52 - Le Ciel, février 2012 Les Potins d’Uranie Chevelures Al Nath Fig. 1 – Extrait du cliché de découverte de la comète 1973a (1ère de l’année 1973), encore désignée comme 1972 VIII (8e à passer au périhélie en 1972) ou C/1973 A1 selon la nomenclature moderne. La comète est repérée par la flèche au sein de l’amas de galaxies de la Vierge. (© OHP/IALg) La première (et toujours la seule) comète découverte par un membre de l’Institut d’Astrophysique de Liège le fut au sein de l’amas de galaxies de la Vierge. Ce fut aussi la première comète découverte à l’Observatoire de Haute Provence. Et ce fut encore la première de 1973. L’amas de galaxies en question est en fait à cheval sur les constellations de la Vierge et de la Chevelure de Bérénice. Il comprendrait jusqu’à plus de 2 000 membres et est le coeur du Superamas Local dont notre Groupe Local1 est une composante extérieure. Cet ensemble de galaxies spirales et elliptiques occupe une région atteignant 8° en sa plus grande amplitude et centrée en gros à 185° en ascension droite et à +13° en déclinaison. Son membre le plus brillant est M87. La distance moyenne de l’amas de la Vierge est estimée à 60 millions d’années-lumière (AL). À ne pas confondre avec le précédent, l’amas de la Chevelure de Bérénice est situé entièrement dans cette constellation. Il se compose de plus d’un millier de galaxies et est centré à environ 195° en ascension droite et +28° en déclinaison, non loin du Pôle Galactique Nord. Sa distance moyenne est d’environ 320 millions Comprenant notamment notre galaxie, la Voie Lactée, et la grande galaxie d’Andromède, M51. 1 février 2012, Le Ciel - 53 Fig. 2 – Amas de galaxies dans la constellation de la Chevelure de Bérénice. La galaxie centrale, NGC 4889, abrite sans doute le plus gros trou noir connu à ce jour, une dizaine de milliards de fois plus massif que le Soleil. (© NASA/JPL) Fig. 4 – La constellation de la Chevelure de Bérénice (Coma, Com). L’amas de galaxies est centré sur NGC 4889 et 4874 à droite de β Com, sur la ligne de 13 h. (© Wikipedia) d’AL. La plupart des galaxies peuplant la portion centrale de cet amas sont des elliptiques, dominées par NGC4874 et NGC4889. Un troisième amas de galaxies mérite d’être mentionné ici : celui du Fourneau se trouvant dans la constellation du même nom et associé au groupe voisin de l’Éridan. Il est beaucoup plus petit que les précédents (moins de 100 galaxies dénombrées à ce jour) et est situé à moins de 100 millions d’AL. Les constellations du Fourneau et de l’Éridan ont déjà présentées en ces pages2 et nous n’y reviendrons pas. Quant à celle de Voir « Les trains de traîneaux » (Le Ciel 71, 2009, 12-17) pour la constellation du Fourneau et « Êtres d’eau » (Le Ciel 73, 2011, 296-302) pour celle de l’Éridan. 2 Fig. 3 – Amas de galaxies dans la constellation du Fourneau. (© ESO) 54 - Le Ciel, février 2012 Fig. 5 – La constellation de la Vierge dans l’atlas d’Hevelius. la Vierge, avec ses 1294 degrés carrés, elle est la deuxième plus grande constellation du ciel (après celle de l’Hydre Femelle3). Elle s’étend entre 172° et 226° en ascension droite et –22° et +14° en déclinaison. La Vierge faisait partie des anciennes constellations identifiées par Ptolémée. La plupart des interprétations associent cette jeune fille à l’époque des récoltes et la représentent avec un épi de blé dans la main gauche, marqué dans le ciel par l’étoile Spica (α Vir), une binaire spectroscopique chaude de type spectral B1III-IV et de magnitude visuelle apparente 1,04. Du fait de la présence de l’amas de galaxies, la constellation est riche en objets nébuleux, particulièrement en Voir « La croix vagabonde » (Le Ciel 73, 2011, 132136) pour une liste de toutes les constellations classées par la taille. 3 Fig. 6 – La galaxie M104 (Sombrero) est située dans la constellation de la Vierge et vue par la tranche, mettant ainsi en évidence son halo et la bande sombre due aux poussières de son plan galactique. (© ESA/NASA) février 2012, Le Ciel - 55 objets Messier. Nous illustrons ici la célèbre galaxie Sombrero (M104). La constellation de la Chevelure de Bérénice est l’une des rares constellations devant son nom à une figure historique, en l’occurrence la Reine Bérénice II d’Égypte, épouse du Roi Ptolémée III Evergetes (env. 246 – 241 avant notre ère) sous lequel Alexandrie devint un important centre culturel. L’histoire de Bérénice vaut la peine d’être contée ici. En 243 avant notre ère, son époux Ptolémée entreprit une expédition risquée contre les Séleucides qui avaient fait assassiner sa soeur. Bérénice jura alors de sacrifier à la déesse Aphrodite sa longue chevelure blonde dont elle était extrêmement fière si son époux revenait sain et sauf. Ce fut le cas et elle fit couper sa chevelure qu’elle plaça dans le temple d’Aphrodite. Le lendemain cependant, la chevelure avait disparu. Pour apaiser le roi furieux, l’astronome de la cour, Conon de Samos, déclara que l’offrande avait tellement plu à la déesse que celle-ci l’avait placée dans le ciel et il indiqua un groupe d’étoiles qui nous est resté aujourd’hui sous l’appellation de Chevelure de Bérénice. Si ce n’étaient ses concentrations en galaxies, la constellation actuelle de ce nom serait peu remarquable : 42e par la taille avec ses 386 degrés carrés, l’astérisme s’étend entre 178° et 202° en ascension droite et 14° et 34° en déclinaison. Son étoile la plus brillante est β Com, une naine de type spectral G0, très semblable au Soleil donc, et de magnitude apparente visuelle 4,25. Sa consoeur α Com, une naine de type spectral F5V et de magnitude apparente visuelle 4,32, est souvent appelée le Diadème : elle représenterait le joyau dans la couronne de Bérénice. La petite tache diffuse laissée par une nouvelle comète sur une plaque photographique rendait sa détection particulièrement difficile au sein d’un amas de galaxies de formes variées et d’aspects tout aussi diffus. Une comète étant encore en général très éloignée au moment de sa découverte, sa queue est alors quasi-inexistante4 et ce que l’on voit de l’astre se résume à une coma (chevelure) plus ou moins développée entourant le noyau. Mais suite au déplacement de la comète, cette tête laissait une traînée plus ou moins importante sur une pose photographique effectuée en suivant la rotation du ciel. C’est donc un examen très attentif des clichés qui permettait de détecter un nouveau venu dans les champs célestes étudiés. Il fallait alors reprendre rapidement un deuxième cliché de confirmation, non seulement pour s’assurer que le nouvel objet était bien réel, mais aussi pour déterminer la direction du déplacement. Pour ce faire, un bon « truc » était d’interrompre asymétriquement la pose, par exemple quelques minutes à 10% ou 20% avant la fin de l’exposition (par exemple une interruption de 5 minutes, 10 min avant la fin d’une exposition totale de 40 minutes). Le « petit bout » de la traînée laissée sur l’enregistrement de la pose indiquait alors la direction du déplacement de l’astre, ce qui permettait de le retrouver ultérieurement par extrapolation. Les queues de comètes se développent au fur et à mesure de l’approche du Soleil. 4 Fig. 7 – La constellation de la Vierge. (© Wikipedia)