Semailles 78 - page 4
Voilà que la messe est dite. De quoi coller de l’urti-
caire aux plus puristes des «libres penseurs». Car,
qu’on se le dise, la laïcité a aussi ses intégristes,
fondamentalistes et extrémistes en tout genre.
Et qu’on se le répète, la lutte des intégristes n’est
pas terminée.
Allait-on un jour imaginer qu’il soit si compliqué
de fêter Noël dans un pays qui ne jure que par
la religion de la laïcité? Bien entendu, notre
propos ne concerne en rien ce qui se passe dans
votre salon, sous le sapin, aux douces odeurs de
cannelle et de vin chaud; mais nous parlons de
ces crèches qui fièrement s’exposent dans des
lieux publics: mairie, école et hôpitaux! Alors, si vous y installez votre
crèche avec une branche de sapin et une boule de Noël, vous êtes dans
la culture et dans l’aspect festif; cela passe! Si votre crèche trône seule
dans l’immense espace public aux yeux de tous, elle risque de constituer
un acte de prosélytisme ou de revendication d'une opinion religieuse.
Et là, cela ne passe plus du tout!
Bon, reconnaissons-le, jusqu’ici nous pourrions prendre cette polé-
mique avec le sourire. Les «libres penseurs» n’ayant pas d’autre raison
d’exister que de «bouffer du curé». Avec le sourire certes oui, si nous
n’étions pas dans un pays où trop de jeunes vont faire des stages
«religieux en Syrie ou en Pakistan»; et de retour en France, tuent au
nom de Dieu. Des jeunes dont le seul avenir est de se «faire sauter en
martyr» et d’assassiner des innocents qui ne demandaient qu’à vivre.
Quel lien ne faisons nous pas ici! Un raccourci trop rapide et sûrement
discutable? Pourquoi pas? Alors regardons donc tout ceci de plus près.
La laïcité est le «principe de séparation dans l'État de la société civile
et de la société religieuse» et «d'impartialité ou de neutralité de l'État
à l'égard des confessions religieuses». Et si depuis bien des années, il
y a toujours eu, de part et d’autre, des rivalités, des crispations, c’était
sans compter sur l’explosion des fondamentalismes religieux. Et ne
soyons pas hypocrites, ce ne sont ni le curé, ni le rabbin du quartier
qui posaient problèmes jusque maintenant, mais c’est l’irruption de
certains intégrismes musulmans qui témoignent de l’impuissance de
l’idéologie républicaine.
La République et sa religion de la laïcité se trouvèrent bien dépourvues
lorsque les extrémismes furent venus…
S’il y a une laïcité pacifique, celle du compromis, il existe aussi une
expression extrémiste, idéologique, de la laïcité.
La laïcité est un fait, un principe; elle ne peut être érigée au rang d’une
idéologie voire d’une religion. Peut-être, y a-t-il eu ce glissement en
France, où trop souvent la République s’est construite dans un conflit
face à la toute-puissance de l’Eglise Catholique, avec la course au
pouvoir comme seule finalité.
Embourbée dans ces haines, ces combats passéistes; à force de prêcher
la laïcité, il en résulte aujourd’hui un «désenchantement» de la société
civile. Bien entendu les facteurs sont multiples. Mais une certaine
forme de la «laïcité à la française» montre comment, par idéologie,
La crèche à la mairie…
Marie et Marianne autour
d’un même berceau ?
DOSSIER
Le Conseil d’État, la plus haute
juridiction française considère que
les crèches peuvent, sous certaines
conditions, être installées au sein
des bâtiments publics.
Le 21 octobre 2016, le rapporteur
public Aurélie Bretonneau avait
déjà expliqué que la crèche était
un «objet mixte porteur d’une plu-
ralité de significations». Elle avait
estimé que cela n’interdisait pas par
principe l’installation d’une crèche
sauf si elle manifeste «un geste de
reconnaissance d’un culte».