Mexique : toujours exposé, moins vulnérable Sylvain Bellefontaine ’année mouvementée qui s’est achevée et celle qui débute indiquent que la contagion aux marchés émergents de la crise de liquidité et de confiance internationale, née de la crise du crédit “subprime” aux EtatsUnis, demeure jusqu’ici assez mesurée. En ce début d’année 2008 où tous les analystes scrutent les signes de récession économique aux Etats-Unis et le gouvernement mexicain a revu à la baisse sa prévision de croissance économique de 3,7% à 2,8% cette année – tendant à converger vers notre scénario central de +2,0% (cf. Ecoweek 07-41) – il paraît opportun de revenir sur les liens macroéconomiques existant entre les deux économies, notamment les sources et mécanismes de propagation de chocs survenant aux EtatsUnis à l’économie mexicaine. Au-delà des inquiétudes à court terme portant sur la conjoncture internationale et ses conséquences sur l’économie mexicaine, notons que la première année du “sexenio” du Président Felipe Calderon semble confirmer son engagement à réformer de façon pragmatique et progressive un pays marqué par des rigidités et des faiblesses structurelles. L Croissance économique : une vigueur toute relative Depuis la récession de 2001-2002, l’économie mexicaine a opéré un redressement et enregistré une croissance du PIB réel de 3,9% l’an sur 2004-2006, contre 2,5% sur la période 1980-2003. Les performances du pays demeurent en grande partie déterminées par le cycle économique des Etats-Unis. Bien qu’aucune réforme économique majeure n’ait été mise en œuvre par le gouvernement de Vicente Fox (2000-2006), le redressement de l’économie mexicaine a été indéniable, profitant d’une conjoncture internationale très porteuse jusqu’à l’année dernière. Mars 2008 La dynamique de croissance de l’économie mexicaine… La demande intérieure a connu depuis quelques années un rythme de croissance relativement soutenu, à la faveur de fondamentaux plus solides, de l’embellie du marché de l’emploi, d’un plus large accès au crédit et de la vigueur des remesas, les transferts d’argent opérés par les travailleurs émigrés (cf. encadré, page 28). L’investissement et la consommation privée ont constitué, au cours des années 2004-2006, deux moteurs majeurs de la croissance, progressant respectivement de 8,5% et 5% l’an (cf. graphiques 1 et 2, page 24). Ce dynamisme de la demande domestique s’est traduit par une hausse importante du volume des importations, dont le rythme de croissance s’est révélé plus rapide que celui, déjà soutenu, des exportations. Une part substantielle des importations demeure toutefois constituée de biens intermédiaires et d’équipement incorporés au processus de production de biens réexportés vers le marché américain. Dans un tel contexte, les indicateurs de confiance des acteurs économiques, entreprises et des ménages, ont suivi une tendance positive allant de pair avec une reprise de l’investissement. Ainsi, le taux d’investissement a atteint 22,1% du PNB en 2006 et probablement 22,5% en 2007 ; pourtant, il se situe toujours en deçà du niveau enregistré à la fin des années 1990 (au-dessus de 24%) et reste relativement bas comparativement aux niveaux constatés dans les pays émergents, notamment en Asie. … s’est essoufflée en 2007… Malgré un léger rebond, a priori provisoire, enregistré dans la seconde moitié de l’année, soutenu par les Conjoncture 23 exportations dans le sillage de la bonne tenue de la demande d’importations aux Etats-Unis, l’année 2007 s’est avérée globalement assez décevante. Le ralentissement économique s’est accompagné, depuis la fin de 2006, d’une certaine inflexion des indices de confiance et des créations d’emplois(1). Autre fait notoire, les transferts d’argent des travailleurs émigrés, qui ont contribué à stimuler la consommation mexicaine et à soutenir les comptes externes au cours des dernières années, ont marqué le pas. Pour l’ensemble de l’année 2007, le volume des remesas (USD 24 milliards) n’a progressé que de 1%, un phénomène qui s’explique notamment par un effet de base important compte tenu de la progression des dernières années (+23% par an en moyenne entre 2000 et 2006), par certaines incertitudes nées du projet de durcissement de la politique d’immigration aux Etats-Unis et du renforcement des contrôles aux frontières, et surtout par le fait que près de 30% des Mexicains émigrés aux Etats-Unis travaillent dans le secteur du bâtiment, directement touché par la crise rampante de l’immobilier depuis la mi-2006(2). (Cf. graphique 3). De son côté, le secteur manufacturier a accusé des performances décevantes avec une augmentation de la production estimée à +1,5% en 2007. Deux secteurs emblématiques de l’économie mexicaine illustrent ce ralentissement. Tout d’abord, la production automobile, qui compte pour un quart des exportations du pays, n’a progressé que de 2,2% en 2007 après une année 2006 très faste (+ 23,2%), stigmatisant le ralentissement de la demande aux Etats-Unis, mais aussi sur le marché domestique. De son côté, le secteur du textile continue de subir la concurrence asiatique. La production périclite depuis 2001 et s’est rétractée de plus de 5,0% l’année dernière. (Cf. graphique 4, page 26). Autre symbole national fort s’il en est, la production de pétrole brut a atteint un point haut en 2004 et décroît de façon inexorable depuis lors, conséquence de l’incapacité financière et technique de Pemex – la société publique dont la position monopolistique dans l’exploitation des réserves pétrolières du pays est inscrite dans la constitution – à investir dans l’exploration (notamment en eaux profondes dans le golfe du Mexique), les capacités de production, le raffinage et le Mars 2008 Croissance du PIB réel et composantes de la demande %, glissement annuel 15 PIB réel Conso. privée Investissement Conso. publique Contribution nette du commerce extérieur 10 5 0 -5 -10 00 01 02 03 Graphique 1 04 05 06 07 Sources : Banxico, BNP Paribas Contribution à la croissance du PIB réel Importations Exportations Variations de stocks Investissement Consommation publique Consommation privée 6 5 4 3 2 1 0 -1 -2 -3 -4 00 01 02 03 Graphique 2 04 05 06 07 Sources : Banxico, BNP Paribas Origine du PIB nominal Agriculture 5% Mines 1% Produits manufacturés 18% Construction 4% Services 72% Graphique 3 Conjoncture 24 Sources : INEGI, IFI, BNP Paribas développement de produits dérivés du pétrole. Ainsi, la production de brut a chuté de 10% en trois ans et de 5,3% pour la seule année 2007, pour s’établir à 3,08 millions de barils par jour en moyenne sur douze mois, dont 55% sont exportés, en quasi-totalité vers les Etats-Unis. (Cf. graphique 5, page 26). Dans le même temps, le secteur de la construction, l’un des plus dynamique ces dernières années, n’a progressé que de 2,5% en 2007 après 6,9% en 2006. En définitive, ce sont les secteurs des transports, de l’agriculture et des services financiers, représentant ensemble environ un tiers du PIB nominal, qui se sont avérés les plus dynamiques. Dans ces conditions, la croissance du PIB réel est attendue à 3,3% pour l’ensemble de l’année 2007, soit légèrement au-dessous de son potentiel estimé à 3,5% et surtout en retrait par rapport aux six principaux pays d’Amérique latine. La croissance moyenne de la zone est estimée à 6,2% en 2007 en excluant le Mexique et à 5,4% en l’intégrant. ces éléments se retrouvent dans la majorité des pays d’Amérique latine et ne constituent pas des facteurs discriminants tangibles et pertinents. L’explication fondamentale réside dans la spécialisation économique du Mexique qui diffère significativement de celle de ses voisins du sud. En effet, l’ensemble des pays d’Amérique du Sud, dont les matières premières représentent plus de la moitié des exportations totales (90% dans le cas du Venezuela), ont profité du dynamisme de la demande mondiale d’hydrocarbures, métaux et denrées agricoles depuis plusieurs années, tiré notamment par l’Asie émergente, dont la contribution à la croissance mondiale dépasse les 35%. Ces pays ont donc bénéficié d’opportunités pour initier une certaine diversification de leurs débouchés géographiques et négocier des accords de partenariats économiques (accords commerciaux, prises de participations dans des sociétés sud-américaines) avec la Chine et l’Inde notamment. (Cf. tableau 1 et graphique 9, page 26). … et demeure inférieure à celle de l’Amérique latine et des principaux pays émergents… Part des matières premières dans les exportations (%) Ainsi, malgré des performances économiques honorables, le Mexique n’a toutefois pas rejoint le “club” des marchés émergents en forte expansion économique. Au-delà des interrogations relatives à la soutenabilité de la croissance à moyen terme dans des pays comme l’Argentine ou le Venezuela notamment, force est de constater qu’à l’échelle régionale le Mexique se situe en retrait, la zone dans son ensemble ayant affiché une croissance annuelle moyenne du PIB réel de 3,6% entre 2000 et 2007 contre 2,9% pour le Mexique. (Cf. graphiques 6 et 7, page 26). Cette faiblesse relative de la croissance mexicaine ne semble pas devoir être imputée à un manque de dynamisme de l’investissement, le taux d’investissement se situant dans la moyenne régionale (cf. graphique 8, page 26). Si la croissance potentielle du Mexique est contrainte par la qualité médiocre du capital humain et des infrastructures, la faible productivité, la rigidité du marché du travail ou encore les défaillances de l’environnement légal (corruption, évasion fiscale...), Mars 2008 Matières Hydro premières carbures 41 18 Argentine 61 17 2 42 Brésil 52 8 18 26 Amérique latine Métaux Agriculture et autres 11 12 Mexique 19 15 1 3 Chili 75 0 56 19 Colombie 57 26 16 15 Pérou 75 9 56 10 Venezuela Tableau 1 90 87 3 0 Source : IFI … compte tenu de la vive concurrence internationale pour l’accès au marché américain Bien que le Mexique ait profité du boom des prix mondiaux des matières premières – essentiellement le pétrole dont la part dans la valeur des exportations totales du pays s’est accrue malgré la baisse marquée de la production –, ses exportations demeurent Conjoncture 25 Croissance du PIB réel (%, moyenne annuelle 2000-2007) Production manufacturière %, glissement annuel 60 Production manufacturière totale Russie Textile Automobile Industrie métallurgique, machines et équipement 40 6,9 Inde 7,2 Chine 9,9 Amérique latine 20 3,6 Vénézuela 4,6 Chili 4,4 Colombie 0 4,2 Argentine 3,4 Brésil 3,4 Mexico -20 00 01 02 Graphique 4 03 04 05 06 07 Sources : INEGI, BNP Paribas 0 1 2 Graphique 7 3 4 5 6 7 8 9 10 Sources : FMI, Data Insight, BNP Paribas Taux d'investissement en Amérique latine Production de pétrole brut 3.5 2,9 % du PNB 30 mns barils/j mns barils/j, moy. 12 mois 2002 2004 2006 2003 2005 25 3.0 20 2.5 15 10 2.0 5 1.5 91 92 93 94 95 96 97 98 99 00 01 02 03 04 05 06 07 Graphique 5 Sources : INEGI, Pemex, BNP Paribas Croissance économique : Amérique latine %, croissance annuelle Amérique latine 25 15 10 BRE CHILI COL MEX Graphique 8 PER ARG VEN Sources : IFI, BNP Paribas Part des exportations destinée aux Etats-Unis (%) 8 Argentine Chili Mexique Argentine Vénézuela Brésil Colombie 20 0 Chili 16 Brésil 18 Pérou 26 Colombie 35 5 Vénézuela 0 -5 52 83 Mexique -10 -15 46 Equateur 48 Amérique latine 00 Graphique 6 01 02 03 04 05 06 07 e Sources : FMI, Data Insight, BNP Paribas Mars 2008 0 Graphique 9 Conjoncture 26 20 40 60 80 100 Sources : Banxico, BNP Paribas composées à hauteur de 80% de produits manufacturés (biens intermédiaires et de consommation finale) (cf. graphique 10). En conséquence, le Mexique, économie relativement ouverte dont le poids des exportations atteint 42% du PIB, est confronté à une concurrence internationale intense sur des marchés où l’Asie émergente – principalement la Chine (textile, électronique, pièces détachées automobiles), l’Inde (textile) et la Corée du Sud (automobiles) – constitue un compétiteur majeur pour l’accès au premier marché mondial : les Etats-Unis. Bien que le Mexique reste le troisième exportateur mondial à destination des Etats-Unis, derrière le Canada et la Chine, sa part de marché s’est réduite de 11,7% en 2001 à 11,0% en 2007, au moment où celle de la Chine (hors réexportations via Hong Kong) est passée de 9,6% à 17,6%(3) (cf. graphique 11). Toutefois, après avoir baissé entre 2003 et 2005, elle a retrouvé une pente ascendante depuis 2006, grâce aux bonnes performances d’ensemble affichées par le secteur des maquilas, par lesquelles transitent 45% des exportations mexicaines, confirmant la compétitivité et l’attractivité du pays : les gains de productivité dans l’industrie ont progressé plus rapidement que les salaires réels alors que le taux de change effectif réel restait relativement stable (cf. graphique 12). Après la crise de 2001-2002, au cours de laquelle un cinquième des 3 600 usines a été délocalisé, le secteur a opéré un redressement. En 2006, la production totale de marchandises assemblées a crû de 3,3% en volume et de 12,2% en valeur, après déduction des composants importés. Tandis que les secteurs requérant une maind’œuvre faiblement qualifiée ont souffert de la concurrence internationale (la production de textile a diminué de 21% en six ans), les produits à plus forte valeur ajoutée ont bien résisté. L’industrie électronique a ainsi créé plus de 15 000 emplois en 2006, alors que le secteur des maquilas est demeuré globalement assez peu créateur d’emplois. Malgré un coût du travail sensiblement plus élevé qu’en Chine ou en Inde, et des défaillances en termes d’infrastructures de transport et de télécommunications, la proximité du marché américain confère au Mexique un avantage concurrentiel décisif du fait de coûts de transport réduits (cf. tableaux 2 et 3, page 28). Mars 2008 Composition des exportations du Mexique, en % des exportations totales, cumul sur 12 mois Agriculture 100 90 80 70 60 50 40 30 20 10 0 Pétrole Autres produits manufacturés Produits électroniques et électriques Machines et équipement Automobile 94 95 96 97 98 99 00 01 02 03 04 05 06 07 Graphique 10 Sources : Banxico, BNP Paribas Part de marché aux Etats-Unis % 18 Mexique Chine 16 14 12 10 8 6 4 93 94 95 96 97 98 99 00 01 02 03 04 05 06 07 Graphique 11 Sources : Banxico, US Dpt of Commerce, BNP Paribas Indicateurs de "compétitivité coût", indice base 100 en janvier 1993 moyenne mobile sur 12 mois échelle inversée 40 200 Productivité du travail/ 190 50 Salaire réel 180 (sect. manuf.) 60 170 160 70 150 80 140 130 90 de 120 K Amélioration la compétitivité 100 Taux de change 110 effectif réel 100 110 95 96 97 98 99 00 01 02 03 04 05 06 07 Graphique 12 Conjoncture 27 Sources : Banxico, BNP Paribas Indicateurs de compétitivité Corruption (classement sur 179 pays) Education (classement sur 57 pays) Liberté d'entreprendre (classement sur 179 pays) Nombre de jours pour débuter une activité Application des contrats : Nombre de procédures Nombre de jours Restrictions à l'embauche Facilités de licenciement Impôt sur les profits (%) Taux d'imposition total (% profit) Coût d'exportation (USD par conteneur) Coût d'importation (USD par conteneur) Indice de protection des investisseurs Tableau 2 Mexique 72 46 44 27 Chili 72 42 33 27 Chine 22 83 35 Corée du Sud 43 4 30 17 38 36 35 35 415 480 406 230 33 33 11 11 70 20 40 40 22,4 18,3 19,9 18,3 51,2 25,9 73,9 34,9 1302 645 390 745 2411 685 430 745 6 6 5 5 Sources : Banxico, Banque mondiale, Transparency International, OCDE, Fitch, BNPP Au final, le potentiel de croissance du Mexique demeure modeste. Comme la majorité des pays d’Amérique latine, le Mexique affiche un taux d’investissement insuffisant pour assurer un taux de croissance supérieur à 3,5-4,0% en longue période. De plus, la spécialisation manufacturière du secteur exportateur mexicain – potentiellement plus porteuse en termes de développement et de stabilité économique à moyen long terme que celle des autres pays de la région plus vulnérables aux chocs externes sur les matières premières – s’avère en définitive peu favorable étant donné la forte concurrence internationale sur des marchés où le Mexique ne se positionne pas comme un leader. Avantages compétitifs relatifs Mexique/Chine Mexique Salaire horaire dans l’industrie (USD) 2,13 Coût de l’électricité (USD cent/kWh) Coût des communications de téléphonie mobile (USD pour 3 minutes) Coûts pour affréter un conteneur aux Etats-Unis (USD) Nombre moyen de jours de transport maritime vers les Etats-Unis Productivité dans l’industrie (classement) Chine 0,66 17,14 5,07 0,83 0,22 1750 4300 2 12-18 49 55 0,5 2,0 Dépenses en R&D (% du PIB) % de la population avec un niveau 24,6 16,8 scolaire secondaire Tableau 3 Sources : OCDE Rapport pays 2005, BNPP Encadré : Les remesas : un bien pour un mal Les transferts d’argent de la diaspora mexicaine, principalement installée aux Etats-Unis où plus de 10 millions de mexicains d’origine résident, sont devenus au cours des dix dernières années un facteur essentiel de stabilité macroéconomique, mais leur rôle va au-delà d’un simple soutien apporté à la consolidation des comptes externes et au dynamisme de la consommation domestique. Une part non négligeable de cette population émigrée appartient à la classe moyenne et bénéficie d’un niveau d’éducation satisfaisant, lui permettant de quitter le Mexique pour bénéficier de conditions salariales bien plus favorables aux Etats-Unis. Toutefois, l’importance des remesas stigmatise une émigration massive – à l’origine de tensions diplomatiques entre les deux pays compte tenu de l’importance de l’émigration clandestine – considérée comme une “soupape de sécurité” apaisant les tensions sociales dans un pays où les opportunités d’emploi offertes à une grande frange de la population faiblement éduquée et pauvre restent limitées et contraintes par un droit du travail considéré par l’OCDE comme l’un des plus rigides et restrictifs, limitant la mobilité professionnelle. Exclus de fait d’un marché du travail sclérosé, de nombreux travailleurs se réfugient dans l’économie informelle, dont l’activité génère environ 40% des emplois et représente près de 35% du PNB. Alors que le taux de chômage officiel est de 3,4%, les niveaux de sous-emploi et de travail à temps partiel demeurent élevés, et seulement 16,5 millions de travailleurs permanents sont affiliés à la sécurité sociale, soit environ un quart de la population en âge de travailler dans un pays de 108 millions d’habitants. Mars 2008 Conjoncture 28 Souvent considéré comme la conséquence de l’écart important de productivité du travail entre les Etats-Unis et le Mexique, force est de constater que le niveau de richesse par habitant au Mexique n’a pas convergé vers celui de son voisin du nord, effet escompté de l’intégration économique. A ce titre, la levée définitive depuis le 1er janvier 2008 des dernières barrières douanières pour certains produits agricoles encore protégés, notamment le maïs, base de fabrication de la tortilla, suscite des inquiétudes auprès des agriculteurs mexicains, surtout dans le sud plus pauvre, le niveau des subventions accordées aux agriculteurs américains et canadiens ainsi que le rendement par hectare étant en moyenne trois fois inférieur au Mexique où nombre d’exploitations sont de taille modeste. Dans le secteur industriel mexicain, alors que les gains de productivité cumulés ont atteint 70% depuis 1994, le salaire réel par ouvrier est demeuré stable. Bien que le niveau de pauvreté se soit résorbé au cours des dix dernières années, près de 20% des foyers mexicains n’ont toujours pas un accès satisfaisant à la nourriture, et plus de 25% ne bénéficient pas d’un accès correct aux soins et à l’éducation. Dans le même temps, bien que moins marquées que dans les autres pays d’Amérique latine, les inégalités en termes de revenus demeurent prégnantes et les disparités régionales au sein du pays importantes, de l’ordre de 1 à 3,5 entre la capitale et les Etats ruraux du sud, générant une mobilité géographique du sud vers le nord qui a bénéficié du développement du secteur des maquilas, puis vers les Etats-Unis. Cette inégalité spatiale dans la répartition des revenus s’est reflétée dans la forte polarisation des résultats des dernières élections générales de juin 2006. Pour des raisons historiques liées à la construction de la principale ligne de chemin fer entre le Mexique et les EtatsUnis au 19e siècle, les principaux flux d’émigration proviennent toujours des régions du centre et de l’ouest du pays. Ces Etats bénéficient donc plus des remesas, celles-ci ne se révélant a priori pas vecteur de réduction des inégalités régionales. Toutefois, selon le FMI (country report 06/351, 10/2006), alors que seulement 3% des foyers urbains reçoivent des remesas, les foyers ruraux généralement plus pauvres sont 10% à en bénéficier. Sans ce soutien financier, 45% des foyers recevant ces remesas seraient dans le dernier décile de la distribution des revenus, mais ils ne sont plus que 10% en intégrant ces transferts d’argent. De plus, selon certaines études, les remesas sont généralement associées à de meilleurs indicateurs en termes de scolarisation des enfants et de santé. Dans le même temps, le chef de famille a aussi une probabilité plus importante d’être sans emploi lorsqu’il reçoit un soutien financier. Finalement, avec un PIB nominal de USD 900 milliards, le Mexique se situe au 13e rang mondial, et au 52e rang mondial sur 177 pays en termes d’indicateurs de développement humain selon le classement 2007-2008 établi par les Nations unies (PNUD). La transition démographique (le taux de fécondité est désormais de 2,1 enfants par femme contre plus de 7 dans les années 1970), le développement du crédit à la consommation, une tendance à l’élévation du niveau de vie moyen et la stabilité macroéconomique du pays ont permis un accès plus large aux biens de consommation, et à l’éducation, sur laquelle les parents investissent de plus en plus. Selon certaines études d’opinion, environ les trois quarts des ménages mexicains estiment appartenir à la classe moyenne, dénotant un sentiment de confiance et un optimiste pour l’avenir. Transferts des travailleurs émigrés montants transférés, mds USD 30 Base trimestrielle Cumul sur 12 M 25 Taux de croissance PIB/habitant en parité de pouvoir d'achat %, glissement annuel 50 40 20 30 15 20 10 10 5 0 0 -10 93 94 95 96 97 98 99 00 01 02 03 04 05 06 07 Graphique 13 Sources : Banxico, BNP Paribas Mars 2008 USD 45000 40000 35000 1980 2000 30000 1995 2006 25000 20000 15000 10000 5000 0 ARG Graphique 14 Conjoncture 29 BRE CHILI CHINE COL IND MEX USA Sources : IMF-WEO Mexique – Etats-Unis : un logique “couplage” du cycle économique L’intégration économique entre les deux rives du Rio Grande... Pays latino-américain, le Mexique n’en demeure pas moins un pays d’Amérique du Nord au regard de l’orientation de ses échanges commerciaux et des relations économiques étroites nouées avec son voisin du Nord. Au cours des vingt dernières années, le Mexique a engagé un processus de libéralisation économique et financière avec, comme point d’orgue, l’entrée dans l’ALENA en 1994(4). Ses changements structurels rapides et le vent d’optimisme sur les perspectives de croissance du Mexique ont été des vecteurs de la crise économique et financière de 1994-95. Les sorties massives de capitaux qui avaient afflué dans le pays depuis la fin des années 1980, ainsi que le “credit crunch”, marquant un coup d’arrêt à plusieurs années d’expansion non contrôlée du crédit alloué par un secteur bancaire fragile, ont amplifié la crise de la balance des paiements courants(5). Toutefois, l’existence de l’ALENA fut aussi l’une des principales explications de la rapide reprise de l’économie mexicaine, notamment grâce à l’intervention des Etats-Unis(6). Depuis 1994, les liens commerciaux entre le Mexique et les Etats-Unis se sont considérablement renforcés. Les Etats-Unis constituent le partenaire commercial quasi exclusif du Mexique puisqu’ils absorbent 83% des exportations mexicaines, les échanges (importations plus exportations) entre les deux pays passant de USD 90 milliards en 1993 à USD 350 milliards en 2006. Economie relativement fermée au début des années 1990, le Mexique affiche désormais un taux d’ouverture commerciale de 44%, le rendant a priori plus sensible à un choc externe. (Cf. graphiques 15 et 16). … explique la synchronisation des deux économies L’analyse comparée des cycles économiques du Mexique et des Etats-Unis sur les vingt dernières années, à partir de la tendance de croissance calculée Mars 2008 en moyenne mobile sur cinq ans, fait ressortir une désynchronisation marquée jusqu’à la crise mexicaine de 1994-95. A contrario, la période post-ALENA a coïncidé avec une synchronisation progressive des performances économiques des deux pays, même si le cycle mexicain est demeuré plus heurté et volatil que celui des Etats-Unis. (Cf. graphique 17). Ce “couplage” économique découle logiquement de l’importance des échanges commerciaux entre les deux pays et de l’étroite corrélation(7) entre l’évolution des exportations mexicaines et la demande d’importations américaine observée depuis 1998. Ainsi, si jusqu’en 1993 les évolutions de ces deux variables étaient totalement déconnectées, la corrélation est ensuite devenue fortement négative jusqu’en 1998, sous l’effet d’un ralentissement des importations des Etats-Unis au moment où l’ALENA et la faiblesse du peso ont “boosté” les exportations mexicaines, dont la part de marché aux Etats-Unis est passée de 7,0% en 1993 à 10,8% en 1999. Depuis la fin des années 1990, l’évolution des exportations mexicaines et des importations américaines ont affiché une symétrie assez frappante, s’agissant notamment des points d’inflexion. A l’exception des épisodes de crise économique (1994-95 et 2001-02), l’élasticité(8) de la variation du PIB mexicain à la variation du PIB américain, d’une part, et l’élasticité de la variation des exportations mexicaines à la variation des importations américaines, d’autre part, ont oscillé autour de 1. Cette analyse est en ligne avec les conclusions de la Banque des Règlements Internationaux qui estime, dans son rapport annuel 20062007, qu’une baisse de 10% des importations américaines se traduirait par une réduction de l’ordre de 9% des exportations totales mexicaines (contre seulement 3,5% en moyenne pour les principaux pays d’Amérique du Sud). (Cf. graphiques 18, 19 et 20). Une décomposition plus fine des liens économiques réels existant entre les deux pays indique que l’évolution de la production industrielle aux Etats-Unis est un facteur explicatif beaucoup plus significatif que la demande domestique exprimée par la consommation des ménages pour comprendre et estimer les variations du PIB mexicain. Selon le FMI (country report 07/378), sur la période post-ALENA, les chocs sur la production industrielle américaine expliquent Conjoncture 30 Destination des exportations mexicaines, en valeur, sur 12 mois glissants Exportations mexicaines et importations américaines % 100 90 80 70 60 50 40 30 20 10 0 Autres pays Asie Europe Amérique latine Etats-Unis 94 95 96 97 98 99 00 01 02 03 04 05 06 07 Graphique 15 Sources : Banxico, BNP Paribas Taux d'ouverture commerciale* (% du PIB réel) 40 20 10 93 94 95 96 97 98 99 00 01 02 03 04 05 06 07 Graphique 16 Sources : Banxico, BNP Paribas 5 0 -5 -15 Mexique Etats-Unis Mexique : "trend" (moy.mob. sur 5 ans) Etats-Unis : "trend" (moy.mob. sur 5 ans) 87 89 91 93 95 97 99 01 03 05 Graphique 17 PIB Mexique/PIB Etats-Unis Exports Mexique/Imports Etats-Unis Prod.Industrielle Mexique/PI Etats-Unis Prod.Industrielle Mexique/Conso Etats-Unis 87 89 91 93 95 97 99 01 03 05 07 Graphique 19 Sources : Banxico, US Dept of Comm. BNP Paribas Synchronisation 10 cycle des affaires, croissance (%, g.a.) -10 0.8 0.6 0.4 0.2 -0.0 -0.2 -0.4 -0.6 -0.8 -1.0 -1.2 Elasticité Synchronisation de la croissance économique Désynchronisation 07 Sources : Banxico, US Dept of Com., BNP Paribas sur la base des variations en termes réels en glissement sur 5 ans 1.0 retardé d'un trimestre pour le PIB du Mexique Exportations Importations Taux d'ouverture commerciale 30 0 Graphique 18 Coefficients de corrélation *calculé selon la formule (exports + imports)/(2 x le PIB) 50 %, glissement annuel, termes réels 36 32 28 24 20 16 12 8 4 0 -4 -8 Mexique : croissance des exportations totales -12 Etats-Unis : croissance des importations totales -16 87 89 91 93 95 97 99 01 03 05 07 Sources : INEGI, Data Insight, BNP Paribas Mars 2008 6 5 4 3 2 1 0 -1 -2 -3 -4 -5 -6 PIB Mexique/PIB Etats-Unis Exports Mexique/Imports Etats-Unis 92 93 94 95 96 97 98 99 00 01 02 03 04 05 06 07 Graphique 20 Conjoncture 31 Sources : Banxico, US Dept of Com., BNP Paribas environ 40% des fluctuations du PIB mexicain avec une répercussion quasi immédiate, concentrée sur le trimestre suivant. Ce constat corrobore l’idée d’une forte intégration des processus de production américain et mexicain, organisé autour d’une “division du travail” basée, notamment, sur la sous-traitance d’une partie de la production américaine par les maquilas mexicaines ; d’où l’importance des échanges intra-industrie et des biens intermédiaires et d’équipement dans les exportations mexicaines (cf. graphique 21). De façon plus surprenante, cette conclusion s’applique aussi au secteur des services, les “non-tradables”, intuitivement considérés comme faiblement exposés à un choc d’offre ou de demande aux Etats-Unis. Ces résultats suggèrent donc l’existence d’importants effets de transmission des exportations sur le reste de l’économie mexicaine. L’importance des “facteurs américains” dans l’explication des fluctuations économiques au Mexique est donc cohérente avec le renforcement de la synchronisation entre les deux économies depuis la mise en place de l’ALENA. Mais les liens entre les deux économies vont au-delà de la simple intégration commerciale, et quatre autres canaux potentiels de transmission de l’économie américaine vers l’économie mexicaine méritent d’être évoqués et discutés plus loin : les remesas, les investissements directs étrangers, le taux de change ainsi que les taux d’intérêt. Ralentissement économique aux EtatsUnis : une vulnérabilité plus modérée qu’en 2001 L’analyse qui précède donne un éclairage sur le ralentissement économique de 2001-2002, plus marqué au Mexique qu’aux Etats-Unis compte tenu de sa nature et de son origine : il s’agissait initialement d’un choc d’offre aux Etats-Unis consécutif à l’accumulation de surcapacités de production dans un contexte d’euphorie lié à la “bulle des NTIC”. Finalement, après une année 2000 exceptionnellement dynamique, le volume des exportations mexicaines a chuté de -3,5% en 2001, le volume des importations aux Etats-Unis se rétractant de -2,7%. Mars 2008 Exportations mexicaines par produits mds USD, sur 12 mois glissants 300 250 200 Agriculture Pétrole Autres produits manufacturés Produits électroniques et électriques Equipement et machines Automobile 150 100 50 0 94 95 96 97 98 99 00 01 02 03 04 05 06 07 Graphique 21 Sources : Banxico, BNP Paribas PIB réel du Mexique et des Etats-Unis, 2000-2002 %, croissance annuelle 25 Consommation privée Consommation publique FBCF Exportations Importations PIB 20 15 10 5 0 -5 Etats-Unis -10 2000 Graphique 22 2001 2002 Mexique 2000 2001 2002 Sources : Banxico, Data Insight, BNP Paribas Cette même année, la production industrielle et l’investissement ont reculé respectivement de -5,9% et -5,6% en termes réels au Mexique, contre -6,0% et -1,8% aux Etats-Unis. Finalement, l’économie mexicaine a été plus touchée et a mis plus de temps à se redresser que l’économie américaine, son PIB réel se contractant de -0,2% en 2001 avec trois trimestres successifs de repli, ne reprenant que +0,8% en 2002, alors que les Etats-Unis ne sont pas entrés en récession et ont affiché une croissance de +0,8% en 2001 et de +1,6% en 2002. Cet écart en termes de profondeur et de durée de la crise entre les deux pays stigmatise, notamment, l’incapacité du gouvernement mexicain de l’époque à mener une politique budgétaire contracyclique de soutien de la croissance, au contraire des Etats-Unis. (Cf. graphique 22). Conjoncture 32 La consommation fait figure de courroie de transmission essentielle du ralentissement économique actuel aux Etats-Unis, de l’immobilier résidentiel au reste de l’économie, les ménages étant directement affectés par l’ensemble des évolutions négatives (immobilier, emploi, actions, crédits). La baisse de 125 points de base de l’objectif des Fed funds et le plan de relance budgétaire de USD 152 milliards décidés en l’espace de huit jours en janvier dernier soulignent combien les autorités américaines sont préoccupées par les risques à la baisse pesant sur l’activité. Par conséquent, les implications pour l’économie mexicaine devraient être non négligeables. Toutefois, certains facteurs inhérents à la situation même du Mexique, principalement l’amélioration significative des fondamentaux macroéconomiques, sous-tendent l’idée d’une moindre vulnérabilité, notamment financière, du pays expliquant pourquoi le Mexique, à l’image de la majorité des pays émergents, a, jusqu’à présent, été relativement préservé de la crise financière internationale. Soldes courants régionaux % du PIB 20 10 0 Amérique latine Chili Mexique Colombie -10 -20 Argentine Vénézuela Brésil 81 83 85 87 89 91 93 95 97 99 01 03 05 07 Graphique 23 Sources : FMI, IFI, BNP Paribas Termes de l'échange Base 1980 = 100 250 Argentine Vénézuela Brésil 200 Chili Mexique Colombie 150 100 Des comptes externes plus solides Les comptes externes du Mexique se sont graduellement améliorés depuis une dizaine d’années. Au début des années 1990, la forte expansion économique du pays s’était accompagnée d’un creusement des déficits commerciaux et surtout courants devenus insoutenables (respectivement -4,4% et -7,0% du PIB en 1994), débouchant sur une crise de balance des paiements. Situation nouvelle pour les pays d’Amérique latine, malgré la vigueur de la demande d’importations au cours des dernières années, les comptes externes sont demeurés solides. Ainsi, les excédents commerciaux et courants se sont consolidés, le solde du compte courant régional affichant un excédent depuis 2003 (+1,9% du PIB en 2006 et environ +0,6% du PIB en 2007), soutenu notamment par une amélioration significative des termes de l’échange (+23% sur quatre ans) et l’afflux massif de remesas (cf. graphiques 23 et 24). Dans le même temps, l’amélioration du climat des affaires et les perspectives de développement dans la zone ont favorisé les investissements directs étrangers dans la majorité des pays (excepté Venezuela, Argentine, Bolivie, Equateur). Mars 2008 50 0 81 83 85 87 89 91 93 95 97 99 01 03 05 07 Graphique 24 Sources : IFI, BNP Paribas Compte tenu de sa spécialisation économique, le Mexique n’a, toutefois, pas bénéficié de la même amélioration des termes de l’échange que le reste de la zone (tout de même +15% sur quatre ans). Malgré la prégnance des échanges commerciaux avec les EtatsUnis, le Mexique a tout de même opéré une légère diversification de ses débouchés depuis 2003, notamment en direction de l’Amérique du Sud(9) et de l’Europe, se reflétant dans la moindre corrélation et l’augmentation de l’élasticité entre l’évolution des exportations mexicaines et des importations américaines observées récemment. En attendant, le compte courant du Mexique demeure structurellement déficitaire, notamment du fait d’un déficit commercial persistant. En 2007, ce dernier s’est creusé de USD 5,0 milliards à USD 11,2 milliards, un niveau jamais atteint depuis 1994. Rapporté au PIB, le déficit commercial s’établit à -1,2% en 2007, et -6,0% en excluant la composante pétrolière. Conjoncture 33 Dans le même temps, le déficit du compte courant s’est accru de USD 6,5 milliards pour atteindre USD 8,5 milliards, soit -0,9% du PIB à la fin de 2007, la dégradation de la balance commerciale étant accompagnée par un léger tassement de l’excédent de la balance des invisibles, le creusement du déficit des services n’ayant pas été compensé par une hausse des transferts courants nets(10). (Cf. graphique 25). Deux évolutions notables dans la structure de la balance des paiements mexicaine sont à l’origine de la plus grande stabilité macroéconomique du pays. Tout d’abord, les remesas sont devenues une source de devises primordiale au soutien du compte courant (deuxième source de devises du pays derrière le pétrole), rôle qu’elles n’avaient pas joué dans les années précédant la crise de 1994-95. Ensuite, le déficit courant n’est plus générateur de dette extérieure comme dans le passé(11), puisqu’il est entièrement couvert par les entrées nettes d’investissements étrangers, sous forme d’IDE ou d’investissements de portefeuille(12). Compte tenu de ces évolutions, la position de liquidité internationale du Mexique s’est nettement améliorée ces dernières années, le montant des réserves en devises ayant été multiplié par 2,5 entre 2000 et 2007 (+14% pour la seule année 2007). Moins significative que dans la majorité des pays émergents, cette accumulation de réserves en devises(13) constitue tout de même une protection solide pour faire face aux chocs via le canal de transmission que constitue le taux de change, aidée en cela par des politiques monétaire et de change désormais considérées comme crédibles. (Cf. graphiques 26, 27 et 28). Une politique monétaire et un régime de change crédibles Suite à la crise de change de décembre 1994, le Mexique a dû abandonner un régime de change prédéterminé (un crawling peg du peso vis-à-vis du dollar) pour un régime de change flottant, la banque centrale se retirant graduellement du marché des changes dans les années post-crise. La dépréciation tendancielle du peso mexicain (MXN) et des autres devises régionales vis-à-vis du dollar s’est infléchie depuis 2005, dans un contexte de Mars 2008 forte dégradation du déficit courant des Etats-Unis, d’accumulation massive de réserves de changes en USD par les pays émergents notamment en Asie, et d’amélioration significative des comptes externes à l’échelle régionale. Le MXN n’a, toutefois, pas suivi la tendance à l’appréciation nominale des autres monnaies latino-américaines flottantes (real brésilien, pesos chilien et colombien ou sol péruvien) encore notoire en 2007, et a affiché une relative stabilité, témoignant à nouveau de l’étroite intégration économique entre le Mexique et les Etats-Unis. En 2007, le MXN a fluctué dans une fourchette de +/-2% autour de 11,0 MXN pour 1 USD. Au cœur des turbulences financières internationales de l’été, il a abandonné 4,1%, avant de se redresser pour s’établir désormais autour de 10,75 (cf. graphique 29). L’augmentation de l’écart entre les taux d’intérêt de la politique monétaire des Etats-Unis et des pays d’Amérique latine est un nouveau facteur d’appréciation des monnaies latino-américaines. Désormais focalisées sur le soutien à l’activité économique plutôt que sur la maîtrise de l’inflation, les autorités monétaires américaines sont entrées dans un cycle d’assouplissement monétaire depuis août 2007. Dans le même temps, la résurgence de pressions inflationnistes observée à l’échelle mondiale depuis six mois, après plusieurs années de désinflation, a conduit les banques centrales latino-américaines à durcir leur politique monétaire. Au Mexique, le niveau et la volatilité de l’inflation se sont graduellement réduits depuis que la politique monétaire a convergé vers un régime de ciblage d’inflation à la fin de années 1990, soutenue par une discipline budgétaire faisant jusqu’alors défaut. En octobre dernier, la banque centrale a étendu à huit trimestres l’horizon servant de base à l’orientation de la politique monétaire dans un objectif de renforcement de l’ancrage des anticipations d’inflation. En attendant, en 2007, la banque centrale a dû pratiquer deux augmentations de 25 pb chacune de son taux d’intérêt cible fixé à 7,50% depuis octobre dernier (cf. graphique 30). Dans le même temps, le gouvernement est intervenu auprès des enseignes de la grande distribution et des producteurs de maïs et de tortillas pour négocier une limitation de la hausse des prix alimentaires. En 2007, le taux d’inflation s’est établi à 3,76% en 2007, au-dessus du point central de la bande cible de 2-4%, mais à un niveau inférieur à la moyenne Conjoncture 34 Comptes externes du Mexique % du PIB 15 Balance courante 10 Balance des invisibles Transferts privés (remesas) Réserves de change Balance commerciale Bal. com., pétrole exclu IDE nets mds USD 100 mois d'importations de B&S 5 80 4 5 60 3 0 40 2 -5 20 -10 Sources : Banxico, IFI, BNP Paribas IDE bruts 25 1 81 83 85 87 89 91 93 95 97 99 01 03 05 07 Graphique 28 Sources : FMI, IFI 60 Transferts stés-mères* Réinvestissement* Nouveaux IDE* IDE totaux (base trim.) 12 50 40 20 (glissement annuel, %) 20 93 94 95 96 97 98 99 00 01 02 03 04 05 06 07 Graphique 26 Sources : Banxico, FMI, BNP Paribas Dette externe brute 120 100 Cible d'inflation 10 0 8 4 94 95 96 97 98 99 00 01 02 03 04 05 06 07 08 Graphique 29 10 6 10 5 Taux de change nominal MXN/USD Prix à la consommation 30 15 0 0 Taux de change et inflation mds USD (*cumul sur 12 mois) 35 30 0 81 83 85 87 89 91 93 95 97 99 01 03 05 07 Graphique 25 2 Sources : Banxico, Data Insight Politique monétaire au Mexique et aux Etats-Unis Dette externe totale (% du PIB) Dette externe à court terme (% de la dette totale) Service de la dette externe (% des export. B&S) Dette externe publique (% de la dette totale) % 100 Mexique : taux interbancaire Etats-Unis : objectif des Fed funds 80 80 60 60 40 40 20 20 0 83 85 87 89 91 93 95 97 99 01 03 05 07e Graphique 27 Sources : Banxico, IFI, BNP Paribas Mars 2008 0 90 92 Graphique 30 Conjoncture 35 94 96 98 00 02 04 06 08 Sources : Banxico, Data Insight régionale estimée à 5,6%. Les pressions inflationnistes devraient se maintenir en 2008, notamment suite à la réforme de l’impôt sur les sociétés et l’augmentation progressive des prix administrés des carburants adoptées par le Congrès en septembre dernier. La banque centrale a, en effet, évalué l’impact potentiel de la répercussion sur les prix à la consommation de la hausse de la fiscalité sur les sociétés à environ 50 pb en 2008. Jusqu’à présent, à l’exception du secteur public, les négociations salariales ne semblent pas avoir été affectées par les anticipations d’inflation, éloignant le risque d’un effet de second tour avec une boucle prix-salaires. Finalement, la crédibilité acquise ces dernières années par la politique monétaire et le régime de change ont significativement réduit les risques d’ajustement macroéconomique par le biais d’une hausse sévère des taux d’intérêt et un décrochage du MXN. Un système financier restructuré et renforcé depuis la crise de 1994-95 La crise de 1994-95 a été à l’origine d’un processus de forte désintermédiation financière. La stabilité du cadre macroéconomique des dernières années est allée de pair avec un approfondissement de l’intermédiation financière et une accélération du crédit au secteur privé (+30% de l’encours par an en moyenne sur les quatre dernières années, dont 2007 malgré la hausse des taux d’intérêt et les incertitudes liées à la conjoncture internationale), dans un contexte de forte concurrence entre les banques commerciales (cf. graphique 31). Dans le même temps, les dépôts bancaires à vue et à terme ont progressé de 16% en 2007. Le secteur bancaire mexicain est aujourd’hui considéré comme relativement solide, la stabilité et la liquidité étant assurées par une forte participation de grandes banques étrangères dans le capital des principales institutions financières mexicaines. Les performances et la supervision du système financier se sont sensiblement améliorées, et les politiques de gestion des risques sont satisfaisantes(14). Finalement, la croissance rapide du crédit ne constitue pas pour le moment une source d’inquiétude majeure puisque le taux de pénétration bancaire demeure très faible, le ratio Mars 2008 Crédit des banques commerciales au secteur privé mds MXN, encours taux de croissance annuelle, % 100 1500 80 1200 60 900 40 600 20 300 0 0 -20 -300 -40 -600 autres crédits crédit immobilier -60 -900 à la conso aux entreprises crédit conso crédit immobilier -80 -1200 crédit entreprises -100 -1500 94 95 96 97 98 99 00 01 02 03 04 05 06 07 Graphique 31 Sources : Banxico, BNP Paribas crédit sur PIB n’atteignant pas les 20%. Toutefois, les prêts non performants ont légèrement augmenté ces deux dernières années(15). Le large accès au crédit à la consommation, notamment via le développement rapide des cartes de crédit (+34% en 2007), pose tout de même un problème potentiel d’effet d’apprentissage pour des personnes parfois peu solvables et non bancarisées(16). Bien que seulement 6% des acquisitions immobilières soient financées par emprunt, la baisse des taux d’intérêt en 2005-2006 et l’émergence d’une classe moyenne ont permis une progression rapide du marché des prêts immobiliers, les banques n’hésitant plus à proposer des prêts sur vingt-cinq ans libellés en pesos mais assortis de taux d’intérêt souvent supérieurs à 15%. L’intégration progressive du Mexique dans la sphère financière internationale et l’appétit des investisseurs internationaux pour les marchés émergents ont conduit à une augmentation importante des investissements de portefeuille(17) et donc à une vulnérabilité accrue de l’économie aux sentiments de marchés. Alors que la volatilité des marchés financiers internationaux s’est accentuée considérablement depuis six mois, la Bourse mexicaine comme les autres places régionales n’y ont pas fait exception (cf. graphique 32). L’indice IPC de la bolsa mexicaine a cédé 14% entre la mi-juillet et la miaoût 2007 pour finir l’année sur un gain de 12%. La nouvelle chute des marchés internationaux à la mijanvier 2008 s’est soldée par un recul de -11,5% de l’IPC en cinq jours, qui a gagné tout de même +2% depuis le début de l’année. Conjoncture 36 Les spreads de taux sur la dette des principaux corporates mexicains (i.e. Pemex et les blue ships de la bolsa) se sont légèrement écartés depuis la fin de l’année 2007, mais les marchés demeurent relativement liquides pour les principales valeurs de la place. Cependant, malgré le redressement du taux d’épargne nationale de 18% à 21% en cinq ans et le doublement des actifs gérés par les fonds de pension (équivalant à 14% du PNB), l’attractivité des titres de la dette souveraine opère un effet d’éviction significatif sur les marchés actions et de la dette des entreprises. Les marchés sont réellement liquides pour une dizaine de grandes entreprises sur les 153 valeurs mexicaines cotées, et les introductions en Bourse (IPO) sont peu dynamiques. Même si certaines sociétés commencent à émettre du commercial paper à 3-5 ans, elles sont généralement contraintes par un risque de crédit et de liquidité, et se financent surtout à court terme via le crédit fournisseur et l’affacturage. Jusqu’à présent, seul le marché de la titrisation de créances, encore relativement peu développé(18), semble véritablement affecté par un assèchement de la liquidité, et le système financier mexicain apparaît désormais beaucoup plus stable et solide. Dans un contexte international moins favorable, le rythme de croissance du crédit bancaire devrait ralentir mais continuer de soutenir la demande interne, ce qui n’avait pas été le cas en 1995 et 2001, le système financier devrait désormais opérer comme un amortisseur de la crise, contrairement à 1995 où sa fragilité avait joué un rôle d’amplificateur de la crise. Une gestion saine des finances publiques, mais des risques à moyen terme La consolidation des finances publiques observée ces dernières années s’est matérialisée en 2006 par le premier surplus budgétaire du “gouvernement général”(19) (gouvernement fédéral et entreprises publiques) à 0,2% du PIB, le gouvernement fédéral affichant seul un déficit de 2,0% du PIB (cf. graphique 33). Après cinq années de contrôle drastique des dépenses publiques, la politique budgétaire s’est révélée plus expansionniste en 2006, année marquée par les Mars 2008 Indices boursiers régionaux Indice 1/1/2006 =100 200 Argentine Brésil Chili Mexique Colombie 180 160 140 120 100 80 60 2006 2007 Graphique 32 2008 Sources : Data Insight, BNP Paribas Solde budgétaire et dette publique % du PIB 50 45 40 35 30 25 20 15 10 5 0 91 Graphique 33 Dette externe Dette domestique Solde public Solde public primaire 93 95 97 99 01 03 % du PIB 10 9 7 6 4 3 2 0 -1 -3 -4 05 07 Sources : ministère des Finances, IFI, BNP Paribas élections générales(20). Ainsi, à la faveur d’une plus grande latitude budgétaire résultant de la manne pétrolière et du dynamisme de l’économie, les dépenses publiques, conduites par les dépenses sociales et en capital, ont pu augmenter sensiblement sans mettre en péril l’équilibre budgétaire, jouant un rôle procyclique dans une conjoncture déjà favorable. Pour sa première année en fonction, l’administration Calderon a présenté des comptes publics équilibrés en 2007 et un excédent primaire estimé à +2,5% du PIB. Compte tenu du délai nécessaire pour établir et activer les orientations de la politique budgétaire, les dépenses publiques n’ont progressé que de 6% en termes réels. Dans le même temps, les ressources fiscales hors pétrole ont augmenté de 8,1%, alors que les revenus issus du pétrole ont chuté de 1,7% par rapport à 2006, tout en Conjoncture 37 dépassant le budget initial basé sur une estimation conservatrice du prix du baril (USD 42,5 alors que le prix moyen du brut mexicain s’est négocié à USD 57 en 2007). Cette baisse des recettes pétrolières est bien entendu liée aux problèmes de production et à la baisse subséquente du volume exporté, posant invariablement la question de la soutenabilité des finances publiques à moyen et long terme, sachant que les réserves pétrolières sont inférieures à neuf années de production. Bien que le poids des revenus pétroliers se soit légèrement rétracté en 2007, il a sensiblement progressé ces dernières années, passant de 30% à plus de 35% des ressources budgétaires en six ans. Cette évolution rend donc primordiale une réforme d’envergure permettant de réduire la lourde charge fiscale pesant sur la “vache à lait” Pemex pour soutenir l’effort nécessaire d’investissement dans la production-exploration, et de substituer progressivement les ressources fiscales aux ressources pétrolières. Conséquence d’un code fiscal pléthorique, complexe, inefficace et inéquitable (nombreux régimes préférentiels et exemptions fiscales, inefficacité administrative dans la collecte, évasion fiscale massive et forte dualité de l’économie), la base fiscale dépasse aujourd’hui péniblement 10% du PIB. A travers le Plan de développement 2012 présenté en juin 2007, le gouvernement a décidé d’axer son action en faveur de la réforme des finances publiques sur quatre piliers : l’amélioration de l’efficacité de l’administration fiscale, le renforcement du cadre institutionnel des finances publiques, la révision du fédéralisme budgétaire et l’engagement d’une réforme fiscale fondamentale permettant la stabilisation des recettes budgétaires hors pétrole, afin de dégager des marges de manœuvre pour mener une politique budgétaire orientée vers de grands projets d’infrastructure(21), l’éducation et la santé. L’objectif du gouvernement d’élever le potentiel de croissance économique de 3,5% à 5,0% d’ici à 2012 est ambitieux, d’autant plus que le contexte économique international est dégradé. Tablant, au moment du vote du budget 2008, sur une croissance économique de +3,7% en 2008, grâce notamment aux ressources dégagées par la réforme fiscale (cf. infra) permettant des dépenses en infrastructures tout en maintenant le budget équilibré(22), le gouvernement a, depuis quelques semaines, revu ses Mars 2008 Recettes supplémentaires attendues en 2008 En points Milliards de USD de PIB Total 14,1 1,3 2,4 0,2 Revenus pétroliers 1,6 0,1 Hausse des prix du pétrole Augmentation des prix des carburants 0,8 0,1 11,7 1,1 Net hors pétrole 14,0 1,3 I/ Revenus supplémentaires 6,5 0,6 1. IETU 1,1 0,1 2. TVA 6,0 0,5 3. Impôt sur le revenu 0,3 0,02 4. Taxe sur les dépôts 0,1 0,01 5. Autres II/ Réduction de revenus 2,3 0,2 Tableau 4 Sources : Banamex, BNP Paribas perspectives de croissance à la baisse et escompte désormais +2,8%. Dans ces conditions, les ressources fiscales supplémentaires attendues de la réforme pourraient être moindres que le 1,1% du PIB (USD 11,7 milliards) initialement envisagé pour 2008 suivi de 2% d’ici à 2012, le ralentissement économique pouvant amputer les ressources fiscales de l’ordre de USD 1 milliard en 2008. Au prix d’un déficit budgétaire estimé à -0,5% du PIB sur l’exercice en cours, l’impulsion du gouvernement pourrait avoir une effet contracyclique de soutien à la croissance économique et permettre de générer des emplois, notamment dans le secteur de la construction attendu comme un moteur essentiel de la croissance. (Cf. tableau 4). En attendant, l’amélioration des finances publiques est allée de pair avec un “reprofilage” de la dette publique. L’encours de la dette publique totale a, certes, progressé de 10% en termes nominaux en 2007 pour s’établir à 24% du PIB, mais le fait le plus notable reste la substitution rapide de la dette interne à la dette externe par émission de titres sur le marché domestique, réduisant sensiblement l’exposition des finances publiques à un choc externe. La dette publique domestique représente désormais 80% de la dette publique totale, la moitié est constituée de bons à taux fixe, et la maturité moyenne s’est sensiblement allongée de moins de 2 ans en 2000 à plus de 6 ans en 2007(23). En octobre 2006, le gouvernement mexicain a émis pour la première fois une obligation à 30 ans libellée en pesos, soulignant l’appétit du marché local, notamment les fonds de pension, pour les titres publics. Conjoncture 38 Parallèlement, les spreads de taux sur les obligations d’Etat mexicaines se sont progressivement resserrés ces dernières années pour tomber à un plus bas historique de 71 pb au début de juin 2007. Suite aux turbulences financières internationales du mois d’août, ils se sont écartés de nouveau (180 pb aujourd’hui), mouvement cohérent avec le repricing du risque sur les marchés émergents opérés par les investisseurs internationaux. Dans un contexte de redressement des taux obligataires à 10 ans aux Etats-Unis, la prime de risque demeure raisonnable et inférieure à celle appliquée aux autres dettes obligataires souveraines régionales, à l’exception du Chili (cf. graphique 34). Alors que lors des deux épisodes majeurs de crise subis par le Mexique au cours des vingt-cinq dernières années (crise de solvabilité du début des années 1980 et crise de liquidité de 1994-95), l’Etat avait joué un rôle catalyseur central, la situation des finances publiques s’est profondément améliorée au cours des dernières années. Bien que celles-ci souffrent toujours de fragilités structurelles du fait de leur forte dépendance aux revenus volatils issus du pétrole, la politique budgétaire restrictive appliquée depuis la fin des années 1990 a permis de soutenir la confiance des investisseurs internationaux et la stabilité macroéconomique du pays, éloignant significativement les risques d’une nouvelle crise provoquée ou amplifiée par le secteur public. Réformes structurelles : rompre avec une décennie d’inertie A la tête de l’exécutif mexicain depuis le 1er décembre 2006, le président Felipe Calderon a, jusqu’à présent, su manœuvrer intelligemment, alors que son parti de centre droit, le PAN, ne bénéficie pas de la majorité des sièges au Congrès et que le mandat que lui ont conféré les urnes apparaissait initialement très faible(24). Les premières mesures prises par son gouvernement, réduction des salaires des principaux membres du cabinet dont lui-même et déploiement de troupes pour lutter contre les cartels de la drogue, lui ont permis d’asseoir sa crédibilité, sa légitimité et son autorité, grâce à une communication politique et un style sobres et pragmatiques basés sur le dialogue et la recherche du Mars 2008 Spreads de taux sur les obligations souveraines (points de base) *les spreads argentins ne sont représentés qu'à compter de juillet 2005 suite à la restructuration de la dette publique externe 1400 1200 Argentine* Brésil Colombie Mexique 1000 800 600 400 200 0 2003 Graphique 34 2004 2005 2006 2007 2008 Sources : EMBI+JP Morgan, BNP Paribas compromis avec les partis d’opposition. De plus, Felipe Calderon a pu profiter d’une situation économique sensiblement meilleure que lors de l’intronisation de ses deux prédécesseurs à la tête du pays en 1994-95 et 2000-01(25). Conscient de l’importance des réformes structurelles à mener dans un pays emprunt d’un certain conservatisme hérité de sept décennies de domination sans partage du pouvoir du PRI, Felipe Calderon a opté pour une stratégie de réformes graduelles et de négociations en plusieurs étapes avec les partis d’opposition, les partenaires sociaux (patronat et syndicats) et les influents groupes d’intérêt et lobbies. La première année de son sexenio s’est soldée par des réformes considérées comme mesurées, mais marquant une profonde rupture en initiant une dynamique devant déboucher cette année sur des réformes essentielles au renforcement des finances publiques et à la pérennisation de la stabilité macroéconomique du pays. Réformes adoptées en 2007… Dès mars 2007, le Congrès a adopté une réforme du système des retraites des fonctionnaires du gouvernement fédéral. Alors que le gouvernement devait, jusqu’à présent, absorber le déficit de ce régime de retraite, dit ISSSTE, qui a plus que triplé entre 2000 et 2006, le basculement progressif d’un régime de pension par répartition à un système individualisé de Conjoncture 39 capitalisation (permettant la portabilité dans l’hypothèse d’une mobilité vers le secteur privé) devrait faire baisser la valeur actuelle nette de la charge portée par le gouvernement de 57% à 35% du PIB(26). Négocié âprement au cours de l’été dernier, un paquet fiscal(27) a été intégré au budget 2008 et entériné par le Congrès minovembre, grâce à l’appui du PRI qui se positionne clairement comme un arbitre du jeu politique et négocie son soutien aux initiatives gouvernementales dans une alliance PAN-PRI à géométrie variable. Cette réforme repose sur l’engagement d’augmenter l’efficacité de la collecte et de l’utilisation de l’impôt et sur les quatre points suivants : 1. L’introduction d’une taxe unique sur le résultat opérationnel de toutes les entreprises (IETU), sujette à une opposition forte des milieux d’affaires, et dont le taux fixé à 16,5% pour 2008 augmentera graduellement d’un demipoint par an jusqu’à 17,5% en 2010. Les sociétés devront s’acquitter de la contribution la plus élevée de l’ancienne ou de celle découlant du nouveau régime fiscal. Jusqu’alors, le taux de référence de l’impôt sur les sociétés était fixé à 28% mais n’excédait pas 15% en moyenne dans les faits, compte tenu des nombreuses exemptions et lacunes de l’administration fiscale. Au-delà de simplifier et rendre le code fiscal plus équitable, cette réforme est destinée aussi à élargir la base fiscale en incitant le secteur informel à rejoindre l’économie formelle. 2. L’augmentation progressive de 5,5% sur dix-huit mois des prix administrés des carburants, dont les recettes seront allouées directement aux Etats fédérés pour financer des projets d’infrastructures. 3. Une nouvelle taxe de 2% sur les dépôts en liquide auprès des banques excédant 25 000 pesos par mois et déductible du IETU. Cet impôt est aussi destiné à capturer une partie des revenus de l’activité informelle. 4. Après une première initiative du gouvernement Fox en 2006 pour réduire la charge fiscale pesant sur PEMEX, le PRI a appuyé un nouvel allègement initialement non intégré dans le projet fiscal. Afin de dégager USD 2,8 milliards en 2008 et USD 5 milliards d’ici à quatre ans de capacité d’investissement pour PEMEX, les royalties prélevées sur la production de brut seront réduites de 79% à 74% en 2008, et progressivement jusqu’à 71% en 2012. Mars 2008 En définitive, cette réforme fiscale ne peut être considérée que comme une première étape vers une refonte plus large de la fiscalité (incluant peut-être la TVA, sujet sensible socialement et politiquement car affectant toutes les couches de la population) qui pourrait être envisagée d’ici à la fin du mandat de Felipe Calderon en 2012, si le contexte est propice. … attendues en 2008… L’année 2008, notamment le premier semestre, s’annonce décisive pour l’adoption de plusieurs réformes programmées par le gouvernement. En effet, la fenêtre d’opportunité est restreinte puisqu’à partir de juin les débats se focaliseront sur le vote du budget 2009 et, en octobre, auront lieu les désignations des candidats pour les élections législatives prévues en juillet 2009. Dans les prochains jours, une réforme judiciaire devrait être entérinée par le Congrès, qui prévoit d’instituer la présomption d’innocence, le procès contradictoire, et de donner plus de pouvoir à la police dans ses investigations pour lutter contre la criminalité et les trafics de drogue. Une réforme du code du travail est aussi à l’étude ; elle est discutée actuellement entre la commission du Congrès et les partenaires sociaux. Le projet de flexibilisation des conditions d’embauche(28) porterait sur la possibilité de nouer plus facilement des contrats de travail à durée déterminée et la suppression de l’obligation pour un salarié dépendant d’une convention collective d’adhérer à un syndicat spécifique. En attendant, la scène politique est de plus en plus polarisée à mesure que les débats relatifs à la réforme énergétique, la plus attendue et la plus fondamentale, se précisent. Des manifestations orchestrées par les syndicats CNTE (éducation), SME (électricité) et CNC (agriculteurs) se sont multipliées ces dernières semaines avec pour mot d’ordre le blocage du processus de réforme et de libéralisation, alors que le PRD maintient une position conservatrice ferme sur le sujet. Bien que la proposition détaillée de réforme conjointe PAN-PRI ne soit toujours pas clairement définie, elle devrait, selon toute vraisemblance, inclure des initiatives permettant des investissements privés dans des domaines “non stratégiques” du secteur des hydrocarbures (stockage, Conjoncture 40 transport, construction de pipelines, et peut-être raffinage) et octroyer la possibilité à PEMEX de s’associer avec d’autres compagnies pétrolières publiques (Petrobras ou Statoil) pour explorer et forer en eaux profondes, sans nécessairement remettre en cause les principes constitutionnels(29). Le PRI a une rôle central à jouer dans les tractations avec les différents interlocuteurs, au premier rang desquels les syndicats de PEMEX, très puissants et historiquement liés au PRI. Compte tenu du déséquilibre du régime des retraites et de l’âge moyen élevé des salariés de PEMEX, une assurance donnée par le PRI sur la pérennité des retraites pourrait être un point d’entrée possible pour que les syndicats modèrent leur opposition à la réforme énergétique. Compte tenu de la sensibilité du PRI aux tendances de l’opinion publique, la crainte serait qu’il adopte une position plus conservatrice sur le projet de réforme énergétique et que la montagne n’accouche finalement d’une souris. … primordiales à la stabilité et au développement économique du pays à moyen et long terme Le gouvernement Calderon a conscience de devoir répondre à des enjeux majeurs pour le pays, à savoir : développer le potentiel de croissance de l’économie, alors qu’une grande partie de la population ne profite pas des fruits de l’expansion économique, ce qui oppose un obstacle au développement du marché intérieur. Afin d’y parvenir, le Mexique doit relever le niveau de vie de la population, venir à bout des profondes inégalités de revenus et lutter contre une économie parallèle omniprésente. Cela nécessite une amélioration des conditions de sécurité, une réforme du système éducatif, du marché du travail et du régime fiscal, une optimisation des infrastructures et des télécommunications ainsi qu’une baisse des prix de l’énergie. Mener à bien ces réformes requière de s’affranchir du poids du corporatisme, de rompre avec certains privilèges exorbitants(30) et de contourner de puissants groupes d’intérêt (politique, syndicats, milieux d’affaires) qui ont soutenu le système politique et les institutions du pays pendant plus de soixante-dix ans au prix d’une corruption importante, d’une impunité, d’un manque de Mars 2008 transparence et d’une forte inertie dans le domaine économique(31) malgré la libéralisation introduite par l’ALENA. Depuis le début de la période post-PRI en 2000, rien n’a réellement été entrepris pour s’attaquer à ce carcan conservateur, laissant le constat d’une transition inachevée d’un système de parti unique centralisé vers un pluralisme politique et un fédéralisme décentralisé. La concurrence politique devient, toutefois, de plus en plus marquée avec l’instauration d’un partage du pouvoir entre les trois principaux partis politiques et un plus grand équilibre entre la présidence et le Congrès. La modernisation des institutions du pays est donc primordiale et passe par une justice impartiale et indépendante, une meilleure gouvernance et “accountability” et, en définitive, un véritable Etat de droit dans lequel la force de la loi prévaut. Perspectives Les liens étroits entre l’économie mexicaine et celle de son voisin du Nord constituent un atout, tout autant qu’une faiblesse. Alors que la proximité géographique et l’ALENA ont fait du marché américain un “débouché naturel” pour les produits manufacturés mexicains, cette étroite intégration commerciale subit depuis plusieurs années les assauts d’une concurrence asiatique, notamment chinoise, très agressive. Compte tenu de son ouverture commerciale, de sa dépendance vis-à-vis du pétrole (surtout au regard des finances publiques), de la sensibilité élevée de ses exportations à la demande intérieure des Etats-Unis, le Mexique reste donc exposé aux chocs extérieurs, et principalement aux fluctuations du cycle économique des Etats-Unis. Toutefois, la vulnérabilité du pays est désormais moindre en ce sens que les canaux traditionnels de transmission et d’amplification d’un choc aux Etats-Unis vers l’économie mexicaine ont changé structurellement. Le taux de change et les taux d’intérêt sont aujourd’hui adossés à de meilleurs fondamentaux macroéconomiques et devraient, logiquement, ne plus endosser le rôle de variables d’ajustement comme dans le passé. L’effet d’opprobre lié à la fragilité des comptes externes n’existe plus, d’autant que les remesas et les IDE – les autres facteurs d’intégration économique avec les Etats-Unis – Conjoncture 41 sont plutôt stabilisants, tout comme le système financier désormais assaini et plus solide. Bien que certaines interrogations perdurent sur la soutenabilité des finances publiques à moyen et long terme, le secteur public ne devrait plus agir comme un catalyseur de risque de crise et la sphère financière comme un amplificateur de crise. Le Mexique est donc aujourd’hui mieux armé pour résister à une détérioration de la conjoncture internationale, conséquence d’une plus grande stabilité macroéconomique et financière, d’un meilleur “policy mix”, d’une légère autonomisation du régime de croissance économique et d’une tendance à la diversification des débouchés commerciaux. Cependant, l’intensification de la concurrence internationale impose une spécialisation plus poussée de l’économie mexicaine, orientée vers des produits à plus forte valeur ajoutée et nécessitant une main-d’œuvre plus qualifiée (chimie, télécommunications, aéronautique, matériel médical), ainsi qu’une amélioration de la compétitivité et de la productivité de son secteur exportateur afin d’ouvrir de nouvelles perspectives de développement. Si le tandem émigration – prix élevé du pétrole a, jusqu’à présent, permis de repousser l’échéance des réformes structurelles, 2008 s’annonce comme une année décisive pour le Mexique : résister à la crise économique aux Etats-Unis et se donner les moyens de consolider sa stabilité macroéconomique et d’assurer le développement à long terme du pays en concédant des réformes fondamentales. Achevé de rédiger le 29 février 2008 [email protected] Mars 2008 NOTES (1) Le nombre de travailleurs permanents affiliés à la sécurité sociale a progressé de 3,9% en 2007 contre 5,0% l’année précédente. (2) Certains indicateurs laissent à penser que beaucoup d’entre eux ont réussi à se reconvertir dans d’autres secteurs d’activité, profitant notamment de la flexibilité du marché du travail aux Etats-Unis. (3) L’entrée de la Chine dans l’Organisation mondiale du Commerce (OMC) en 2001, suivie en 2005 par la fin des accords multifibres qui limitaient les exportations textiles chinoises, explique en partie l’augmentation rapide de la part de marché de la Chine aux Etats-Unis. (4) L’Accord de Libre Echange Nord-Américain entre les Etats-Unis, le Mexique et le Canada est entré en vigueur le 1er janvier 1994. A ce jour, à peine plus de 2% des exportations mexicaines prennent le chemin du Canada. (5) L’accumulation de déficits commerciaux rendait le régime de change fixe d’autant moins tenable que les Etats-Unis ont initié un durcissement de leur politque monétaire ; la fragilité du secteur bancaire mexicain limitant la capacité des autorités du pays à leur emboîter le pas afin de soutenir le peso. Dans ces conditions, l’émergence de tensions socio-politiques fortes au cours de l’année 1994 (année électorale), conjuguée à l’épuisement des réserves de changes, a débouché sur une crise de liquidité, marquée par une baisse du PIB réel de 6,2% en 1995 et une dépréciation du peso de 50% en trois mois. (6) Le support financier accordé alors au Mexique par les Etats-Unis, directement ou via le FMI, est estimé à près de USD 40 milliards. Dès 1996, la croissance du PIB réel mexicain a rebondi à +5,1%. (7) Le coefficient de corrélation (compris entre -1 et 1) mesure l’intensité de la liaison entre deux variables. Il n’induit pas une relation de causalité entre ces deux variables. (8) L’élasticité est le changement proportionnel d’une variable relativement à une autre variable. (9) L’augmentation des exportations mexicaines de télévisions à écran plat à destination du Brésil ou du Chili est assez significative de l’émergence d’une demande régionale de plus en plus forte, conséquence de l’amélioration du niveau de vie et de la constitution progressive d’un classe moyenne. (10) Le Mexique est le troisième pays récipiendaire de remesas au niveau mondial, derrière la Chine et l’Inde. Le développement des canaux formels de transfert de fonds, la baisse des coûts associés ainsi que l’amélioration de l’outil statistique expliquent la meilleure prise en compte des remesas dans la balance des paiements. Le Mexique est moins vulnérable à un choc sur les remesas que les petits pays d’Amérique centrale ou des Caraïbes pour lesquels ces transferts représentent généralement plus de 15% du PIB nominal. (11) Contrairement à la crise de la dette souveraine subie par le Mexique et les pays d’Amérique latine dans les années 1980, la crise mexicaine de 1995 ne relevait pas d’un problème de solvabilité à long terme de l’Etat, mais d’un problème de liquidité, la faiblesse des réserves de change ne permettant plus de servir la dette publique externe à court terme. (12) Les entreprises américaines sont à l’origine de 60% des IDE effectués au Mexique depuis 1994, dont plus de 60% sont destinés au secteur manufacturier, notamment l’industrie automobile. Les entrées nettes d’IDE ont reculé de USD 1,2 milliard en 2007, mais les entrées brutes ont progressé de 20% à USD 23,2 milliards, la stratégie d’internationalisation de plusieurs grandes compagnies mexicaines, telles que Cemex ou Telmex, ayant conduit à un nouveau record en matière d’investissements à l’étranger (environ USD 8 milliards en 2007). Dans le même temps, les flux d’investissements de portefeuille en actions se sont soldés par des sorties nettes pour - USD 0,4 milliard. Conjoncture 42 (13) Afin de limiter l’accumulation de réserves de change et le coût associé à leur stérilisation, la banque centrale applique depuis 2003 un mécanisme strict et transparent d’adjudications systématiques d’une partie des réserves de changes, notamment celles qu’elle gère pour le compte de Pemex. Cette pratique permet aussi de limiter les pressions à l’appréciation du MXN. (14) Les indicateurs de performance se sont légèrement dégradés depuis la fin de 2006 : le ratio de capitalisation moyen du système bancaire était de 16% en juin 2007, la profitabilité a diminué sur le premier semestre 2007 mais est toujours satisfaisante (ROA 2,5% et ROE 18%), le ratio de liquidité actifs liquides/dépôts à court terme est de 80%, et le niveau de provisionnement des prêts non performants excède 180%. (15) Ils s’établissent à 2,5% de l’encours total de crédit, avec des disparités en fonction du type de débiteur : 2% pour les prêts aux entreprises contre 6% pour les prêts à la consommation. (16) 700 000 personnes seraient déjà surendettées à cause d’une utilisation excessive et mal avisée de leurs cartes de crédit, certaines en accumulant plus d’une dizaine. (17) Le “hot money”, c’est-à-dire le stock des investissements de portefeuille ajouté à la dette externe à court terme, représente environ 170% des réserves de changes du Mexique, le stock des investissements de portefeuille ayant doublé depuis 2001. (18) Le marché des produits structurés, notamment les Residential Mortgage Backed Securities (les titres adossés à des créances hypothécaires), s’est développé ces dernières années au Mexique. Les émissions sur le marché ont atteint USD 6 milliards en 2006, ce qui reste marginal comparé aux marchés matures. Il faut noter que le marché immobilier mexicain ne comporte pas de compartiment “subprime”. (19)La loi de responsabilité budgétaire introduite en mars 2006 a amélioré la transparence des comptes publics en établissant une cible d’équilibre budgétaire, un cadre de dépenses à moyen terme, un mécanisme transparent de fixation du prix du pétrole pour établir le budget, ainsi qu’une gestion plus stricte du fonds de stabilisation du pétrole. Ce dernier demeure faiblement approvisionné (USD 5 miliards), malgré la hausse des cours du prix du brut. A part le Chili et Trinidad & Tobago, aucun pays du sous-continent ne dispose d’un fonds de stabilisation réellement alimenté et bien géré, permettant aux gouvernements de limiter leur vulnérabilité en cas de baisse brutale des cours. (20) Les élections présidentielles et législatives se sont tenues au mois de juillet 2006, or les années électorales ou préélectorales sont souvent caractérisées par un relachement de la bride budgétaire dans la plupart des pays. (21) La CFE (Commission Fédérale pour l’Electricité) a confirmé en janvier le lancement d’un appel d’offres pour un important projet d’usine de gaz naturel liquéfié et de pipeline estimé à USD 600 millions. Début février, le gouvernement a annoncé la création d’un fonds national pour les infrastructures (FNI) doté de USD 3,7 milliards affectés dans le budget 2008 avec pour objectif de créer 100 000 emplois ; suivi mifévrier de l’annonce d’un programme de modernisation de l’industrie pétrochimique avec la construction d’une usine d’éthylène pour un investissement d’environ USD 1 milliard. (22) L’un des objectifs du programme d’infrastructure étant de permettre à moyen terme de compenser le coût à court terme de la réforme fiscale pour les entreprises. (23) Le poids de la dette publique externe indexée sur le USD et émise à taux variable a été un aspect important de la crise de 1995. Le Congrès a désormais mandat de réduire la dette publique externe de USD 500 millions par an. A noter qu’une définition plus large de la dette Mars 2008 publique intégrant l’ensemble des engagements de l’Etat, notamment ceux hors-bilan relatifs au programme PIDIREGAS de financement à long terme de projets énergétiques mis en place en 1995, fait ressortir le ratio dette publique sur PIB à 35%. Par convention comptable, ces engagements ne sont réintégrés dans l’encours de dette du gouvernement fédéral que deux ans avant leur échéance. (24) Felipe Calderon n’a en effet devancé Andres Manuel Lopez Obrador, le candiat de la gauche radicale (PRD) que de 0,6 point en obtenant seulement 35,9% des votes. Le PAN détient 41% des sièges dans les deux chambres du Congrès, contre 30% pour le PRD suivi de près par le PRI, le parti historique à la tête du pays pendant 71 ans qui a perdu la présidence au profit du PAN en 2000. Le PRI demeure tout de même à la tête de la majorité des Etats fédérés et est le seul parti disposant d’une implantation régionale et locale dans l’ensemble du pays. (25) Les derrniers sondages effectués en janvier 2008 le créditent toujours de plus de 65% d’opinions favorables au sein de la population mexicaine. (26) Les fonctionnaires potentiellement concernés par ce dispositif ont encore quelques semaines pour décider de basculer vers ce nouveau régime de retraite, ce qui permettra alors d’estimer le coût de transition de la réforme. (27) L’imbroglio qui a suivi l’élection présidentielle de juin 2006 – Lopez Obrador désormais décrédibilisé, ne reconnaissant pas sa défaite, arguant des fraudes – a ébranlé les institutions du pays jusqu’à ce que la cour électorale confirme la victoire de Calderon en septembre. Sur demande des partis d’opposition de gauche, notamment le PRD, et comme un pré-requis à l’adoption de la réforme fiscale, une réforme du code électoral a été adoptée. Elle prévoit que l’Institut Fédéral Electoral (IFE), placé sous le contrôle du Congrès, aura à charge de réguler les élections, et que les budgets des campagnes des partis seront financés sur fonds publics, alloués sur principe de l’obtention d’un nombre minimum de votes, ce qui dessert les petits partis et renforce le tripartisme de la scène politique. De plus, la nouvelle loi limitera la publicité dans les médias. (28) Selon l’OCDE, le droit du travail au Mexique est l’un des plus rigides parmi les pays membres, après la Turquie et le Portugal. (29) Projet moins controversé, la refonte de la gouvernance de PEMEX et CFE, passant par l’établissement de conseils d’administration indépendants, ne devrait pas souffrir d’une grande opposition. (30) Les syndicats du secteur éducatif et des grands groupes publics comme Pemex et CFE ont toujours montré une grande loyauté envers le PRI en échange de régimes de protection sociale et d’avantages extrêment généreux. (31) Coûts élevés, faible concurrence dans certains secteurs toujours très concentrés (télécommunications, ciment, production de tortillas…) du fait d’importantes barrières à l’entrée (réglementaires ou tarifaires pour les pays avec qui le Mexique n’a pas d’accord commercial) pour les nouveaux entrants potentiels. Conjoncture 43 DIRECTION DES ETUDES ECONOMIQUES Philippe d’ARVISENET Chef Economiste economic-research.bnpparibas.com 01.43.16.95.58 [email protected] Philippe d’ARVISENET 01.43.16.95.58 [email protected] Eric VERGNAUD Responsable Economies OCDE Questions structurelles, Marché financier unique 01.42.98.49.80 [email protected] Caroline NEWHOUSE-COHEN Conjoncture 01.43.16.95.50 [email protected] 01.43.16.95.53 [email protected] ECONOMIES OCDE ETATS-UNIS, CANADA Jean-Marc LUCAS JAPON, AUSTRALIE, NOUVELLE-ZELANDE Caroline NEWHOUSE-COHEN 01.43.16.95.50 [email protected] ZONE EURO, ITALIE, ELARGISSEMENT UE Clemente De LUCIA 01.42.98.27.62 [email protected] FRANCE, MARCHE DU TRAVAIL ZONE EURO Mathieu KAISER 01.55.77.71.89 [email protected] ALLEMAGNE, AUTRICHE, SUISSE, FINANCES PUBLIQUES Frédérique CERISIER 01.43.16.95.52 [email protected] ESPAGNE, PORTUGAL, GRECE Philippe SABUCO 01.43.16.95.54 [email protected] ROYAUME-UNI, PAYS NORDIQUES, BENELUX, PENSIONS, PREVISIONS A LONG TERME Raymond V AN DER PUTTEN 01.42.98.53.99 [email protected] Laurent QUIGNON Responsable 01.42.98.56.54 [email protected] Céline CHOULET Philippe SABUCO 01.57.43.02.91 01.43.16.95.54 [email protected] [email protected] 01.43.16.95.40 [email protected] 01.42.98.79.82 [email protected] ASIE Delphine CAVALIER Alexandre VINCENT 01.43.16.95.41 01.43.16.95.44 [email protected] [email protected] AMERIQUE LATINE Sylvain BELLEFONTAINE Valérie PERRACINO 01.42.98.26.77 01 42 98 74 26 [email protected] [email protected] AFRIQUE Stéphane ALBY Gaëlle LETILLY 01.42.98.02.04 01.42.98.56.27 [email protected] [email protected] EUROPE DE L’EST Europe centrale, Pays baltes, Pays balkaniques Jean-Loïc GUIEZE 01.42.98.43.86 [email protected] RUSSIE, ANCIENNES REPUBLIQUES SOVIETIQUES Anna DORBEC 01.42.98.48.45 [email protected] MOYEN-ORIENT – SCORING Pascal DEVAUX 01.43.16.95.51 [email protected] ECONOMIE BANCAIRE RISQUES PAYS Guy LONGUEVILLE Responsable François FAURE Flux de capitaux vers les pays émergents,Turquie Mars 2008 Conjoncture Nos publications economic-research.bnpparibas.com Conjoncture traite chaque mois des grands sujets de l’actualité économique et des problèmes structurels. Conjoncture - Taux - Change assure un suivi mensuel détaillé de la conjoncture économique et des évolutions des taux d’intérêt et de change dans les grands pays de l’OCDE. EcoWeek étudie des sujets économiques spécifiques et au cœur des débats (chaque vendredi). EcoFlash est un commentaire des principaux événements économiques (publication de données, décisions de politique économique) dans les heures qui suivent leur annonce, accompagné d’une analyse approfondie. ECOTV, le rendez-vous mensuel des économistes de BNP Paribas. Chaque mois, Philippe d'Arvisenet et ses équipes décodent pour vous l'actualité économique et financière sur le plateau d'EcoTV en français et en anglais. Vous pouvez visualiser ces interviews via notre site internet: Pour recevoir directement nos publications, vous pouvez vous abonner sur notre site La revue Conjoncture reflète l’opinion des Etudes Economiques de BNP Paribas. Elle est publiée uniquement à titre informatif. 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BNP Paribas et l'ensemble des entités juridiques, filiales ou succursales (ensemble désignées ci-après " BNP Paribas "), sont susceptibles d'agir comme teneur de marché, d'agent ou encore à titre principal d'intervenir pour acheter ou vendre des titres émis par les émetteurs mentionnés dans ce document, ou des dérivés y afférents. BNP Paribas est susceptible notamment de détenir une participation au capital des émetteurs mentionnés dans ce document, de se trouver en position d'acheteur ou vendeur de titres ou de contrats à termes, d'options ou de tous autres instruments dérivés reposant sur l'un de ces sous-jacents. BNP Paribas, ses dirigeants ou employés, peuvent exercer ou avoir exercé des fonctions d'employé ou dirigeant auprès de tout émetteur mentionné dans ce document, ou ont pu intervenir en qualité de conseil auprès de ce(s) émetteur(s). BNP Paribas est susceptible de solliciter, d'exécuter ou d'avoir dans le passé fourni des services de conseil en investissement, de souscription ou tous autres services au profit de l'émetteur mentionné aux présentes (y compris et sans limitation agir en tant que conseil, arrangeur, souscripteur, prêteur) au cours des 12 derniers mois précédant la publication de ce document. BNP Paribas est susceptible, dans les limites autorisées par la loi en vigueur, d'avoir agi sur la foi de ou d'avoir utilisé les informations contenues dans les présentes, ou les travaux de recherche ou d'analyses sur le fondement desquels elles sont communiquées, et ce préalablement à la publication de ce document. BNP Paribas est susceptible d'obtenir une rémunération ou de chercher à être rémunéré au titre de services d'investissement fournis à l'un quelconque des émetteurs mentionnés dans ce document dans les 3 mois suivant sa publication. Tout émetteur mentionné aux présentes est susceptible d'avoir reçu des extraits du présent document préalablement à sa publication afin de vérifier l'exactitude des faits et sa véracité des informations sur le fondement desquelles il a été élaboré. Ce document est élaboré par le Groupe BNP Paribas. Il est conçu à l'intention exclusive des destinataires qui en sont bénéficiaires et ne saurait en aucune façon être reproduit en tout ou partie ou même transmis à toute autre personne ou entité sans le consentement préalable écrit de BNP Paribas. En recevant ce document, vous acceptez d'être engagés par les termes des restrictions ci-dessus. Déclaration de l'analyste. Chaque analyste responsable de la préparation et de la rédaction de ce document certifie que (i) les opinions qui y sont exprimées reflètent exactement son opinion personnelle sur l'ensemble des émetteurs (pris individuellement ou collectivement) ou des titres désignés dans ce document de recherche, et déclare que (ii) aucune composante de sa rémunération n'a été, n'est, ou ne sera liée, directement ou indirectement, aux recommandations et opinions exprimées ci-dessus. Etats-Unis : ce document est distribué aux investisseurs américains par BNP Paribas Securities Corp., ou par une succursale ou une filiale de BNP Paribas ne bénéficiant pas du statut de broker-dealer au sens de la réglementation américaine à des investisseurs institutionnels américains de premier rang. BNP Paribas Securities Corp., filiale de BNP Paribas, est un broker -dealer enregistré auprès de la Securities and Exchange Commission et est membre affilié de la National Association of Securities Dealers, Inc. BNP Paribas Securities Corp. n'accepte la responsabilité du contenu du document préparé par une entité non américaine du groupe BNP Paribas que lorsqu'il a été distribué à des investisseurs américains par BNP Paribas Securities Corp. Royaume-Uni : ce document a été approuvé en vue de sa publication au Royaume Uni par BNP Paribas Succursale de Londres, une succursale de BNP Paribas dont le siège social est situé à Paris, France. BNP Paribas Succursale de Londres est régie par la Financial Services Authority (" FSA ") pour la conduite de son activité de banque d'investissement au Royaume Uni, et est un membre du London Stock Exchange. Ce document a été préparé pour des investisseurs professionnels, n'est pas conçu à destination de clients relevant de la gestion privée au Royaume Uni tels que définis par la réglementation FSA, et ne saurait de quelconque façon être transmise à ces personnes privées. Japon : ce document est distribué à des entreprises basées au Japon par BNP Paribas Securities (Japan) Limited, par la succursale de Tokyo de BNP Paribas, ou par une succursale ou une entité du groupe BNP Paribas qui n'est pas enregistrée comme une maison de titres au Japon, à certaines institutions financières autorisées par la réglementation. BNP Paribas Securities (Japan) Limited, Succursale de Tokyo, est une maison de titres enregistrée conformément au Securities and Exchange Law of Japan et est membre de la Japan Securities Dealers Association. BNP Paribas Securities (Japan) Limited, Succursale de Tokyo, n'accepte la responsabilité du contenu du document préparé par une entité non japonaise membre du groupe BNP Paribas que lorsqu'il fait l'objet d'une distribution à des entreprises basées au Japon par BNP Paribas Securities (Japan) Limited, Succursale de Tokyo. Hong Kong : ce document est distribué à Hong Kong par BNP Paribas Hong Kong Branch, filiale de BNP Paribas dont le siège social est situé à Paris, France. BNP Paribas Hong Kong Branch exerce sous licence bancaire octroyée par l'Autorité Monétaire de Hong Kong et est réputée banque agréée par la Securities and Futures Commission pour l'exercice des activités de type Advising on Securities [Regulated Activity Type 4] en vertu des Securities and Futures Ordinance Transitional Arrangements. Singapour : ce document est distribué à Singapour par BNP Paribas Singapore Branch, filiale de BNP Paribas dont le siège social est situé à Paris, France. BNP Paribas Singapore exerce sous licence bancaire octroyée par l'Autorité Monétaire de Singapour et est dispensée de la détention des licences requises au titre de l'exercice d'activités réglementées et de la fourniture de services financiers en vertu du Securities and Futures Act et du Financial Advisors Act. © BNP Paribas (2008). 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