Mario Barra-Jover et Tobias Scheer (c'est sûr), et peut-être Jean-Philippe Dalbera, Patrick Sauzet et Guylaine
Brun-Trigaud (éds), Approches de la variation linguistique gallo-romane. Paris : Presses Universitaires de
Vincennes 2009.
Le paramètre du sujet nul dans les variétés dialectales de l’occitan et du francoprovençal1
Marc-Olivier Hinzelin (SFB 471 - Universität Konstanz / University of Oxford) &
Georg A. Kaiser (SFB 471 - Universität Konstanz)
1. Introduction
1.1. Paramètre du sujet nul
Perlmutter (1971) décrit une différence typologique fondamentale des langues du monde
concernant la réalisation de pronoms sujets. Chomsky (1981, 1982) reprend cette catégo-
risation et propose un paramètre binaire [+/- pro-drop].
Dans les langues romanes, il existe une division selon ce paramètre : la plupart des langues
romanes (espagnol, portugais, italien, occitan, etc.) sont des langues à sujet nul comme leur
langue mère, le latin. Dans ces langues, le pronom sujet est généralement omis. Le pronom
sujet n’est utilisé que pour la mise en relief ou la désambiguïsation. La conséquence de ce fait
consiste en l’absence obligatoire de pronoms sujets (dénommés explétifs) dans les construc-
tions impersonnelles (cf. Haider 2001).
Contrairement à cette majorité des langues romanes, le français et les dialectes romanches (cf.
p. ex. Hack 2007, Kaiser & Hack 2008), en général, ne connaissent que l’emploi obligatoire
de pronoms sujets référentiels et explétifs (avec quelques exceptions bien limitées). Dans ces
langues, est intervenu un changement linguistique qui les distingue clairement du latin et
d’autres langues romanes (cf. Adams 1987a, b et Vance 1997 pour l’évolution en français).
Dans l’espace géolinguistique de la Romania, on s’attendrait à un changement brusque d’un
système à l’autre, mais ceci n’est pas le cas2 (cf. Vanelli, Renzi & Benincà 1985, Benincà
1 Ce travail a été réalisé dans le cadre du projet de recherche « Évolution et variation de pronoms explétifs et
neutres dans les langues romanes », dirigé par Georg A. Kaiser. Ce projet fait partie du SFB 471 « Variation und
Entwicklung im Lexikon » (Centre de Recherche « Variation et évolution dans le lexique ») rattaché à
l’Université de Constance et financé par la DFG (Société Allemande pour la Recherche). Nous remercions nos
témoins en Val Maira et en Vallée d’Aoste, le Bureau Régional pour l’Ethnologie et la Linguistique (BREL),
Aoste, Rodolfo Allemandi et Andrea Rolando pour l’aide apporté durant les enquêtes. Merci à Christian
Hinzelin pour la relecture du manuscrit. Les auteurs demeurent bien évidemment seuls responsables des erreurs
et omissions pouvant subsister.
2 Cf. Heap (1996 : 43) : « If this major division between possible natural languages were real, we would expect it