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Communiqué de presse
Bruxelles, le 8 octobre 2013
Le Prix Nobel de physique est décerné à François Englert, professeur émérite de
l’Université libre de Bruxelles, et à Peter Higgs, Université d’Édimbourg
Ce mardi 8 octobre, le Prix Nobel de Physique a été attribué au Belge François Englert,
Université libre de Bruxelles, et au Britannique Peter Higgs, Université d’Édimbourg. Avec
le défunt Robert Brout (Université libre de Bruxelles également), ils ont proposé en 1964 un
mécanisme théorique qui joue un rôle essentiel dans notre compréhension de l’univers.
L’ULB compte désormais 4 Prix Nobel scientifiques (sur 6 attribués à des Belges).
Le boson de Brout-Englert-Higgs impliqué par leurs théories a attendu près de cinquante ans
avant d’être découvert, en juillet 2012, par les collaborations CMS et ATLAS au grand
collisionneur de hadrons, le LHC du CERN, à Genève.
En 1964, Robert Brout et François Englert, suivis immédiatement (et indépendamment) par
Peter Higgs, signaient dans Physical Review Letters un article qui relie l’électromagnétisme,
interaction à portée infinie, à l’interaction « faible » de la radioactivité, dont la portée est
limitée au noyau de l’atome. Un mécanisme dit « de brisure spontanée de symétrie »
unifierait en effet ces deux types d’interactions, en donnant une masse aux particules
porteuses de l’interaction faible. Ce mécanisme expliquerait également, de manière plus
générale, l’origine de la masse de tous les constituants élémentaires de la matière, et
fournirait donc un élément décisif dans la construction du « Modèle standard » des particules
élémentaires. Cette théorie implique l’existence d’une particule auxiliaire, de nature scalaire,
le boson de Brout-Englert-Higgs (BEH).
Diplômé ingénieur et docteur en sciences physiques de l’Université libre de Bruxelles,
François Englert est nommé chargé de cours à l’ULB en 1961, puis professeur en 1964. De
1980 à 1998 (date de sa retraite), François Englert dirige le service de Physique théorique
de l’ULB qu’il continue à fréquenter aujourd’hui, à 81 ans.
Au cours de sa carrière, François Englert s’est vu décerner de nombreux prix — souvent
avec son collègue et ami Robert Brout, décédé en 2011 — : Prix Francqui (1982) ; prix de la
Département
Relations
Extérieures
Service Communication Recherche
Nancy Dath, T : +32 (0)2 650 92 03, +32 (0) 473 97 22 56
Nathalie Gobbe, T : +32 (0)2 650 92 06, +32 (0)474 84 23 02
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Société européenne de physique (1997) ; Prix de physique de la Fondation Wolf (2004) ; Prix
J.J. Sakurai de la Société américaine de physique (2010) ; Prix Prince des Asturies pour la
recherche scientifique et technique (2013).
Fierté supplémentaire pour l’ULB : son équipe de physique expérimentale des particules est
impliquée très activement dans l’expérience CMS, l’une des deux expériences du CERN qui
ont découvert le boson de Brout-Englert-Higgs.
L’attribution à un professeur de l’ULB d’un Prix Nobel de physique – le premier décerné à un
Belge ! – n’est pas un hasard. L’Université libre de Bruxelles affiche en effet une longue
tradition d’excellence en physique, récompensée par de nombreux prix.
L’excellence de la recherche de l’ULB ne se limite toutefois pas à la physique. Dans les
sciences fondamentales, l’ULB se distingue de manière exceptionnelle, avec les
contributions de Robert Brout et François Englert en physique théorique, ou celles d’Ilya
Prigogine en chimie théorique, qui lui ont valu le prix Nobel de chimie en 1977. En
mathématiques, l’ULB compte parmi ses anciens étudiants et enseignants Jacques Tits qui a
reçu le prix Abel, et Pierre Deligne, la médaille Fields et le prix Abel. En médecine, l’ULB
s’enorgueillit de deux autres prix Nobel : Jules Bordet et Albert Claude...
Au-delà de personnalités d’exception, ces succès s’expliquent par l’attachement profond de
l’ULB à la liberté de chercher dont bénéficient ses chercheurs, ainsi que par son ouverture
internationale exceptionnelle.
http://www.ulb.be/nobel
Photos et vidéos disponibles pour la presse sur http://bit.ly/ulb-nobel-presse
Contact presse :
Dath Nancy,
+32 (0)2 650 92 03 ou +32 (0) 473 97 22 56, [email protected]
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François Englert
En quelques questions
Ce prix récompense une théorie formulée en 1964. Rappelez-nous comment elle est
née.
François Englert : En 1961, le professeur Robert Brout et moi avons rencontré, à l’Université
de Cornell, Yoichiro Nambu qui introduisit en théorie des particules élémentaires la brisure
spontanée de symétrie et qui recevra le prix Nobel de physique en 2008. Nous avions alors
commencé à étudier la théorie des particules élémentaires. À l’époque, les forces à longue
portée (c’est-à-dire agissant sur des objets très éloignés) étaient bien comprises et certains
scientifiques pensaient qu’on pouvait ainsi comprendre les phénomènes depuis l’échelle de
l’atome jusqu’aux limites de l’univers observable. Mais les forces à courte portée agissant
au niveau nucléaire et subnucléaire restaient mystérieuses. Nous basant sur la brisure de
symétrie introduite par Nambu, nous avons construit un mécanisme engendrant des forces à
courte portée à partir de celles à longue portée. Ce mécanisme opérait en donnant une
masse aux particules transmettant ces forces et plus généralement pouvait engendrer les
masses de tous les constituants élémentaires de la matière. En 1964, nous étions sûrs de la
cohérence logique de notre théorie même si nous n’en voyions pas encore toutes les
implications précises et nous avons publié notre article dans Physical Review Letters.
Quelques semaines plus tard, l’Écossais Peter Higgs introduisait lui aussi ce mécanisme.
Notre théorie implique l’existence d’une particule, le « boson de Brout-Englert-Higgs » que le
CERN a découvert l’année dernière. Dès 1967, ce mécanisme est devenu un des éléments
essentiels du « modèle standard » des interactions fondamentales initié par la théorie
électrofaible de Steven Weinberg.
L’« aventure du boson », vous l’avez vécue avec votre complice pendant plus d’un
demi-siècle, Robert Brout.
François Englert : Nous nous sommes rencontrés en 1959, aux États-Unis. Nous sommes
très vite devenus amis. Nos visions sur la physique étaient très complémentaires : lui avait
une approche plutôt anglo-saxonne basée d’abord sur l’image intuitive puis suivie du
développement théorique tandis que j’avais une démarche plus latine, allant du formel à
l’image. Et surtout, tous les deux, nous voyions la physique et la connaissance en général
comme devant échapper à la spécialisation. Malheureusement, mon ami Robert Brout est
disparu en mai 2011.
La physique, c’était une voie toute tracée pour vous ?
François Englert : Pas vraiment puisque je me destinais à être ingénieur et je me suis donc
inscrit à l’École polytechnique de Bruxelles. Pendant mes études, je me suis rendu compte
que ce qui m’intéressait, c’était comprendre les lois qui régissent les phénomènes et moins
comment les utiliser techniquement. Diplômé, j’ai poursuivi des études de physique, puis un
doctorat. Pendant mes études, j’avais rencontré le Français Pierre Aigrain dont j’étais
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devenu l’assistant à l’ULB ; j’ai d’ailleurs signé avec lui mon premier ouvrage, intitulé « Les
Semiconducteurs ». À l’époque, le professeur Robert Brout voulait accueillir un chercheur
dans son laboratoire à l’Université de Cornell aux États-Unis, il a demandé conseil à Pierre
Aigrain et je me suis retrouvé invité là-bas. C’était en 1959.
En 1961, vous décidez de rentrer à l’ULB
François Englert : Oui, à la fin de mon postdoctorat, l’Université de Cornell m’a offert un
poste, mais j’ai refusé : la Belgique me manquait ; je suis revenu à l’ULB comme chargé de
cours. Et Robert Brout m’a suivi. Il aimait la culture européenne — c’était en particulier un
amateur d’arts —, il était marié à une Européenne, il a décidé de venir à Bruxelles et a fini
d’ailleurs par résilier la nationalité américaine au profit de la belge. À partir de 1980, nous
avons dirigé ensemble le Service de Physique théorique en Faculté des Sciences.
À 81 ans, vous continuez à vous rendre à votre bureau à l’ULB. La curiosité
scientifique vous titille toujours ?
François Englert : Oui, vous savez, la physique, c’est un peu une drogue ! J’ai toujours voulu
m’amuser dans ma recherche ; j’ai choisi mes sujets selon ma curiosité du moment et le
plaisir que j’avais à collaborer avec certains collègues. Nous ne vivons bien sûr pas à la
Renaissance, les connaissances sont devenues trop vastes pour les maîtriser toutes, mais il
n’est pas nécessaire d’avoir tout lu sur un sujet pour s’y intéresser. L’important est avant tout
d’apprendre à discerner l’essentiel de l’accessoire pour ensuite s’y plonger.
Le plaisir de la création scientifique est lié à une certaine forme d’esthétisme, comme chez
l’artiste. Sans être déiste, le chercheur peut se demander : si j’étais Dieu, comment aurais-je
créé les choses ?
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Curriculum Vitae
Date de naissance : 6 novembre 1932
Nationalité : Belge
Education
1955 Degree in Electrical-Mechanical Engineering, Université libre de Bruxelles,
Belgium
1958 Degree in Physical Sciences, Université libre de Bruxelles, Belgium
1959 PhD in Physical Sciences, Université libre de Bruxelles, Belgium
Academic Career
1956-1959 Assistant, Université libre de Bruxelles, Belgium
1959-1960 Research Associate, Cornell University (Ithaca), USA
1960-1961 Assistant Professor, Cornell University (Ithaca), USA
1961-1964 Lecturer, Université libre de Bruxelles, Belgium
1964-1998 Professor, Université libre de Bruxelles, Belgium
1980-1998 Director (with Robert Brout) of the Theoretical Physics Service at the
Université libre de Bruxelles, Belgium
Scientific Awards
1977 A. Wetrems Prize in Mathematical and Physical Sciences awarded by the
Académie royale de Belgique “For his work on spontaneous symmetry
breaking in elementary particule physics".
1978 First Prize in the International Gravity Contest (with Robert Brout and Edgar
Gunzig) awarded by the Gravity Research Foundation for “The Causal
Universe”'. This work introduced for the first time the inflation mechanism in
cosmology.
1982 Francqui Prize, awarded by the Fondation Francqui once every three years in
exact sciences,
- “For his contribution to the theoretical understanding of spontaneous
symmetry breaking in the physics of fundamental interactions, where, with
Robert Brout, he was the first to show that spontaneous symmetry breaking in
gauge theories gives mass to the gauge particles",
- “For his extensive contributions in other domains, such as solid state physics,
statistical mechanics, quantum field theory, general relativity and cosmology",
- “For the originality and the fundamental importance of these achievements".
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