ciences immunitaires chez nombre d’entre
eux. Elle peut expliquer beaucoup de publi-
cations déjà anciennes montrant que le
vieillissement s’accompagne d’un déficit de
l’IMC (3),en apparente contradiction avec
les publications les plus récentes semblant
montrer, au contraire, une certaine préserva-
tion des réponses immunitaires jusqu'à un
âge avancé chez ceux restés en très bonne
santé (2, 4, 6, 19). Il est probable que de
nombreux travaux observant une baisse des
réponses immunitaires chez les sujets âgés,
même en apparente bonne santé, ne tradui-
sent pas l’influence du vieillissement sur les
réponses immunitaires mais plutôt l’influen-
ce de subcarences nutritionnelles chez les
sujets âgés. Les études futures portant sur le
vieillissement immunitaire devront intégrer
cette dimension nutritionnelle et quantifier
de nombreux micronutriments.
Il faut considérer avec une attention toute
particulière les travaux sur la vitamine E du
groupe de Symin Meydani (Tufts University,
Boston, États-Unis). Ce groupe a montré que
des supplémentations en vitamine E permet-
tent d’augmenter les réponses d’IMC des
sujets âgés autonomes, alors même que ces
sujets ne présentent pas de carence (ni d’ap-
ports ni biologique) en vitamine E. Cet effet
immunitaire est associé à la diminution de
production de radicaux libres et de PGE2 par
les monocytes des sujets âgés traités (41),
c’est-à-dire à une réduction des effets biolo-
giques du vieillissement.
Ainsi, une augmentation des réponses immu-
nitaires peut être obtenue chez des sujets en
bonne santé et ne présentant pas de subca-
rence pour le micronutriment en question.
Les doses efficaces pour un tel effet sont lar-
gement supérieures aux apports nutritionnels
conseillés (ANC) pour cette vitamine. Elles
sont de 4 à 80 fois celles des ANC. La ques-
tion posée par ces travaux est celle de la
valeur réelle des recommandations actuelles
faites pour les personnes âgées en ce qui
concerne les ANC en certains micronutri-
ments. Si des supplémentations importantes
en vitamine E permettent d’amplifier les
réponses immunitaires des sujets âgés auto-
nomes et réduisent en même temps les mani-
festations biologiques du vieillissement, cela
ne veut-il pas dire que les besoins des per-
sonnes âgées en ce nutriment sont plus
importantes que ce qui est préconisé ? En
corollaire, ne faut-il pas prendre en compte
les travaux concernant les effets des supplé-
mentations en micronutriments sur les
réponses immunitaires des personnes âgées
pour déterminer des ANC plus valables, per-
mettant de définir des niveaux d’apports suf-
fisants pour ralentir ou prévenir le vieillisse-
ment chez les personnes âgées autonomes ?
La réponse est venue récemment de la com-
mission de la CEDAP travaillant à une nou-
velle définition des ANC, et elle est positive.
Cette commission, qui établissait des recom-
mandations particulières pour les personnes
âgées, vient de publier récemment de nou-
veaux apports nutritionnels conseillés, et ce
pour la première fois pour les sujets en bonne
santé de 60 à 80 ans (42-43). Contrairement
à ce qui est observé entre les ANC de 1992 et
de 2001 pour les adultes plus jeunes – dimi-
nution des ANC en certaines vitamines –, il
est préconisé, pour les sujets de plus de
60 ans, non pas une diminution mais une
augmentation, parfois même très importante,
comme pour la vitamine E (qui passe de 12 à
20-50 UI/j), des ANC en certains micronutri-
ments. Les micronutriments, pour lesquels
les apports conseillés sont plus importants
chez les sujets âgés, sont tous des micronu-
triments ayant une influence et sur les
réponses immunitaires et sur certains fac-
teurs biologiques associés à un vieillissement
accéléré :
■micronutriments à activité antioxydante (et
immunostimulante) ;
■ vitamines du groupe B, dont les déficits se
traduisent par une augmentation de l’homo-
cystéine et des déficits immunitaires.
Cette prise de position de la commission des
ANC, si elle est logique, reste tout du moins
encore assez théorique, puisque très peu
d’études ont montré que des apports plus
élevés permettaient un réel bénéfice clinique
et un ralentissement des phénomènes de
vieillissement. Quoi qu’il en soit, il apparaît
aujourd’hui évident que la prévention du
vieillissement et de ses conséquences (bais-
se de l’IMC) passe par des apports en micro-
nutriments plus importants que ce qui était
préconisé jusqu'à aujourd’hui. Comme les
niveaux qui commencent à être préconisés,
surtout pour la vitamine E, sont difficile-
ment couverts par des apports alimentaires,
on peut se demander si l’on n’entre pas
aujourd’hui dans la prévention du vieillisse-
ment par des “pilules nutritionnelles”,
comme on est entré
dans la prévention du
vieillissement osseux par les traitements hor-
monaux de la ménopause.
Le niveau des réponses d’IMC dépend du
statut nutritionnel non seulement en micro-
nutriments mais aussi en macronutriments,
et ce, même chez les sujets âgés autonomes,
en apparente bonne santé, vivant à leur
domicile et menant une vie active. Nous
avons vérifié, chez de tels sujets, avec mal-
nutrition protéino-énergétique (MPE) débu-
tante (ingesta < 20 kcal/kg/j avec < 1 g/kg/j
de protéines, index de masse corporelle < 21
kg/m2,et albumine sérique comprise entre
35 et 39 g/l), que leurs réponses immuni-
taires étaient comparables, en niveau et en
profil, à celles décrites comme typiques du
vieillissement immunitaire normal : diminu-
tion des lymphocytes T matures (CD3+) et
augmentation des lymphocytes T immatures
(CD2+ CD3-), diminution de la prolifération
lymphocytaire et des synthèses de cytokines,
notamment d’IL-2 (2, 6, 15, 33)
(tableaux I
et II)
. Nous avons pu ainsi montrer qu’il
existait un effet cumulatif entre le vieillisse-
ment dit “normal ” et le degré de MPE sur
les réponses d’IMC des sujets âgés auto-
nomes (6, 33, 36). Cet effet additionnel de la
carence nutritionnelle protéino-énergétique
sur les réponses immunitaires des sujets
âgés existe même chez ceux qui ne sont pas
considérés comme atteints de MPE (albumi-
ne sérique > 35 g/l) (2, 6). On peut donc se
poser la question de l’importance de ces
“pré-MPE” sur les réponses immunitaires
des sujets âgés et donc sur le vieillissement
immunologique per se. Plus encore, on peut
se demander quelle est leur influence sur le
Act. Méd. Int. - Métabolismes - Hormones - Nutrition, Volume V, n° 4, juillet-août 2001
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Mise au point