héritier de sang royal et sacré. En cette terre où tout appartient au roi, au
pharaon, la personne du souverain n’exprime plus seulement la puissance
politique, mais la présence du divin, du surnaturel au beau milieu de la
condition humaine. Ahmosis est réputée pour la beauté de ses traits, la
finesse de son corps. Ses yeux sombres s’ornent de poudre de galène, en un
long trait noir rehaussant le regard comme le font encore les belles
Egyptiennes de notre siècle avec le khôl. Elle redoute la naissance de
l’enfant. Son corps déformé par la grossesse va pouvoir retrouver son
aspect premier, ses formes élancées, soulignées par la longue robe
diaphane et plissée qui laisse jouer les membres sous l’étoffe légère. La
jeunesse de la reine lui permet d’espérer beaucoup de naissances pour
donner à son père et à son mari les futurs pharaons, petits dieux vivants
jouant sur la terre des hommes.
En cette année l’Égypte a deux maîtres : le plus âgé, pharaon de par sa
lignée dynastique, l’austère et remarquable Aménophis Ier, le plus jeune,
Thoutmosis Ier2. Ce dernier a été choisi par Aménophis pour assurer la
survie de la XVIIIe dynastie, celle de la famille d’Ahmosis, fondateur du
Nouvel Empire. Ahmosis avait su relever l’empire après l’invasion des
Hyksôs orientaux et la fin de ce que les égyptologues nomment le Moyen
Empire. Le pharaon Aménophis a su prendre deux précautions pour sceller
ce lien par le sang: Thoutmosis a été associé au trône, mais cela ne
suffisait pas et le mariage avec la princesse Ahmosis est venu compléter
l’union entre les deux pharaons. Fille et femme de pharaon, Ahmosis se
trouve au cœur de la famille sacrée, elle doit en assurer la pérennité et
l’être à venir l’incarnera tout entier.
Dans le palais du pharaon, labyrinthe de couloirs et d’appartements, de
salles de réception aux colonnes chatoyantes, l’attention des dignitaires et