Atelier d’ouverture :
Les gestes du grammairien p. 260-263
Démarche
Cet atelier d’ouverture de la partie langue a pour objectif de
mettre les élèves en posture de grammairiens : il doit leur
permettre de mettre en place des procédures de réflexion sur
la langue comme objet d’étude pour en faciliter son acquisi-
tion et favoriser une utilisation consciente des moyens qu’elle
offre.
Il vise à faire prendre conscience aux élèves que la grammaire
est à la fois un ensemble de règles à suivre afin d’être compris,
mais aussi la science qui étudie ces mêmes règles. La gram-
maire est donc autant à celui qui écrit ou dit qu’à celui qui lit
ou entend.
La démarche est à la fois résolument inductive et réflexive :
l’enjeu est d’attirer l’attention des élèves sur des gestes essen-
tiels et des niveaux d’analyse différents (texte, phrase, mot) et
de leur permettre d’expliciter leur démarche.
Choix du support
Nous avons choisi le texte de Grand Corps Malade afin d'éveil-
ler la curiosité des élèves et de les surprendre. C’est aussi
l’occasion d’étudier un genre particulier, la chanson, parce
qu’elle se singularise comme co-présence de la langue et de
la musique. Cette particularité nous a semblé très intéres-
sante pour attirer l’attention des élèves sur les liens entre oral
et écrit. En outre, ce choix permet de faire entrer les élèves
dans l’analyse du texte par l’écoute (lienmini de la partie 1).
On n’oubliera cependant pas de leur rappeler que le slam
repose, à l’origine, sur la prédominance du texte, récité a
capella, sans autre musicalité que celle des mots et de la voix.
C’est dans les versions concert et CD qu’apparaissent les
instruments. On pourra interroger avec profit les élèves sur
le choix des instruments qui accompagnent la déclamation.
Le piano, instrument noble et à cordes, répond à l’accordéon,
instrument à vent plus populaire.
« J’écris à l’oral » se veut un pied de nez à la linguistique
qui considère souvent la frontière entre écrit et oral comme
infranchissable. Or, avec ce texte, nous sommes en présence
d’un écrit oralisé qui occupe une position intermédiaire entre
l’écrit formel et l’oral spontané, mettant en œuvre une véri-
table hybridation stylistique. Le texte respecte la forme cano-
nique de la poésie et se présente donc d’emblée comme un
écrit très codifié et élaboré ; l’artiste se présente d’ailleurs
comme un artisan des mots (« j’ai de l’encre plein la bouche »).
Néanmoins, on repère de nombreux éléments caractéris-
tiques du français familier et de l’oralité qui confèrent au texte
un effet d’oral spontané.
Enfin, l’artiste cherche et prend plaisir à surprendre voire à
piéger son auditeur par le jeu sur et avec les mots : le sup-
port écrit se révèle nécessaire pour éviter les pièges et lever
les ambigüités. Les élèves découvrent alors que le grammai-
rien est celui qui utilise toutes les potentialités de la langue
non pour analyser mais pour créer. En mesurant les écarts par
rapport aux règles établies par la grammaire, ils comprennent
la nécessité de les maitriser pour pouvoir s’en éloigner et affir-
mer ainsi leur singularité et leur liberté.
Objectifs pédagogiques
– Mettre les élèves en position de grammairiens qui observent,
manipulent, débattent et tirent des conclusions.
– Faire prendre conscience aux élèves que le grammairien est
celui qui étudie un texte mais aussi celui qui le produit, à l’écrit
comme à l’oral.
– Faire comprendre aux élèves que le choix des mots est
motivé par leur sonorité, ce que l’on veut dire et l’effet que
l’on veut produire.
– Faire découvrir aux élèves les indices linguistiques et séman-
tiques dont ils disposent pour mieux comprendre un texte.
– Développer l’envie de coopérer et montrer l’intérêt de ce
travail dans la construction du sens.
– Donner envie de s’exprimer.
Mise en œuvre
Constitution des groupes
L’enseignant demande aux élèves de constituer des groupes
de trois ou quatre. Il respecte, autant que faire se peut, leurs
affinités : la langue doit être un endroit où ils se sentent bien.
Pour s’assurer du bon déroulement de la séance, on pourra
demander à chacun de remplir une fonction particulière : le
maitre du temps veille à l’efficacité du groupe et à la parti-
cipation de chacun, l’observateur note les points positifs et
fait des suggestions d’amélioration, le secrétaire prend des
notes, le rapporteur présentera à la classe les conclusions de
son groupe.
Déroulement
Après avoir insisté auprès des élèves sur le fait qu’on attend
qu’ils se mettent dans la position du grammairien qui observe,
analyse et tire des règles de ses observations, le travail de
groupes peut commencer.
Plusieurs modalités sont possibles :
– ménager des plages de mises en commun à la fin de chaque
partie ;
– laisser les élèves travailler en autonomie sur l’ensemble de
l’atelier et ne faire une mise en commun qu’à la fin, pour le
« Qu’avons-nous découvert sur les gestes du grammairien ? » ;
– attribuer à chaque groupe une seule partie de l’atelier pour
faire apparaitre de façon concrète la nécessité des niveaux
différents de (re)lecture lors de la lecture ou de la production
d’un texte.
Quelle que soit la modalité choisie, la mise en commun doit
être l’occasion pour les élèves d’utiliser différents types d’écrit
comme supports de l’oral (schémas, cartes mentales, prise
de notes) et de travailler sur le passage de l’écrit à l’oral dans
cette phase de l’atelier.
L’atelier étant proposé en ouverture de la partie langue des
trois niveaux du cycle, on tendra à accorder davantage de
temps, au fil des années, à la mise en œuvre de l’activité finale,
les élèves devant parvenir à une production de plus en plus
longue et élaborée.
Rôle de l’enseignant
L’enseignant passe parmi les groupes pour observer et écou-
ter ses élèves : il prend ainsi conscience du niveau de maitrise
des savoirs et des savoir-faire de la classe. C’est à partir de ce
diagnostic qu’il pourra construire sa progression annuelle
en langue. Il peut également « débloquer » la réflexion d’un
groupe et relancer la motivation d’un autre, ou apaiser les
éventuelles tensions : travailler en groupe s’apprend !
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© Magnard, 2016 – Jardin des Lettres 3e – Livre Ressources