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Les Anges meurent
de nos blessures
de Yasmina Khadra
Adaptation et mise en scène René Chéneaux
Scénographie Chantal Hocdé
Lumières Charly Thicot
Interprètes
Rachid Benbouchta
Catherine Le Hénan
Jean-Baptiste Siaussat
Photo Louis Jammes
Calendrier
19, 20, 21, 22 novembre 2014 >Théâtre du Hublot/Colombes(92).
10 janvier 2015 >Théâtre du Cormier/Cormeilles-en-Parisis
28 février, 7, 14, 21, 28 mars 2015 > Péniche l’Eau & les
Rêves/Paris 19ème.
Contact diffusion
Cie Kick théâtre/La Traversée, René Chéneaux
06 66 42 05 87 - [email protected]
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LES ANGES MEURENT DE NOS BLESSURES
De Yasmina Khadra
La pièce
L’équipe de création de Trois voix pour Les sirènes Bagdad adapte au théâtre le nouveau
roman de Yasmina Khadra. Les Anges meurent…raconte l’histoire d’un boxeur dans l’Algérie
des années 20. Ce roman passionné et passionnant, raconté au présent, donne une actualité et
une acuité à cette Histoire - loin de la Nostalgéria contenue dans certains récits sur cette
période. De plus, Yasmina Khadra revient sur les traces de Camus –le roman se passe à Oran,
comme La Peste -, et l’on y retrouve les accents humanistes de l’auteur de l’Homme Révolté.
Extrait
Récitante Je n’avais jamais vu mon oncle, lui le pieux, le sage de vingt ans et toujours, dans un tel état de
mépris et content du mal qu’il se préparait à m’infliger car je devinais qu’il ne m’avait pas conduit là pour
m’éveiller à mon devoir mais pour me punir de façon que j’en garde les séquelles jusqu’à la fin de mes jours.
Turambo Pourquoi m’amènes-tu ici ?
Mekki Tu n’as qu’à entrer là-dedans pour le savoir.
Turambo Tu crois que mon père est enterré parmi les juifs ?
Mekki Il veille seulement sur leurs morts.
Récitante Mekki me poussa à l’intérieur du cimetière, chercha du regard quelque chose et finit par m’indiquer
un homme assis en tailleur sur le pas d’une guérite. Ce dernier était en train de farcir son bout de pain de
rondelles d’oignons et de tranches de tomates. Au moment où il s’apprêta à mordre dans son sandwich, il
remarqua notre présence. Je le reconnus aussitôt. C’était ma gueule cassé de père, plus maigre qu’un
épouvantail et tout aussi dépareillé. Mon cœur cogna si fort dans ma poitrine qu’il m’ébranla de la tête aux
pieds. La terre et le ciel se confondirent autour de moi et je dus m’agripper aux bras de mon oncle pour tenir sur
mes jambes, la pomme bloquée dans mon cou comme un galet avalé de travers.
Mekki Il aurait du mourir dans sa tranchée. Nous aurions au moins gardé de lui une médaille pour greffer à
notre deuil un semblant de fierté.
Récitante Le gardien nous dévisagea de ses yeux de rongeur. Lorsqu’il nous reconnu à son tour, il ploya sur sa
nourriture. Comme si de rien était. Comme si nous n’étions pas là. Comme s’il ne nous connaissait ni d’Eve ni
d’Adam. Si le sol s’était dérobé sous mes pieds à cet instant, je n’aurais pas hésité à le laisser m’engloutir.
Mekki J’espère que tu ne nous casseras plus les oreilles avec tes histoires de père, me dit Mekki. Il est bel et
bien vivant, comme tu peux le constater. Ce n’est qu’un pauvre type qui préfère sarcler les tombes plutôt que
balayer devant sa porte. Il a choisi le cimetière israélite pour qu’on ne le retrouve pas. Ici, a-t-il pensé, aucun
musulman ne viendrait le regarder de près. Encore moins sa propre famille larguée dans la nature.
Récitante Il me prit par le bras et me bouscula hors du cimetière. Je n’arrivais pas à décrocher mes yeux de
l’homme en train de manger sur le pas de la guérite. Un sentiment insondable se répandit en moi telle une
coulée de plomb. J’avais une envie folle de fondre en larme mais je ne parvins ni à crier ni à gémir. Je me
contentais de fixer cet homme qui avait été mon père et mon idole et qui, désormais, m’était totalement étranger.
Il becquetait en nous ignorant. Rien ne semblait lui importer plus que son bout de pain dans lequel il mordait
avec un franc appétit. Je n’avais décelé sur son visage ni surprise, ni la moindre trace d’émotion. Hormis la
flammèche fugace qui avait traversé son regard lorsqu’il nous avait reconnu, tout son visage s’était refermé
comme une marre sur un pavé. J’avais un gros chagrin pour lui, même si je mesurais nettement combien, de tous
les enfants de la terre, j’étais le plus à plaindre.
Mekki Allons-nous-en. Tu as eu ta dose pour aujourd’hui.
Récitante Mes forces m’avaient lâché. Mon oncle me traînait presque. En sortant du cimetière, je vis mon père
fermer le portail derrière nous. Sans un regard. Sans une once de gêne…Un monde venait de s’éteindre, mais
j’ignorais lequel. Je m’étais retourné plusieurs fois dans l’espoir de voir le portail du cimetière s’ouvrir et mon
père se dépêcher de me rattraper. Le portail demeura clos. Je compris qu’il me fallait partir, m’éloigner,
disparaître. Mon oncle me parlait. Sa voix s’estompait avant de m’atteindre. Je n’entendais que mon sang battre
à mes temps. Les bâtisses défilaient de part et d’autre dans une sorte de buée fumante. Il faisait sombre dans le
jour. Mes pieds s’enfonçaient dans un sol cotonneux. La nausée contactait mon ventre, et je tremblais sous le
soleil.
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LES ANGES MEURENT DE NOS BLESSURES
De Yasmina Khadra
Note de mise en scène
L’adaptation
Comme dans Les Sirènes… , il s’agit d’adapter au théâtre le nouveau roman de Yasmina
Khadra, en un Livre vivant : une récitante, qui est l’allégorie de l’auteur, commente l’action
des acteurs, comme un journaliste commenterait un match de boxe.
La musicalité de la langue est centrale. Le travail de l’acteur tend à restituer la
rythmique psalmodiée propre à l’écriture de Yasmina Khadra.
La mise en scène
Des situations jouées, accentuant les actions physiques, parfois jusqu’à la danse, quand il
s’agit de combats.
Des images filmées, images d’archive qui représentent l’Algérie des années 20, ou
images directes des acteurs au plateau.
Une interaction entre le récit, l’action et l’image, interaction vivante qui produit du
sens et nous rend présentes les évocations de la mémoire.
La dramaturgie
Une dizaine de tableaux, comme autant de rounds, montrant l’ascension, la gloire et enfin la
chute de Turambo. Il s’agit de rester le plus factuel possible, à la manière d’une chronique ou
une biographie qui tend plus à établir des faits, qu’à les interpréter ou les juger.
La scénographie
La Récitante est placée à l’avant scène, avec un pupitre. Elle représente l’auteur, Yasmina
Khadra. Parfois, elle entre sur le plateau, au cœur de l’action.
Au centre du plateau, une toile carrée qui figure l’espace du combat, des actions physiques,
de la danse.
Au lointain, un écran qui reçoit des images d’archives des années 20, et des images des
acteurs filmés en live.
L’ambiance générale, accentuée par la lumière, est Cépia, à l’exception de rares couleurs
qui viennent souligner certains moments de l’action.
La place du spectateur
Les spectateurs représentent un Chœur dans ce théâtre aux accents de tragédie antique :
l’acteur s’adresse parfois directement à lui, parfois il est invité à se lever, parfois à participer
directement à l’action – comme dans les chorégraphies d’Alvin Nikolais. Les actions
physiques du spectateur contribuent à souligner le caractère rituel de la représentation.
René Chéneaux
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LES ANGES MEURENT DE NOS BLESSURES
De Yasmina Khadra
Parcours de la compagnie
Fondée en 1989 pour la création de Les amertumes de Koltès (Théâtre Rutebeuf/Clichy-la-Garenne), elle naît
d’une équipe d’acteurs qui se sont rencontrés à l’Ecole Internationale Jacques Lecoq. A partir de 91, elle mène
un travail d’implantation au Théâtre Firmin Gémier/Antony.
C’est avec le spectacle Personnes déplacées que la compagnie commence à inventer la création avec le public,
à partir de recueil de témoignages. Le travail artistique tend à s’inspirer de ressources réelles pour une mise en
correspondance du plateau et de la société.
1991 : création de Les Joueurs de Nicolaï Gogol, traduction André Markovicz (Théâtre Firmin Gémier,
Festival du Jeune Théâtre/Alès).
1993 : Personnes déplacées, écriture collective (Théâtre Firmin Gémier/Antony, Centre d’Art et d’Essai de
Mont-Saint-Aignan).
A partir de 1995, la compagnie reprend sa mobilité : Ile-de-France, Normandie, Région centre. Le travail avec
les publics se confirme, allant jusqu’à ouvrir la présence au plateau des publics-acteurs dans Elysée-Polka.
1995 : Les Enfants du diable de René Chéneaux (Théâtre Paul Eluard/Choisy-le-Roi, Gare au
Théâtre/Vitry sur Seine, théâtre Itinérant en Région Centre avec Nicolas Peskine).
1997-98-99 : Elysée-Polka, de René Chéneaux (Gare au Théâtre/Vitry, Théâtre Paris-Villette, Grande
Halle de la Villette, Espace Jules vernes/Brétigny-sur-Orge, Théâtre Jean Vilar/Vitry).
1999 : Vu du Ciel, de Ch. Angot, Ecole de répétition, CDN de Normandie.
De 2000 à 2005, la compagnie s’ouvre à des œuvres de répertoire dans le cadre d’un travail d’implantation au
Théâtre Louis Aragon/Tremblay.
Ce faisant elle s’efforce d’inventer un nouveau dialogue avec le public à partir des répétitions publiques, des
ateliers et des Rencontres théâtrales.
2001 : reprise de Les Joueurs de Nicolaï Gogol, traduction André Markowicz (Théâtre Louis
Aragon/Tremblay-en-France, Centre des Bords de Marne/Le Perreux-sur-Marne, Théâtre Le Vanves).
2003 : Le Convive de pierre d’Alexandre Pouchkine, traduction André Markovicz Théâtre Louis Aragon /
/Tremblay-en-France).
2004 : Le Voyage des comédiens d’après L’Orestie d’Eschyle, traduction Paul Mazon (Théâtre Louis
Aragon / Tremblay).
2005 : Les Choéphores d’Eschyle, traduction Paul Mazon (Théâtre Louis Aragon/Tremblay-en-France).
A partir de 2006, la Compagnie reprend sa mobilité.
2005 : Les Choéphores d’Eschyle, traduction Paul Mazon (Théâtre Louis Aragon/Tremblay-en-France).
Novembre 2006 : création de En attendant Godot de Samuel Beckett Théâtre Jean Vilar/Vitry, puis au
Théâtre Paul Eluard/Choisy-le-Roi. 2007 : Théâtre des Sources/Fontenay-aux-Roses, Théâtre du
Samovar/Bagnolet, Ferme de Bel Ebat/ Guyancourt, Forum/ Scène conventionnée de Blanc-Mesnil,
Centres de vacances de la CCAS, Théâtre du Pays de Morlaix.
En 2008, la Cie aborde Les Sirènes de Bagdad de Yasmina Khadra comme un texte ouvert à tous. Elle
entend traiter cette pièce comme un miroir des incertitudes d’aujourd’hui. Forum de Blanc-Mesnil, Th Le
Vanves, Festival Les Petits Riens/Côtes d’Armor, tournée CCAS, Th Jean Vilar/Vitry-sur-Seine, Centre
Culturel Algérien/Paris, La Merise/Trappes, Théâtre de Ferney-Voltaire, Festival d’Avignon/La
Manufacture, Théâtre du Cormier (95), Espace Magh/Bruxelles.
Mars 2009 : Création de Les Hommes sans nom, texte et mise en scène de René Chéneaux. Forum/Scène
conventionnée du Blanc-Mesnil, Le Théâtre Le Vanves, Ferme de Bel Ebat/Guyancourt.
2010 : Nord-Ost de Anna Politkovskaïa Théâtre du Hublot, Théâtre Le Vanves, Ferme de Bel
Ebat/Guyancourt, Gare au Théâtre/Vitry-sur-Seine, Avignon public off, Jardins d’hiver-Festival de th de
proximité/Val d’Oise
De 2010 à 2013, la Compagnie met en place un projet de compagnonnage avec Yasmina Khadra autour de la
notion de livre vivant, et anime dans le Val d’Oise, La Traversée, Centre de création théâtrale pour l’Enfance et
la Jeunesse.
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LES ANGES MEURENT DE NOS BLESSURES
De Yasmina Khadra
Curriculum vitae
Rachid Benbouchta
Il mène un parcours théâtral entre Paris et Bruxelles, notamment sous la direction de Gilles Bouillon
(CDR de Tours), Philippe Adrien (Théâtre de la Tempête), Henri Ronse, Otto Hubert, Christophe
Reymond, Agathe Alexis, Alain Barsacq (Comédie de Béthune), Christophe Perton (Comédie de
Valence), Jean-françois Politzer, Claude-Alice Peyrotte, Lofti Achour (Théâtre des Quartiers d’Ivry),
Xavier Percy, Jorge Lavelli (MC 93), Jean-Michel d’Hoop, René Chéneaux. Le monologue Saleté de
Robert Schneider, M en S : Henri Ronse révèle cet acteur singulier lors d’une importante tournée :
Bruxelles, Festival d'Avignon, Théâtre de Vidy-Lausanne, tournée française)
Au cinéma il travaille sous la direction de Pierre Grange, Yvan Lemoine, Georges Walker, Olivier
Jahan, Philippe Blasband, Edgardo Cozarinski, Frank Van Mechelen. A la télévision il est dirigé par
Claude-Michel Rome, Jean-Marc Vervoort, Patrick Dewolf.
Formation : Conservatoire National Supérieur d'Art Dramatique de Paris
Farid Bentoumi
Il mène un parcours théâtral sous la direction de Gino Zampieri (Phèdre.2007), Marion Suzanne (Frères
du Bled. 2005), Irina Brook (La bonne âme de Setchouan.2003-04), Claude Crétient (Vous qui habitez le
temps. Comédie. 2002), Laurent d’Aumal (George Dandin. 1998).
Au cinéma, il travaille sous la direction de Léa Fazer (Notre univers impitoyable. 2007), Saïd Ould-
Khelifa (Vivantes. 2006), Christophe Barraud (Homicides. 2006), Mehdi Lisi (Framed. 2004), Francis
Perrin (A un cheveu près. 2003).
Au théâtre, il met en scène : Un repas entre amis de P. Beheydt (Rencontres de la cartoucherie. 2005),
Novgorod Sortie Est (2005), Petit boulot pour vieux clown de Mattei Visniec (1999).
Il écrie deux scénarios : L’Migri (Documentaire en cours de réalisation), Le fils volé.
Formation : aux ateliers Sudden, avec R. Acquaviva, G. Shelley. Stages avec A. Mnouchkine, G. Freixe,
F. Giorgieti, A. Alexis.
Catherine Le Henan
Elle mène un parcours théâtral sous la direction de V.Grail (La Chance de ma vie.2007), de Philippe
Adrien (Andromaque. 2006), de Gérald Châtelain (Jouliks. 2005), de Philippe Adrien et Geneviève de
Kermabon (Cadavres exquis2004), de René Chéneaux (Le convive de pierre. 2003), de Geneviève de
Kermabon (drôlesses. 2002), de René Chéneaux (Elysée-Polka, les Enfants du diable, personnes
déplacées 1995-1999), de Patrick Colet (Les nuits blanches. 1994).
Au cinéma, elle travaille sous la direction de Thomas Bardinet (Soyons amis ! 1997), de Vincent
Dietschy (Julie est amoureuse), d’Andy Okoroafor (Modern love. 92), de Bruno Juminer (Besame
Mucho. 90).
Elle a réalisé des films documentaires : De rive à rive. 23 mn, Femmes Solidaires. 35 mn, Chroniques
adolescentes du monde ouvrier. 26 mn.
Depuis 1995, elle a doublé de nombreux films notamment sous la direction de Jean Pierre Dorat, Jean
Marc Pannetier, Béatrice Delphe, Fabienne Orain, Jean Louis Montagné, Laura Koffler…
Formation : Théâtre-Ecole du Passage, Ateliers Varan/Paris (Documentaire).
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