir et « un service d’honneur rendu au peuple allemand » ; le chef suprême de l’armée est
le Führer et Chancelier, investi de tous les droits régaliens, y compris le pouvoir de déclarer
la guerre et de décréter la mobilisation.
8) Structure et évolution du Führerstaat Le IIIème Reich combina Führerprinzip et
« polycratie ». Cette structure hybride s’explique à la fois par l’autocratie d’Hitler d’une part,
l’existence de hiérarques au sein du Parti et l’alliance avec les élites traditionnelles de l’Etat
d’autre part. Trois grands domaines permettent de comprendre le caractère partiel de la
révolution NS : l’Etat, l’économie, la société. Tout sembla transitoire sous le IIIème Reich :
l’emprise du Parti augmenta sans que les anciennes structures administratives, économiques et
sociales disparaissent.
A) L’Etat Du 30 janvier 1933 au 2 août 1934, Hitler devint jurislateur : maître du pouvoir
constituant, conventionnel, législatif et réglementaire*. Il n’y eut cependant pas de refonte
territoriale et administrative, ni des Länder, ni de la fonction publique. La contradiction entre
le principe de légalité et le principe de neutralité du service public d’une part, le
Führerprinzip (l’exigence que la fonction publique obéisse au chef) et le
Weltanschauungsprinzip (l’exigence que la fonction publique soit NS) d’autre part, ne fut
jamais surmontée. La structure gouvernementale et administrative de l’Allemagne se trouva
bouleversée, mais pas stabilisée. Hitler était Führer du Parti ; il transféra cette position unique
dans l’Etat, tout en maintenant séparés le Parti et l’Etat, le premier ne commandant que
théoriquement au second. Hitler admit en effet qu’il n’y avait pas assez d’éléments
compétents dans le Parti pour s’emparer de l’armée, de l’administration et de la justice, et les
faire fonctionner. C’est sa situation personnelle, non celle du Parti, qu’Hitler transféra dans
l’Etat. Il délégua les tâches quotidiennes de la gestion du Parti et de l’Etat à ses hiérarques ou
à ses alliés conservateurs. Il admettait que l’organisation était indispensable ; mais il garda un
style « artiste », ne s’occupant que de ce qu’il estimait décisif : armement, diplomatie,
stratégie.
Au-dessous d’Hitler, il y avait l’Etat et le Parti (7 M de membres en 1940), ayant chacun leur
propre administration, juridiction et budget. Le Parti avait un secrétariat général (Hess puis
Bormann, qui étaient également ministres sans portefeuille) et un état-major avec 18
directions. Il englobait 55 organisations, dont les plus importantes étaient la SA, la SS, le
DAF et la HJ. Au niveau territorial, le Parti comme l’Etat étaient subdivisés en Gaue, dirigés
par des Gauleiter (agents du Parti) qui étaient en même temps Statthalter (agents de l’Etat).
*
Le Reichstag, intégralement composé de députés NS, ne fut pas aboli. Il fut renouvelé trois fois : le 12 novembre 1933 (après le retrait de la
SDN), le 30 mars 1935 (après le rétablissement du SMO) et le 10 avril 1938 (après l’Anschluss). Il resta législateur, mais il ne fut appelé à
voter que sept lois nouvelles, dont celles de Nuremberg en septembre 1935 sur la citoyenneté, sur « la protection du sang et de l’honneur
allemands » et sur le drapeau. C’est en septembre 35 que la croix gammée devint l’unique emblème officiel de l’Allemagne, à la place de
l’ancien emblème impérial, restauré en mars 1933 ; en revanche, l’hymne du NSDAP ne remplaça pas l’hymne allemand traditionnel, mais
s’ajouta à lui.
Au niveau de l’Etat, il y avait : l’administration traditionnelle, i.e les ministères, dont la
Propagande (Goebbels) et les Finances (Krosigk) ; l’administration parallèle, i.e les
« Autorités suprêmes du Reich », dont l’Organisation Todt, le Plan quadriennal et l’Office
central de sécurité du Reich (RSHA) ; au plan budgétaire, l’ensemble relevait du ministère des
Finances. A partir de juillet 1934, le gouvernement se réunit de moins en moins ; la dernière
réunion eut lieu le 4 février 1938. Entre le sommet du pouvoir et la haute administration en
déclin, un vide apparut qui devait être rempli par une nouvelle structure : la « Chancellerie ».
La Chancellerie du Reich (l’Etat), la Chancellerie du Parti (le NSDAP) et l’OKW (l’Armée)
étaient les trois maillons entre Hitler et les trois énormes organisations à la base du régime.
Chacune des trois structures, respectivement dirigées par Lammers, Hess puis Bormann,
Keitel et Jodl, assurait la liaison entre le Führer d’une part, le corps des hauts fonctionnaires,
le corps des chefs du NSDAP et le corps des officiers généraux d’autre part. Hitler était
autocrate ; avoir accès à lui était décisif, cependant que lui avait besoin d’instances pour faire
appliquer ses directives. Les ministres devaient passer par Lammers, les Gauleiter par Hess
puis Bormann, les généraux par l’OKW. Les responsables des « Autorités suprêmes du
Reich », eux, avaient directement accès à Hitler car ils étaient chargés d’exécuter les missions
qu’il jugeait prioritaires. La première, en 1933, fut l’Organisation Todt, du nom de son chef,
pour la construction des autoroutes, les fortifications (le Westwall) et les travaux publics ; en
août 1936, ce fut le Plan quadriennal, pour l’aviation et l’armement, confié à Goering puis à
Speer ; en septembre 1939, ce fut le RSHA, confié à Himmler, qui englobait l’ensemble de la
Police (Sipo, Kripo, Gestapo et Sicherheitsdienst) tout en relevant de la SS (le Parti) et du
ministère de l’Intérieur (l’Etat)*.
B) L’économie Pour résorber le chômage, le régime mit en oeuvre un programme de grands
travaux et de réarmement, avec émergence d’un Etat-providence, dans le cadre d’un
« keynésianisme » militaro-industriel. Malgré les mesures en faveur de l’artisanat, du
commerce et, surtout, de l’agriculture (conformément au programme populiste du NSDAP), la
structure économique de l’Allemagne resta dominée par la grande industrie capitaliste. Outre
l’abolition des syndicats, les deux grandes modifications concernèrent la structure corporative
des professions et la répartition autoritaire de la main d’oeuvre (le « livret ouvrier »),
parallèlement au contrôle des changes, des prix, des salaires et du crédit. En août 1936, le
Plan quadriennal marqua le tournant économique du régime, i.e le déplacement de l’équilibre
du pouvoir, avec la substitution de Goering, déjà responsable de la Luftwaffe, à Schacht (qui
avait succédé à Hugenberg comme membre non NS du gouvernement) comme responsable
suprême de l’économie (en novembre 1937, Funk remplaça Schacht au ministère de
l’Economie). Hitler avait stipulé que l’armée et l’économie allemandes devaient être sur le
pied de guerre dans quatre ans. Il n’y eut pas d’expropriation, mais : intervention de l’Etat
dans l’économie avec l’extension du Plan à l’ensemble de l’industrie, du commerce et des
transports ; recherche de l’autosuffisance pour une trentaine de produits cruciaux ; connexion
entre le Plan, le Syndicat du charbon de Rhénanie-Westphalie, le plus grand cartel industriel
d’Europe, et l’IG Farben, la plus grande société industrielle d’Europe. Avec la fondation des
Hermann Goering Reichswerke (HGR) pour l’extraction et la métallurgie du fer à partir du
minerai à faible teneur de Salzgitter, un nouveau stade fut atteint : le régime passa de la
direction de l’économie à la propriété et à la gestion étatiques d’une partie de l’industrie
lourde*. Avec le Plan quadriennal*, Hitler avait confié la direction de l’économie de guerre à
Goering, sans que les industriels allemands participent à la planification du réarmement,
exceptés Carl Krauch et l’IG Farben. C’est en janvier 1942 qu’il accepta les changements
dans l’organisation de l’économie que préconisait Todt et que ce dernier avait commencé à
introduire à l’automne 1940. Il écarta Goering et confia à Speer la direction de l’Armement.
En juin 1936, Himmler était devenu chef de la Police allemande. Celle-ci était soustraite à l’Etat pour être rattaché au Parti, plus
précisément à la SS, organisation (civile) qui se considérait comme un corps d’élite NS dévoué à l’exécution de la volonté du Führer. La
Police fut divisée en deux sections : l’Ordnungspolizei et la Sicherheitspolizei, au sein de laquelle se trouvaient la police du maintien de
l’ordre (la Sipo), la police judiciaire (la Kripo) et la police secrète (la Gestapo). S’ajoutaient le Sicherheitsdienst (SD), le service de sécurité
du Parti, relevant de la SS, et l’Abwehr, le service de renseignement de la Wehrmacht. Himmler, en tant que Reichsführer SS, relevait du
Parti (Hess) ; en tant que « chef de la Police allemande au sein du ministère de l’Intérieur », il relevait de l’Etat (Frick). La protection
personnelle d’Hitler était confiée à la Leibstandarte SS Adolf Hitler (LSSAH).
*
En 1939, les HGR étaient la première entreprise publique industrielle d’Europe.
*
Du fait de l’augmentation énorme de l’endettement public, l’Allemagne avait emprunté une voie conduisant à la guerre. De mars 1938 à
mars 1939, les coups de force d’Hitler étaient des « actes de guerre » sans effusion de sang, qui étaient caractéristiques d’une « économie de
butin ». Hitler dira qu’il avait investi dans les armes toute la fortune du peuple allemand : seule une guerre rapportant des bénéfices (un
empire à l’Est) était en mesure de faire fructifier cette fortune, car le peuple allemand ne serait plus en état de procéder à un deuxième
réarmement.
*
Celui-ci restaura « l’autoresponsabilité de l’industrie », faisant participer les industriels aux
comités créés pour rationaliser et augmenter la production de chaque secteur. Alors fut
réalisée la « mobilisation totale » : les chiffres de la production connurent un gonflement
spectaculaire malgré les bombardements aériens.
C) La société Dans le domaine de l’Etat, Hitler établit un compromis entre le corps des
fonctionnaires et des officiers d’une part, le corps des chefs du NSDAP d’autre part ; dans le
domaine de l’économie, il donna les pouvoirs à Schacht puis à Goering enfin à Speer. Dans le
domaine de la société, il s’impliqua davantage avec Goebbels et Rosenberg pour la
Propagande et la Culture*, Darré pour la paysannerie, Ley pour le DAF, Schirach puis
Axmann pour la HJ. L’objectif du NSDAP était d’endoctriner et embrigader les masses pour
constituer une nation engagée idéologiquement. Après avoir supprimé les organisations
politiques et syndicales du « marxisme », confisqué leurs biens et internés ou bannis leurs
dirigeants, il s’agissait de rallier leurs partisans à la « communauté nationale ». La question
était de savoir si, au-delà de la paysannerie et des classes moyennes, le régime pouvait exercer
son emprise sur le groupe le plus nombreux : la classe ouvrière. Il y parvint. Le DAF était la
plus grande organisation NS ; il disposait des biens confisqués aux syndicats et des cotisations
de tous les salariés et employeurs de l’industrie (23 M de personnes). Il s’employa à élever le
statut du travail manuel et à diffuser une idéologie du travail. Les salaires, les prix et le crédit
furent contrôlés ; le niveau de consommation s’éleva ; les congés, les assurances sociales, les
allocations familiales, les logements sociaux, les loisirs furent développés* ; les impôts
augmentèrent peu et pesèrent essentiellement sur les hauts revenus, sur les entreprises et,
durant le conflit, sur les bénéfices de guerre. Le chômage fut supprimé ; il y eut même pénurie
de main d’oeuvre, soit une situation favorable aux salariés, mais que le régime verrouillait en
remplaçant les négociations collectives par l’arbitrage de l’Etat, en contrôlant les salaires et en
limitant la liberté de changer de travail. In fine, le régime réussit à galvaniser la moitié la plus
jeune du peuple allemand, celle qui fit la guerre. Cependant, Hitler n’était pas capable,
contrairement à Staline, d’exiger de la population qu’elle consente à une baisse de son niveau
de vie : parallèlement à l’endettement public, il préféra (et il dut) spolier les Juifs et exploiter
les populations des territoires occupés ou satellisés en 1939-45*.
D) L’éviction des élites traditionnelles Dans les trois secteurs réservés aux forces
conservatrices : armée, diplomatie, économie, dont l’entrée leur restait difficile, les NS
créèrent des organisations parallèles : la Waffen SS et le SD face à la Wehrmacht et à
l’Abwehr ; l’AuslandOrganisation du NSDAP (Bohle) face au ministère des Affaires
étrangères ; la Direction du Plan face au patronat. A l’automne 1937, Hitler décida de passer à
la seconde étape de sa politique étrangère : le réarmement était accompli, le SMO rétabli et la
Rhénanie remilitarisée. Il était persuadé qu’il ne vivrait pas vieux et que le temps travaillait
contre l’Allemagne et pour l’URSS*. D’autre part, il craignait que la propagande de paix ne
rende le peuple allemand incapable de recourir à la force. Après la réunion du 5 novembre
1937, Hitler comprit qu’il devait remanier l’armée et les affaires étrangères, dont les chefs
s’opposaient à ses projets en Europe centrale et orientale. Fin novembre, le ministère de
l’Economie passa sous le contrôle du Plan : la dictature économique de Goering s’abat sur le
grand capital, pour substituer la règle de l’utilité collective militaire à celle du profit
individuel. Début février 1938, Neurath fut remplacé par Ribbentrop ; les ambassadeurs à
Rome, Vienne et Tokyo furent également remplacés. La relation critique était avec l’armée,
qui possédait une tradition unique d’autonomie dans l’Etat. A la différence de Staline, Hitler,
commandant suprême des forces armées depuis août 1934, n’opéra pas de purge du haut
commandement, il en remania la structure. Le général Blomberg fut destitué, seize généraux
Au niveau de l’Etat, les Chambres de culture du Reich (Goebbels) ; au niveau du Parti, la Ligue de combat pour la culture allemande
(Rosenberg).
*
Durant la guerre, le revenu du chef de famille appelé sous les drapeaux fut remplacé par une pension versée par l’Etat (loi d’indemnisation
pour la mobilisation dans la Wehrmacht adoptée le 28 août 1939).
*
De 1914 à 1918, le niveau de vie en Allemagne diminua en moyenne de 65% ; de 1939 à 1943, il augmenta, ne diminuant qu’ensuite,
jusqu’à l’effondrement après 1945. Les deux tiers des prélèvements de guerre allemands provinrent de sources étrangères (160 MM de
marks), sous l’appellation générale de « recettes tirées des frais d’occupation » (incluant les contributions des partenaires du Reich) ; un tiers
d’Allemagne (80 MM de marks). En Allemagne même, un tiers des contribuables supportait les deux tiers des charges de la guerre. Cf. Götz
Aly : Comment Hitler a acheté les Allemands. Le IIIème Reich, une dictature au service du peuple, Paris, Flammarion, 2005, pp.269-275.
*
Le sommet de la courbe de supériorité de l’Allemagne par rapport à la Russie fut atteint en 1905. En 1914, cette courbe avait déjà baissé.
En 1933, lorsque l’Allemagne touche le fond de la dépression et que l’URSS achève le premier plan quinquennal, elle a encore baissé.
Bientôt viendrait le moment où l’URSS, Etat-continent autarcique, dépasserait l’Allemagne, Etat-nation dépendant du commerce extérieur.
Cf. Paul Kennedy : Naissance et déclin des grandes puissances, Paris, Payot, 1991 (1988), p.282.
*
mis à la retraite, le ministère de la Guerre supprimé et remplacé par l’OberKommando der
Wehrmacht, i.e l’état-major des forces armées du Reich. L’OKW avait pour chef suprême
Hitler, secondé par Keitel et Jodl. Il supervisait l’armée de terre (Heeres, OKH, Brauchitsch
puis Zeitzler), la marine (Kriegsmarine, OKK, Raeder puis Doenitz) et l’armée de l’air
(Luftwaffe, OKL, Goering), ainsi que la Waffen SS, force armée (terrestre) du Parti (Himmler).
Hitler annonça ces changements le 4 février 1938, lors de ce qui s’avéra la dernière réunion de
Cabinet du IIIème Reich.
La confrontation germano-soviétique lors de la guerre civile espagnole
Avant la confrontation militaire directe de 1941-45, il y eut une confrontation militaire indirecte entre
l’Allemagne et l’URSS : lors de la guerre civile espagnole* (juillet 36-avril 39). Les interventions
L’Etat espagnol comme l’Etat russe sont nés de la lutte contre des Puissances non chrétiennes : les Arabes dans le cas
espagnol, les Mongols dans le cas russe. La conséquence en était l’importance de la religion d’Etat, catholicisme et
orthodoxie. On trouvait un peuple-noyau dominant, Castillans et Russes, et des peuples minoritaires ou dominés, Catalans et
Basques, Ukrainiens et Turcophones. Les sociétés demeuraient rurales au début du XXème siècle, avec des grandes
propriétés et de nombreux paysans sans terre, quelques poches industrielles, un clivage entre européanisateurs et
traditionalistes (afrancesados v. carlistes ou occidentalistes v. slavophiles), une tradition de violence insurrectionnelle
(anarchistes ou SR). Mais l’Espagne était une monarchie parlementaire depuis 1839 avec suffrage universel en 1889 ; la
Russie ne devint une monarchie parlementaire qu’en mars 1917 et pour quelques mois seulement. La (IIème) République
espagnole (1931) avait de rudes adversaires : droite monarchiste et phalangiste, gauche anarchiste et communiste. Elle était
gouvernée par un centre gauche (Azana) ou un centre droit (Robles) qui s’opposaient notamment sur la laïcité et la
régionalisation. Le parti socialiste, avec son aile droite Prieto et son aile gauche Caballero, évoluait dans un sens
révolutionnaire, au point que Caballero était appelé le « Lénine espagnol ». La droite -Bloc national de Sotelo, Phalange de
Primo de Rivera, Requetes (carlistes) de Fal Condé, réunis dans une Confédération espagnole des droites autonomes
(CEDA)- passait de la contre-révolution à l’hostilité envers la République. Les élections du 6 février 1936 montrèrent que
deux blocs d’électeurs d’importance à peu près égale se faisaient face. Mais le mode de scrutin donna la victoire au « Front
populaire » (républicains, socialistes, communistes), majoritaire au Parlement. Les troubles sociaux se multiplièrent,
cependant qu’éclatèrent les tendances centrifuges au Pays basque ou en Catalogne. Le Président Azana, qui avait succédé à
*
respectives d’Hitler et de Staline dans la guerre d’Espagne montrent le caractère parallèle de leur politique
étrangère en 1936-38. Tous deux avaient compris « l’effet de diversion » de la guerre en Méditerranée
et l’intérêt qu’elle dure le plus longtemps possible : pour détourner l’attention occidentale de
l’Autriche dans le cas allemand, des purges dans le cas soviétique. Des deux côtés, l’Espagne devint un champ
d’expérimentation de matériels et de tactiques, notamment aériennes. L’URSS comme l’Italie et l’Allemagne
adhérèrent au pacte de non intervention proposé par Londres, qui prévoyait un embargo sur les armes.
Mais le pacte (signé le 9 septembre 36) ne fut pas respecté : Rome et Berlin, avec Lisbonne (10000 hommes),
soutenaient les forces insurgées, i.e la coalition des nationalistes dirigée par Franco (les meilleures troupes
de l’armée de terre et le gros de l’encadrement, plus les partis et milices de droite, soutenus par l’Eglise) ; Moscou, les
forces gouvernementales, i.e le Frente popular (le reste de l’armée de terre, la quasi-totalité d’une marine et d’une
armée de l’air faibles, les syndicats et partis de gauche, les milices basques ou catalanes) ; quant à la France du Front
populaire, elle jouait le double jeu de la non-intervention officielle et de la livraison de matériel de
guerre (soviétique ou français) au gouvernement espagnol. L’aide allemande (30000 hommes) décisive fut le
transport aérien des troupes de Franco du Maroc à l’Espagne fin juillet 36, puis l’appui aérien (Légion
Condor) des forces franquistes, en échange de la livraison et de la promesse de livraison de matières premières . L’Italie
envoya 80000 hommes en tout. L’URSS, n’envoya pas de troupes, à l’exception de pilotes et de conseillers ; le
Komintern leva des Brigades internationales de volontaires étrangers (il y eut en tout 50000 brigadistes), placées
sous commandement communiste et équipées en matériel soviétique payé par les réserves d’or (les
quatrièmes du monde) de la Banque centrale espagnole (les deux tiers de l’or avait été déposé à Moscou dès novembre
36, Staline l’exigeant comme garantie de paiement et le gouvernement espagnol craignant que Paris ou Londres bloquent plus
tard cet or). Pour Hitler, les avantages étaient nets : il pouvait se présenter comme le champion de
l’anticommunisme, nouer un partenariat militaire avec l’Italie et aggraver l’antagonisme entre Rome
d’une part, Paris et Londres d’autre part, réduisant à néant le « front de Stresa » qui garantissait
l’indépendance de l’Autriche, donc la sécurité de la Tchécoslovaquie. Staline, lui, pouvait se présenter comme le
champion de l’antifascisme, à un moment où les procès de Moscou dégradaient l’image de l’URSS . Le fait que
l’URSS soit la seule source sûre d’approvisionnement militaire permit au PC, qui avait constitué les milices
les plus disciplinées, de dominer les forces armées de la République espagnole puis la République ellemême*, après l’élimination des trotskistes (POUM, Parti ouvrier d’unification marxiste) et des anarchistes*.
Mais la supériorité militaire des nationalistes et les dissensions au sein du Frente popular donnèrent la
victoire finale à Franco*.
Zamora, était présenté à gauche comme le « Kerenski espagnol », cependant que l’hypothèse d’un putsch militaire,
facilement maîtrisable, était comparé à la tentative de Kornilov. L’assassinat de Calvo Sotelo, le 12 juillet 1936, précipita la
conjuration militaire (Sanjurjo, Mola, Goded et finalement Franco). Mais celle-ci échoua. La guerre civile éclata, provoquant
l’effondrement de l’Etat espagnol, dont le territoire fut bientôt scindé en un « gouvernement de Burgos » fondé sur la
coalition des droites insurgées, et un gouvernement légal Front populaire (Quiroga, Barrio, Giral) déplacé à Valence
(Caballero, Negrin, Besteiro).
* Suivant une stratégie, non de conquête directe, mais de contrôle des instruments clés (armée, police, information),
d’emprise sur le PS et d’élimination progressive des forces rivales incontrôlables (anarchistes, trotskistes).
* Ceux-ci avaient spontanément déclenché la révolution économique et sociale dans les zones qu’ils contrôlaient :
« communes populaires », expropriation et collectivisation des moyens de production. Au grand dam des communistes, dont
la priorité était la victoire militaire et dont la stratégie, conséquemment, visait à ne pas effrayer les classes moyennes
espagnoles ni les démocraties occidentales (auxquelles l’URSS désirait s’allier).
* Après la bataille de Madrid (août 36-mars 37), qui vit l’échec des franquistes, cinq séries de batailles se déroulèrent : avriloctobre 37, la bataille du Nord (Bilbao, Santander et Asturies) ; décembre 37-février 38, la bataille de Teruel ; juilletnovembre 38, la bataille de l’Ebre ; décembre 38-janvier 39, la prise de Barcelone ; février-mars 39, la prise de Madrid.
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