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Adapter l'agriculture aux changements climatiques
Quelles actions sur les territoires ?
Si la journée du 1er décembre 2014 restera dans les mémoires, on se
souviendra aussi de la remarquable journée qui a suivi. Car dès le
lendemain, la salle Gambetta du Ministère de l’Agriculture
(MAAF) rouvrait ses portes pour une journée d'échanges intitulée «
Adapter l'agriculture aux changements climatiques - Quelles actions
sur les territoires ? ». Une suite logique de la rencontre de la veille...
Le Réseau Action Climat, organisateur de la journée, mettait l'accent
sur des témoignages d'acteurs (agriculteurs bien sûr, mais aussi
chercheurs, gestionnaires des espaces naturels, institutionnels, etc.)
pour stimuler les réflexions et alimenter les discussions autour de l'un
des plus grands défis de notre temps.
De l'avis de tous, l'atténuation des changements climatiques via la
réduction des émissions de gaz à effet de serre demeure l'absolue
priorité. Pour autant, compte tenu de l'inertie de la machine
climatique, l'adaptation de notre société et notamment de notre
agriculture aux « dérèglements » déjà enclenchés, s'impose également
comme un axe de travail indispensable. Depuis quelques années déjà
les agriculteurs, qui s'accordent massivement sur l'existence d'un
changement des « règles du jeu » climatique (étude APCA), réagissent
spontanément à cette évolution (ex. avancement des dates de
récoltes). Mais ces adaptations, mises en œuvre dans l'urgence en
réponse à des « imprévus » subis à un instant donné, maintiennent les
systèmes agricoles (et les agriculteurs !) dans une situation de
vulnérabilité et de précarité qui, au regard de ce que l'avenir semble
vouloir nous réserver, ne fait au mieux que reporter le problème.
S'adapter (réellement) aux changements climatiques, c'est reconsidérer
de fond en comble notre manière de gérer l'espace et de faire de
l'agriculture. C'est diversifier les productions pour « diviser » le risque,
optimiser le fonctionnement du sol pour, notamment, accroître sa
capacité à retenir l'eau, maximiser la biodiversité – sauvage et cultivée
– et donc l'adaptabilité des systèmes, aménager les zones cultivées et
d'élevage de manière à tamponner, en leur sein, les écarts
climatiques... Autant d'objectifs qui, depuis longtemps déjà, sont au
cœur de l'approche agroforestière. Jacques Morineau, vice-président
du Réseau Agriculture Durable et agriculteur en Vendée, nous fait part
de son expérience : « En plantant, il y a une trentaine d'années, des
peupliers à faible densité (8 x 15 m) sur une parcelle en prairie
permanente, je n'aurais jamais imaginé que l'herbe pousse avec autant
de vigueur sous les arbres, et ce jusqu'à la 25ème année, terme du
cycle d'exploitation ». Preuve que, dans un système agroforestier
judicieusement conçu, il y a de la place (et de l'eau !) pour tout le
monde. Et le récit de M. Morineau se poursuit : « sous les arbres,
durant la période estivale, la température était de 4°C inférieure à
celle relevée sur les parcelles adjacentes. Les animaux (des vaches
laitières, ndlr) consommaient mieux et plus, car ils ne souffraient pas
de la chaleur. En d'autre termes, j'avais construit sans le vouloir une
véritable stabule d'été ».
L'arbre agroforestier est donc un allié de taille dans l'effort
d'adaptation de notre agriculture aux changements climatiques : il
régule le cycle de l'eau, climatise, diversifie, protège. Au-delà, il fut
rappelé à plusieurs reprises que les arbres permettent également de
maximiser la capacité des agrosystèmes à séquestrer durablement le
carbone, ce qui en d'autres termes donne à l'agroforesterie une
capacité unique : celle d'agir significativement, à la fois sur
l'adaptation locale des milieux aux changements climatiques et sur
l'atténuation de ces bouleversements à l'échelle planétaire.
Nul doute, lorsque l'on met tout cela en perspective, que
l'agroforesterie n'en est encore qu'à son tour de chauffe !
Fabien Balaguer, administrateur AFAF, 3 décembre 2014. 
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