Avis
L'embryon humain, dans les premiers stades de son développement, est devenu accessible
aux regards et surtout aux pouvoirs des biologistes, des médecins et des patients, en raison
du développement de la fécondation in vitro, dont l'objectif actuel est de permettre à des
couples infertiles d'avoir des enfants.
- Il s'agit d'une situation de fait créée au sein d'institutions scientifiques et médicales, pour
répondre, grâce aux expériences et aux connaissances acquises chez l'animal, aux
demandes de couples en souffrance. L'application à l'homme des pratiques par lesquelles
progresse la maîtrise scientifique et technique de la reproduction, présente encore un
caractère expérimental. La rapidité des évolutions ouvre aujourd'hui de nouvelles
perspectives de recherches, d'expérimentations sur l'embryon humain ou d'applications à
l'homme de techniques déjà mises en oeuvre, à une échelle plus ou moins large, dans la
reproduction de certains animaux (détermination et choix du sexe, etc.) à des fins
procréatives. L'embryon humain peut aussi être l'objet de recherches fondamentales ou
d'expérimentations indépendantes, pour l'instant, d'un projet procréatif personnalisé.
- L'ensemble de ces interventions actuellement réalisées, ou à l'avenir réalisables, suscitent
sur tous les plans (philosophique, éthique, scientifique, juridique, voire économique) des
questions graves. Elles inquiètent bon nombre d'esprits, y compris dans les milieux de la
recherche; ils s'interrogent à juste titre sur la valeur des progrès ainsi accomplis, sur les
risques actuels et futurs du développement des procréations médicalement assistées et sur
les conséquences, éventuellement néfastes, que ce développement pourrait entraîner dans
les pratiques médicales ou sociales comme dans les représentations psychosociales de l'être
humain.
On considère aujourd'hui que toutes les avancées scientifiques ne constituent pas a priori un
progrès, car certaines peuvent avoir des conséquences ambiguës ou indésirables. Ces
questions ont déjà fait l'objet de nombreuses études, d'horizons divers, qui permettent une
appréciation mieux raisonnée des enjeux de la recherche biomédicale appliquée aux
embryons humains dans les premiers stades de leur développement. Mais la rapidité des
évolutions scientifiques et du développement des pratiques prend de court la réflexion
éthique tout en nécessitant, dans un contexte à la fois provisoire et aléatoire, l'élaboration
de normes susceptibles d'assurer une régulation de ces nouveaux pouvoirs.
- Les inquiétudes, comme les espérances, que fait naître la maîtrise de la reproduction
humaine, suscitent, en effet, le désir de soumettre l'exercice de cette maîtrise à des normes
et/ou à des contrôles. De nombreux Etats, ou Instances nationales et internationales,
confrontés à ces problèmes, ont pris conscience de la nécessité de ne pas laisser s'imposer,
comme des faits accomplis, des actes qui, parce qu'ils mettent en question le sens de la vie
humaine et de la personne nécessitent une rigoureuse évaluation de leur légitimité éthique
et scientifique comme de leur utilité individuelle, familiale et sociale.
- Le Comité consultatif national d'éthique pour les sciences de la vie et de la santé, après
avoir pris connaissance des réflexions ou positions déjà formulées et après avoir provoqué
de nombreuses observations et consultations de la part de divers spécialistes, présente à
son tour un avis, limité aux interventions et recherches sur l'embryon in vitro, à des fins
médicales et scientifiques.
- Le présent avis prolonge et complète les précédents avis rendus, le 22 mai et 23 octobre
1984 à l'occasion desquels le Comité avait présenté diverses réflexions et recommandations
dont certaines peuvent être ici utilement rappelées.
"Provoquer une naissance par des techniques de reproduction artificielle est un acte qui
suscite des interrogations éthiques". Elles ne viennent pas d'un a priori à l'égard de ce qui
est artificiel. Le fait nouveau pour lequel la société n'a pas encore de réponse est qu'en
dissociant différentes étapes du processus de reproduction, les nouvelles techniques