
Première leçon : La création selon les Ecritures
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. 
 
I. L’Ancien Testament
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  Au  cours  du  XX
e
  siècle,  la  théologie  biblique  a  eu  le  grand  mérite  de  mettre  en 
lumière  l’articulation  de  la  doctrine  de  la  création  avec  celle  du  salut  et  de  l’alliance
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. 
Comme l’enseigne le CEC : « La création est le fondement de ‘tous les desseins salvifiques de 
Dieu’, ‘le commencement de l’histoire du salut’
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 ». La Bible n’isole donc pas la création de 
l’ensemble du projet sauveur de Dieu. Projet qui culmine dans l’alliance, les noces de Dieu 
et de l’humanité. C’est à l’intérieur de cet ensemble que la création prend tout son sens. 
  Certes,  Israël  partageait  avec  ses  voisins  certaines  représentations  cosmogoniques 
communes,  certaines  idées concernant l’origine du  monde. De  sorte qu’on trouve dans la 
Bible  de  multiples  échos  des  grandes  représentations  mythologiques,  surtout 
babyloniennes,  du  Proche  Orient
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.  Mais,  pour  Israël,  l’expérience  fondatrice  est  celle  de 
l’exode et de l’alliance. Là, Dieu se révèle Dieu Sauveur, un Dieu qui intervient dans l’histoire 
en  faveur  des  hommes  qu’il  a  choisis  pour  passer  alliance  avec  eux.  Cette  conviction 
centrale  imprègne  progressivement  toute  la  vision  du  monde  d’Israël  et  elle  lui  donne  sa 
spécificité. Peu à peu, surtout au moment de l’Exil, Israël comprend que cette action de Dieu 
est universelle, ce qui exclut l’action de quelque autre dieu que ce soit (monothéisme strict). 
Elle ne  se limite pas  à une  ère géographique  donnée, comme  la  Terre d’Israël
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, mais elle 
s’étend à tous les peuples et même à tout l’univers. C’est dans cette perspective qu’on en 
vient  à  envisager  la  création  du  monde  comme  une  intervention  salvifique  de  Dieu.  La 
première. La plus universelle. Une sorte de prologue qui pose les cadres de toute l’œuvre de 
salut, « le point de départ du dessein de Dieu et de l’histoire du salut, le premier des hauts 
faits divins dont la série se poursuit dans l’histoire d’Israël
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 ». La doctrine de la création se 
trouve  ainsi  rattachée  à  ce  qui  définit  le  cœur  de  la  foi  d’Israël :  la  confession  du  Dieu 
sauveur qui fait alliance avec son peuple. La geste créatrice de Dieu sera donc racontée sur 
le modèle des grandes interventions salvifiques de Dieu dans l’histoire. 
                                           
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 Parmi les exposés généraux sur la création dans la Bible, cf. G. L
AMBERT
, « La création dans la Bible », NRT 
75 (1963), p. 252-281 ; L. S
CHEFFCZYK
, Création et providence, « Histoire des dogmes », Paris, 1967, p. 12-45 ; 
R.  G
UELLUY
,  La  Création,  « Le  Mystère  chrétien »,  Paris,  1963,  p.  12-34  ;  F
OERSTER
,  art.  « ktizô »  dans 
Theological Dictionary of the New Testament, t. 3, 1966, p. 1000-1035... 
6
  Parmi les exposés  généraux sur la création  dans l’AT, cf. G. 
VON 
R
AD
, Théologie de  l’Ancien  Testament, 
Genève, 1963, t. 1, p. 123-138 ; L. S
CHEFFCZYK
, Création, p. 13-29 ; R. G
UELLUY
, La Création, p. 11-30 ; W. 
K
ERN
, « La création, présupposé de l’alliance dans l’AT » dans La Trinité et la création, « Mysterium salutis, 
6 », Paris, 1971, p. 197-217 ; G. A
UZOU
, Au commencement Dieu créa le monde, L’Histoire et la Foi, « Lire la 
Bible, 36 », Paris, 1973... 
7
 L’influence de K. Barth a été déterminante, cf. K. B
ARTH
, Dogmatique, vol. 3 : La doctrine de la création, 
tome premier, Genève, 1960. 
8
 CEC n° 281 ; cf. n° 288. 
9
 Ainsi Isaïe fait-il encore allusion à la victoire du Dieu créateur sur les monstres du chaos originel : « N’est-ce 
pas toi qui a fendu Rahab, transpercé le Dragon ? » (Is 51, 9). Sur la mythologie relative à l’origine des choses, 
cf. La création du monde et de l’homme, « Suppléments au Cahiers Evangile, 38 », Paris, 1981 ; J. O’B
RIEN
 et 
W. M
AJOR
, In The Beginning : Creation Myths from Ancient Mesopotamia, Israël and Greece, Chicago, 1982 ;  
La création et le déluge d’après les textes du Proche Orient ancien, « Suppléments au Cahiers Evangile, 64 », 
Paris, 1988... 
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 Quoi qu’en pense Naaman, cf. 2 R 5, 17. 
11
 Paul A
UVRAY
, « Création », VTB, col. 225.