Dossier de présentation

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Les Anges meurent
de nos blessures
de Yasmina
Khadra
Adaptation et mise en scène René Chéneaux
Scénographie Chantal Hocdé
Lumières Charly Thicot
Interprètes
Rachid Benbouchta
Catherine Le Hénan
Jean-Baptiste Siaussat
Photo Louis Jammes
Calendrier
 19, 20, 21, 22 novembre 2014 >Théâtre du Hublot/Colombes(92).
 10 janvier 2015 >Théâtre du Cormier/Cormeilles-en-Parisis
 28 février, 7, 14, 21, 28 mars 2015 > Péniche l’Eau & les
Rêves/Paris 19ème.
Contact diffusion
Cie Kick théâtre/La Traversée, René Chéneaux
06 66 42 05 87 - [email protected]
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LES ANGES MEURENT DE NOS BLESSURES
De Yasmina Khadra
La pièce
L’équipe de création de Trois voix pour Les sirènes Bagdad adapte au théâtre le nouveau
roman de Yasmina Khadra. Les Anges meurent…raconte l’histoire d’un boxeur dans l’Algérie
des années 20. Ce roman passionné et passionnant, raconté au présent, donne une actualité et
une acuité à cette Histoire - loin de la Nostalgéria contenue dans certains récits sur cette
période. De plus, Yasmina Khadra revient sur les traces de Camus –le roman se passe à Oran,
comme La Peste -, et l’on y retrouve les accents humanistes de l’auteur de l’Homme Révolté.
Extrait
Récitante Je n’avais jamais vu mon oncle, lui le pieux, le sage de vingt ans et toujours, dans un tel état de
mépris et content du mal qu’il se préparait à m’infliger car je devinais qu’il ne m’avait pas conduit là pour
m’éveiller à mon devoir mais pour me punir de façon que j’en garde les séquelles jusqu’à la fin de mes jours.
Turambo Pourquoi m’amènes-tu ici ?
Mekki Tu n’as qu’à entrer là-dedans pour le savoir.
Turambo Tu crois que mon père est enterré parmi les juifs ?
Mekki Il veille seulement sur leurs morts.
Récitante Mekki me poussa à l’intérieur du cimetière, chercha du regard quelque chose et finit par m’indiquer
un homme assis en tailleur sur le pas d’une guérite. Ce dernier était en train de farcir son bout de pain de
rondelles d’oignons et de tranches de tomates. Au moment où il s’apprêta à mordre dans son sandwich, il
remarqua notre présence. Je le reconnus aussitôt. C’était ma gueule cassé de père, plus maigre qu’un
épouvantail et tout aussi dépareillé. Mon cœur cogna si fort dans ma poitrine qu’il m’ébranla de la tête aux
pieds. La terre et le ciel se confondirent autour de moi et je dus m’agripper aux bras de mon oncle pour tenir sur
mes jambes, la pomme bloquée dans mon cou comme un galet avalé de travers.
Mekki Il aurait du mourir dans sa tranchée. Nous aurions au moins gardé de lui une médaille pour greffer à
notre deuil un semblant de fierté.
Récitante Le gardien nous dévisagea de ses yeux de rongeur. Lorsqu’il nous reconnu à son tour, il ploya sur sa
nourriture. Comme si de rien était. Comme si nous n’étions pas là. Comme s’il ne nous connaissait ni d’Eve ni
d’Adam. Si le sol s’était dérobé sous mes pieds à cet instant, je n’aurais pas hésité à le laisser m’engloutir.
Mekki J’espère que tu ne nous casseras plus les oreilles avec tes histoires de père, me dit Mekki. Il est bel et
bien vivant, comme tu peux le constater. Ce n’est qu’un pauvre type qui préfère sarcler les tombes plutôt que
balayer devant sa porte. Il a choisi le cimetière israélite pour qu’on ne le retrouve pas. Ici, a-t-il pensé, aucun
musulman ne viendrait le regarder de près. Encore moins sa propre famille larguée dans la nature.
Récitante Il me prit par le bras et me bouscula hors du cimetière. Je n’arrivais pas à décrocher mes yeux de
l’homme en train de manger sur le pas de la guérite. Un sentiment insondable se répandit en moi telle une
coulée de plomb. J’avais une envie folle de fondre en larme mais je ne parvins ni à crier ni à gémir. Je me
contentais de fixer cet homme qui avait été mon père et mon idole et qui, désormais, m’était totalement étranger.
Il becquetait en nous ignorant. Rien ne semblait lui importer plus que son bout de pain dans lequel il mordait
avec un franc appétit. Je n’avais décelé sur son visage ni surprise, ni la moindre trace d’émotion. Hormis la
flammèche fugace qui avait traversé son regard lorsqu’il nous avait reconnu, tout son visage s’était refermé
comme une marre sur un pavé. J’avais un gros chagrin pour lui, même si je mesurais nettement combien, de tous
les enfants de la terre, j’étais le plus à plaindre.
Mekki Allons-nous-en. Tu as eu ta dose pour aujourd’hui.
Récitante Mes forces m’avaient lâché. Mon oncle me traînait presque. En sortant du cimetière, je vis mon père
fermer le portail derrière nous. Sans un regard. Sans une once de gêne…Un monde venait de s’éteindre, mais
j’ignorais lequel. Je m’étais retourné plusieurs fois dans l’espoir de voir le portail du cimetière s’ouvrir et mon
père se dépêcher de me rattraper. Le portail demeura clos. Je compris qu’il me fallait partir, m’éloigner,
disparaître. Mon oncle me parlait. Sa voix s’estompait avant de m’atteindre. Je n’entendais que mon sang battre
à mes temps. Les bâtisses défilaient de part et d’autre dans une sorte de buée fumante. Il faisait sombre dans le
jour. Mes pieds s’enfonçaient dans un sol cotonneux. La nausée contactait mon ventre, et je tremblais sous le
soleil.
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LES ANGES MEURENT DE NOS BLESSURES
De Yasmina Khadra
Note de mise en scène
L’adaptation
Comme dans Les Sirènes… , il s’agit d’adapter au théâtre le nouveau roman de Yasmina
Khadra, en un Livre vivant : une récitante, qui est l’allégorie de l’auteur, commente l’action
des acteurs, comme un journaliste commenterait un match de boxe.
La musicalité de la langue est centrale. Le travail de l’acteur tend à restituer la
rythmique psalmodiée propre à l’écriture de Yasmina Khadra.
La mise en scène
Des situations jouées, accentuant les actions physiques, parfois jusqu’à la danse, quand il
s’agit de combats.
Des images filmées, images d’archive qui représentent l’Algérie des années 20, ou
images directes des acteurs au plateau.
Une interaction entre le récit, l’action et l’image, interaction vivante qui produit du
sens et nous rend présentes les évocations de la mémoire.
La dramaturgie
Une dizaine de tableaux, comme autant de rounds, montrant l’ascension, la gloire et enfin la
chute de Turambo. Il s’agit de rester le plus factuel possible, à la manière d’une chronique ou
une biographie qui tend plus à établir des faits, qu’à les interpréter ou les juger.
La scénographie
La Récitante est placée à l’avant scène, avec un pupitre. Elle représente l’auteur, Yasmina
Khadra. Parfois, elle entre sur le plateau, au cœur de l’action.
Au centre du plateau, une toile carrée qui figure l’espace du combat, des actions physiques,
de la danse.
Au lointain, un écran qui reçoit des images d’archives des années 20, et des images des
acteurs filmés en live.
L’ambiance générale, accentuée par la lumière, est Cépia, à l’exception de rares couleurs
qui viennent souligner certains moments de l’action.
La place du spectateur
Les spectateurs représentent un Chœur dans ce théâtre aux accents de tragédie antique :
l’acteur s’adresse parfois directement à lui, parfois il est invité à se lever, parfois à participer
directement à l’action – comme dans les chorégraphies d’Alvin Nikolais. Les actions
physiques du spectateur contribuent à souligner le caractère rituel de la représentation.
René Chéneaux
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LES ANGES MEURENT DE NOS BLESSURES
De Yasmina Khadra
Parcours de la compagnie
Fondée en 1989 pour la création de Les amertumes de Koltès (Théâtre Rutebeuf/Clichy-la-Garenne), elle naît
d’une équipe d’acteurs qui se sont rencontrés à l’Ecole Internationale Jacques Lecoq. A partir de 91, elle mène
un travail d’implantation au Théâtre Firmin Gémier/Antony.
C’est avec le spectacle Personnes déplacées que la compagnie commence à inventer la création avec le public,
à partir de recueil de témoignages. Le travail artistique tend à s’inspirer de ressources réelles pour une mise en
correspondance du plateau et de la société.
 1991 : création de Les Joueurs de Nicolaï Gogol, traduction André Markovicz (Théâtre Firmin Gémier,
Festival du Jeune Théâtre/Alès).
 1993 : Personnes déplacées, écriture collective (Théâtre Firmin Gémier/Antony, Centre d’Art et d’Essai de
Mont-Saint-Aignan).
A partir de 1995, la compagnie reprend sa mobilité : Ile-de-France, Normandie, Région centre. Le travail avec
les publics se confirme, allant jusqu’à ouvrir la présence au plateau des publics-acteurs dans Elysée-Polka.
 1995 : Les Enfants du diable de René Chéneaux (Théâtre Paul Eluard/Choisy-le-Roi, Gare au
Théâtre/Vitry sur Seine, théâtre Itinérant en Région Centre avec Nicolas Peskine).
 1997-98-99 : Elysée-Polka, de René Chéneaux (Gare au Théâtre/Vitry, Théâtre Paris-Villette, Grande
Halle de la Villette, Espace Jules vernes/Brétigny-sur-Orge, Théâtre Jean Vilar/Vitry).
 1999 : Vu du Ciel, de Ch. Angot, Ecole de répétition, CDN de Normandie.
De 2000 à 2005, la compagnie s’ouvre à des œuvres de répertoire dans le cadre d’un travail d’implantation au
Théâtre Louis Aragon/Tremblay.
Ce faisant elle s’efforce d’inventer un nouveau dialogue avec le public à partir des répétitions publiques, des
ateliers et des Rencontres théâtrales.
 2001 : reprise de Les Joueurs de Nicolaï Gogol, traduction André Markowicz (Théâtre Louis
Aragon/Tremblay-en-France, Centre des Bords de Marne/Le Perreux-sur-Marne, Théâtre Le Vanves).
 2003 : Le Convive de pierre d’Alexandre Pouchkine, traduction André Markovicz Théâtre Louis Aragon /
/Tremblay-en-France).
 2004 : Le Voyage des comédiens d’après L’Orestie d’Eschyle, traduction Paul Mazon (Théâtre Louis
Aragon / Tremblay).
 2005 : Les Choéphores d’Eschyle, traduction Paul Mazon (Théâtre Louis Aragon/Tremblay-en-France).
A partir de 2006, la Compagnie reprend sa mobilité.
 2005 : Les Choéphores d’Eschyle, traduction Paul Mazon (Théâtre Louis Aragon/Tremblay-en-France).
 Novembre 2006 : création de En attendant Godot de Samuel Beckett – Théâtre Jean Vilar/Vitry, puis au
Théâtre Paul Eluard/Choisy-le-Roi. 2007 : Théâtre des Sources/Fontenay-aux-Roses, Théâtre du
Samovar/Bagnolet, Ferme de Bel Ebat/ Guyancourt, Forum/ Scène conventionnée de Blanc-Mesnil,
Centres de vacances de la CCAS, Théâtre du Pays de Morlaix.
 En 2008, la Cie aborde Les Sirènes de Bagdad de Yasmina Khadra comme un texte ouvert à tous. Elle
entend traiter cette pièce comme un miroir des incertitudes d’aujourd’hui. Forum de Blanc-Mesnil, Th Le
Vanves, Festival Les Petits Riens/Côtes d’Armor, tournée CCAS, Th Jean Vilar/Vitry-sur-Seine, Centre
Culturel Algérien/Paris, La Merise/Trappes, Théâtre de Ferney-Voltaire, Festival d’Avignon/La
Manufacture, Théâtre du Cormier (95), Espace Magh/Bruxelles.
 Mars 2009 : Création de Les Hommes sans nom, texte et mise en scène de René Chéneaux. Forum/Scène
conventionnée du Blanc-Mesnil, Le Théâtre Le Vanves, Ferme de Bel Ebat/Guyancourt.
 2010 : Nord-Ost de Anna Politkovskaïa – Théâtre du Hublot, Théâtre Le Vanves, Ferme de Bel
Ebat/Guyancourt, Gare au Théâtre/Vitry-sur-Seine, Avignon public off, Jardins d’hiver-Festival de th de
proximité/Val d’Oise
De 2010 à 2013, la Compagnie met en place un projet de compagnonnage avec Yasmina Khadra autour de la
notion de livre vivant, et anime dans le Val d’Oise, La Traversée, Centre de création théâtrale pour l’Enfance et
la Jeunesse.
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LES ANGES MEURENT DE NOS BLESSURES
De Yasmina Khadra
Curriculum vitae
Rachid Benbouchta
Il mène un parcours théâtral entre Paris et Bruxelles, notamment sous la direction de Gilles Bouillon
(CDR de Tours), Philippe Adrien (Théâtre de la Tempête), Henri Ronse, Otto Hubert, Christophe
Reymond, Agathe Alexis, Alain Barsacq (Comédie de Béthune), Christophe Perton (Comédie de
Valence), Jean-françois Politzer, Claude-Alice Peyrotte, Lofti Achour (Théâtre des Quartiers d’Ivry),
Xavier Percy, Jorge Lavelli (MC 93), Jean-Michel d’Hoop, René Chéneaux. Le monologue Saleté de
Robert Schneider, M en S : Henri Ronse révèle cet acteur singulier lors d’une importante tournée :
Bruxelles, Festival d'Avignon, Théâtre de Vidy-Lausanne, tournée française)
Au cinéma il travaille sous la direction de Pierre Grange, Yvan Lemoine, Georges Walker, Olivier
Jahan, Philippe Blasband, Edgardo Cozarinski, Frank Van Mechelen. A la télévision il est dirigé par
Claude-Michel Rome, Jean-Marc Vervoort, Patrick Dewolf.
Formation : Conservatoire National Supérieur d'Art Dramatique de Paris
Farid Bentoumi
Il mène un parcours théâtral sous la direction de Gino Zampieri (Phèdre.2007), Marion Suzanne (Frères
du Bled. 2005), Irina Brook (La bonne âme de Setchouan.2003-04), Claude Crétient (Vous qui habitez le
temps. Comédie. 2002), Laurent d’Aumal (George Dandin. 1998).
Au cinéma, il travaille sous la direction de Léa Fazer (Notre univers impitoyable. 2007), Saïd OuldKhelifa (Vivantes. 2006), Christophe Barraud (Homicides. 2006), Mehdi Lisi (Framed. 2004), Francis
Perrin (A un cheveu près. 2003).
Au théâtre, il met en scène : Un repas entre amis de P. Beheydt (Rencontres de la cartoucherie. 2005),
Novgorod Sortie Est (2005), Petit boulot pour vieux clown de Mattei Visniec (1999).
Il écrie deux scénarios : L’Migri (Documentaire en cours de réalisation), Le fils volé.
Formation : aux ateliers Sudden, avec R. Acquaviva, G. Shelley. Stages avec A. Mnouchkine, G. Freixe,
F. Giorgieti, A. Alexis.
Catherine Le Henan
Elle mène un parcours théâtral sous la direction de V.Grail (La Chance de ma vie.2007), de Philippe
Adrien (Andromaque. 2006), de Gérald Châtelain (Jouliks. 2005), de Philippe Adrien et Geneviève de
Kermabon (Cadavres exquis2004), de René Chéneaux (Le convive de pierre. 2003), de Geneviève de
Kermabon (drôlesses. 2002), de René Chéneaux (Elysée-Polka, les Enfants du diable, personnes
déplacées 1995-1999), de Patrick Colet (Les nuits blanches. 1994).
Au cinéma, elle travaille sous la direction de Thomas Bardinet (Soyons amis ! 1997), de Vincent
Dietschy (Julie est amoureuse), d’Andy Okoroafor (Modern love. 92), de Bruno Juminer (Besame
Mucho. 90).
Elle a réalisé des films documentaires : De rive à rive. 23 mn, Femmes Solidaires. 35 mn, Chroniques
adolescentes du monde ouvrier. 26 mn.
Depuis 1995, elle a doublé de nombreux films notamment sous la direction de Jean Pierre Dorat, Jean
Marc Pannetier, Béatrice Delphe, Fabienne Orain, Jean Louis Montagné, Laura Koffler…
Formation : Théâtre-Ecole du Passage, Ateliers Varan/Paris (Documentaire).
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LES ANGES MEURENT DE NOS BLESSURES
De Yasmina Khadra
Trois voix pour
LES SIRENES DE BAGDAD
La presse en parle…
La Terrasse
Spécial Avignon, juillet 2008
La Compagnie Kick Théâtre s’attaque aux «Sirènes de Bagdad» de l’écrivain algérien Yasmina Kadhra. Le
chemin initiatique d’un prétendant kamikaze pendant la guerre en Irak.
La dérive humaine ancrée dans le conflit irakien pèse sur Les Sirènes de Bagdad de Yasmina Kadhra dans
la mise en scène de René Chéneaux, fidèle dans ses engagements politiques et artistiques. Kadhra raconte la
guerre vue par un Irakien bédouin, dont le père se trouve brutalement victime de la violence de l’armée
américaine. Le metteur en scène est touché par l’art qu’a l’auteur de se mettre dans la peau de son
personnage, suivant son parcours depuis l’humiliation par l’armée d’occupation jusqu’à l’errance dans la
ville et la tentation terroriste, la volonté d’anéantissement des autres et de soi. Comment un homme
ordinaire se transforme-t-il en machine à tuer ? Le sursaut vital aura-t-il lieu ? Un périple au bout de la
violence, exposant la fragilité humaine.
Véronique Hotte
France culture
La chronique de Benjamin Stora
Au Festival d’Avignon cette année est jouée une pièce de théâtre, inspirée du livre de Yasmina Khadra, Les
sirènes de Bagdad, dans une belle mise en scène de René Chéneaux (…) Avec un jeu impeccable des trois
acteurs, on voit bien la guerre comme un processus, un engrenage indéfendable, et la pièce lui dénie toute
qualité positive, héroïque. Le théâtre de la guerre se fait critique active de la guerre. Avec l’avilissement de
l’homme, se devine le désenchantement, la perte de sens, et le passage au nihilisme. Ce que fait le
personnage central du livre (…) Il est rare que se montent en France des pièces de théâtre directement en
prise avec l’actualité politique, et la guerre d’Irak ne fait pas exception (…).
Benjamin Stora.
Radio France Internationale
Les comédies sont les spectacles les plus populaires dans le Festival Off d'Avignon. Mais certains acteurs et
certaines compagnies ont le courage (peut être le soutien) de mettre leur talent au service de thèmes
d’actualité comme les guerres ou les conflits entre cultures. En 2008, le plateau de la Manufacture est occupé
par une pièce de théâtre qui montre comment le traitement barbare et l'injustice, en envahissant des êtres
humains, peuvent transformer un homme sensé en un monstre obsédé par la vengeance.
Le personnage principal, l'être humain innocent, est joué par Farid Bentoumi. Il raconte d’abord l'histoire du
personnage à un auditoire attentif dans un monologue. Il nous emmène dans un village quelque part en Iraq,
où les GI bardés de mitrailleuses sont si nerveux que leur suspicion et leur peur les conduit à tuer un jeune
malade mental, en route avec son père vers un dispensaire pour un soin médical.
Dans la version que j'ai vue, il n'y a pas de paysage à proprement parler, mais quelques bols de peinture au
sol. Une peintre/actrice peint petit à petit sur une toile de fond, ou sur une bâche en plastique, tandis que les
acteurs disent le récit. Elle peint aussi des traces de pas blanches sur le sol, et des peintures de guerre sur le
corps d’un personnage. La peinture murale représente le trajet d’un personnage dont le monde, les valeurs et
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l’honneur s'effondrent après qu’il eut vu le sexe de son père - dénudé quand le vieil homme est malmené par
des soldats américains.
Son désespoir le conduit à quitter son village et à chercher sa propre justice, alors que son cousin essaie de
l’en dissuader. Vers la fin de la pièce, les voix, comme des sirènes, montent en spirale dans la frénésie d’un
lavage de cerveau fanatique. Puis, le personnage principal va à l'aéroport d'où il ne décolle jamais. Et tombe
dans le silence. Son silence est noyé dans une chanson populaire de Fayrouz, « Les Sirènes de Bagdad ».
Les Sirènes de Bagdad, une pièce de théâtre adaptée du roman de Yasmina Khadra et mise en scène par
René Chéneaux.
Rosslyn Hyams
Rue du théâtre
Partenaire Avignon 2008 du quotidien Métro
Coup de cœur Rue du théâtre !
Un appel déchirant
Sans le moindre artifice, à la seule force du mot et de la puissance évocatrice du jeu des comédiens, la
compagnie Kick théâtre met en vie les mots de Yasmina Khadra. Un spectacle puissant qui résonne fort dans
l’actualité, ricoche sur nos vies. Et donne à réfléchir. Longtemps…
Déjà, le texte est superbe. Et la beauté d’écriture de Yasmina Khadra rencontre ici une mise en vie qui lui
donne une résonnance plus forte encore. Les choix de mise en scène permettent (…) de dégager un maximum
de force. De l’insouciance enfantine d’un « chat perché » jusqu’au dénouement du drame annoncé, les
comédiens font évoluer le récit avec une rare intensité, la présence féminine du trio permettant par ailleurs une
mise en abyme salutaire. D’autant plus salutaire que les comédiens évoluent au grand jour, sans artifice de
lumière et que les spectateurs ne peuvent se retrancher derrière le traditionnel quatrième mur.
Karine Prost
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LES ANGES MEURENT DE NOS BLESSURES
De Yasmina Khadra
Trois voix pour
LES SIRENES DE BAGDAD
Paroles de spectateurs…
C’est fort, c’est tellement fort que l’on peut difficilement en parler immédiatement. Mais il faut voir ce
spectacle, absolument ! Laure
Ce qui m’a bouleversé, c’est le regard interdit du fils sur le père et qui détruit un être et sa famille. Et bien
sûr tout le contexte de la guerre qui emmène à l’autodestruction et à celle des autres dans un désespoir
absolu. Dieb
C’est un texte magnifique, Remarquablement rendu. Et qui ouvre des horizons bouleversants sur un pays
que vous nous rendez si proche et si humain, loin des clichés des média. Sans nom
Impossible de dessiner l’ensemble de ces sentiments si forts qui m’ont traversé au cours de cette
représentation. Faire vivre la guerre, la souffrance des hommes, comment la haine engendre la haine,
transforme les hommes, détruit l’humain. Vous m’avez fait ressentir ce que sans doute tant d’hommes et de
femmes ont vécu dans ce pays détruit par la violence.
Les larmes coulaient quand le fils fou du ferronnier s’est fait abattre par un GI, la gorge était nouée, la
chaleur était moite, comme à Bagdad…la météo était aussi là pour nous aider à ressentir cette douleur.
Bravo à vous, bravo pour ce trio qui exprime parfaitement la complexité de la situation. Et merci ! JeanChristophe
Je n’ai pas de mots. C’est très fort. J’écris, c'est-à-dire j’ai l’orthographe, mais je n’ai pas les mots qu’il
faut. Très beau spectacle. Je vois Bagdad autrement. Merci. Bravo à tous. Meriem
Puissance et richesse du texte, actualité aussi. Proximité des acteurs, complexité. On est ensemble pendant
ce moment, sur un fil ténu. Moment d’une grande émotion. Françoise
Emmenée dans un monde de violence, de question, de croyance et d’amour, j’ai été dénudée. Je parle de la
proximité créée par cette petite salle et les trois paires d’yeux qui viennent chercher à l’intérieur de chacun.
J’ai été prise à parti, j’ai vu l’histoire de Yasmina et je lirai le livre, lecture dont je n’aurais jamais eu envie
sans Les Sirènes de Bagdad au festival d’Avignon. Sans nom
En temps normal, il y a une certaine forme d’impudeur à fixer le public aussi longuement, aussi
intensément. Mais là, les regards nous captaient, nous invitaient à entrer dans le récit à vivre, à ressentir.
Nous étions à genoux dans la poussière, nous étions…Merci et bravo. Thierry
J’ai trouvé très riche ce spectacle. Je suis rentré dedans, j’ai vécu de l’intérieur les évènements ; peut-être
compris certaines réactions contre l’Occident. Jeu fabuleux entre deux acteurs : un qui est la pensée, un qui
est le corps. Sans nom
Le théâtre et la guerre. Le théâtre et la transmission capitale, nécessaire.
Merci. Claire
Si seulement tous les kamikazes observaient le monde qui les entoure comme l’a fait le personnage du
spectacle, il n’y aurait peut être plus d’attentats suicides et peut-être plus de guerre.
Que les guerres cessent un jour ! Fouzia
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