32 SERVICE 07/06 Le cycle ovarien et ses principaux troubles Le bon déroulement d’un cycle ovarien bien réglé et synchronisé est une condition indispensable pour garantir une bonne fécondité. Pour qu’une vache vienne en chaleurs, il faut une mosaïque parfaite de différentes hormones, qui sont commandées sur plusieurs niveaux et par différents organes. 1ère partie: commande hormonale et facteurs d’influence Pour qu’une vache vienne en chaleurs, il faut une juste combinaison de diverses hormones. jbg. Dans cet article, nous expo­ sons la complexité des interactions entre hormones, nécessaires pour qu’une vache ait des chaleurs et soit portante. Une bonne connais­ sance des hormones qui partici­ pent au mécanisme de la reproduc­ tion est fondamentale pour comprendre les troubles de la fé­ condité qui seront traités dans la deuxième partie de cet article, pu­ bliée dans la prochaine édition de TORO. Les différents organes qui parti­ cipent à la reproduction communi­ quent entre eux par le biais d’hor­ mones: un organe sécrète une hormone définie et (dans la plu­ part des cas) il la libère dans le système circulatoire. L’hormone en question déclenchera une réac­ tion précise dans «l’organe cible». Les organes communiquent donc entre eux respectant une hiérarchie stricte selon le principe «comman­ de et rétrocontrôle». Les organes qui participent au cycle sexuel sont l’hypothalamus, l’hypophyse, les deux ovaires et la matrice. Le centre sexuel se situe dans le cerveau Le centre sexuel dans le cerveau se situe tout en haut de l’échelle hié­ rarchique. C’est ici que la «déci­ sion» de débuter un nouveau cycle ou non est prise. Des éléments ex­ ternes (lumière, environnement ou stress), pour lesquels les informa­ tions sont transmises au cerveau, peuvent influencer cette décision. C’est également le cas pour les élé­ ments internes, par exemple l’état du métabolisme, qui sont enregis­ trés par le cerveau. Par le biais d’une hormone (GnRH), le centre sexuel, à savoir l’hypothalamus, amène l’hypophyse à produire une deuxième hormone (FSH) qui sti­ mule la maturation des ovules dans les follicules. Ovules et follicules Au moment de la naissance d’une vachette, les ébauches de milliers d’ovules sont déjà présentes sur les ovaires. Ils se trouvent au repos, jusqu’au moment où ils seront activés par l’hormone sécrétée par l’hypophyse. La FSH incite les cellules qui entourent étroitement l’ovule au repos à se développer en vésicule remplie de liquide (folli­ cule). Par ailleurs, l’ovule lui­ même, sous l’effet de l’hormone, poursuit son développement; il de­ vient fécond. Ainsi, plusieurs ovules croissent à chaque cycle. Par un mécanisme compliqué, un seul ovule sera sélectionné pour arriver à maturité complète. Ce dernier commence à produire l’hormone responsable des cha­ leurs (œstrogène), inhibant ainsi la maturation des autres ovules. Il peut arriver que ce mécanisme d’inhibition soit perturbé. De ce fait, deux follicules arrivent à maturité ce qui conduit à une ges­ tation gémellaire (deux ovules). L’œstrogène sécrété par l’ovule mature déclenche, chez la vache, les symptômes typiques des cha­ leurs. Il modifie d’une part les organes sexuels; davantage irri­ gués, ces organes se colorent de rouge, des glaires cervicales sont produites et s’écoulent par le col ouvert de la matrice. La matrice elle­même se contracte et se dur­ cit. D’autre part, l’augmentation du taux d’œstrogène modifie le comportement des vaches. Elles beuglent, sont agitées et tentent de chevaucher leurs congénères. Le pic d’œstrogène déclenche ensuite le reflexe d’immobilisation au niveau du cerveau, la vache ac­ cepte le chevauchement. Les cha­ leurs principales commencent. En même temps, le taux élevé d’œs­ trogène signale à l’hypothalamus qu’un ovule mature se trouve sur un des ovaires. L’ovulation En réaction au taux d’œstrogène élevé, l’hypothalamus augmente encore la production de la même hormone (GnRH) qui servait à la stimulation des ovules. Ce fai­ sant, il déclenche la production de l’hormone qui induit l’ovulation (LH), dans l’hypophyse. Pour provoquer l’ovulation, il faut tou­ tefois un taux très élevé de cette hormone, taux qui n’est mesuré que pendant une très courte durée (environ 30 minutes) dans le sang. La quantité d’hormone né­ cessaire ne peut être garantie que si l’hypophyse avait constitué auparavant un réservoir suffisant de LH. Sous l’effet de cette hor­ mone, la paroi du follicule se dé­ chire et l’ovule est expulsé dans l’oviducte – qui entoure l’ovaire en vue de réceptionner l’ovule – avec le liquide qui était présent dans le follicule. Corps jaune Dans la cavité laissée par le folli­ cule sur l’ovaire, un corps jaune se développe à présent, également sous l’effet de l’hormone LH. Après une semaine, le corps jaune a atteint sa forme typique, assimi­ lable à celle d’un bouchon de champagne. Le corps jaune pro­ duit également une hormone, la progestérone. Quatre jours après l’ovulation, cette hormone peut être détectée dans le sang. La pro­ gestérone incite la matrice à se préparer à accueillir une éventuel­ le gestation. Ainsi la sécrétion de glaires typiques des chaleurs cesse et les muqueuses utérines se met­ tent à produire des glaires nutriti­ ves qui permettraient d’alimenter l’embryon durant les trois premiè­ res semaines suivant la féconda­ tion. Par ailleurs, le col de la ma­ trice se ferme, hermétique aux germes qui pourrait pénétrer de l’extérieur dans l’utérus et mettre l’embryon en danger. La progesté­ rone exerce également un effet «apaisant» sur le comportement 1 Ovaire (taille réelle env. 3 cm) avec un follicule mur1 33 SERVICE 07/06 de la vache et informe le cerveau que l’ovula­ tion a eu lieu et qu’une gestation est plausible. Cette information de rétrocontrôle inhibe la sécrétion de l’hormone stimulante dans l’hy­ pothalamus. Le 16 e jour suivant la fécondation La fécondation de l’ovule a lieu dans l’oviduc­ te. A partir de là, l’embryon de taille micros­ copique nécessite trois jours pour arriver dans la matrice. Arrivé au but, il flotte tout d’abord librement dans un des replis de la muqueuse et débute sa croissance longitudinale. Le 16e jour suivant la fécondation, l’embryon envoie un signal de type hormonal (interféron) à l’utérus, signe pour la vache qu’elle est portante. Si l’embryon est viable, il se niche dans la ma­ trice et la situation hormonale (production de LH par le corps jaune) reste en principe in­ changée jusqu’à la naissance du veau. Il est donc capital que l’embryon soit suffisamment vigoureux, le 16e jour, pour envoyer le signal décisif à la matrice. Si le signal n’est pas en­ voyé aux muqueuses utérines, au 17e jour du cycle, la matrice commence la production d’une nouvelle hormone, la prostaglandine F2a. Cette dernière fait cesser le fonctionne­ ment du corps jaune sur l’ovaire. Par consé­ quent, le taux de LH diminue dans le sang, le blocus de l’hypothalamus est levé et la stimu­ lation des ovaires débute à nouveau. Trois jours s’écoulent encore jusqu’au début des nou­ velles chaleurs, le cycle comporte ainsi 21 jours. Dans la prochaine édition de TORO, vous pourrez vous informer sur les principaux troubles et problèmes liés au cycle ovarien. La «décision» de démarrer un nouveau cycle ou non est prise dans le centre sexuel du cerveau. Par la sécrétion de l’hormone GnGR, l’hypothalamus induit l’hypophyse à débuter la production de FSH (follicle-stimulatinghormone) qui déclenche alors le processus de maturation d’un follicule. Sous l’effet de la FSH, plusieurs follicules murissent sur les deux ovaires. Un seul arrivera à maturité complète et produira de l’œstrogène, provoquant chez la vache les chaleurs et les symptômes typiques associés. œstrogène Dans la cavité laissée sur l’ovaire, par le follicule après l’ovulation, un corps jaune se forme. Par sa production hormonale, celui-ci induit les préparatifs pour une gestation: la matrice modifie ses fonctions et la production hormonale dans le centre sexuel est inhibée. œstrogène L’œstrogène informe l’hypothalamus qu’un follicule mature se trouve sur un des ovaires. L’hypothalamus réagit avec une production supplémentaire de GnGR pour inciter l’hypophyse à sécréter l’hormone LH. Progestérone 20 SERVICE 08/06 Cycle ovarien – troubles les plus fréquents Lorsque la communication entre les organes participant au cycle ovarien ne fonctionne pas, cela se manifeste par des troubles de la fécondité. En tant que problème survenant à l’échelle du troupeau, les absences de chaleurs, les chaleurs silencieuses, les kystes et les retours fréquents en chaleurs indiquent des «difficultés de communication hormonale»: Partie 2: Troubles de la fécondité dus aux hormones cas de multiplication de chaleurs silencieuses, il s’agit de contrôler la teneur en graisse du lait, la consistance des déjections et le comportement de rumination des animaux concernés. Une acidification de la panse survient généralement à cause d’un manque de structure dans la ration, un mauvais ordre des aliments (aliments riches en énergie donnés au début du repas et non à la fin) ou trop d’aliments riches en énergie à la fois (p. ex. plus de 1.5kg de concentrés par repas). Avec une observation régulière des chaleurs, on détecte souvent également les animaux présentant de faibles symptômes de chaleurs. jbg. Des «malentendus» peuvent arriver à tous les niveaux du cycle sexuel et avoir divers effets sur la fécondité. Les troubles de la fécondité les plus importants (à l’échelle du cheptel) sont: Absence de chaleurs (acyclie) – les vaches ne démarrent pas Lorsque le cycle des vaches ne démarre pas après le vêlage, celles-ci souffrent dans la plupart des cas d’un déficit énergétique au début de la lactation. Une grande perte de poids après le vêlage, de faibles teneurs en protéine et des teneurs élevées en graisse dans le lait, un appétit insuffisant et des résultats positifs au test à l’acétone sont des signes typiques. Une nouvelle gestation n’a pour l’instant pas la priorité pour un tel organisme: la vache essaie en premier lieu d’assurer la survie du veau nouveau-né par une bonne production laitière. C’est d’ailleurs la raison pour laquelle elle se retrouve en déficit énergétique. Une nouvelle gestation signifierait une charge supplémentaire pour le métabolisme énergétique. Celle-ci est évitée par un cycle qui ne démarre simplement pas. En cas de déficit en énergie, une hormone métabolique est produite dans le foie, empêchant la production hormonale au niveau du centre sexuel. C’est seulement lorsque le métabolisme revient à la normale que le cycle peut à nouveau se mettre en place. Chaleurs silencieuses – les vaches ne se manifestent pas Les chaleurs «silencieuses» représentent un autre problème répandu. Alors que le cycle ovarien se déroule normalement à l’intérieur du corps de la vache, aucun symptôme extérieur de chaleurs n’est visible. C’est-à-dire que les follicules ne sont pas capables de produire suffisamment d’hormone (œstrogène). Plus la quantité d’œstrogène produite est grande, plus les symptômes des chaleurs sont forts. Les «chaleurs silencieuses» ont ainsi des manifestations diverses: une partie des animaux touchés ne se manifeste plus du tout, une partie produit un peu de glaires ou saigne sans présenter d’autres symptômes; parfois le comportement des animaux se modifie seulement légèrement. Une bonne observation des chaleurs est alors absolument nécessaire, afin que de tels animaux soient détectés. Le manque d’énergie et surtout l’acidose latente ou chronique de la panse conduisent à une diminution de la production d’œstrogène. En Kystes – l’ovulation est perturbée Un taux élevé d’œstrogène est également important afin que le centre sexuel déclenche l’ovulation. Ce seuil semble être différent d’un animal à l’autre et dépendre de l’état métabolique de la vache. Si l’ovulation est déclenchée plus de 24h après le début des chaleurs principales, on parle d’«ovulation retardée». Dans ce cas, l’insémination est trop précoce si, pour l’effectuer, on respecte le délai habituel de 12–24 heures après l’apparition du reflexe d’immobilisation. Si le signal (LH) qui induit l’ovulation manque, la croissance du follicule se trouvant sur l’ovaire est encore stimulée (au moyen de la FSH). Lorsque le follicule dépasse une taille de 2cm, on parle de kyste. Les kystes qui se forment à cause d’un manque en œstrogène restent souvent sans symptôme et ne sont généralement décelés que lors d’un contrôle par le vétérinaire. Un kyste «typique» par ses symptômes, avec des chaleurs permanentes, des ligaments du bassin relâchés etc. a généralement une autre cause. Dans ce cas, le follicule est certes en état de produire suffisamment d’œstrogène, l’ordre de déclencher l’ovulation est également donné correctement par le centre sexuel, mais l’hypophyse ne peut pas réagir à cette commande; car le réservoir de LH, qu’elle aurait dû constituer, n’est que partiellement rempli. Des recherches expérimentales ont pu montrer que les vaches qui se trouvent en déficit énergétique ne peuvent produire qu’un tiers de la quantité nécessaire de LH. Avec cette quantité réduite de LH, une ovulation ne peut pas être provoquée sur l’ovaire. Dans d’autres cas, la sécrétion de LH par l’hypophyse ne concorde pas temporellement avec la maturation du follicule sur l’ovaire. La période durant laquelle la LH peut agir sur l’enveloppe du follicule est très courte. Si l’hypophyse sécrète son hormone avant ou après cette période, les récepteurs sur le follicule ne sont pas encore ou plus réceptifs à la LH. Cela explique pourquoi «aider» avec une «injection ovulatoire» reste souvent sans succès. Retours en chaleurs – l’embryon ne survit pas Les analyses ont montré que chez env. 75% des animaux qui reviennent en chaleurs 21 jours après une insémination, la fécondation de l’ovule a eu lieu et qu’il y avait déjà un embryon microscopique vivant dans l’utérus. Toutefois, soit l’embryon n’était pas viable au jour décisif (16e jour) et n’a ainsi pas pu envoyer à l’utérus un signal de maintien de la gestation, soit la muqueuse de l’utérus n’était pas capable de rece- Si l’ovulation n’est pas induite, le follicule continue à croître et devient un kyste. 21 SERVICE 08/06 voir ce signal. Il y a plusieurs raisons pourquoi les embryons meurent à un stade précoce. La plus fréquente est que le milieu dans l’utérus ne convient pas. En effet, celui-ci se modifie de manière drastique lorsque la vache souffre d’acidose (acétonémie) à cause d’un déficit en énergie suite à des erreurs d’affouragement ou présente des valeurs d’urée très élevées (> 35mg/dl de lait) à cause d’un surplus de protéine dans la ration. L’embryon ne peut pas survivre dans de telles conditions. Lorsque le milieu utérin est modifié par une inflammation infectieuse, l’embryon n’a également aucune chance. La raison principale pourquoi l’utérus ne reconnait pas le signal d’un embryon vivant réside dans le fait que la vache a été réinséminée trop tôt après le dernier vêlage et que l’utérus n’a pas pu se rétablir suffisamment après la dernière gestation. On ne peut que supposer la vraie cause de retours en chaleurs. De l’extérieur, on remarque seulement que les animaux reviennent toujours en chaleurs (apparemment sans raison). Surtout lorsque le cycle est plus long que 21 jours, on peut présumer qu’un embryon était présent, mais qu’il n’a pas survécu. Si le métabolisme d’une vache fraîchement vêlée dérape, parce que son déficit énergétique est trop grand, le foie produit une hormone qui empêche la production hormonale (GnRH) dans le centre sexuel. Par la suite, aucune hormone (FSH) n’est produite pour stimuler la maturation du follicule. Afin que l’équilibre énergétique ne soit pas plus chargé par une nouvelle gestation, le cycle de la vache ne démarre pas et ce jusqu’à ce que la situation d’approvisionnement se soit améliorée. Une acidification de la panse a souvent pour conséquence une production réduite d’œstrogène. Les vaches ne se manifestent pas correctement, elles présentent des «chaleurs silencieuses». La clarté des symptômes de chaleurs est différente d’un animal à l’autre. Règle de base: plus il y a d’œstrogène, plus les symptômes des chaleurs sont marqués. De plus, s’il manque au centre sexuel le «feedback» signalant qu’il y a un follicule mûr sur l’ovaire, le mécanisme qui devrait déclencher l’ovulation peut être perturbé. œstrogène Si la sécrétion de LH ne concorde pas temporellement avec la maturation du follicule, un kyste peut également se produire. La période durant laquelle la LH peut induire une ovulation est très courte. L’apparition d’une ovulation dépend non seulement de la quantité de LH produite, mais également du moment de sa libération et de la sensibilité à la LH des récepteurs sur le follicule. Cela explique pourquoi «aider» avec une «injection ovulatoire» reste souvent sans succès. œstrogène Si le mécanisme de «feedback» via l’œstrogène fonctionne, indiquant qu’il se trouve un follicule mûr sur l’ovaire, le centre sexuel de l’hypophyse donne le signal (GnRH) pour déclencher l’ovulation. Chez de nombreuses vaches avec un déficit en énergie, le réservoir de LH n’est pas suffisamment rempli. La quantité réduite de LH ne suffit souvent pas à l’ovulation. Il se produit un kyste actif au niveau hormonal. œstrogène