Téléchargez la revue de presse d`Actoral Montréal

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SPECTACLE
PERFORMANCE
ARTS VISUELS
LECTURE
MUSIQUE
AUTRE FORME
REVUE DE PRESSE
actøral
16
festival des arts et des écritures cøntempøraines
25 octobre - 5 novembre 2016 - Montréal
1
MISE EN ESPACE
ON A PARLÉ DU FESTIVAL ACTORAL.16 À MONTRÉAL...
• DANS LA PRESSE ÉCRITE INTERNATIONALE
Le Devoir - Mélanie Carpentier - 22 octobre 2016
24h - 25 octobre 2016
Le Devoir - Catherine Lalonde - 27 octobre 2016
• SUR LE WEB
Voir.ca - Philippe Couture - 5 mai 2016
Et baam - Malorie D’Emmanuelle - 26 septembre 2016
Mat.TV - Sébastien Bouthillier - 24 octobre 2016
Mat.TV - Sébastien Bouthillier - 25 octobre 2016
Mouvement.net - Moïra Dalant - 26 octobre 2016
Revue Jeu - Christian St Pierre & Smaranda Olcèse - 26 octobre 2016
Lepetitjournal.com - 26 octobre 2016
Montreal157 - 26 octobre 2016
Le Devoir - Catherine Lalonde - 27 octobre 2016
Mat.TV - Sébastien Bouthillier - 27 octobre 2016
tourisme-montreal.org - Robyn Fadden - 27 octobre 2016
La Presse - Mario Cloutier - 28 octobre 2016
Mat.TV - Sébastien Bouthillier - 28 octobre 2016
Un Fauteuil pour l’Orchestre - Jean Hostache - 28 octobre 2016
DFDanse - Brigitte Manolo - 29 octobre 2016
Infopresse - 30 octobre 2016
Le Devoir - Catherine Lalonde - 31 octobre 2016
La Devoir - Mélanie Carpentier - 3 novembre 2016
Unidivers - 3 novembre 2016
Sors-tu ? - Gilles G. Lamontagne - 24 novembre 2016
• SUPPLÉMENTS SPÉCIAL ACTORAL
Jeu n° 160 - Spécial actoral Montréal - Octobre 2016
• À LA RADIO
ICI Radio Canada Première - Emission Le 15-18 avec Hubert Colas & Danièle de Fontenay - 24 octobre 2016
Choq - Emission Danscussions avec Pamina de Coulon & Alexander Vantournhout - 25 octobre 2016
Emission Le Retour d’Anne-Marie Kirouac avec Danièle de Fontenay & Hubert Colas - 26 octobre 2016
Emission La Matinale de Mayssoun Tadlaoui avec Marie Brassard - 27 octobre 2016
CISM - Emission Le Cubicule - 28 octobre 2016
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DANS LA PRESSE ÉCRITE
INTERNATIONALE
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Le Devoir
Quotidien montréalais
Le 22 octobre 2016
Par Mélanie Carpentier
REVUE
Devoir - Le Devoir - 22 oct. 2016 - Page
#40 DE PRESSE - ACTORAL
LE DEVOIR, Dimanche 22 octobre 2016
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RuGicomm • 514 759 0494 • [email protected]
24H, Mardi 25 octobre 2016
24h
Quotidien montréalais
Le 25 octobre 2016
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Le Devoir
Quotidien montréalais
Le 27 octobre 2016
Par Catherine Lalonde
Devoir - Le Devoir - 27 oct. 2016 - Page #15
REVUE DE PRESSE - ACTORAL
LE DEVOIR, Jeudi 27 octobre 2016
6
RuGicomm • 514 759 0494 • [email protected]
SUR LE WEB
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Voir.ca
Site québécois
Le 5 mai 2016
Par Philippe Couture
URL : https://voir.ca/scene/2016/05/05/les-chiens-de-navarre-et-meg-stuart
-de-retour-a-lusine-c-en-2016-2017/
SCÈNE
LES CHIENS DE NAVARRE ET MEG STUART DE
RETOUR À L’USINE C EN ᐕᘲ☢̆㌶㐵ᰚ᨜耂耂ᐕᘲ☢̆㌶㐵ỒĜ
L’Usine C dévoile aujourd’hui 4 des pièces qui seront à l’afⴀ휄che dès
l’automne. Les Chiens de Navarre, Meg Stuart, Virginie Brunelle et Angela
Konrad sont les noms qui annoncent la couleur d’une nouvelle saison.
L’Usine C accueillera également, pour une deuxième édition montréalaise,
le festival Actoral fondé à Marseille par Hubert Colas.
(https://voir.ca/scene/2016/05/05/les-chiens-de-navarre-et-meg-stuart-dePhilippe Couture (https://voir.ca/auteur/pcouture/)
Photo : Les armoires normandes / P.
5 mai 2016
Lebruman
retour-a-lusine-c-en-2016-2017/attachment/macbeth/)
Que les afⴀ휄cionados de l’irrévérence se réjouissent, Les chiens de Navarre
ACTORAL
MONTRÉAL,
ouvriront la saison
pour une deuxièmeDEUXIÈME
année consécutiveÉDITION
! Ce petit rituel !
automnal
désormais
couru, promet
cette année
encore
quelques
truculences
L’Usine
C et le
festival Actoral
s’associent
à nouveau
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délectation
l’explorationFondé
des affres
de l’amour
et du sexe.
l’on en croit
Québec
et de ladans
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en 2001
à Marseille,
par leSimetteur
en
les Hubert
échos d’outre-Atlantique,
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nouvelle
intitulée
Lesetarmoires
Kolik
Face au
scène
Colas qui nous avait
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mémorables
une pièce
hautement
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Présenté en première
, le festivalest
Actoral
interroge
les écritures
dans nordtous les
murnormandes
américaine
du 21 au Parmi
23 septembre
!
annoncées cette année deux solos
domaines
artistiques.
les surprises
de haut vol: Aneckxander d’Alexander Vantournhout et Bauke Lievens, où
danse et acrobatie se fondent dans le corps métamorphique d’un jeune
trublion de la scène belge, et Texte M., un monologue vertigineux sur la
liberté, écrit et interprété par Hubert Colas dont le théâtre radical frappera
une fois de plus. La collaboration entamée en 2014 entre Danièle de Fontenay
et le metteur en scène marseillais poursuit ainsi allègrement son cours et
promet encore de belles découvertes pour cette deuxième édition d’Actoral
Montréal qui prendra d’assaut l’Usine C du 25 octobre au 5 novembre.
Programmation complète à venir.
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Et Baam
Blog Online
Le 26 septembre 2016
Par Malorie D’Emmanuelle
URL : http://etbaam.com/et-si-on-parlait-culture/2016/09/actoral-la-diversite-emergente/
Actoral : la diversité émergente | Et Baam !
25/09/2016
Le festival, né à Marseille en 2001 sous la houlette d’Hubert Colas, défend les arts et les écritures contemporaines. Il s’exporte pour la
seconde fois à Montréal.
Actoral est un festival fleuve consacré à la jeune création : une programmation variée, avec expositions, concerts et danse, qui se déroulera pendant
trois semaines à Marseille puis 10 jours à Montréal. Hubert Colas explique sa volonté « d’interroger les écritures contemporaines dans le champ le plus
large, le plus original et de valoriser les échanges culturels ».
Quant au choix de la programmation, elle se fait par des affinités, des connaissances, de l’intuition et des rencontres. C’est le plasticien Théo Mercier qui
parraine l’édition Marseillaise. Il sera présent au Musée d’Art Contemporain à Marseille avec son exposition The Thrill is gone jusqu’au 29 janvier. Il
présentera aussi sa performance Radio Vinci Park à Montréal.
Marseille­Bruxelles
Parmi les spectacles proposés à Marseille, un temps sera consacré à la découverte de courants artistiques belges. Le fondateur du festival explique : « Il
y a une dualité géographique en Belgique, entre la Flandre et la Wallonie. Une situation intéressante à faire connaître au public marseillais au travers de
ces travaux ». Une envie d'ouvrir à la scène émergente doublée de la volonté de faire venir des grandes figures belges, comme le dessinateur et
performer Jan Fabre ou le chorégraphe Jan Martens.
Marseille­Montréal
Dix jours seulement après l’édition marseillaise c’est la montréalaise qui s’ouvrira à l'Usine C. « En ce moment nous travaillons à distance mais comme
nous sommes sur une biennale cela se prépare sur du long terme ». Les voyages et les échanges d’artistes ont permis la naissance de ce festival : «
C’est en me rendant là-bas an tant que metteur en scène que j’ai pu parler du festival, du travail de défense des artistes et de l’émergence ». Une
rencontre qui a amené à la création de cet événement grâce à l’investissement de l’Usine C qui reçoit des artistes en résidence.
Bien que les programmations diffèrent, on retrouve des similitudes. « Des artistes sont communs aux deux éditions, nous souhaitions présenter une
œuvre de Théo Mercier à Montréal. Et Fanny De Chaillé, actuellement au Québec, sera en 2017 à Marseille ».
Montévidéo vecteur de lien
Si ces rencontres sont possibles c’est aussi grâce à Montévidéo, lieu des résidences marseillaises qui permet des échanges entre structures et la
préparation sereine des artistes. « C’est le cœur de la programmation et un lieu privilégié pour la création ».
Le festival Actoral se déroule du 27 septembre au 15 octobre à Marseille et du 25 octobre au 5 novembre à Montréal.
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Mat.TV
Site québécois
Le 24 octobre 2016
Coup d’envoi d’Actoral
Par Sébastien Bouthillier
URL : http://www.mattv.ca/coup-denvoi-dactoral/
BY SEBASTIEN BOUTHILLIER · OCT 24, 2016
Le festival débute par 4 spectacles à l’Usine C ce soir et
demain
© Bart Grietens (Aneckxander)
Par : Sébastien Bouthillier
Actoral, le Festival international des arts et des écritures contemporaines francophones, réunit des artistes
émergents au regard inédit ou singulier. Arts visuels, performance, danse, théâtre et littérature se déploient
jusqu’au 5 novembre. Ce soir et demain, l’Usine C présente quatre premiers spectacles, sans compter le
stationnement souterrain où campe le décor sinistre de Radio Vinci Park, plus qu’un show de boucane.
Son cou démesurément long lui vaut le surnom d’Aneckxander. Ses bras aussi, des bras interminables,
impossibles à soustraire au regard. C’est pourtant ce que recherche l’acrobate et danseur Alexander
Vantournhout en explorant la plasticité de son corps dans sa nudité sculpturale. Sur les trois variations d’un
morceau de piano d’Arvo Pärt et muni de quelques objets, cet homme procède à son autoportrait bizarre, mais
captivant par son originalité. Son sens du sacrifice motive­t­il ses acrobaties?
Le chorégraphe Lorenzo de Angelis se déclare Haltérophile, celui qui prend en charge. Il soulève le poids
de l’animal public et de la fragilité qui émerge de sa carapace, qu’il casse. Les spectateurs se trouvent près
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de lui sur scène, en cercle disjoint, ce qui isole chacun des autres et leur offre une perspective unique sur
Actoral, le Festival international des arts et des écritures contemporaines francophones, réunit des artistes
émergents au regard inédit ou singulier. Arts visuels, performance, danse, théâtre et littérature se déploient
Mat.TV
jusqu’au 5 novembre. Ce soir et demain, l’Usine C présente quatre premiers spectacles, sans compter le
Site
québécois
stationnement souterrain où campe le décor sinistre de Radio Vinci Park, plus qu’un show de boucane.
Le 24 octobre 2016
Son cou démesurément long lui vaut le surnom d’Aneckxander. Ses bras aussi, des bras interminables,
Par
Sébastien Bouthillier
URL
: http://www.mattv.ca/coup-denvoi-dactoral/
impossibles à soustraire au regard. C’est pourtant ce que recherche l’acrobate et danseur Alexander
Vantournhout en explorant la plasticité de son corps dans sa nudité sculpturale. Sur les trois variations d’un
morceau de piano d’Arvo Pärt et muni de quelques objets, cet homme procède à son autoportrait bizarre, mais
captivant par son originalité. Son sens du sacrifice motive­t­il ses acrobaties?
Le chorégraphe Lorenzo de Angelis se déclare Haltérophile, celui qui prend en charge. Il soulève le poids
de l’animal public et de la fragilité qui émerge de sa carapace, qu’il casse. Les spectateurs se trouvent près
de lui sur scène, en cercle disjoint, ce qui isole chacun des autres et leur offre une perspective unique sur
l’animal dansant. Dans son improvisation, de Angelis aguiche le public par ses jeux d’adresse, quelques
paroles ou le silence.
© CHA Production (Haltérophile)
Lorenzo de Angelis déambule ensuite dans les rayons de Médail Décor, un magasin de tissus
d’ameublement. Il dédouble Vincent Thomasset, qui retisse les liens avec l’enfant qu’il a été. Ce dernier
réussit le défi de parler des choses sans les évoquer grâce à sa démarche aussi expressionniste
qu’humoristique. La finesse de la trame sonore sélectionnée pour cette séquence biographique pudique
restaure l’ambiance nostalgique de l’enfance, le garçon maintenant jeune homme savait qu’il deviendrait
artiste et rien d’autre.
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Mat.TV
Site québécois
Le 24 octobre 2016
Par Sébastien Bouthillier
URL : http://www.mattv.ca/coup-denvoi-dactoral/
© Flavie Laleu (Fire of emotions)
Avec ingénuité, Pamina de Coulon relie Pytagore, Einstein, la science­fiction et la « sorcellerie capitaliste »
dans un déluge effervescent de paroles dont jaillit Fire of emotions : Genesis. Parce qu’elle désire voyager
dans le temps, elle retient les aspects irrationnels de la science pour soulever le doute sur les narrations
acceptées de notre réalité, qui exercent un monopole sur notre vision du monde. Pour son voyage cosmique,
elle monte en classe comique : dans la bouche de Pamina de Coulon, le jargon scientifique s’entend comme si
elle récitait une fantaisie.
Aneckxander, Haltérophile, Fire of emotions : Genesis et Médail Décor, les 25 et 26 octobre à l’Usine C.
Crédit photo : Bart Grietens (Aneckxander), CHA Production (Haltérophile) et Flavie Laleu (Fire of emotions)
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Mat.TV
Site
québécois
Plus qu’un show de boucane
Le 25 octobre 2016
Plus qu’un show de boucane
Par
Sébastien Bouthillier
URL : http://www.mattv.ca/plus-quun-show-de-boucane/
BY SEBASTIEN BOUTHILLIER · OCT 25, 2016
BY SEBASTIEN BOUTHILLIER · OCT 25, 2016
Actoral transforme un parkingsouterrain en arène
Actoral transforme un parkingsouterrain en arène
© Erwan Fichou
Par : Sébastien Bouthillier
© Erwan Fichou
Un parking souterrain, la nuit. Odeur pneumatique, effluves carboniques. Dans cet espace clos, une arène
Par : Sébastien Bouthillier
délimitée par des barrières. Une rencontre improbable entre un danseur travesti et un motard cascadeur sur
Un parking souterrain, la nuit. Odeur pneumatique, effluves carboniques. Dans cet espace clos, une arène
sa monture. Affrontement au rythme du clavecin. Décadence de la civilisation?
délimitée par des barrières. Une rencontre improbable entre un danseur travesti et un motard cascadeur sur
« Radio Vinci Park est une rencontre dans un parc de stationnement chargé de fantasmes et d’angoisses,
sa monture. Affrontement au rythme du clavecin. Décadence de la civilisation?
explique le plasticien et metteur en scène Théo Mercier, c’est une ode à l’amour impossible, un spectacle
« Radio Vinci Park est une rencontre dans un parc de stationnement chargé de fantasmes et d’angoisses,
forain, un combat de chiens, une corrida, une scène mythologique… »
explique le plasticien et metteur en scène Théo Mercier, c’est une ode à l’amour impossible, un spectacle
La motocyclette révèle le souci du metteur en scène pour l’anthropomorphisation des objets. Comme si en
forain, un combat de chiens, une corrida, une scène mythologique… »
devenant humains, les objets connaissent les mêmes enjeux de société que nous : vieillissement
La motocyclette révèle le souci du metteur en scène pour l’anthropomorphisation des objets. Comme si en
démographique, questions de genre, lutte des classes, etc.
devenant humains, les objets connaissent les mêmes enjeux de société que nous : vieillissement
Anthropologue, ethnographe ou touriste féru de géopolitique, Théo Mercier explore le monde réel et le monde
démographique, questions de genre, lutte des classes, etc.
inexistant. Il part en quête de l’authenticité de la nature dans une culture de production sérielle d’objets de
Anthropologue, ethnographe ou touriste féru de géopolitique, Théo Mercier explore le monde réel et le monde
consommation de masse.
inexistant. Il part en quête de l’authenticité de la nature dans une culture de production sérielle d’objets de
consommation de masse.
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Mat.TV
Site québécois
Le 25 octobre 2016
Par Sébastien Bouthillier
URL : http://www.mattv.ca/plus-quun-show-de-boucane/
Il invite à oublier l’univocité des objets, car en remettant en question leur statut, il pave la voie vers leur
équivocité, voire leur plurivocité jusqu’à la confusion, puis la perte du sens du geste de l’artiste dans son
œuvre.
Théo Mercier a conçu Radio Vinci Park avec François Chaignaud. Celui­ci danse dans les endroits les plus
inusités, en plus de réaliser des performances et des concerts surprenants. L’opérette, la littérature érotique,
le hulla hoop l’inspirent, et il a collaboré avec la drag queen Rumi Missabu. En 2009, avec Cecilia Bengolea, il
emporte le prix de la révélation chorégraphique de la critique. Le cascadeur Cyril Bourny et la
claveciniste Marie­Pierre Brébant l’accompagnent dans l’arène.
Actoral, le Festival des arts et des écritures contemporaines, propose de découvrir jusqu’au 5 novembre des
artistes qui remettent en question leur art.
Radio Vinci Park, les 25 et 26 octobre au parking Indigo de la Cité internationale.
Crédit photo : Erwan Fichou
Texte révisé par : Annie Simard
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Mouvement.net
Magazine culturel interdisciplinaire
Le 26 octobre 2016
De Moïra Dalant
URL : http://www.mouvement.net/teteatete/entretiens/recherche-dinconfort
(/)
Tu iras la chercher (texte de Guillaume Corbeil) de Florian Pautasso © p. D. R.
Entretiens Théâtre (/teteatete/entretiens)
Recherche d’inconfort
« La représentation n’a pas pour but de montrer, dire, assurer, mais plutôt de perdre un peu,
d’effleurer la sphère intime peut-être. » Rencontre avec l’auteur-metteur en scène Florian
Pautasso qui vient de partir pour le Canada où il présente Tu iras la chercher dans le cadre du
festival Actoral. Par Moïra Dalant
publié le 26 oct. 2016
Florian Pautasso évite l’écueil d’affirmer trop clairement et trop fièrement un propos. Pas de discours mais
des détours poétiques. Tout est plus souterrain qu’il n’y paraît. Cela va sans dire que la représentation n’a
pas un but précis, pas de mission, ces noms sont trop brutaux, il s’agit chez le jeune auteur/metteur en
scène d'éviter les lignes droites et les raccourcis, et d’interroger la courbe et l’indicible… Tout se joue dans
l’inédit ou le non­dit et dans l’invisible.
Dans votre travail, le « je » est au centre. De quel « je » s’agit­il ?
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festival Actoral. Par Moïra Dalant
publié le 26 oct. 2016
Mouvement.net
Magazine
culturel interdisciplinaire
Florian Pautasso évite l’écueil d’affirmer trop clairement et trop fièrement un propos. Pas de discours mais
Le
26 octobre 2016
des détours poétiques. Tout est plus souterrain qu’il n’y paraît. Cela va sans dire que la représentation n’a
De
Moïra Dalant
pas un but précis, pas de mission, ces noms sont trop brutaux, il s’agit chez le jeune auteur/metteur en
URL
: http://www.mouvement.net/teteatete/entretiens/recherche-dinconfort
scène d'éviter les lignes droites et les raccourcis, et d’interroger la courbe et l’indicible… Tout se joue dans
l’inédit ou le non­dit et dans l’invisible.
« Les individus qui deviennent des artistes sont souvent distordus par leur vie. Des gens étranges, « qui
Dans votre travail, le « je » est au centre. De quel « je » s’agit­il ?
« Les individus qui deviennent des artistes sont souvent distordus par leur vie. Des gens étranges, « qui
n’ont pas supporté quelque chose » comme le dit Valère Novarina. J’aime travailler avec des gens qui font
« Les individus qui deviennent des artistes sont souvent distordus par leur vie. Des gens étranges, « qui
n’ont pas supporté quelque chose » comme le dit Valère Novarina. J’aime travailler avec des gens qui font
avec leur étrangeté, sans en faire un étendard. Chez les acteurs, je n’aime pas trop les « je » qui se
n’ont pas supporté quelque chose » comme le dit Valère Novarina. J’aime travailler avec des gens qui font
avec leur étrangeté, sans en faire un étendard. Chez les acteurs, je n’aime pas trop les « je » qui se
connaissent et se maîtrisent trop bien, ça m’angoisse. Je trouve que le théâtre n’est vraiment pas l’endroit
avec leur étrangeté, sans en faire un étendard. Chez les acteurs, je n’aime pas trop les « je » qui se
connaissent et se maîtrisent trop bien, ça m’angoisse. Je trouve que le théâtre n’est vraiment pas l’endroit
où prouver que l’on sait des choses sur soi et sur les autres. C’est l’endroit du danger, de l’accident et de la
connaissent et se maîtrisent trop bien, ça m’angoisse. Je trouve que le théâtre n’est vraiment pas l’endroit
où prouver que l’on sait des choses sur soi et sur les autres. C’est l’endroit du danger, de l’accident et de la
surprise. Dans mes spectacles, je fais en sorte que l’acteur, quand il joue, soit en train de faire une
où prouver que l’on sait des choses sur soi et sur les autres. C’est l’endroit du danger, de l’accident et de la
surprise. Dans mes spectacles, je fais en sorte que l’acteur, quand il joue, soit en train de faire une
expérience, avec le présent et sur lui­même. Une expérience qui le défie et qui le remette en question. Il
surprise. Dans mes spectacles, je fais en sorte que l’acteur, quand il joue, soit en train de faire une
expérience, avec le présent et sur lui­même. Une expérience qui le défie et qui le remette en question. Il
est à un point inconfortable, et pourtant je lui demande d’avancer quand même, sur ce fil, d’aller plus loin,
expérience, avec le présent et sur lui­même. Une expérience qui le défie et qui le remette en question. Il
est à un point inconfortable, et pourtant je lui demande d’avancer quand même, sur ce fil, d’aller plus loin,
même si ce qu’il fait ou dit se révèle être à un endroit totalement inconnu pour lui au bout d’un moment,
est à un point inconfortable, et pourtant je lui demande d’avancer quand même, sur ce fil, d’aller plus loin,
même si ce qu’il fait ou dit se révèle être à un endroit totalement inconnu pour lui au bout d’un moment,
qu’il se met à parler ou à bouger bizarrement. Le théâtre c’est l’endroit de la curiosité.
même si ce qu’il fait ou dit se révèle être à un endroit totalement inconnu pour lui au bout d’un moment,
qu’il se met à parler ou à bouger bizarrement. Le théâtre c’est l’endroit de la curiosité.
qu’il se met à parler ou à bouger bizarrement. Le théâtre c’est l’endroit de la curiosité.
Quand j’écris, je cherche aussi à faire une expérience, toujours, « être autre ». Par exemple traverser une
Quand j’écris, je cherche aussi à faire une expérience, toujours, « être autre ». Par exemple traverser une
situation que je n’ai pas vécue dans la réalité. Une expérience amoureuse, une expérience qui met ma vie
Quand j’écris, je cherche aussi à faire une expérience, toujours, « être autre ». Par exemple traverser une
situation que je n’ai pas vécue dans la réalité. Une expérience amoureuse, une expérience qui met ma vie
en danger, où dont je ne suis pas capable dans ma propre vie par pudeur ou par peur. Tout ce qui est
situation que je n’ai pas vécue dans la réalité. Une expérience amoureuse, une expérience qui met ma vie
en danger, où dont je ne suis pas capable dans ma propre vie par pudeur ou par peur. Tout ce qui est
transgressif donne des sensations au goût unique – dans ces instants on se sent exister intensément, on
en danger, où dont je ne suis pas capable dans ma propre vie par pudeur ou par peur. Tout ce qui est
transgressif donne des sensations au goût unique – dans ces instants on se sent exister intensément, on
se sent très fort « soi ».
transgressif donne des sensations au goût unique – dans ces instants on se sent exister intensément, on
se sent très fort « soi ».
se sent très fort « soi ».
Comment est­ce que vous débutez un nouveau projet ?
Comment est­ce que vous débutez un nouveau projet ?
Comment est­ce que vous débutez un nouveau projet ?
« Très souvent, ça part d’une intuition, d’un constat intime. Mes projets trouvent une base très simple,
« Très souvent, ça part d’une intuition, d’un constat intime. Mes projets trouvent une base très simple,
très concrète – pour Flirt, ma précédente création, il s’agissait pour les acteurs d’essayer de vivre un
« Très souvent, ça part d’une intuition, d’un constat intime. Mes projets trouvent une base très simple,
très concrète – pour Flirt, ma précédente création, il s’agissait pour les acteurs d’essayer de vivre un
moment intense avec les spectateurs. Notre foyer, la prochaine, s’interroge sur deux projets de vie
très concrète – pour Flirt, ma précédente création, il s’agissait pour les acteurs d’essayer de vivre un
moment intense avec les spectateurs. Notre foyer, la prochaine, s’interroge sur deux projets de vie
extrêmes : une maison extraordinaire dont sa créatrice ne sortirait jamais, et un voyage sans retour.
moment intense avec les spectateurs. Notre foyer, la prochaine, s’interroge sur deux projets de vie
extrêmes : une maison extraordinaire dont sa créatrice ne sortirait jamais, et un voyage sans retour.
Chaque projet est différent mais chacun se place à un endroit de nœud intime, politique et esthétique fort
extrêmes : une maison extraordinaire dont sa créatrice ne sortirait jamais, et un voyage sans retour.
Chaque projet est différent mais chacun se place à un endroit de nœud intime, politique et esthétique fort
selon moi. Fort et contradictoire, ambigu.
Chaque projet est différent mais chacun se place à un endroit de nœud intime, politique et esthétique fort
selon moi. Fort et contradictoire, ambigu.
selon moi. Fort et contradictoire, ambigu.
Avant de commencer une pièce, je vérifie vite si la matière sur laquelle je vais travailler présente des
Avant de commencer une pièce, je vérifie vite si la matière sur laquelle je vais travailler présente des
aspérités, des contradictions, en bref : si elle me pose problème. En ce qui concerne la commande
Avant de commencer une pièce, je vérifie vite si la matière sur laquelle je vais travailler présente des
1, j’ai pris ma décision en imaginant Stéphanie Aflalo –
aspérités, des contradictions, en bref : si elle me pose problème. En ce qui concerne la commande
qu’Hubert Colas m’a passé pour Actoral 2015
aspérités, des contradictions, en bref : si elle me pose problème. En ce qui concerne la commande
qu’Hubert Colas m’a passé pour Actoral 20151, j’ai pris ma décision en imaginant Stéphanie Aflalo –
comédienne avec qui je travaille beaucoup – le jouer. J’avais l’intuition qu’une concordance se ferait, entre
qu’Hubert Colas m’a passé pour Actoral 20151, j’ai pris ma décision en imaginant Stéphanie Aflalo –
comédienne avec qui je travaille beaucoup – le jouer. J’avais l’intuition qu’une concordance se ferait, entre
moi, ce texte et elle. Ma première écriture de plateau, Quatuor violence, s’est construite avant tout sur une
comédienne avec qui je travaille beaucoup – le jouer. J’avais l’intuition qu’une concordance se ferait, entre
moi, ce texte et elle. Ma première écriture de plateau, Quatuor violence, s’est construite avant tout sur une
intuition de distribution. Avec quatre comédiens (que je n’avais pas tous vu jouer) et un axe : notre
moi, ce texte et elle. Ma première écriture de plateau, Quatuor violence, s’est construite avant tout sur une
intuition de distribution. Avec quatre comédiens (que je n’avais pas tous vu jouer) et un axe : notre
rapport intime à la violence, c’est tout. Pour résumer, il y a mon intuition, la distribution, et puis tout le
intuition de distribution. Avec quatre comédiens (que je n’avais pas tous vu jouer) et un axe : notre
rapport intime à la violence, c’est tout. Pour résumer, il y a mon intuition, la distribution, et puis tout le
reste en découle – la mise en scène, l’univers sonore, visuel…
rapport intime à la violence, c’est tout. Pour résumer, il y a mon intuition, la distribution, et puis tout le
reste en découle – la mise en scène, l’univers sonore, visuel…
reste en découle – la mise en scène, l’univers sonore, visuel…
Vous aimez mettre en mot et en scène des petites choses de l’invisible…
Vous aimez mettre en mot et en scène des petites choses de l’invisible…
Vous aimez mettre en mot et en scène des petites choses de l’invisible…
« Oui, si on pense en terme d’expérience, le théâtre permet plein de réactions chimiques mystérieuses.
« Oui, si on pense en terme d’expérience, le théâtre permet plein de réactions chimiques mystérieuses.
J’aime bien les essayer, les étudier, sans jamais les comprendre absolument. Si on superpose telle image et
« Oui, si on pense en terme d’expérience, le théâtre permet plein de réactions chimiques mystérieuses.
J’aime bien les essayer, les étudier, sans jamais les comprendre absolument. Si on superpose telle image et
telle musique, tel et tel propos, une réaction se fait, forte et indicible. J’aime faire parler le silence, faire
J’aime bien les essayer, les étudier, sans jamais les comprendre absolument. Si on superpose telle image et
telle musique, tel et tel propos, une réaction se fait, forte et indicible. J’aime faire parler le silence, faire
qu’il soit parfois plus loquace que lorsque l’acteur parle. Et puis le rapport au public est dur parfois, très
telle musique, tel et tel propos, une réaction se fait, forte et indicible. J’aime faire parler le silence, faire
qu’il soit parfois plus loquace que lorsque l’acteur parle. Et puis le rapport au public est dur parfois, très
dur, mais aussi insaisissable, multiple et secret. Les vraies réactions chimiques ce sont celles­là, celles qui
qu’il soit parfois plus loquace que lorsque l’acteur parle. Et puis le rapport au public est dur parfois, très
dur, mais aussi insaisissable, multiple et secret. Les vraies réactions chimiques ce sont celles­là, celles qui
se déroulent à l’intérieur les spectateurs, corps ou tête ou les deux, pendant le temps de la représentation
dur, mais aussi insaisissable, multiple et secret. Les vraies réactions chimiques ce sont celles­là, celles qui
se déroulent à l’intérieur les spectateurs, corps ou tête ou les deux, pendant le temps de la représentation
ou après, une fois sorti de la salle, ou bien après encore, et on ne saura jamais vraiment ce qui s’y passe.
se déroulent à l’intérieur les spectateurs, corps ou tête ou les deux, pendant le temps de la représentation
ou après, une fois sorti de la salle, ou bien après encore, et on ne saura jamais vraiment ce qui s’y passe.
ou après, une fois sorti de la salle, ou bien après encore, et on ne saura jamais vraiment ce qui s’y passe.
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Une dernière question concernant votre écriture de textes et de mises en situation. Est­ce une
Mouvement.net
Magazine culturel interdisciplinaire
Le 26 octobre 2016
De Moïra Dalant
URL : http://www.mouvement.net/teteatete/entretiens/recherche-dinconfort
« Au sein de ma compagnie, j’ai commencé par monter des textes que j’écrivais intégralement.
L’expérience d’écriture, j’aime la mener seul. Cette solitude a du sens : j’écris de ma propre décision, sans
demander à personne, sans être dépendant de quelqu’un d’autre. Et, seul, je peux aller loin. Il n’y a que
moi­même pour m’interrompre. Ce moment ménagé pour l’écoute de soi, j’y tiens beaucoup.
Mais c’est insuffisant et j’ai aussi besoin des autres. L’autre permet d’aller à la rencontre d’une
contradiction. Au début on défend ce qui nous appartient, notre « œuvre », de manière un peu butée. Et
au fil des années j’ai appris à aimer le fait d’être contredit, de devoir remettre en question l’écrit par le
regard d’un autre, en la personne de l’acteur par exemple. C’est par là que je suis venu à l’écriture de
plateau. Avec Quatuor violence, mon envie était de faire théâtre de ma rencontre avec les acteurs, nos
désirs mis en commun, et non pas d’imposer mon propre désir par le biais d’un texte. Dans la prochaine
création, Notre foyer, je travaille à conjuguer ces deux formes d’écriture. C’est passionnant.
1. Il s’agissait de monter un des textes du Québécois Guillaume Corbeil, le choix de Florian Pautasso s’est fixé sur Tu iras la
chercher.
> Les plans de notre foyer, performance autour de la future création Notre foyer a été présentée le 20 octobre à Paris (Zoa)
> Tu iras la chercher, (texte de Guillaume Corbeil), les 28 et 29 octobre à L’usine C, Montréal, Canada (Actoral)
> Une maquette de Notre foyer, les 9 et 10 novembre au JTN, Paris (Fragment(s))
> La création du spectacle Notre foyer aura lieu en avril 2018 aux Subsistances, Lyon
17
Revue Jeu
Revue québécoise
Le 26 octobre 2016
De Christian St Pierre
URL : http://revuejeu.org/2016/10/26/hubert-colas-memoire-fantome/
Hubert Colas : mémoire fantôme
PAR CHRIST IAN SAINT­ PIERRE
CO MMENTAIRES Hubert Colas : mémoire fantôme
26 O CTO BRE 2016
PAR CHRIST IAN SAINT­ PIERRE
CO MMENTAIRES 0
0
26 O CTO BRE 2016
À l’occasion du festival Actoral, qui se déroule à l’Usine C du 25 octobre au 5 novembre, Hubert Colas
présente Texte M, un spectacle créé à Toulouse en 2015. On y découvre un homme qui a retrouvé la
liberté, mais qui est hanté par le souvenir de son asservissement. On dit que le solo vertigineux écrit et
À l’occasion du festival Actoral, qui se déroule à l’Usine C du 25 octobre au 5 novembre, Hubert Colas
interprété par Colas « nous fait pénétrer à l’intérieur d’un esprit qui, malgré ses peurs et ses
présente Texte M, un spectacle créé à Toulouse en 2015. On y découvre un homme qui a retrouvé la
hallucinations, finit par s’ouvrir à l’Autre ».
liberté, mais qui est hanté par le souvenir de son asservissement. On dit que le solo vertigineux écrit et
interprété par Colas « nous fait pénétrer à l’intérieur d’un esprit qui, malgré ses peurs et ses
hallucinations, finit par s’ouvrir à l’Autre ».
Dans quel contexte Texte M a t­il été écrit
et créé en 2015 ?
La pièce a été écrite en réponse à une commande pour
Dans quel contexte Texte M a t­il été écrit
la commémoration de l’abolition de l’esclavage, lancée
et créé en 2015 ?
par un artiste, Moïse Touré, sensible à mon propre
La pièce a été écrite en réponse à une commande pour
parcours. J’ai des origines guyanaises et je suis
la commémoration de l’abolition de l’esclavage, lancée
descendant d’esclaves, pour une partie de ma famille.
par un artiste, Moïse Touré, sensible à mon propre
Je suis un mélange de cultures, mon grand­père est
Hervé Bellamy
parcours. J’ai des origines guyanaises et je suis
algérien, ma mère est métisse. Le fait d’avoir vécu mon
descendant d’esclaves, pour une partie de ma famille.
enfance avec des images différentes, le fait de savoir
Je suis un mélange de cultures, mon grand­père est
Hervé Bellamy
que dans ma famille il y a eu des esclaves m’a porté vers une écoute et un regard différents. Cette pratique
18
algérien, ma mère est métisse. Le fait d’avoir vécu mon
liée aux écritures et à l’imaginaire fait qu’il y a quelque chose chez moi qui entend les problématiques du
enfance avec des images différentes, le fait de savoir
et créé en 2015 ?
La pièce a été écrite en réponse à une commande pour
Revue Jeu
la commémoration de l’abolition de l’esclavage, lancée
par un artiste, Moïse Touré, sensible à mon propre
Revue québécoise
Le 26 octobre 2016
parcours. J’ai des origines guyanaises et je suis
De Christian St Pierre
descendant d’esclaves, pour une partie de ma famille.
URL : http://revuejeu.org/2016/10/26/hubert-colas-memoire-fantome/
Hervé Bellamy
Je suis un mélange de cultures, mon grand­père est
algérien, ma mère est métisse. Le fait d’avoir vécu mon
enfance avec des images différentes, le fait de savoir
que dans ma famille il y a eu des esclaves m’a porté vers une écoute et un regard différents. Cette pratique
racisme. Quand on parle, quand on écrit, quand on vit, nous ne nous exprimons pas seulement avec notre
liée aux écritures et à l’imaginaire fait qu’il y a quelque chose chez moi qui entend les problématiques du
racisme. Quand on parle, quand on écrit, quand on vit, nous ne nous exprimons pas seulement avec notre
corps présent, avec lequel nous vivons depuis notre naissance, mais aussi avec un corps passé, que nous
racisme. Quand on parle, quand on écrit, quand on vit, nous ne nous exprimons pas seulement avec notre
corps présent, avec lequel nous vivons depuis notre naissance, mais aussi avec un corps passé, que nous
héritons de nos parents et arrière­grands­parents, toute une mémoire enfouie, cachée, prête à resurgir. Cette
corps présent, avec lequel nous vivons depuis notre naissance, mais aussi avec un corps passé, que nous
héritons de nos parents et arrière­grands­parents, toute une mémoire enfouie, cachée, prête à resurgir. Cette
mémoire fantôme agit pour moi en tant qu’artiste, elle est active dans mes projets, charrie des peurs
héritons de nos parents et arrière­grands­parents, toute une mémoire enfouie, cachée, prête à resurgir. Cette
mémoire fantôme agit pour moi en tant qu’artiste, elle est active dans mes projets, charrie des peurs
ancestrales, physiques, elle crée du trouble, de l’écrit et du regard.
mémoire fantôme agit pour moi en tant qu’artiste, elle est active dans mes projets, charrie des peurs
ancestrales, physiques, elle crée du trouble, de l’écrit et du regard.
ancestrales, physiques, elle crée du trouble, de l’écrit et du regard.
Qu’est­ce qui vous a inspiré ce monologue ? De quels enfermements est­il
Qu’est­ce qui vous a inspiré ce monologue ? De quels enfermements est­il
question ?
Qu’est­ce qui vous a inspiré ce monologue ? De quels enfermements est­il
question ?
question ?
Ce texte ne raconte pas effectivement la fin de l’esclavagisme, mais pose la question de savoir ce qu’est un
Ce texte ne raconte pas effectivement la fin de l’esclavagisme, mais pose la question de savoir ce qu’est un
être qui se retrouve en liberté, alors que son passé est agi par des forces plus sombres, plus obscures. Si on ne
Ce texte ne raconte pas effectivement la fin de l’esclavagisme, mais pose la question de savoir ce qu’est un
être qui se retrouve en liberté, alors que son passé est agi par des forces plus sombres, plus obscures. Si on ne
lui a pas appris à être libre, qu’est ce que cela provoque dans un corps ? Il y va, non pas du plaisir, mais de
être qui se retrouve en liberté, alors que son passé est agi par des forces plus sombres, plus obscures. Si on ne
lui a pas appris à être libre, qu’est ce que cela provoque dans un corps ? Il y va, non pas du plaisir, mais de
l’angoisse de la liberté. Tenter d’être en société et dans une société qui l’a rejeté devient une nouvelle forme
lui a pas appris à être libre, qu’est ce que cela provoque dans un corps ? Il y va, non pas du plaisir, mais de
l’angoisse de la liberté. Tenter d’être en société et dans une société qui l’a rejeté devient une nouvelle forme
d’enfermement.
l’angoisse de la liberté. Tenter d’être en société et dans une société qui l’a rejeté devient une nouvelle forme
d’enfermement.
d’enfermement.
Pourquoi avoir choisi de jouer vous­
Pourquoi avoir choisi de jouer vous­
même ce texte ?
Pourquoi avoir choisi de jouer vous­
même ce texte ?
même ce texte ?
Sans que ce soit auto­biographique, l’histoire de Texte
Sans que ce soit auto­biographique, l’histoire de Texte
Mrésonnait en moi. Retrouver la place de l’acteur, en
Sans que ce soit auto­biographique, l’histoire de Texte
Mrésonnait en moi. Retrouver la place de l’acteur, en
tant que metteur en scène, permet de mieux
Mrésonnait en moi. Retrouver la place de l’acteur, en
tant que metteur en scène, permet de mieux
comprendre sur le plateau des choses qu’on a parfois
tant que metteur en scène, permet de mieux
comprendre sur le plateau des choses qu’on a parfois
tendance à oublier. Il était important pour moi de
comprendre sur le plateau des choses qu’on a parfois
tendance à oublier. Il était important pour moi de
revivre cette expérience et de pouvoir en témoigner
tendance à oublier. Il était important pour moi de
revivre cette expérience et de pouvoir en témoigner
auprès de mes compagnons, de comprendre comment
revivre cette expérience et de pouvoir en témoigner
auprès de mes compagnons, de comprendre comment
dire très peu des choses à un acteur qui lui ouvrent
auprès de mes compagnons, de comprendre comment
dire très peu des choses à un acteur qui lui ouvrent
néanmoins un paysage.
dire très peu des choses à un acteur qui lui ouvrent
néanmoins un paysage.
néanmoins un paysage.
Hervé Bellamy
Hervé Bellamy
Hervé Bellamy
Comment le spectacle est­il reçu ? Qu’est­ce qu’il déclenche ?
Comment le spectacle est­il reçu ? Qu’est­ce qu’il déclenche ?
Comment le spectacle est­il reçu ? Qu’est­ce qu’il déclenche ?
Texte M est encore tout frais : nous l’avons joué seulement deux fois pour l’instant. La pièce commence à
Texte M est encore tout frais : nous l’avons joué seulement deux fois pour l’instant. La pièce commence à
trouver le chemin de sa liberté, les spectateurs ont entendu cette forme d’humour paradoxale qu’a ce texte.
Texte M est encore tout frais : nous l’avons joué seulement deux fois pour l’instant. La pièce commence à
trouver le chemin de sa liberté, les spectateurs ont entendu cette forme d’humour paradoxale qu’a ce texte.
Dans l’errance de cette personne il y a toujours une distance humoristique avec cette souffrance d’être libre.
trouver le chemin de sa liberté, les spectateurs ont entendu cette forme d’humour paradoxale qu’a ce texte.
Dans l’errance de cette personne il y a toujours une distance humoristique avec cette souffrance d’être libre.
Dans l’errance de cette personne il y a toujours une distance humoristique avec cette souffrance d’être libre.
Propos recueillis par Smaranda Olcèse.
Propos recueillis par Smaranda Olcèse.
Propos recueillis par Smaranda Olcèse.
Texte M
19
Lepetitjournal.com
Site francophone
Le 26 octobre 2016
URL : http://www.lepetitjournal.com/montreal/montreal/breves/
261251-delicat-pulse-serie-de-performances-a-la-fonderie-darling
DELICAT PULSE – Série de performances à la Fonderie
Darling
La Fonderie Darling organise une série de performances en lien avec l’exposition Délicat Pulse de Julie Favreau, qui
sera présentée dans la grande salle de La Fonderie Darling jusqu’au 27 novembre 2016. L’exposition de Julie
Favreau, est composée de sculptures, d’une vidéo projetée sur grand écran et d’une série de photographies. L’artiste utilise des
arts visuels, de la chorégraphie, du cinéma, de la performance et de la dramaturgie. Délicat Pulse devient aussi un terrain de jeu
investi par Volmir Cordeiro, Adva Zakai, et Emily Wardill, trois performeurs invités par Julie Favreau.
Trois soirées de performances seront présentées, à 18h, le 27 octobre, 4 novembre, et 24 novembre. Une table ronde aura lieu le
27 octobre de 12h30 à 14h au Café de l’Usine C, dans le cadre du Festival Actoral, dont Julie Favreau est marraine depuis
l’édition 2016.
(www.lepetitjournal.com/montreal), mercredi 26 octobre 2016
Pour plus d'informations: La Fonderie Darling
Adresse: 745 rue Ottawa
Montréal, QC, H3C 1R8
20
Montreal157
un blogue de ServicesMontreal.com
Le 26 octobre 2016
URL : http://montreal157.blogspot.fr/2016/10/autour-de-delicat-pulse-de-julie-favreau.html
AUTOUR DE DÉLICAT PULSE DE JULIE FAVREAU
AUTOUR DE DÉLICAT PULSE DE JULIE
FAVREAU
Jeudi 27 OCTOBRE 2016, 18h
Jeudi 27 OCTOBRE 2016, 18h
Vendredi 4 NOVEMBRE 2016, 18h
Vendredi 4 NOVEMBRE 2016, 18h
Jeudi 24 NOVEMBRE 2016, 18h
Jeudi 24 NOVEMBRE 2016, 18h
Performances à la Fonderie Darling
La Fonderie Darling vous convie à une série de performances ainsi qu’à une table
ronde, en lien avec l’exposition Délicat Pulse de Julie Favreau. La Fonderie Darling vous convie à une série de performances ainsi qu’à une table
Jeudi 27 octobre, 18h
ronde, en lien avec l’exposition Délicat Pulse de Julie Favreau. Doux, Julie Favreau + Anne Thériault
Présentée dans la grande salle de La Fonderie Darling jusqu’au 27 novembre
2016, l’exposition Délicat Pulse de Julie Favreau est composée de sculptures,
Performance inédite, Adva Zakai
d’une vidéo projetée sur grand écran et d’un corpus de photographies, l’artiste
Programme double
Présentée dans la grande salle de La Fonderie Darling jusqu’au 27 novembre
s’intéressant à la charge évocatrice et symbolique qu’un geste peut révéler par
Au travers du corpus d'œuvres qui forme l'exposition Délicat Pulse, Julie Favreau
l’interaction avec un objet.
2016, l’exposition Délicat Pulse de Julie Favreau est composée de sculptures,
questionne les limites des corps et des objets, joue avec les ombres et les non­
dits, révèle la puissance de l’intime dans notre rapport à nous­mêmes, à l’espace
d’une vidéo projetée sur grand écran et d’un corpus de photographies, l’artiste
La pratique de l'artiste se situant à la croisée des arts visuels, de la chorégraphie,
et aux autres. Écrite en collaboration avec Anne Thériault, la performance Doux
s’intéressant à la charge évocatrice et symbolique qu’un geste peut révéler par
du cinéma, de la performance et de la dramaturgie, Délicat Pulse devient ainsi un
prend comme points de départ l'érotisme, les sens et la matière.
terrain de jeu investi par Volmir Cordeiro, Adva Zakai et Emily Wardill, trois
l’interaction avec un objet.
performeurs invités par Julie Favreau et la commissaire Marie Frampier à
Adva Zakaï, chorégraphe, performeuse et commissaire, explore différents champs
dialoguer avec l’installation et les œuvres de l’artiste montréalaise.
de la performance. Au travers d’un dialogue constant entre le corps et le langage,
La pratique de l'artiste se situant à la croisée des arts visuels, de la chorégraphie,
elle interroge les notions d’expérience et de performance dans le cadre
Trois soirées de performances seront présentées à la Fonderie Darling à 18h, le
d’expositions soumises à des modes participatifs et des dispositifs scéniques.
du cinéma, de la performance et de la dramaturgie, Délicat Pulse devient ainsi un
27 octobre (Julie Favreau avec Anne Thériault ; Adva Zakai), le 4 novembre
Invitée par l'artiste et la commissaire, Zakaï révèlera et déstabilisera l’espace
(Volmir Cordeiro) et le 24 novembre (Emily Wardill). Une table ronde aura
terrain de jeu investi par Volmir Cordeiro, Adva Zakai et Emily Wardill, trois
d'exposition et le travail de Julie Favreau lors d'une performance caractérisée par
également lieu le 27 octobre de midi 30 à 14h au Café de L’Usine C, dans le
l’humour et la simplicité propre à son travail.
performeurs invités par Julie Favreau et la commissaire Marie Frampier à
cadre du Festival Actoral pour lequel Julie Favreau est la marraine de l’édition
dialoguer avec l’installation et les œuvres de l’artiste montréalaise.
2016.
Jeudi 4 novembre, 18h
Ciel, Volmir Cordeiro
Table­Ronde au Café de L’Usine C
Volmir Cordeiro présente Ciel (2012), le premier solo qu'il signe en tant qu'auteur.
Trois soirées de performances seront présentées à la Fonderie Darling à 18h, le
Jeudi 27 octobre, 12h30 à 14h (Restauration sur place)
Cordeiro cherche à y éprouver les solitudes de celles et ceux que la vie a
Points de rencontre : arts visuels et arts vivants
27 octobre (Julie Favreau avec Anne Thériault ; Adva Zakai), le 4 novembre
condamné à affaiblir, disparaître, dérailler. Ses recherches portent sur les
(Volmir Cordeiro) et le 24 novembre (Emily Wardill). Une table ronde aura
représentations des marginaux. Organisée dans le cadre de l’exposition Délicat Pulse, en partenariat avec les
également lieu le 27 octobre de midi 30 à 14h au Café de L’Usine C, dans le
conférences ICI de l’École des arts visuels et médiatiques de l’UQAM, l’Usine C et
Jeudi 24 novembre, 18h
le festival Actoral
cadre du Festival Actoral pour lequel Julie Favreau est la marraine de l’édition
Performance inédite, Emily Wardell
Au travers d’objets, de films et de vidéos, Emily Wardill convoque des
2016.
Les artistes discuteront de projets récents mettant en exergue leurs pratiques
personnages charismatiques et crée des narrations basées sur l’illusion, les jeux
interdisciplinaires mêlant les langages de la chorégraphie, du théâtre, des arts
de miroir, l’hypnose, le double. La théâtralité est omniprésente, au travers des
visuels et de l’écriture.
Table­Ronde au Café de L’Usine C
décors, des costumes et des dialogues. Wardill entrera en dialogue avec
l’exposition de Julie Favreau pour faire ressortir les liens entre sa démarche et
celle de l’artiste montréalaise.
Jeudi 27 octobre, 12h30 à 14h (Restauration sur place)
Intervenants : Emma Waltraud Howes, Hanna Sybille Muller, Adva Zakai, Julie
Favreau et Anne Thériault
Points de rencontre : arts visuels et arts vivants
Modératrice : Manon De Pauw
Organisée dans le cadre de l’exposition Délicat Pulse, en partenariat avec les
conférences ICI de l’École des arts visuels et médiatiques de l’UQAM, l’Usine C et
le festival Actoral
Les artistes discuteront de projets récents mettant en exergue leurs pratiques
interdisciplinaires mêlant les langages de la chorégraphie, du théâtre, des arts
visuels et de l’écriture.
Intervenants : Emma Waltraud Howes, Hanna Sybille Muller, Adva Zakai, Julie
Favreau et Anne Thériault
Modératrice : Manon De Pauw
Performances à la Fonderie Darling
21
Le Devoir
Quotidien montréalais
Le 27 octobre 2016
Par Catherine Lalonde
URL : http://www.ledevoir.com/culture/danse/483138/consentement
ARTS VIVANTS
«Est­ce que je peux vous toucher?»
Apprendre à lire les faux oui et les vrais non que génère cette question pas si
simple, avec le chorégraphe Lorenzo De Angelis
27 octobre 2016 | Catherine Lalonde | Danse
Photo: Guillaume Levasseur Le Devoir
La danseuse Maya Milet interprète la chorégraphie «Haltérophilie», créée par Lorenzo De Angelis.
« Est­ce que je peux vous toucher ? » demandait en début de semaine à l’Usine C le chorégraphe et
danseur Lorenzo De Angelis à certains des dix spectateurs assis en cercle autour de lui. L’un d’eux a
longuement hésité, mi­figue mi­raisin. Un autre a répondu un franc oui, prêt à s’engager sur ce ring où
l’artiste, avec sa performance Haltérophile, tentait de mouvoir, dans tous les sens du terme, le public. Un
troisième, un homme, a dit oui, alors que tout son corps, bras croisés, front baissé, criait l’inverse.
Réflexion sur le consentement et ses complexités avec un artiste qui a inclus cette notion dans son travail. Il y a dans votre performance, où vous dansez tour à tour pour une personne à la fois et où
vous invitez les spectateurs à agir avec vous, une part importante laissée au consentement, au
libre arbitre, au choix que fera le spectateur, non ?
Je ne l’avais jamais nommé, mais c’est vrai que c’est une grosse part du travail. Je travaille plus
directement sur le partage et le don, l’idée étant de jouer pour une personne à la fois, et encore plus, de
jouer la personne. D’être à la hauteur de ce qui se joue là, réellement, dans cette rencontre. Et pour ça, il
me faut arriver à être le plus ouvert et le plus patient possible, et attendre, vraiment, les réponses qu’on
va me faire.
Comment approchez­vous le spectateur ? Comment allez­vous le chercher ?
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Réflexion sur le consentement et ses complexités avec un artiste qui a inclus cette notion dans son travail. Il y a dans votre performance, où vous dansez tour à tour pour une personne à la fois et où
vous invitez les spectateurs à agir avec vous, une part importante laissée au consentement, au
Le
Devoir
libre arbitre, au choix que fera le spectateur, non ?
Quotidien
montréalais
Le 27 octobre 2016
Je ne l’avais jamais nommé, mais c’est vrai que c’est une grosse part du travail. Je travaille plus
Par
Catherine Lalonde
directement sur le partage et le don, l’idée étant de jouer pour une personne à la fois, et encore plus, de
URL
: http://www.ledevoir.com/culture/danse/483138/consentement
jouer la personne. D’être à la hauteur de ce qui se joue là, réellement, dans cette rencontre. Et pour ça, il
me faut arriver à être le plus ouvert et le plus patient possible, et attendre, vraiment, les réponses qu’on
va me faire.
Comment approchez­vous le spectateur ? Comment allez­vous le chercher ?
Par un mélange de tact et de délicatesse, mais aussi de surprise. Car il s’agit de déjouer l’approche sociale
qui fait que notre cerveau va paramétrer la rencontre très vite et trouver alors une solution facile et
connue. Il s’agit de ne pas prendre à partie le spectateur, de ne pas le prendre en otage, de ne pas forcer
quoi que ce soit et de respecter les messages que je reçois et que j’interprète forcément. Je vérifie chaque
fois si on comprend bien la même chose, lui et moi ; si on ne comprend pas, je vérifie qu’on est bien deux
à ne pas comprendre, et c’est déjà une chose partagée. Je ne veux jamais aller plus loin que ce qu’il
m’autorise, et je l’invite à être responsable de son rôle : s’il dit non, je considère qu’il n’en veut pas ; s’il
dit qu’il en veut moins ou plus, il s’engage. Il est responsable de ce qu’il va recevoir, et j’aime cette
responsabilité partagée.
Comment interprétez­vous les faux oui et les faux non, et ces moments où le corps semble
dédire les mots ?
Une réponse mitigée est une belle chose, et j’ai envie de laisser exister ça, et le doute, le malaise, et qu’on
accepte d’être dans le malaise. Ça me semble important de pouvoir aborder la richesse comportementale.
Ce n’est pas parce qu’on veut quelque chose qu’on doit l’obtenir tout de suite ; ce n’est pas parce que
quelqu’un accepte que je le touche que je dois le toucher. Laisser exister cette histoire en puissance, c’est
parfois beaucoup plus fort que de le faire de façon basique. Mais si je sens un malaise, je transforme tout
de suite. J’arrête. Ou je pose réellement la question à la personne : « Est­ce que ça va ? On continue ? Tu
as envie d’autre chose ? » On est dans une société qui nous pousse à dire « Oui ! Cool ! Yes ! J’fais ci, j’fais
ça » et où les « Je ne fais pas ça », « Je suis prudent », « J’hésite », « Je ne fais pas de mal » sont moins
valorisés. Mais ce sont aussi de belles choses, qu’il faut savoir respecter.
Est­ce à dire qu’il est socialement plus valorisé de dire oui que non ?
On est dans une société qui nous force un peu à l’abnégation, où on nous apprend de plus en plus à
supporter des choses malgré nous. Et qui nous encourage de moins en moins à sublimer ; on nous vend
plutôt du plaisir, du profit et de la jouissance immédiate, tout le temps. Ce que j’apprends aux danseurs
qui doivent me remplacer, c’est que même si le spectateur dit oui, on peut faire autre chose. Il y a toute
une richesse de comportements possibles, tellement de façons de poursuivre la relation, tellement de
choses à inventer… Je crois que l’art et la créativité ont un rôle à jouer, qu’ils permettent de revitaliser une
créativité des comportements pour réenrichir une relation au monde, aux autres et à soi. Et cette relation
à soi est importante : si on n’est pas capable d’inventer autre chose que les désirs qu’on nous vend,
effectivement on va toujours être dans un échec blessant qui risque de nous pousser à une prise de
pouvoir excessive.
L’imagination pourrait donc être une clé ?
Totalement. Il y a d’autres possibilités. Si on doit parler de sexualité et de jouissance, il y a
potentiellement une richesse de plaisirs sensuels et relationnels en dehors de ce qu’on nous vend de très
basique, qu’on nous dit censé être un rapport sexuel satisfaisant. Il y a tant d’autres choses à vivre. Mais
pour ça, il faut être créatif, être attentif à soi­même et à ce qu’on trouve dans les angles morts de ce que
nous propose une société qui a besoin de normer des comportements pour vendre plus facilement.
Comment inviter quelqu’un à être plus créatif ?
J’utilise beaucoup le silence et l’immobilité. Juste en regardant une personne, sans rien faire. Le cerveau
étant une machine à créer du sens, à le générer et à le dégénérer jusqu’à ce qu’il soit satisfait, rien que
par cet acte de ne pas faire, on le rend créatif. On est alors obligé d’inventer autre chose.
Haltérophile était présentée dans le cadre du festival Actoral.
23
Mat.TV
Félix­Antoine Boutin magique, pas logique
Site québécois
Le
27 octobre 2016
Félix­Antoine Boutin magique, pas logique
Par Sébastien Bouthillier
BY SEBASTIEN BOUTHILLIER · OCT 27, 2016
URL : http://www.mattv.ca/fab/
BY SEBASTIEN BOUTHILLIER · OCT 27, 2016
Petit guide pour disparaître doucementau festival Actoral
Petit guide pour disparaître doucementau festival Actoral
© Félix­Antoine Boutin
Par Sébastien Bouthillier
© Félix­Antoine Boutin
Félix­Antoine Boutin fabule un monde enchanté où poésie, bricolage et origami le remplacent sur scène
Par Sébastien Bouthillier
quand il disparaît. Dans son spectacle présenté au festival Actoral, Petit guide pour disparaître
Félix­Antoine Boutin fabule un monde enchanté où poésie, bricolage et origami le remplacent sur scène
doucement, le jeune homme allie l’introspection psychanalytique à la philosophie existentielle. En entrevue à
quand il disparaît. Dans son spectacle présenté au festival Actoral, Petit guide pour disparaître
MatTv, le prolifique créateur de 27 ans se dévoile à l’aube du festival consacré à l’exploration et aux œuvres
doucement, le jeune homme allie l’introspection psychanalytique à la philosophie existentielle. En entrevue à
en chantier en danse, théâtre et littérature jusqu’au 5 novembre à l’Usine C.
MatTv, le prolifique créateur de 27 ans se dévoile à l’aube du festival consacré à l’exploration et aux œuvres
Une question a déclenché la création de ton spectacle…
en chantier en danse, théâtre et littérature jusqu’au 5 novembre à l’Usine C.
Oui, comment disparaître sur scène? J’ai ouvert plusieurs horizons en partant de cette simple question. À la
Une question a déclenché la création de ton spectacle…
manière d’un scientifique, j’ai exploré des hypothèses, testé une foule de trucs et développé du matériel durant
Oui, comment disparaître sur scène? J’ai ouvert plusieurs horizons en partant de cette simple question. À la
deux ans sur le thème de la disparition.
manière d’un scientifique, j’ai exploré des hypothèses, testé une foule de trucs et développé du matériel durant
Comment y réponds­tu?
deux ans sur le thème de la disparition.
Par la poésie parce qu’elle permet de laisser de côté l’ego, de mieux se comprendre comme être humain. La
Comment y réponds­tu?
société impose qu’on se définisse tôt dans la vie, notamment quant au choix de carrière dès l’école
Par
la poésie parce qu’elle permet de laisser de côté l’ego, de mieux se comprendre comme être humain. La
secondaire. Pourtant, je ne me comprends pas tellement et je trouve que c’est bien, une occasion pour me
société impose qu’on se définisse tôt dans la vie, notamment quant au choix de carrière dès l’école
questionner.
secondaire. Pourtant, je ne me comprends pas tellement et je trouve que c’est bien, une occasion pour me
questionner.
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Dans mon spectacle, en plus de la poésie textuelle, je crée des images porteuses de sens. Mon idée consiste
à proposer un univers de réflexion où je soulève des questions sans rien affirmer. Par l’émerveillement,
j’espère que le public s’appropriera ma réflexion. Le théâtre est un espace de magie exceptionnel où la
Mat.TV
capacité du public à se laisser surprendre dépasse celui d’autres médias.
Site québécois
Le
27 octobre 2016
Au quotidien, qui es­tu?
Par Sébastien Bouthillier
(Éclats de rire) Hors de mon rôle, je pense aussi en métaphores au jour le jour! Je commence à moins
URL
: http://www.mattv.ca/fab/
prendre en pleine figure les choses… Rassurez­vous, je suis heureux et j’ai des amis! Il y en a un qui a craint
que je me suicide quand j’ai parlé de disparaître, mais ma disparition n’a rien à voir avec la mort. D’ailleurs, je
démantèle l’aura négative entourant la disparition, car de l’effacement de soi émane l’altruisme, des pensées
Te considères­tu trop sensible?
plus grandes et un souci de la collectivité.
Oui, je suis sensible : je réagis fortement aux situations. À mes yeux, c’est positif même si passer à travers la
vie me semble parfois lourd. Malheureusement, je déplore qu’il faut le cacher dans notre monde d’efficacité,
alors que la base de mon métier consiste à ressentir.
Quel lien tires­tu entre sensibilité, enchantement et magie dans Petit guide pour disparaître doucement ?
Ah! La poésie est mon cheval de bataille! Je crois au pouvoir de la poésie car, grâce à elle, en ne posant pas
de jugement définitif sur les choses concrètes, je parviens à mieux percevoir une réalité plus juste, nuancée et
ouverte à l’interprétation.
Dans mon spectacle, en plus de la poésie textuelle, je crée des images porteuses de sens. Mon idée consiste
à proposer un univers de réflexion où je soulève des questions sans rien affirmer. Par l’émerveillement,
j’espère que le public s’appropriera ma réflexion. Le théâtre est un espace de magie exceptionnel où la
capacité du public à se laisser surprendre dépasse celui d’autres médias.
Au quotidien, qui es­tu?
(Éclats de rire) Hors de mon rôle, je pense aussi en métaphores au jour le jour! Je commence à moins
prendre en pleine figure les choses… Rassurez­vous, je suis heureux et j’ai des amis! Il y en a un qui a craint
que je me suicide quand j’ai parlé de disparaître, mais ma disparition n’a rien à voir avec la mort. D’ailleurs, je
démantèle l’aura négative entourant la disparition, car de l’effacement de soi émane l’altruisme, des pensées
plus grandes et un souci de la collectivité.
© Odile Gamache et Félix­Antoine Boutin
Que fabrique­tu, Félix­Antoine Boutin?
Depuis mes débuts, j’incorpore l’artisanat dans mes pièces parce que le travail de la matière est un travail
sensible qui m’approche de moi­même. Le geste de construire un objet sur scène, je le trouve chaleureux.
Dans Petit guide pour disparaître doucement, il y a des moments de bricolage.
Mais que deviens­tu après ta disparition?
Le spectacle commence avec des gestes concrets que je pose sur scène, puis d’autres choses me remplacent
au fur et à mesure que je disparais. Mais c’est choses­là disparaissent à leur tour… Ce qui advient ensuite
est de l’ordre de l’ouverture.
Et si nous comparons avec Animal mort, ton précédent spectacle…
Dans ce spectacle­là, les personnages se transformaient pour devenir une autre chose. Maintenant, mon
personnage s’efface pour que vivent de plus en plus de choses. Le phénomène devient exponentiel.
À qui t’adresses­tu?
Au plus de gens que possible. Les adultes s’y retrouveront puisque j’évoque des thèmes universels, les
expériences marquantes, le deuil, les épreuves à surmonter, la relation avec les autres… Et comme je vois le
monde à partir de mon vécu de jeune homme de 27 ans, ma génération risque de s’y retrouver aussi. À
© Odile Gamache et Félix­Antoine Boutin
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Marseille, la pièce figure au parcours des lycéens et les images interpellent autant ce public.
au fur et à mesure que je disparais. Mais c’est choses­là disparaissent à leur tour… Ce qui advient ensuite
Le spectacle commence avec des gestes concrets que je pose sur scène, puis d’autres choses me remplacent
est de l’ordre de l’ouverture.
Mais que deviens­tu après ta disparition?
au fur et à mesure que je disparais. Mais c’est choses­là disparaissent à leur tour… Ce qui advient ensuite
Et si nous comparons avec Animal mort, ton précédent spectacle…
Le spectacle commence avec des gestes concrets que je pose sur scène, puis d’autres choses me remplacent
est de l’ordre de l’ouverture.
au fur et à mesure que je disparais. Mais c’est choses­là disparaissent à leur tour… Ce qui advient ensuite
Et si nous comparons avec Animal mort, ton précédent spectacle…
est de l’ordre de l’ouverture.
au fur et à mesure que je disparais. Mais c’est choses­là disparaissent à leur tour… Ce qui advient ensuite
Et si nous comparons avec Animal mort, ton précédent spectacle…
Le spectacle commence avec des gestes concrets que je pose sur scène, puis d’autres choses me remplacent
est de l’ordre de l’ouverture.
Dans ce spectacle­là, les personnages se transformaient pour devenir une autre chose. Maintenant, mon
Et si nous comparons avec Animal mort, ton précédent spectacle…
est de l’ordre de l’ouverture.
Dans ce spectacle­là, les personnages se transformaient pour devenir une autre chose. Maintenant, mon
au fur et à mesure que je disparais. Mais c’est choses­là disparaissent à leur tour… Ce qui advient ensuite
Et si nous comparons avec Animal mort, ton précédent spectacle…
personnage s’efface p
our que vivent de plus en plus de choses. Le phénomène devient exponentiel.
Dans ce spectacle­là, our que vivent de plus en plus de choses. Le phénomène devient exponentiel.
les personnages se transformaient pour devenir une autre chose. Maintenant, mon
Site
québécois
Et si nous comparons avec Animal mort, ton précédent spectacle…
personnage s’efface p
Dans ce spectacle­là, les personnages se transformaient pour devenir une autre chose. Maintenant, mon
est de l’ordre de l’ouverture.
Et si nous comparons avec Animal mort, ton précédent spectacle…
personnage s’efface p
our que vivent de plus en plus de choses. Le phénomène devient exponentiel.
Le
27
octobre
2016
Dans ce spectacle­là, les personnages se transformaient pour devenir une autre chose. Maintenant, mon
À qui t’adresses­tu?
personnage s’efface p
our que vivent de plus en plus de choses. Le phénomène devient exponentiel.
Dans ce spectacle­là, les personnages se transformaient pour devenir une autre chose. Maintenant, mon
À qui t’adresses­tu?
Par
Sébastien
Bouthillier
Et si nous comparons avec Animal mort, ton précédent spectacle…
personnage s’efface p
Dans ce spectacle­là, our que vivent de plus en plus de choses. Le phénomène devient exponentiel.
les personnages se transformaient pour devenir une autre chose. Maintenant, mon
À qui t’adresses­tu?
personnage s’efface p
Au plus de gens que our que vivent de plus en plus de choses. Le phénomène devient exponentiel.
possible. Les adultes s’y retrouveront puisque j’évoque des thèmes universels, les
URL
:
http://www.mattv.ca/fab/
À qui t’adresses­tu?
personnage s’efface p
our que vivent de plus en plus de choses. Le phénomène devient exponentiel.
Au plus de gens que possible. Les adultes s’y retrouveront des thèmes universels, les
Dans ce spectacle­là, les personnages se transformaient pour puisque devenir j’évoque une autre chose. Maintenant, mon
À qui t’adresses­tu?
expériences marquantes, le deuil, les épreuves à surmonter, la relation avec les autres… Et comme je vois le
Au plus de gens que possible. Les adultes s’y retrouveront puisque j’évoque des thèmes universels, les
À qui t’adresses­tu?
expériences marquantes, le deuil, les épreuves à surmonter, la relation avec les autres… Et comme je vois le
Au plus de gens que possible. Les adultes s’y retrouveront puisque j’évoque des thèmes universels, les
personnage s’efface p
our que vivent de plus en plus de choses. Le phénomène devient exponentiel.
monde à partir de mon vécu de jeune homme de 27 ans, ma génération risque de s’y retrouver aussi. À
À qui t’adresses­tu?
expériences marquantes, le deuil, les épreuves à surmonter, la relation avec les autres… Et comme je vois le
Au plus de gens que possible. Les adultes s’y retrouveront puisque j’évoque des thèmes universels, les
monde à partir de mon vécu de jeune homme de 27 ans, ma génération risque de s’y retrouver aussi. À
expériences marquantes, le deuil, les épreuves à surmonter, la relation avec les autres… Et comme je vois le
Marseille, la pièce figure au parcours des lycéens et les images interpellent autant ce public.
Au plus à de gens que possible. jeune Les adultes s’y retrouveront puisque j’évoque des thèmes universels, les
monde partir de mon vécu de homme de 27 ans, ma génération risque de s’y retrouver aussi. À
À qui t’adresses­tu?
expériences marquantes, le deuil, les épreuves à surmonter, la relation avec les autres… Et comme je vois le
Marseille, la pièce figure au parcours des lycéens et les images interpellent autant ce public.
Au plus à de gens que possible. jeune Les adultes s’y retrouveront puisque j’évoque des thèmes universels, les
monde partir de mon vécu de homme de 27 ans, ma génération risque de s’y retrouver aussi. À
expériences marquantes, le deuil, les épreuves à surmonter, la relation avec les autres… Et comme je vois le
Marseille, la pièce figure au parcours des lycéens et les images interpellent autant ce public.
monde à partir de mon vécu de jeune homme de 27 ans, ma génération risque de s’y retrouver aussi. À
Mes œuvres sont accessibles à tous sans que je nivelle par le bas. Animal mort, spectacle difficile à capter, a
expériences marquantes, le deuil, les épreuves à surmonter, la relation avec les autres… Et comme je vois le
Marseille, la pièce figure au parcours des lycéens et les images interpellent autant ce public.
Au plus à de gens possible. Les adultes s’y retrouveront j’évoque universels, monde partir de que mon vécu de jeune homme de 27 ans, ma puisque génération risque des de thèmes s’y retrouver aussi. les
À
Mes œuvres sont accessibles à tous sans que je nivelle par le bas. Animal mort, spectacle difficile à capter, a
Marseille, la pièce figure au parcours des lycéens et les images interpellent autant ce public.
été le plus apprécié par vécu ceux de qui jeune sortaient au théâtre première fois. risque Ils s’y rendaient peut­être sans
monde à partir de mon homme de 27 pour ans, la ma génération de s’y retrouver aussi. À
Mes œuvres sont accessibles à tous sans que je nivelle par le bas. Animal mort, spectacle difficile à capter, a
expériences marquantes, le deuil, les épreuves à surmonter, la relation avec les autres… Et comme je vois le
Marseille, la pièce figure au parcours des lycéens et les images interpellent autant ce public.
été le plus apprécié par ceux qui sortaient au théâtre pour la première fois. Ils s’y rendaient peut­être sans
Mes œuvres sont accessibles à tous sans que je nivelle par le bas. Animal mort, spectacle difficile à capter, a
convier à voir des idées préconçues. Je tends la main au public pour le créations pointues, mais qui les
Marseille, la pièce figure au parcours des lycéens et les images interpellent autant ce public.
été le préconçues. plus apprécié par tends ceux qui sortaient au théâtre pour la première fois. risque Ils s’y de rendaient peut­être sans
monde à partir de mon vécu de jeune homme de 27 le ans, ma génération s’y retrouver aussi. À
Mes œuvres sont accessibles à tous sans que je nivelle par le bas. Animal mort, spectacle difficile à capter, a
convier à voir des idées Je au public pour pointues, mais qui les
été le plus apprécié par ceux la qui main sortaient au théâtre pour la première fois. créations Ils s’y rendaient peut­être sans
toucheront.
Mes œuvres sont accessibles à tous sans que je nivelle par le bas. Animal mort, spectacle difficile à capter, a
convier à voir des idées préconçues. Je tends la main au public pour le créations pointues, mais qui les
Marseille, la pièce figure au parcours des lycéens et les images interpellent autant ce public.
été le plus apprécié par tends ceux qui main sortaient au théâtre pour la première fois. créations Ils s’y rendaient peut­être sans
toucheront.
Mes œuvres sont accessibles à tous sans que je nivelle par le bas. Animal mort, spectacle difficile à capter, a
convier à voir des idées Je au public pour le pointues, mais qui les
été le préconçues. plus apprécié par ceux la qui sortaient au théâtre pour la première fois. Ils s’y rendaient peut­être sans
toucheront.
convier à voir des idées préconçues. Je tends la main au public pour le créations pointues, mais qui les
Tu évoques Marseille, où as­tu créé ton spectacle?
été le plus apprécié par ceux qui sortaient au théâtre pour la première fois. Ils s’y rendaient peut­être sans
toucheront.
Mes œuvres sont accessibles à tous sans que je nivelle par le bas. Animal mort, spectacle difficile à capter, a
idées préconçues. Je tends la main au public pour le convier à voir des créations pointues, mais qui les
Tu évoques Marseille, où as­tu créé ton spectacle?
toucheront.
idées préconçues. Je tends la main au public pour le convier à voir des créations pointues, mais qui les
Tu évoques Marseille, où as­tu créé ton spectacle?
été le plus apprécié par ceux qui sortaient au théâtre pour la première fois. Ils s’y rendaient peut­être sans
toucheront.
À Bruxelles, dans un laboratoire de recherche fondamentale, L’L, grâce à un partenariat avec Actoral. Depuis
Tu évoques Marseille, où as­tu créé ton spectacle?
toucheront.
À Bruxelles, dans un laboratoire de recherche fondamentale, L’L, grâce à un partenariat avec Actoral. Depuis
idées 2014, préconçues. Je tends la main au entre public Montréal pour le convier à voir des pointues, mais qui les
Tu évoques Marseille, où as­tu créé ton spectacle?
mars en alternant mensuellement et la Belgique, je créations vis ma première expérience de
À Bruxelles, dans un laboratoire de recherche fondamentale, L’L, grâce à un partenariat avec Actoral. Depuis
Tu évoques Marseille, où as­tu créé ton spectacle?
mars 2014, en alternant mensuellement entre Montréal et la Belgique, je vis ma première expérience de
À Bruxelles, dans un laboratoire de recherche fondamentale, L’L, grâce à un partenariat avec Actoral. Depuis
toucheront.
création en Europe. La production a débuté au printemps dernier. Elle représente la dernière phase durant
Tu évoques Marseille, où as­tu créé ton spectacle?
mars 2014, en alternant mensuellement entre Montréal et la Belgique, je vis ma première expérience de
À Bruxelles, dans un laboratoire de recherche fondamentale, L’L, grâce à un partenariat avec Actoral. Depuis
création en Europe. La production a débuté au printemps dernier. Elle représente la dernière phase durant
mars 2014, en alternant mensuellement entre Montréal et la Belgique, je vis ma première expérience de
laquelle j’ai assemblé les éléments du casse­tête avec les gens de confiance qui m’entourent.
À Bruxelles, dans un laboratoire de recherche fondamentale, L’L, grâce à un partenariat avec Actoral. Depuis
création en Europe. La production a débuté au printemps dernier. Elle représente la dernière phase durant
Tu évoques Marseille, où as­tu créé ton spectacle?
mars 2014, en alternant mensuellement entre Montréal et la Belgique, je vis ma première expérience de
laquelle j’ai assemblé les éléments du casse­tête avec les gens de confiance qui m’entourent.
À Bruxelles, dans un laboratoire de recherche fondamentale, L’L, grâce à un partenariat avec Actoral. Depuis
création en Europe. La production a débuté au printemps dernier. Elle représente la dernière phase durant
mars 2014, en alternant mensuellement entre Montréal et la Belgique, je vis ma première expérience de
laquelle j’ai assemblé les éléments du casse­tête avec les gens de confiance qui m’entourent.
création en Europe. La production a débuté au printemps dernier. Elle représente la dernière phase durant
Tu te compares à un scientifique dans son laboratoire
… et la Belgique, je vis ma première expérience de
mars 2014, en alternant mensuellement entre Montréal laquelle j’ai assemblé les éléments du casse­tête avec les gens de confiance qui m’entourent.
À Bruxelles, dans un laboratoire de recherche fondamentale, L’L, grâce à un partenariat avec Actoral. Depuis
création en Europe. La production a débuté au printemps dernier. Elle représente la dernière phase durant
Tu te compares à un scientifique dans son laboratoire
…
laquelle j’ai assemblé les éléments du casse­tête avec les gens de confiance qui m’entourent.
création en Europe. La production a débuté au printemps dernier. Elle représente la dernière phase durant
Tu te compares à un scientifique dans son laboratoire
… et la Belgique, je vis ma première expérience de
mars 2014, en alternant mensuellement entre Montréal laquelle j’ai assemblé les éléments du casse­tête avec les gens de confiance qui m’entourent.
Il s’agit d’un véritable laboratoire créatif où je travaille avec des installations et de la performance. Une matière
Tu te compares à un scientifique dans son laboratoire
…
laquelle j’ai assemblé les éléments du casse­tête avec les gens de confiance qui m’entourent.
Il s’agit d’un véritable laboratoire créatif où je travaille avec des installations et de la performance. Une matière
création en Europe. La production a débuté au printemps dernier. Elle représente la dernière phase durant
Tu te compares à un scientifique dans son laboratoire
…j’écris énormément sans fil conducteur pour dépasser
textuelle riche et plutôt complexe en résulte. Comme Il s’agit d’un véritable laboratoire créatif où je travaille avec des installations et de la performance. Une matière
Tu te compares à un scientifique dans son laboratoire
…j’écris énormément sans fil conducteur pour dépasser
textuelle riche et plutôt complexe en résulte. Comme Il s’agit d’un véritable laboratoire créatif où je travaille avec des installations et de la performance. Une matière
laquelle j’ai assemblé les éléments du casse­tête avec les gens de confiance qui m’entourent.
mes habitudes, explorer de nouveaux territoires et développer des images scéniques, mon défi consiste à
Tu te compares à un scientifique dans son laboratoire
…j’écris énormément textuelle riche et plutôt complexe en résulte. Comme sans fil conducteur pour consiste dépasser
Il s’agit d’un véritable laboratoire créatif où je travaille avec des installations et de la performance. Une matière
mes habitudes, explorer de nouveaux territoires et développer des images scéniques, mon défi à
textuelle riche et plutôt complexe en résulte. Comme j’écris énormément sans fil conducteur pour dépasser
livrer un spectacle en ne conservant que l’essentiel. Je vous propose donc de venir voir Petit guide pour
Il s’agit d’un véritable laboratoire créatif où je travaille avec des installations et de la performance. Une matière
mes habitudes, explorer de nouveaux territoires et développer des images scéniques, mon défi consiste à
Tu te compares à un scientifique dans son laboratoire…
textuelle et explorer plutôt complexe en résulte. Comme énormément sans fil venir conducteur pour dépasser
livrer un riche spectacle en ne conservant que l’essentiel. j’écris Je vous propose donc de voir Petit guide pour
Il s’agit d’un véritable laboratoire créatif où je travaille avec des installations et de la performance. Une matière
mes habitudes, de nouveaux territoires et développer des images scéniques, mon défi consiste à
disparaître doucement.
textuelle et plutôt complexe en résulte. Comme j’écris énormément sans fil venir conducteur pour dépasser
livrer un riche spectacle en ne conservant que l’essentiel. Je vous propose donc de voir Petit guide pour
mes habitudes, explorer de nouveaux territoires et développer des images scéniques, mon défi consiste à
disparaître doucement.
textuelle et plutôt complexe en résulte. Comme j’écris énormément sans fil venir conducteur pour dépasser
livrer un riche spectacle en ne conservant l’essentiel. Je vous propose donc de voir Petit pour
Il s’agit d’un véritable laboratoire créatif où je travaille avec des installations et de la performance. Une matière
mes habitudes, explorer de nouveaux que territoires et développer des images scéniques, mon défi guide consiste à
disparaître doucement.
livrer un spectacle en ne de conservant l’essentiel. Je vous propose donc de venir voir Petit pour
__________
mes habitudes, explorer nouveaux que territoires et développer des images scéniques, mon défi guide consiste à
disparaître doucement.
textuelle et plutôt complexe en résulte. Comme énormément sans fil venir conducteur pour dépasser
livrer un riche spectacle en ne conservant que l’essentiel. j’écris Je vous propose donc de voir Petit guide pour
__________
disparaître doucement.
livrer un spectacle en ne conservant que l’essentiel. Je vous propose donc de venir voir Petit guide pour
__________
mes habitudes, explorer de nouveaux territoires et développer des images scéniques, mon défi consiste à
disparaître doucement.
Prolifique auteur et metteur en scène, Félix­Antoine Boutinaligne les pièces depuis sa graduation de l’École
__________
disparaître doucement.
Prolifique auteur et metteur en scène, Félix­Antoine Boutinaligne les pièces depuis sa graduation de l’École
livrer un spectacle en ne conservant que l’essentiel. Je vous propose donc de venir voir Petit guide pour
__________
nationale de théâtre en 2012 :
Prolifique auteur et metteur en scène, Félix­Antoine Boutinaligne les pièces depuis sa graduation de l’École
__________
nationale de théâtre en 2012 :
Prolifique auteur et metteur en scène, Félix­Antoine Boutinaligne les pièces depuis sa graduation de l’École
disparaître doucement.
__________
nationale de théâtre en 2012 :
Prolifique auteur et metteur en scène, Félix­Antoine Boutinaligne les pièces depuis sa graduation de l’École
– Animal mort (2016)
nationale de théâtre en 2012 :
Prolifique auteur et metteur en scène, Félix­Antoine Boutinaligne les pièces depuis sa graduation de l’École
– Animal mort (2016)
__________
nationale de théâtre en 2012 :
Prolifique auteur et metteur en scène, Félix­Antoine Boutinaligne les pièces depuis sa graduation de l’École
– Animal mort (2016)
nationale de théâtre en 2012 :
– Dévoilements simples (2015)
– Animal mort (2016)
nationale de théâtre en 2012 :
– Dévoilements simples (2015)
Prolifique auteur et metteur en scène, Félix­Antoine Boutinaligne les pièces depuis sa graduation de l’École
– Animal mort (2016)
– Dévoilements simples (2015)
– Animal mort (2016)
– Koalas (2014)
– Dévoilements simples (2015)
nationale de théâtre en 2012 :
– Animal mort (2016)
– Koalas (2014)
– Dévoilements simples (2015)
– Koalas (2014)
– Dévoilements simples (2015)
– Archipel (150 haïkus avant de mourir encore) (2014)
– Koalas (2014)
– Animal mort (2016)
– Dévoilements simples (2015)
– Archipel (150 haïkus avant de mourir encore) (2014)
– Koalas (2014)
– Archipel (150 haïkus avant de mourir encore) (2014)
– Koalas (2014)
– Orphée karaoké (2014)
– Archipel (150 haïkus avant de mourir encore) (2014)
– Dévoilements simples (2015)
– Koalas (2014)
– Orphée karaoké (2014)
– Archipel (150 haïkus avant de mourir encore) (2014)
– Orphée karaoké (2014)
– Archipel (150 haïkus avant de mourir encore) (2014)
– Message personnel (2013)
– Orphée karaoké (2014)
– Koalas (2014)
– Archipel (150 haïkus avant de mourir encore) (2014)
– Message personnel (2013)
– Le sacre du printemps (2013)
– Orphée karaoké (2014)
– Message personnel (2013)
– Orphée karaoké (2014)
– Message personnel (2013)
– Archipel (150 haïkus avant de mourir encore) (2014)
– Orphée karaoké (2014)
En outre, Pierre Lapointe, Alex Nevsky, Josha, Jean­François Malo et Sophie Cadieux l’ont chacun invité
– Message personnel (2013)
– Message personnel (2013)
– Orphée karaoké (2014)
à collaborer avec eux.
– Message personnel (2013)
Mat.TV
– Message personnel (2013)
Comme interprète, Félix­Antoine Boutin a apparu au cinéma dans Chameau, lion, enfant de Stéphane
Beaudoin et Un comte pour enfants de Renée Beaulieu, mais aussi au théâtre dans le Ventriloque de Larry
Tremblay.
__________
26
tourisme-montreal.org
Blog officiel du tourisme à Montréal
Le 27 octobre 2016
Par Robyn Fadden
URL : http://www.tourisme-montreal.org/blog/things-to-do-in-montrealoctober-28-to-november-3-2/
THINGS TO DO IN MONTRÉAL: OCTOBER 28 TO
NOVEMBER 3
Posted on October 27th, 2016 by Robyn Fadden.
As the cool weather begins, Montréal knows exactly what to do about it: eat, drink and have some seasonal fun.
Restaurant week MTLàTABLE kicks off, Halloween parties for all tastes abound, and new art, theatre, dance and music
show off the city’s diverse cultural side.
Stage and screen
In dance, see Les Grands Ballets’s Roméo & Juliette on Oct. 28, Danse Danse’s presentation of the Nederlands
Dans Theater performing pieces by choreographers Paul Lightfoot, Sol León and Crystal Pite, Nov. 1­5, and experiments
in contemporary dance at Actoral.16 at Usine C, to Nov. 5. In theatre: love reigns in the true story of Prom Queen: The
Musical at the Segal Centre; Teesri Duniya Theatre’s dark comedy The Refugee Hotelplays at the Segal too; family
theatre company Geordie stages mysterious tale The Halloween Tree written by Ray Bradbury, Oct. 29­30; Talisman
Theatre’s excellent production of intensely emotional Canadian drama Yukonstyle stuns at Theatre La Chapelle to Oct.
29; a journey of romance through parallel worlds awaits in Constellations at Centaur Theatre; and sing and shout along
to Richard O’Brien’s The Rocky Horror Show at Mainline to Oct. 29 or see the movie at The Rocky Horror Picture
Show Halloween Ball at The Imperial. In film, the Au Contraire Film Festival screens animated shorts on Oct. 28,
while on Nov. 3 the ever­illuminating Cinemania festival of French­language films (all with English subtitles!) opens with
Nicole Garcia’s From the Land of the Moon. And coming soon: the high­energy magic of Cirque du Soleil’s OVO at
the Bell Centre Nov. 29 to Dec. 4 – tickets, including family packs, are on sale now.
Eat, drink and play
Eat well and explore the city at the same time during Montréal’s decadent restaurant week MTLàTABLE when 150
restaurants offer multi­course prix­fixe menus at incredible prices. Get an insider’s perspective in our Survival guide to
MTLàTABLE and then choose places to dine and party, where to taste dishes of the world, neighbourhood restaurants to
try, fabulous hotel restaurants, Languedoc wines and SAQ wine events, tours and cheese events, chocolate
creations and more. Walk it all off among the changing leaves in the city’s quaint neighbourhoods and big
parks, through Old Montréal and on multimedia tour Cité Mémoire, and among public art downtown among the
skyscrapers. On Oct. 28, drink and eat local at Oktoberfest in the outdoor biergarten of the Olympic Stadium
Esplanade. And get in on the new hockey season action as the Montréal Canadiens take on the Toronto Maple Leafs
on Oct. 29 and the Vancouver Canucks on Nov. 2 at the Bell Centre.
Live music
Friday night brings the sweet soulful sounds of Earth, Wind & Fire to the Bell Centre, Canadian new­wave
rockers Platinum Blonde to L’Astral, the heavy guitar vibes of Halestorm and Lita Ford to Metropolis, indie rock
supergroup TUNS featuring Chris Murphy of Sloan to Divan Orange and the ska­punk of L.A.’s The Interrupters to Café
Campus. On Saturday, get your dance­pop shoes on for Tegan and Sara at Metropolis and earplugs in for Belfast
punks Stiff Little Fingers and local legends The Nils at Théâtre Corona, plus west­coast electro dudes LANY at Théâtre
Fairmount, the good indie­folk­rock folks of Royal Canoe at La Vitrola, and the fun British art­pop sound of Kero Kero
Bonito and local stars She­Devils at L’Astral. Starting Oct. 29, all kinds of music and dance from the Arab world
enlivens several of the city’s venues during the Festival du Monde Arabe de Montréal, including an opening show
27
by Abeer Nehme and Oktoecho ensemble in a tribute to Syria at Place des Arts, Algerian pop singer Amel Zen at Le
La Presse
Quotidien montréalais
Le 28 octobre 2016
Par Mario Cloutier
URL : http://plus.lapresse.ca/screens/1a9cf18a-4c00-4ef8-90a3-a162ecf129f8%7C_0.html
FESTIVAL ACTORAL
FESTIVAL ACTORAL
FUSIONS À PROFUSION
FUSIONS À PROFUSION
Les disciplines artistiques sont solubles dans le grand tout des arts vivants. Fondé à
Marseille, le festival Actoral est ce laboratoire où se rencontrent littérature, danse,
Les disciplines artistiques sont solubles dans le grand tout des arts vivants. Fondé à
théâtre, arts visuels et musique. Profusion de fusions en vue, telle la
Marseille, le festival Actoral est ce laboratoire où se rencontrent littérature, danse,
performance Doux de l’artiste visuelle Julie Favreau avec la danseuse Anne
théâtre, arts visuels et musique. Profusion de fusions en vue, telle la
Thériault ce soir à la Fonderie Darling. Une programmation de formes courtes
performance Doux de l’artiste visuelle Julie Favreau avec la danseuse Anne
décloisonnées, surprenantes, que nous font découvrir le fondateur du festival,
Hubert Colas, et la directrice artistique de l’Usine C, Danièle de Fontenay.
Thériault ce soir à la Fonderie Darling. Une programmation de formes courtes
décloisonnées, surprenantes, que nous font découvrir le fondateur du festival,
MARIO CLOUTIER
Hubert Colas, et la directrice artistique de l’Usine C, Danièle de Fontenay.
LA PRESSE
À l’Usine C demain et samedi
MARIO CLOUTIER
IO SONO ROCCO
LA PRESSE
PETIT GUIDE POUR DISPARAÎTRE
DOUCEMENT
SALVATORE CALCAGNO (THÉÂTRE)
FÉLIX­ANTOINE BOUTIN (THÉÂTRE)
On a pu voir le travail étonnant de Salvatore
IO SONO ROCCO
Calcagno à La Chapelle (La vecchia vacca ) en
Un texte poétique sur le « je » et le « nous ». « 2015. « Actoral, ce sont des créateurs de leur
[Félix­Antoine Boutin] est très jeune, mais je
époque, d’ici et de chez nous en Europe, dit le
sens qu’il a cette nécessité de l’avenir, note
SALVATORE CALCAGNO (THÉÂTRE)
fondateur du festival, Hubert Colas. Leur écoute
Hubert Colas. Il écrit sur les dépôts du monde.
On a pu voir le travail étonnant de Salvatore
du monde est importante et leur travail contient
Les codifications du sens depuis 30 ans sont
une source biographique dans plusieurs cas, un
Calcagno à La Chapelle (La vecchia vacca ) en
normées. Félix­Antoine travaille en dehors de
impact du passé qui a une résonance dans le
2015. « Actoral, ce sont des créateurs de leurces codes. Il restitue une émotion sur laquelle il
présent. C’est le cas de Salvatore Calcagno qui
est impossible de mettre des mots dans un
époque, d’ici et de chez nous en Europe, dit le
travaille sur la mémoire. Il le fait très bien, avec
premier temps. Les artistes d’aujourd’hui sont
fondateur du festival, Hubert Colas. Leur écoute
humour. »
plus proches des arts visuels. »
du monde est importante et leur travail contient
À l’Usine C demain et samedi
À l’Usine C les 1er et 2 novembre
une source biographique dans plusieurs cas, un
impact du passé qui a une résonance dans le
DISSIDENCES présent. C’est le cas de Salvatore Calcagno qui
travaille sur la mémoire. Il le fait très bien, avec
FANNY DE CHAILLÉ (DANSE)
ALEXANDRA BADEA ET MARIE BRASSARD
humour. »
(THÉÂTRE)
« C’est une écriture à la fois chorégraphique et
CHUT
théâtrale avec une métaphore sur les chutes,
À l’Usine C demain et samedi
explique Hubert Colas. Fanny de Chaillé a un
parcours atypique. Elle s’intéresse beaucoup à
la littérature, mais elle travaille cette fois avec la
CHUT
plasticienne Nadia Lauro. Celle­ci a fabriqué un
tapis en 3D ! Les artistes d’Actoral sont tous
transversaux. Il n’y a plus de frontière entre les
FANNY DE CHAILLÉ (DANSE)
formes d’art. » Marie Brassard a mis en scène un texte de la
Française Alexandra Badea, Dissidences ,
mettant en vedette des finissants d’une école de
théâtre. « Elle a réussi un travail formidable,
estime la directrice de l’Usine C. On crée ainsi
des liens entre les étudiants d’ici et de là­bas.
On veut que notre collaboration Montréal­
Marseille serve de tremplin pour les jeunes. »
« C’est une écriture à la fois chorégraphique et
À l’Usine C demain et samedi
théâtrale avec une métaphore sur les chutes, À l’Usine C les 4 et 5 novembre
À l’Usine C demain et samedi
explique Hubert Colas. Fanny de Chaillé a un
PETIT GUIDE POUR DISPARAÎTRE
BAMBI ET CO.
parcours atypique. Elle s’intéresse beaucoup à
DOUCEMENT
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la littérature, mais elle travaille cette fois avec la
OLIVIA ROSENTHAL ET ANTOINE
FÉLIX­ANTOINE BOUTIN (THÉÂTRE)
plasticienne Nadia Lauro. Celle­ci a fabriqué un
ALEXANDRA BADEA ET MARIE BRASSARD
(THÉÂTRE)
Marie Brassard a mis en scène un texte de la
La
Presse
Française Alexandra Badea, Dissidences
,
Quotidien
montréalais
mettant en vedette des finissants d’une école de
Le
28 octobre 2016
théâtre. « Elle a réussi un travail formidable,
Par
Mario Cloutier
estime la directrice de l’Usine C. On crée ainsi
des liens entre les étudiants d’ici et de là­bas.
URL
: http://plus.lapresse.ca/screens/1a9cf18a-4c00-4ef8-90a3-a162ecf129f8%7C_0.html
On veut que notre collaboration Montréal­
Marseille serve de tremplin pour les jeunes. »
À l’Usine C les 4 et 5 novembre
BAMBI ET CO.
OLIVIA ROSENTHAL ET ANTOINE
OPPENHEIM (LECTURE MUSICALE)
« Elle nous parle des films qu’on a tous vus
comme Bambi , dit Danièle de Fontenay. C’est
vrai, la mort de la mère nous attriste, mais
comme Olivia le dit : “La mère pour Walt Disney,
c’est aléatoire.” La mort dure une minute, puis le
père apparaît et tout va bien, alors qu’on ne
l’avait pas vu depuis le début du film. C’est très
ludique, brillant, pendant qu’un musicien joue
les musiques de film. » À l’Usine C le 5 novembre
LA JAMÉSIE
GENEVIÈVE & MATTHIEU (PERFORMANCE)
En voilà deux qu’on aurait pu retrouver dans la
programmation de la Biennale de Montréal.
« On les adore », dit Hubert Colas. « Ils ont
ouvert un centre de création à Rouyn où ils font
une biennale des arts, ajoute Danièle de
Fontenay. Ils sont fous braque, mais ils sont
vraiment bons. Hubert les a présentés l’année
dernière à Marseille. Un tabac ! Ils vont tourner
en Europe. »
À l’Usine C le 5 novembre
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Mat.TV
Actoral surprend : 3 spectacles audacieux
Site
québécois
Le 28 octobre 2016
Actoral surprend : 3 spectacles audacieux
Par
Sébastien Bouthillier
URL : http://www.mattv.ca/actoral-surprend-avec-3-spectacles-audacieux/
BY SEBASTIEN BOUTHILLIER · OCT 28, 2016
BY SEBASTIEN BOUTHILLIER · OCT 28, 2016
Io sonno Rocco, Tu iras la chercher et Chut continuent le
festival
Io sonno Rocco, Tu iras la chercher et Chut continuent le
festival
© Els De Nilrhok (Io sonno Rocco)
© Els De Nilrhok (Io sonno Rocco)
Par Sébastien Bouthillier
Par Sébastien Bouthillier
La deuxième édition montréalaise d’Actoral, le festival des arts vivants où les artistes de l’avant­garde
occupent et explorent la scène, présente trois autres spectacles aujourd’hui et demain à l’Usine
La deuxième édition montréalaise d’Actoral, le festival des arts vivants où les artistes de l’avant­garde
C. Performance, théâtre et arts visuels se déploient en révélant la richesse de l’imagination des créateurs.
occupent et explorent la scène, présente trois autres spectacles aujourd’hui et demain à l’Usine
C. Performance, théâtre et arts visuels se déploient en révélant la richesse de l’imagination des créateurs.
Le jeune et prometteur metteur en scène Salvatore Calcagno, né en 1990, présente Io sonno Rocco (Tu dors
Rocco), où mort et beauté s’affrontent. Après la guitare, le piano et le chant lyrique, il se tourne vers le
Le jeune et prometteur metteur en scène Salvatore Calcagno, né en 1990, présente Io sonno Rocco (Tu dors
théâtre, le meilleur moyen pour assouvir ses préoccupations rythmiques et visuelles, voire ses obsessions
Rocco), où mort et beauté s’affrontent. Après la guitare, le piano et le chant lyrique, il se tourne vers le
pour la lumière, la couleur et le détail. Son premier spectacle, La Vecchia Vacca (La vieille vache), a été primé
théâtre, le meilleur moyen pour assouvir ses préoccupations rythmiques et visuelles, voire ses obsessions
Meilleure découverte aux Prix de la critique 2013.
pour la lumière, la couleur et le détail. Son premier spectacle, La Vecchia Vacca (La vieille vache), a été primé
Meilleure découverte aux Prix de la critique 2013.
Calcagno élabore ce spectacle sophistiqué, un drame mimé, après le décès de son père, quand il découvre
deux morceaux d’Ennio Morricone sur des vinyles usés. L’intensité des émotions déclenchées par la musique
Calcagno élabore ce spectacle sophistiqué, un drame mimé, après le décès de son père, quand il découvre
du compositeur incite l’artiste à inventer des mouvement pour les représenter sur scène. Le résultat s’avère
deux morceaux d’Ennio Morricone sur des vinyles usés. L’intensité des émotions déclenchées par la musique
du compositeur incite l’artiste à inventer des mouvement pour les représenter sur scène. Le résultat s’avère
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Mat.TV
Site québécois
Le 28 octobre 2016
Par Sébastien Bouthillier
URL : http://www.mattv.ca/actoral-surprend-avec-3-spectacles-audacieux/
être le « mimodrame contemporain » chorégraphié qui découle de son fantasme comme s’il nous lisait à voix
basse une page de son journal intime. Un danseur de l’opéra de Paris (Axel Ibot), une soprano (Elise
Caluwaerts) et une actrice (Sophie Sénécaut) l’interprètent.
© Andrés Donadio (Tu iras la chercher)
Dans un monologue qu’il a rédigé, récité à la deuxième personne, Guillaume Corbeil accomplit un tour de
force théâtral. Tu iras la chercher devient une expérience poétique vécue par le spectateur, qui suit l’histoire
d’une femme (Stéphanie Aflalo) envolée pour Prague sur un coup de tête, à la poursuite d’une autre… Sauf
qu’elle se poursuit elle­même! Dans le rêve éveillé que constitue sa fuite, elle demeure prisonnière d’une
existence où elle ne retrouve plus son identité. La constante comparaison de soi à des images factices
s’avère un exercice aussi aliénant qu’inquiétant selon l’auteur, assisté de Florian Pautasso à la mise en scène.
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Mat.TV
Site québécois
Le 28 octobre 2016
Par Sébastien Bouthillier
URL : http://www.mattv.ca/actoral-surprend-avec-3-spectacles-audacieux/
© Fanny de Chaillé (Chut)
Enfin, avec son humour absurde, Fanny de Chaillé projette sur le sol un tapis anamorphique, inventé par la
plasticienne Nadia Lauro. La scène acquiert un relief insoupçonné à cause de la déconcertante projection. Dans Chut, l’espace devient ainsi l’endroit idoine pour jouer avec le déséquilibre.
Peut­être que l’interprète, Grégoire Monsaingeon, chutera s’il omet de prendre garde – de regarder – avant de
poser le pied… Devant l’immensité du territoire, l’individu semble rapetissé jusqu’à devenir minuscule pour de
Chaillé, qui évoque notre rapport à la réalité par une question d’échelle. Le burlesque de son spectacle
exploite le décalage entre l’ambiance amusante du jeu d’équilibre et la gravité du propos.
Le festival Actoral, créé à Marseille en 2001, se réclame par la diversité des formes artistiques qu’il célèbre. Depuis 2014, une édition montréalaise biennale le complète outre­Atlantique pour marquer l’ouverture des
frontières des artistes de la francophonie.
Io sonno Rocco, Tu iras la chercher et Chut à l’Usine C les 28 et 29 octobre.
Crédits photos : Els De Nilrhok (Io sonno Rocco), Andrés Donadio (Tu iras la chercher) et Fanny de Chaillé
(Chut)
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Un Fauteuil pour l’Orchestre
Site culturel français
Le 28 octobre 2016
Par Jean Hostache
URL : http://unfauteuilpourlorchestre.com/aneckxander-de-alexander-vantournhoutet-bauke-lievens-a-lusine-c/
Aneckxander, de Alexander Vantournhout et Bauke Lievens, à l’Usine C.
Oct 28, 2016 | Commentaires fermés sur Aneckxander, de Alexander Vantournhout et Bauke Lievens, à l’Usine C.
ƒƒƒ article de Jean Hostache
© Bart Grietens
Surnommé « Aneckxander », Alexander au long cou, au corps fascinant, monstrueusement­angélique, propose pour le Festival
Actoral de l’Usine C une performance rare est absolument époustouflante. Il s’agit d’une étude sur le corps humain. Un corps ici
atypique, capable de se tordre, de se désarticuler, de se condenser à l’extrême, nous donnant le sentiment que la chair pourrait
prendre la qualité d’une matière comme le gaz, le caoutchouc ou encore le diamant brute. Le sentiment qui guette constamment
le spectacle admirant cette acrobate de génie, est de l’ordre d’une hallucination totale. On a de la peine à croire les prouesses
qui se déroulent sous nous yeux, qui sont pourtant bien réelles est bien incarnées. Réelles car il s’agit de performance, où
l’illusion théâtrale et la bonne veille machine fabulatrice n’ont pas leur place au plateau. Où contemple une nudité bien réelle, qui
se heurte dans le mouvement, qui fait choc et joue à la fois avec nos craintes et notre désir malsain de violence. Il y a quelque
chose de tragiquement drôle dans ce corps qui se cherche, qui vient découvrir autant ses possibilités multiples et hors du
commun que ses limites, qui viennent bousculer et couper net le mouvement de virtuosité. Pourtant les limites sont à prendre à
une échelle qui ne sont en aucun cas celles de l’homme, tant ce qu’accomplit Alexander Vantournhout appartient à une sphère
que nous ne connaissons pas et que nous avons plaisir à venir découvrir. Nous parlerons de sa présence très forte au plateau,
de ses regards enfantins et touchants adressés un à un au public comme autant d’amis bienveillants, de sa qualité de corps à la
fois animale, rebelle à la gravité, de ce corps sculptural qu’il métamorphose comme une peinture de Francis Bacon. Au cours du
spectacle certain objets, plaqués ici comme des prothèses, viennent habiller la nudité pour ajouter une dimension monstrueuse
et contraignante à la performance. Sur une musique enregistrée en temps réelle sur un piano électrique, Alexander réalisera à
plusieurs reprises une variation de mouvements complexes dont les motifs accentuent la tension au fil de ces prothèses qu’il se
rajoute et s’impose dans la répétition. Un Sisyphe contemporain qui s’essouffle sous le poids des choses et qui continue de nous
heurter profondément. Une proposition radicale qui laisse le spectateur bouche bée par la beauté qui lui fait face, comme dans
combat où dès le premier regard nous savons que nous sommes pris.
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DFDanse
Site culturel québécois
Le 29 octobre 2016
Par Brigitte Manolo
URL : http://www.dfdanse.com/article2171.html
PAS LE TEMPS DE RELIRE
MÉDAIL DÉCOR DE VINCENT THOMASSET
PRÉSENTÉ PAR L’USINE C DANS LE CADRE D’ACTORAL
Sous prétexte de revisiter ses premières expériences textuelles, Vincent Thomasset
pénètre l’univers quincailler de la boutique Médail décor que tenait son grand­père. À la
suite du danseur Lorenzo de Angelis qui se faufile dans la mémoire de l’artiste, le public lit
entre les lignes le hiatus permanent entre souvenir, biographie et réflexion active.
La performance Médail décor , conçue et narrée par Vincent Thomasset, et incarnée en compagnie
de Lorenzo de Angelis, est une digression ludique et stimulante sur le temps de la parole et son décalage
d’avec la pensée et l’écriture. Le spectacle démarre par un monologue à la va­vite sur ce qui amène la
thématique : soit une énumération des détours carriéristes de l’artiste depuis son initiation au babillage
enfantin, puis aux langues, à la prose et au théâtre (en bifurquant par l’ambition, la honte, la séduction, le
découragement). Au travers des années, les mots ont initié toute une gamme de sentiments, pas
nécessairement plus facile à nommer qu’à vivre.
Orateur sous projecteur, un brin confus et malhabile, l’auteur s’aide de ses mains pour exprimer ce qui relève
d’anecdotes et remonte à trop loin. S’installe immédiatement un double langage de phrases et de signes,
appuyé de postures et de déplacements. Hormis cette vibration physique du sens, le discours est faussement
maladroit : déjà il calcule sa durée, ses inachèvements et ses effets. Dix minutes à mitrailler le passé, sur un
débit tout juste assez rapide et articulé pour s’y perdre et s’y retrouver. La page lignée de la performance est
dressée, avec déjà des gribouillis et coins cornés.
Concrètement, lunettes sur le nez, feuillets en main, assis en penseur ou droit derrière un pupitre, le comédien
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étudie plusieurs courts textes écrits de lui, qu’il livre en empruntant des procédés abordés en prologue : une
diction de voix de synthèse sur un ton excessivement neutre, ou l’apprentissage par cœur d’une série
La performance Médail décor , conçue et narrée par Vincent Thomasset, et incarnée en compagnie
de Lorenzo de Angelis, est une digression ludique et stimulante sur le temps de la parole et son décalage
d’avec la pensée et l’écriture. Le spectacle démarre par un monologue à la va­vite sur ce qui amène la
thématique : soit une énumération des détours carriéristes de l’artiste depuis son initiation au babillage
Siteenfantin, puis aux langues, à la prose et au théâtre (en bifurquant par l’ambition, la honte, la séduction, le
culturel québécois
découragement). Au travers des années, les mots ont initié toute une gamme de sentiments, pas
Le 29
octobre 2016
nécessairement plus facile à nommer qu’à vivre.
DFDanse
Par Brigitte Manolo
Orateur sous projecteur, un brin confus et malhabile, l’auteur s’aide de ses mains pour exprimer ce qui relève
URL
: http://www.dfdanse.com/article2171.html
d’anecdotes et remonte à trop loin. S’installe immédiatement un double langage de phrases et de signes,
appuyé de postures et de déplacements. Hormis cette vibration physique du sens, le discours est faussement
maladroit : déjà il calcule sa durée, ses inachèvements et ses effets. Dix minutes à mitrailler le passé, sur un
débit tout juste assez rapide et articulé pour s’y perdre et s’y retrouver. La page lignée de la performance est
dressée, avec déjà des gribouillis et coins cornés.
Concrètement, lunettes sur le nez, feuillets en main, assis en penseur ou droit derrière un pupitre, le comédien
étudie plusieurs courts textes écrits de lui, qu’il livre en empruntant des procédés abordés en prologue : une
diction de voix de synthèse sur un ton excessivement neutre, ou l’apprentissage par cœur d’une série
d’appositions à se mettre en bouche comme une mélodie fredonnée. En marge, le corps sinueux de Lorenzo
de Angelis apparaît d’abord emmitouflé, comme annotation du texte, s’efface puis revient en rampant, se
frayant une place illustrative ou incitative selon les chapitres. Parfois sous­texte, contexte, surtitre, doublure,
accentuation, emphase ou refus, la succession de poses appuie ou infléchit le dire. Cela va du « lipsynch »
aux mimiques concentrées jusqu’à l’aparté physique.
L’enchaînement de situations qui s’en suit élabore sur plusieurs notions liées à l’énonciation ­ telles que la
mémorisation, la récitation, la répétition pour soi. Tout cela est nommé sans vraiment le dire, en le mimant ou
en l’exprimant (dans le sens forçant du terme). Et à quoi servent ces piles de boîtes en plastique coloré, si ce
n’est l’évocation d’un monde primaire d’enfance dans lequel l’accumulation de savoirs devient autant
d’obstacles encombrants à une expression claire et libre de soi ?
Dans leurs actions dissonantes se lit un effet de rythme, une figuration des façons d’énoncer. En fin de course
par exemple, alors que Thomasset reprend un fil de pensée qui s’agite, incompris et pris dans le vertige d’une
réflexion sur le temps, la simultanéité et la détermination, De Angelis se prend pour un cheval au trot, bientôt
au galop, dont les longues pattes ambitionnent des sauts entre les piles, franchissent les barrières avant une
ruade incontrôlée. L’accélération, son jeu sonore, évoquent une langue hâtive, qui s’enfourche en voulant tout
dire et penser d’un même élan. En réponse à ce talent d’interprétation et de précision gestuelle, les
mouvements de Vincent Thomasset sont plus brouillons, raturés, balbutiants, sorte d’archive manuscrite et
immédiate de la présence en scène. Dans cet exercice de ton et de diction, les hésitations, redondances et
autres fausses notes sont partie intégrante du jeu et sorte de mise en abîme du sujet. Il s’agit en réalité d’une
partition précise, chiffrée à la lettre et au lapsus près, profilée par la ligne corporelle du danseur et la
rythmique des déplacements.
Un autre épisode, épistolaire, met en relief les écarts de style caractéristiques d’une correspondance entre un
garçon nonchalant en camp de vacances et ses parents rassurants. Les soupirs, les ellipses, les exagérations
et euphémismes se traduisent dans les arythmies de diction, et laissent entendre une maturité, des
sentiments, une personnalité en changement. Échos de points de vue différents. Ces jeux de focalisation sont
renforcés par un travail sonore réfléchi, déployé à grandeur de scène. Alors que le récit décrit des déferlantes,
celles­ci se déchaînent par­dessus tête. Quand un acteur simule la pensée à voix haute, le son surgit de façon
quasi divine et intérieure. Les variations de sources, de qualité du son, les modulations de distance, les
bruitages et la spatialisation d’ensemble témoignent d’une attention dirigée vers le public, son emplacement et
ses perceptions. Ils matérialisent, somme toute, la chaîne physique de la communication : entre origine,
message, transmission et réception.
Au fil de son leitmotiv à huit notes "Pla­fond Mon­sieur I­ci Voi­là", Médail décor époussette les étagères d’un
grenier du langage, ses signes silencieux, ses jeux de mots endormis : vestiges de non­dits signifiants et
constructifs de l’adulte. La prestation invite à une plus grande réflexion sur le temps de l’action, les notions
d’immédiateté et de prédiction, et bien sûr l’interprétation. La tricherie tout compte fait. Car nous nous
racontons nos vies la plupart du temps, leurs événements que nous réfléchissons instantanément plutôt que
d’y être momentanément suspendus. Instant après instant.
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INFOPRESSE
Site québécois
Le 30 octobre 2016
URL : http://www.infopresse.com/article/2016/10/30/4-sorties-culturelles-a-ne-pas-manquer
4 sorties culturelles à ne pas
manquer
0
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Danse, théâtre, exposition et projections numériques
sont à l’honneur. Infopresse vous propose ses coups de
cœur culturels de la semaine. Théâtre// Petit guide pour disparaître doucement – les 1er et 2
novembre dans le cadre d’Actoral à l’Usine C
Se confronter à l’identité collective
Danse, théâtre, exposition et projections numériques
sont à l’honneur. Infopresse vous propose ses coups de
cœur culturels de la semaine. Théâtre// Petit guide pour disparaître doucement – les 1er et 2
novembre dans le cadre d’Actoral à l’Usine C
Se confronter à l’identité collective
Petit guide pour disparaître doucement confronte le rapport du soi
au collectif. Guidé par le désir d’une empathie infinie, le metteur
en scène Félix­Antoine Boutin invente le sommaire d’une
démarche par laquelle le «je» pourrait se sublimer, pour ensuite se
fondre dans un «nous» en faisant appel à des souvenirs, réels et
fantasmés.
Danse // Nederlands Dans Theatre – du 1er au 5 novembre
36
dans le cadre de la programmation de Danse Danse à la Place
Le Devoir
Quotidien montréalais
Le 31 octobre 2016
Par Catherine Lalonde
URL : http://www.ledevoir.com/societe/actualites-en-societe/483459/
symbole-et-politique-la-sorciere-grain-de-sable-dans-le-rouage-capitaliste
LE RETOUR DES SORCIÈRES
Un grain de sable dans le rouage capitaliste
31 octobre 2016 | Catherine Lalonde | Actualités en société
Photo: Flavie Leleu
Pamina de Coulon
Les grandes chasses au sortir du Moyen Âge auraient, selon certaines théories, produit un terreau fertile à
l’éclosion du capitalisme néolibéral. La résurgence des sorcières, ces grains de sable dans le discours
rationnel, annoncerait­elle la révolution inverse ?
« Au­delà [du fait] de poursuivre ces femmes aux savoirs qui faisaient peur, les chasses aux sorcières ont
été une manière d’instaurer comme seul bon sens acceptable la rationalité froide et non sensuelle, »
explique en entrevue l’auteure et performeuse Suisse Pamina de Coulon. Elle a beaucoup réfléchi à la
figure de la sorcière et à sa pertinence politique actuelle, et l’expliquait fin octobre dans son monologue au
festival Actoral à Montréal. « Au Moyen Âge, poursuit­elle, les communautés étaient très soudées, avec des
terres mises en collectivité ; en créant un climat de suspicion et de dénonciation, en montant les gens les
uns contre les autres, on a atomisé ces communautés jusqu’à l’individu, figure valorisée depuis. Ce qui a
fait un super terreau pour la révolution industrielle et capitaliste. »
C’est par la lecture de Mona Chollet, puis de La sorcellerie capitaliste, d’Isabelle Stengers et Pierre Pignarre
(La Découverte, 2005), que madame de Coulon a commencé à penser la sorcière. « Les auteurs expliquent
leur concept du capitalisme comme système sorcier. Plusieurs autres cultures, des peuples colonisés, ont
parlé de cette impression que les Blancs étaient possédés par une espèce de pouvoir capable de les
capturer, qui réduit et mobilise la pensée et la critique. »
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Le Devoir
Quotidien montréalais
Le 31 octobre 2016
Par Catherine Lalonde
URL : http://www.ledevoir.com/societe/actualites-en-societe/483459/
symbole-et-politique-la-sorciere-grain-de-sable-dans-le-rouage-capitaliste
Les auteurs présentent ensuite ces féministes nord­américaines actuelles qui, pour s’émanciper des
carcans proposés par les féministes blanches, se présentent comme des sorcières néopaïennes. « Elles
repensent de nouveaux rituels, parce que c’est une manière de reprendre le pouvoir, au­delà de la prise de
conscience. Elles proposent de se remobiliser. » Stengers et Pignarre parlent de créer l’événement. « Ainsi,
les gens s’emparent d’un problème qui les concerne, ils deviennent proactifs et se le réapproprient, en
faisant un livre, une rencontre, un rituel, un spectacle. » Exactement ce que fait Pamina de Coulon avec
son spectacle Fire of Emotions : Genesis, même si ce n’était pas son intention de création.
Passer par le bas
Mais ces actions ne s’avèrent­elles pas plus symboliques que d’aller manifester ou occuper Wall Street ?
« Ce n’est pas un système d’exclusion : on n’a pas à choisir la manifestation OU le rituel ; on peut penser
en superposition, avec des ET », rétorque Pamina de Coulon, de sa manière rationnelle d’inviter
l’irrationnel. Pour elle, le blocage qu’a d’abord fait la Wallonie dans l’accord de libre­échange UE­Canada est
un geste sorcier : être l’improbable grain de sable, revendiquer le droit de dire non, retrouver « cette
soudaine capacité d’agir, cette mobilité soudaine… »
Ce mouvement des nouvelles sorcières, selon celle qui est maintenant belge, démontre une prise par le
bas, « une façon d’aller du côté des oppressés et des vaincus. D’aller en solidarité. Je pense que le
mouvement est symptôme de plusieurs années à penser le monde autrement, comme par les études post­
coloniales, post­genres, ou le black feminism. » Toutes ces manières, poursuit­elle, de penser depuis
l’ailleurs, de se trouver à l’intersection de la femme, du surnaturel, de la pauvreté. « Et de trouver par
cette figure une émancipation. Une figure qu’on ne prend peut­être pas au sérieux, qui est un peu
mystique­chou. Sauf qu’une fois qu’on a toutes repris conscience de notre propre pouvoir, on va être
difficiles à ébranler, à maîtriser, à immobiliser. »
Mais le côté mystique ? « Pour moi, c’est une idée conceptuelle que le pouvoir intérieur. Dans le carcan du
système capitaliste, les mots pour penser le monde sont galvaudés, froids, très utilisés par la science dure.
Aller chercher un vocabulaire qui empêche la mise à distance — parler sorcières et émotions, comme
Frédéric Lordon va parler des affects du capitalisme (La société des affects, 2013), est intéressant, et c’est
un terrain où on peut surprendre le capitalisme. »
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Le Devoir
Quotidien montréalais
Le 3 novembre 2016
Par Mélanie Carpentier
URL : http://www.ledevoir.com/culture/theatre/483740/
actoral-comment-disparaitre-completement
ACTORAL
Comment disparaître complètement
3 novembre 2016 | Mélanie Carpentier | Théâtre
Photo: Hervé Bellamy
Prise de vue tirée de la pièce «Texte M.» de Hubert Colas
« Je veux disparaître », confessait Félix­Antoine Boutin à son public à l’Usine C mardi, lançant la deuxième
et dernière semaine d’activités d’Actoral à Montréal. Le présage d’un suicide scénique annoncé ? Petit
guide pour disparaître doucement est plutôt la fascinante déconstruction d’une identité se volatilisant dans
une forêt de mots et d’images à caractère méditatif.
« Je ne comprends pas de qui je parle lorsque je prononce “ je ” », continue l’artiste québécois seul sur
scène, chandail illustrant une nature boréale pittoresque sur le dos. Plus tout à fait personnage dans ce
monologue éclaté, le « je » de l’acteur s’éclipse peu à peu pour se fondre dans un « nous » prédateur.
Pour se redéfinir, hors de question de se fier à l’Histoire qui « se construit dans un trou de mémoire ». Ici,
on choisit de se réinventer au fil de micro­histoires et de haïkus portés par une scénographie simple et
ingénieuse. Dans ce récit entrelaçant impeccablement voix préenregistrée et textes projetés, on discernera
de petits électrochocs (« regarde­nous ne pas être »). On s’amuse d’ailleurs à chercher des sens cachés
dans ces images de pendus qui se transforment en gentils fantômes du passé.
Ce poème scénique existentiel et romantique est d’une grande beauté visuelle avec ces maisons de papier,
métaphores de l’identité qu’on croit solidement fondée, pouvant brûler et se froisser en un instant. Et, en
miroir, des bonshommes allumettes ironiquement immolés par le feu. La proposition reste assez cérébrale
(presque universitaire, a­t­on envie de dire). Une intellectualité qui n’enlève rien au charme provocateur de
cette invitation à ne plus se définir, portant de façon ludique à réfléchir, mais ne générant pas de véritable
engagement émotif.
39
Le Devoir
Quotidien montréalais
Le 3 novembre 2016
Par Mélanie Carpentier
URL : http://www.ledevoir.com/culture/theatre/483740/
actoral-comment-disparaitre-completement
Relevons pourtant la fantastique image finale de ce terrain de jeu. Sur le tapis où apparaît, comme dessiné
dans le sable, le slogan « Je suis invisible » (écho au « Je suis Charlie » et « Je suis Paris » ?), l’auteur finit
par s’éclipser pour laisser place à un groupe de personnes hétérogène. Des petites roches et des figures
miniatures aux voiles noirs sont déposées sur le sol. On laissera à la discrétion de chacun l’interprétation
de ces petits fantômes traversant un désert parsemé d’embûches, balayées d’un coup de vent.
Chacun creuse son trou
En contrepoint des magiques envolées de Félix­Antoine Boutin, Hubert Colas se terre dans une obscure
austérité. C’est seul au fond d’un puits­écran circulaire et terreux qu’on retrouve le metteur en scène
français. La densité de ce texte composé à l’origine pour commémorer l’abolition de l’esclavage demande
une bonne endurance. Car, oui, ce texte s’endure sur la longueur comme une interminable traversée sur
un bateau de pacotille.
Le frigo plein, ce protagoniste « middle­class » paranoïaque est prisonnier de son trou, petit lopin de terre
qu’il défend bec et ongles. Un espace de solitude où il perd toutes sensations, le corps anesthésié, en mal
d’amour. Juste un peu en colère, mais pas trop. Surtout pas révolutionnaire ou rebelle.
Parfois drôle, parfois nous tapant sérieusement sur les nerfs, le personnage interprété par le génial
créateur frappe certaines cordes sensibles. Si bien qu’on finit par éprouver une certaine empathie pour cet
ingénu caractère. Car s’il est insupportable, n’est­ce pas parce qu’on peut reconnaître en lui quelque chose
de soi ? Avec nos virtuels outrages, nos illusions de liberté, pieds et mains démocratiquement liés. Pire
encore peut être la complaisante politique de l’autruche. La tête enfouie dans son trou, ne sachant plus
d’où vient véritablement le danger.
Née dans le contexte européen actuel où la peur tend à justifier tous les moyens, jusqu’aux graves dérives
autoritaires, la visée de
Texte M. est ô combien pertinente. Bien sûr, il faut être prêt à l’écouter d’un bout à l’autre (en faisant fi du
dédoublement de voix de l’acteur par son souffleur, audible depuis les premiers rangs).
Politique aussi est The Call,du jeune Mathias Varenne. Un kaléidoscope en train de se faire s’avérant
prometteur, visuellement intéressant, même si la conception sonore reste à travailler, notamment la voix
du personnage d’étudiant qui reste statique derrière son livre ouvert et qui gagnerait à se mouvoir dans ce
bel espace sculpté par les lumières.
40
Unidivers
Site culturel français
Le 3 novembre 2016
URL : https://www.unidivers.fr/rennes/toutes-les-chansons-que-jai-composees-de-jacob-wren/
Toutes les chansons que j’ai composées de Jacob Wren
4 novembre 2016 21:00 ­ 23:00
Toutes les chansons que j’ai composées de Jacob Wren, 4 novembre 2016 21:00, MAC Musée d’art
contemporain de Montréal
JACOB WREN / PME­ART Toutes les chansons que j’ai composées Le 4 novembre à 21h MAC
La Biennale de Montréal en partenariat avec La Chapelle Scènes Contemporaines présente en collaboration avec l’Usine C dans le cadre du Festival actoral.16
Montréal Toutes les chansons que j’ai composées (Every Song I’ve Ever Written), un spectacle de Jacob Wren / PME­ART qui allie performance et musique,
présenté pour la première fois en version intégrale (karaoké, solo, groupes, web).
Toutes les chansons que j’ai composées de Jacob Wren was last modified: novembre 4th, 2016 by Festivals 2016
MAC Musée d’art contemporain de Montréal (https://www.unidivers.fr/lieu/mac­musee­dart­contemporain­de­montreal/) @Festival actoral Montreal
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ART % 0 AT O UT E S + L E S + CH ANS O NS + Q UE + J % E 2 % 8 0 % 9 9 AI + CO MPO S % C3 % A9 E S % 0 AL E + 4 + NO VE MB RE + % C3 % A0 + 2 1 H % 0 AMAC+ % 0 AL A+ B I E NNAL E + DE + MO NT R% C3 % A9 AL + E N+ PART E NARI AT + AVE
ART + Q UI + AL L I E + PE RFO RMANCE + E T + MUS I Q UE % 2 C+ PR% C3 % A9 S E NT % C3 % A9 + PO UR+ L A+ PRE MI % C3 % A8 RE + FO I S +
CRITIQUE
PUBLIÉ LE 24 NOVEMBRE 2016 @ 9H51
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RÉDACTION
Site culturel québécois
Gilles G. Lamontagne
Le 24 novembre
2016
Critique théâtre, danse, classique
Par Gilles G. Lamontagne
URL : http://www.sorstu.ca/festival-actoral-a-lusinePHOTOS
c-le-quebec-a-lhonneur-lan-prochain-a-marseille/
Courtoisie
FESTIVAL ACTORAL À L’USINE C | LE QUÉBEC À
L’HONNEUR L’AN PROCHAIN À MARSEILLE
Avec son Festival Actoral étalé sur deux semaines, l’Usine C a accueilli dans ses trois salles une
faune bigarrée d’artistes encore verts pris en flagrant délit d’initiés. Tantôt hirsute, tantôt lisse,
toujours audacieuse et hors de contrôle, la programmation d’Actoral se compare à celle d’un
Fringe, mais d’un Fringe aux critères relevés.
Actoral (fusion des mots acteur et oral) est né à Marseille en 2001, à l’initiative de l’auteur et metteur en scène
français Hubert Colas qui cherchait avec éclat à décloisonner les courants artistiques, les faisant se croiser,
entrer en collision et s’influencer mutuellement. À tel point que le Festival de cette année, juste avant l’édition de
Montréal, a proposé à son public téméraire pas moins d’une centaine de rendez­vous durant trois semaines dans
17 lieux. Théâtre, danse, musique, lecture, installation, performance, arts visuels et écriture scénique, tout y a
passé.
Après Montpellier et Paris, c’est grâce à la rencontre en 2012 entre Hubert Colas et Danièle de Fontenay,
cofondatrice et directrice artistique de l’Usine C, que les liens se sont tissés en vue d’une réciprocité avec
Montréal de talents émergents. Et de plus, qui ne sont pas forcément passés par les écoles de formation.
« Nous avions ce rêve, dit en entrevue Danièle de Fontenay, d’un tremplin transatlantique qui se consacrerait
uniquement à des écritures scéniques très contemporaines, et ce, dans toutes les formes d’art. C’est même une
plasticienne, Julie Favreau, qui a été proclamée cette année marraine de l’événement. Ce qui me tient vraiment à
cœur, ce sont les échanges d’artistes des deux côtés de l’Atlantique, la provocation et les chocs culturels autant
que la complémentarité des différentes formes d’expression artistique. C’est important non seulement comme
moyen de diffusion mais aussi en tant que témoin d’un travail en cours. »
Avec un maigre budget ne dépassant pas les 150 000 $, cette édition à Montréal en était seulement la deuxième.
On aura pu voir 18 spectacles et trois hors les murs originaires du Québec, de France, de Belgique, de Suisse et
même pour un, des États­Unis. Des spectacles hétéroclites qui le plus souvent ne dépassaient pas une heure, ce
qui permettait certains soirs d’enchaîner avec trois shows l’un après l’autre.
même pour un, des États­Unis. Des spectacles hétéroclites qui le plus souvent ne dépassaient pas une heure, ce
« Les salles étaient pleines, se réjouit Danièle de Fontenay, le public a répondu présent, ce qui est formidable
compte tenu qu’il s’agit en grande partie d’artistes qui ne sont pas connus, avec des contenus à risque, et
presque sans aucune publicité. La logistique de tout ça représente beaucoup de travail, c’est un vrai marathon. Il
faut loger non seulement tous ces artistes, mais aussi les équipes techniques, et répondre aux besoins des uns
et des autres. Mais je suis très contente du résultat. »
Ce qui me tient vraiment à cœur, ce sont les échanges d’artistes des deux côtés de
l’Atlantique, la provocation et les chocs culturels autant que la complémentarité des différentes
formes d’expression artistique.
Retour sur les spectacles de 2016
Seul en piste et dans le plus simple appareil, le Belge Alexander Vantournhout a ouvert le bal avec une
performance cultivant l’ambiguïté entre acrobatie et danse. Juché sur ses plates­formes noires et avec des gants
de boxe, son corps sculptural sous un éclairage cru et sans décor, le performeur au crâne rasé lançait au public
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voyeur que nous étions devenus des regards amusés et désopilants.
compte tenu qu’il s’agit en grande partie d’artistes qui ne sont pas connus, avec des contenus à risque, et
presque sans aucune publicité. La logistique de tout ça représente beaucoup de travail, c’est un vrai marathon. Il
faut loger non seulement tous ces artistes, mais aussi les équipes techniques, et répondre aux besoins des uns
et des autres. Mais je suis très contente du résultat. »
Sors-tu ?
Site culturel québécois
Le 24 novembre 2016
Ce qui
tient vraiment à cœur, ce sont les échanges d’artistes des deux côtés de
Par Gilles
G.me
Lamontagne
l’Atlantique, la provocation et les chocs culturels autant que la complémentarité des différentes
URL :formes
http://www.sorstu.ca/festival-actoral-a-lusined’expression artistique.
c-le-quebec-a-lhonneur-lan-prochain-a-marseille/
Retour sur les spectacles de 2016
Seul en piste et dans le plus simple appareil, le Belge Alexander Vantournhout a ouvert le bal avec une
performance cultivant l’ambiguïté entre acrobatie et danse. Juché sur ses plates­formes noires et avec des gants
de boxe, son corps sculptural sous un éclairage cru et sans décor, le performeur au crâne rasé lançait au public
voyeur que nous étions devenus des regards amusés et désopilants.
Photo par Bart Grietens.
Dans la mise en scène du Français Florian Pautasso et sur un texte du Québécois Guillaume Corbeil, Tu iras la
chercher était défendu par l’énigmatique Stéphanie Aflalo. Assise presque tout du long dans une sorte de carcan
en bois, elle se parle à la deuxième personne de sa quête à Prague d’une autre femme que l’on soupçonne être
elle­même. De sa voix envoutante, car elle chante aussi, les deux mains sur ses cuisses, observant les
spectateurs pendant que son avion s’arrache du sol imaginaire qui la retenait captive.
Autre exemple de cette dramaturgie créée en laboratoire où une idée en cache une autre qui en cache une autre,
on aura pu voir les trois personnages de Io sono Rocco, du Wallon Salvatore Calcagno, se livrer à une
chorégraphie complexe avec une grande table qu’ils déplacent selon les codes curieux d’une inquiétante danse
des longs couteaux de cuisine. Sans le moindre doute, leur performance figurait comme l’une des plus originales
du Festival.
43
Sors-tu ?
Site culturel québécois
Le 24 novembre 2016
Par Gilles G. Lamontagne
URL : http://www.sorstu.ca/festival-actoral-a-lusinec-le-quebec-a-lhonneur-lan-prochain-a-marseille/
Crédit photo: ElsDeNilRHoK
Sans oublier le délire verbal de l’Américain Ian Hatcher et sa propre poésie musicale qu’il désaccorde à la
manière dadaïste, ou encore le duo terrible de La Jamésie, en une démonstration symbolique d’auto­destruction
chez les peuples autochtones, saccageant méthodiquement et avec fureur leurs propres décors.
Explorations de nouvelles formes artistiques, souvent par leur croisement, créations spontanées autant que
réglées selon la mécanique abstraite du jeu pur, chocs des idées et des formes, renversements de concepts,
Actoral est une ruche de talents qui ne demandent qu’à être découverts.
Tout cela pour dire que le Festival Actoral 17 à Marseille l’an prochain mettra à l’honneur le Québec, avec toutes
les palettes d’une avant­garde sans cesse à dépasser par ces curieuses bibittes que sont les artistes qui s’y
adonnent et s’en réclament jusqu’au fin fond d’eux­mêmes.
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DOSSIER SPÉCIAL
SUR ACTORAL
DANS LA REVUE JEU
45
JEU no 160 • 2016.3
46
40
ans
RREE V UE DE T HÉ ÂT RE
R E 1 65 70
Dossier
ACTORAL
Félix-Antoine Boutin
Félix-Antoine Boutin
Antonija Livingstone
Guillaume Corbeil et Florian Pautasso
Salvatore Calcagno
Geneviève et Matthieu
ENJEUX
Evelyne de la Chenelière
PROFIL
Mathieu Leroux
DANSE
Virginie Brunelle
47
Jeu n° 160 - Spécial actoral Montréal - Octobre 2016
12 | DOSSIER : ACTORAL JEU 160
ACTORAL
48
Jeu n° 160 - Spécial actoral Montréal - Octobre 2016
JEU 160 DOSSIER : ACTORAL | 13
J’
ai d’abord été conquis par les
spectacles d’Hubert Colas.
Au Festival d’Avignon, en
2009, je me souviens d’avoir
été profondément remué par
Le Livre d’or de Jan. Je découvrais alors
un auteur et un metteur en scène. Depuis,
j’ai eu le bonheur de voir à l’Usine C trois
autres de ses réalisations : Kolik de Rainald
Goetz, Face au mur de Martin Crimp et
Nécessaire et urgent d’Annie Zadek.
DE MARSEILLE À MONTRÉAL
Vous imaginez alors mon enthousiasme
quand j’ai appris qu’Hubert Colas dirigeait à Marseille, depuis 2000, un festival
consacré chaque automne aux écritures
contemporaines. Après avoir assisté à la
première édition montréalaise d’Actoral,
en 2014, où une douzaine de spectacles ont
été présentés, j’ai décidé que j’irais voir sur
place, à Marseille, l’année suivante, de quoi
il retournait.
Je n’avais pas vu la ville depuis 2001. Élue
Capitale européenne de la culture en 2013,
elle avait pris, du point de vue des arts, une
toute nouvelle ampleur. Du 24 septembre au
10 octobre, galvanisé par les créations et les
installations, les gens et les idées, j’ai assisté à
une vingtaine des 90 rendez-vous organisés
aux quatre coins de la ville par Colas et
son équipe. Ravi par mes rencontres avec
Jonathan Capdevielle, Angélica Liddell et
Milo Rau, mais aussi avec Félix-Antoine
Boutin, Sophie Cadieux, Guillaume
Corbeil, Geneviève et Matthieu, et Antonija
Livingstone, j’ai proposé à la rédaction de
Jeu un dossier sur Actoral.
Le dossier du numéro que vous tenez entre
vos mains est donc consacré à des artistes, la
plupart sont Québécois, quelques-uns sont
Français, mais il y a aussi une Canadienne
basée en Allemagne et un Belge d’origine
italienne. Ils ont en commun de présenter
cet automne un spectacle à Montréal ou à
Marseille, parfois même dans les deux villes,
bien entendu à l’occasion d’Actoral. C’est la
plus éloquente manière que j’ai trouvée de
rendre compte de la circulation des œuvres
et des artistes. Actoral est une courroie de
transmission extraordinaire, du genre qui,
j’en suis convaincu, si la volonté politique
est au rendez-vous, pourrait bien devenir
essentielle à notre écologie culturelle, une
fenêtre sur le monde et un précieux outil de
rayonnement pour les artistes québécois.
Chaque automne depuis 2000, à Marseille,
le festival Actoral propose à ses fidèles
de communier avec « la richesse des écritures
d’aujourd’hui ». Son fondateur et directeur
artistique, Hubert Colas, invite des écrivains,
des metteurs en scène, des chorégraphes,
des plasticiens, des poètes et des cinéastes
français et internationaux à partager leurs
regards sur le monde. Depuis 2014, grâce
à Danièle de Fontenay, Actoral connaît à
l’Usine C une édition montréalaise, un rendezvous biennal qui expose les festivaliers à des
découvertes emballantes en plus de contribuer
au rayonnement des artistes québécois.
Christian Saint-Pierre
DANS LES COULISSES DE LA CRÉATION
Le dossier s’ouvre sur une incursion dans
l’univers du Québécois Félix-Antoine
Boutin. En train de créer un Petit guide
pour disparaître doucement, l’auteur,
metteur en scène et comédien imagine un
grand-père qu’il n’a pas connu, projette
sur lui ses aspirations, ses réflexions et ses
questionnements. Pour sa part, Andréane
Roy nous fait découvrir la démarche de
l’artiste de performance et chorégraphe
canadienne Antonija Livingstone, qui
présentera à Montréal Supernatural, un
spectacle pour le moins pulsionnel, créé
avec Simone Aughterlony et Hahn Rowe.
Je m’entretiens ensuite avec Danièle de
Fontenay et Hubert Colas pour en savoir
plus sur les relations entre Actoral Marseille
et Actoral Montréal. Dans le texte suivant,
le Québécois Guillaume Corbeil et le
Français Florian Pautasso témoignent de
leur jumelage. Le premier a vu sa pièce, Tu
iras la chercher, mise en scène par le second
à Marseille en 2014. C’est une version
plus longue de ce solo, défendue par la
comédienne française Stéphanie Aflalo, qui
sera présentée à Montréal.
49
Dans une retranscription des premières
minutes de son spectacle Médail Décor,
l’auteur et metteur en scène français Vincent
Thomasset explique de quelle manière il est
arrivé au théâtre. Avec un texte introspectif,
le Belge Salvatore Calcagno nous fait entrer
dans les répétitions de sa nouvelle création,
Io sono Rocco. Le tandem Geneviève et
Matthieu, des artistes de Rouyn-Noranda
aussi drôles qu’iconoclastes, nous entraînent en Jamésie. Attachez bien votre
tuque ! Finalement, le plasticien français
Théo Mercier, parrain de la 16e édition
marseillaise du festival, nous prépare à voir
et à entendre Radio Vinci Park.
Bonne lecture et longue vie à Actoral, à
Marseille comme à Montréal ! •
Félix-Antoine Boutin.
© Charlie Marois et
Joël Morin-Ben Abdallah
14 | DOSSIER : ACTORAL JEU 160
Petit guide pour disparaître doucement
de Félix-Antoine Boutin, présenté coup
sur coup à Marseille et à Montréal au
festival Actoral en 2016. Sur la photo
(répétition) : Félix-Antoine Boutin.
© Odile Gamache
50
JEU 160 DOSSIER : ACTORAL | 15
Alors que son nouveau spectacle,
Petit guide pour disparaître doucement,
verra le jour à l’occasion du festival Actoral,
à Marseille puis à Montréal,
Félix-Antoine Boutin en profite pour explorer ici
le thème de la disparition.
Mon grand-père
était magicien
Félix-Antoine Boutin
P
uerto Vallarta, 1980. Mon grandpère meurt sous le soleil, en
costume de bain sur la plage, son
corps éteint de touriste cardiaque
caressé par l’air chaud du Mexique.
Avant sa mort, il hypnotisait. Littéralement.
Il faisait des tournées sous le nom de
Polo Thorez, en faisant faire des bruits de
coq aux vieilles dames inconscientes. Il
faisait aussi voler mon oncle, adolescent à
l’époque, à l’horizontale, la tête appuyée
sur un dossier de chaise. Mon oncle volait
sous le regard ébahi du public. Mon grandpère était magicien. C’est dit.
51
Après sa mort, il a été rapidement rapatrié
par avion puis enterré à Sherbrooke. Ensuite,
sa femme, ma grand-mère, a développé les
photos du voyage. Elle n’y a plus vu mon
grand-père. Il avait disparu des photos,
laissant à sa place des espaces remplis de
paysages colorés, des trous inhabités à côté
de ma grand-mère souriante.
Ma grand-mère faisait partie de ceux que
l’on pourrait appeler « les sceptiques ».
Elle était terre à terre, ma grand-mère ;
cartésienne même, je dirais. Elle était
passionnée de généalogie ; elle avait rempli
des dizaines de grands cahiers avec ses
recherches. Enfant, j’adorais scruter ces
ouvrages pendant des heures.
16 | DOSSIER : ACTORAL JEU 160
Peut-être que [mon grand-père] s’enterrait trop
souvent, mort déjà de ne pas pouvoir être poreux.
Et que, devant le ridicule du monde civilisé,
Elle n’a jamais compris ce qui s’était passé.
Troublée et muette devant les photos,
il s’est volatilisé. Comme un manifeste
elle a longtemps tenté de trouver une
réponse. Son esprit n’a jamais été capable
contre les définitions
de concevoir une solution logique à cet
événement surnaturel. Ce mystère a laissé
qui ne veulent plus rien dire.
un espace vide dans sa tête jusqu’à sa mort,
28 ans plus tard, comme une vapeur trouble
dans son âme, un soupir tiède qui n’a jamais
voulu se faire oublier.
C’est peut-être le moyen que mon grandpère avait trouvé après son dernier souffle
pour habiter celle avec qui il avait partagé
sa vie. Pour ne pas finir, justement. Pour se
trouver un petit tombeau de chair et de sang,
et y dormir un peu, avant de s’envoler pour
de bon, avec elle peut-être, celle qu’il a aimée
sans doute, un jour. Pour laisser une trace
en elle, mais disparaître quand même. Pour
devenir une légende, sans avoir à exister,
sans avoir de peau pour se contenir. Pour
devenir une fable, un conte, qui pourra peutêtre traverser les époques, le temps. Pour se
survivre hors des cahiers et de la généalogie.
LES HYPOTHÈSES
Peut-être qu’au contraire il a voulu se
soustraire du monde pour de bon. Effacer
son image pour être oublié rapidement.
Peut-être qu’il voulait en finir pour vrai.
Que trop longtemps il avait senti devoir
brandir son identité comme un drapeau.
Peut-être qu’au fond il avait toujours mieux
saisi ce qui ne le définissait pas que ce qui
le définissait. Peut-être qu’il n’avait jamais
réussi à se caractériser, mon grand-père,
qu’il avait eu conscience toute sa vie d’une
pression extérieure qui le poussait à se
cerner, à se délimiter. Mais qui limitait son
existence aussi, probablement. Peut-être que
mon grand-père ne voulait pas se barricader,
justement, et que, dans un dernier effort, il
a réussi à estomper l’image qu’on avait de
lui. Parce qu’il ne croyait pas à la barrière
entre le corps et l’esprit, qu’il aurait aimé
« être » simplement, assumer le vertige de sa
propre perméabilité et embrasser le trouble
de ses espaces inconnus, changeants.
Peut-être qu’il aurait voulu se déconstruire.
Pour exister comme entité globale, sans
appartenance à une identité définie. Il aurait
voulu, en disant « je », dire ce qui est collectif
et non ce qui est individuel. Il aurait voulu
s’extraire de lui, pour capter ce qu’il y a
de plus vaste, ce qui le dépasse et qui ne
peut être saisi. Il aurait voulu se dérober à
son individualité, pour tenter d’atteindre
une humanité rassembleuse. Une identité
qui s’étendrait sur l’univers en expansion.
Pour se dilater toujours plus, sans avoir de
contour pour la retenir.
Peut-être que, comme moi, il était trop
sensible, mon grand-père, et qu’il aurait
voulu pouvoir habiter cette vulnérabilité
avec sérénité. Peut-être qu’il recevait tout
en pleine face et qu’il s’écroulait souvent.
Parce que le monde était trop rigide peutêtre, et que mon grand-père aimait la poésie
des choses, sans le savoir. Peut-être qu’il
s’enterrait trop souvent, mort déjà de ne
pas pouvoir être poreux. Et que, devant le
ridicule du monde civilisé, il s’est volatilisé.
Comme un manifeste contre les définitions
qui ne veulent plus rien dire. Contre les
prises de position factices qui ne font que
gonfler l’ego et détruire le dialogue. Contre
la guerre que l’on se fait au quotidien pour
grandir, mais tout seul. Peut-être qu’il aurait
trouvé qu’on ne se regarde pas assez souvent.
Peut-être qu’au bilan final il a trouvé que
sa vie avait été vaine et que, dans un geste
ultime, il a voulu mettre un peu de poésie
dans ce bas monde. Un peu d’imaginaire et
de mystère, comme une respiration chaude
sur la froideur du métal.
52
JEU 160 DOSSIER : ACTORAL | 17
Petit guide pour disparaître
doucement de Félix-Antoine Boutin,
présenté à Marseille et à Montréal
au festival Actoral en 2016 (photo
de répétition). © Odile Gamache
53
18 | DOSSIER : ACTORAL JEU 160
Un animal (mort), écrit et mis en scène
par Félix-Antoine Boutin (Création
Dans la Chambre), présenté au Théâtre
d’Aujourd’hui à l’hiver 2016. Sur la photo :
François Bernier. © Nans Bortuzzo
LA FICTION
Mon spectacle ne parle pas de mon grandpère. Il n’y est même pas évoqué. Je ne sais
rien de lui. À part cette anecdote que j’ai
peut-être inventée. Mort neuf ans avant ma
naissance, mon grand-père n’a rien laissé
qui se soit rendu jusqu’à moi. Sauf un autre
prénom sur mon certificat de naissance,
« Roger », un nom vieillot entre le « Joseph »
et le « Félix-Antoine » qui a perdu son sens
de n’avoir rien transmis. Une coquille vide à
investir, peut-être.
Je ne lui en veux pas, parce que quelque
chose de lui m’habite sûrement sans que je
le sache. Il a laissé un écran blanc immaculé,
que l’on pourrait croire absent tellement
il a été inutilisé. Pendant un instant, tout
à l’heure, j’ai projeté sur lui mes propres
désirs, mes propres réflexions, mes propres
questionnements. Parce qu’il a fallu inventer.
Inventer pour remplir ce que je ne connais
pas. Remplir l’inconnu. Ce qui grandit sans
cesse et qui ne peut être comblé.
Remplir parce que je veux disparaître et
que c’est en forgeant des forêts de fiction
que je réussis à m’égarer pour ne plus me
retrouver. Parce que je veux disparaître,
oui. À cause de toutes les raisons que j’ai
projetées précédemment sur mon grandpère vide. Parce qu’il faut s’inventer et se
raconter tous les jours, je crois. Parce que
nous ne sommes pas ce que nous croyons
être et que c’est beau. Et qu’il faut s’y
perdre. Parce qu’il faut se noyer, pour de
bon. Pour ne plus se comprendre, parce
qu’on ne s’explique pas de toute façon. Il ne
faut pas se leurrer.
Il faut arrêter de se croire et commencer à
construire. Une construction irréelle qui
pourrait devenir un grand château fabriqué
de nos mains, avec les bouts de bois laissés par
terre et avec les roches là depuis longtemps.
Fabriquer une cathédrale imaginaire où se
soustraire pour laisser la place à plus grand
que soi, comme une conscience abstraite qui
dépasse celui qui la conçoit.
54
J’invente des histoires pour ne plus exister.
Pour me cacher sans doute. Je façonne des
images où je peux me dissimuler. Comme
dans le spectacle que je crée en ce moment,
celui qui est la source de cet article. J’y
invente un moi qui n’est pas moi, dans
lequel je peux m’effacer. Un alter ego dans
lequel je peux me réengendrer infiniment
et ne plus être moi. Même si ce n’est pas
possible, je le sais. Même si c’est une utopie.
Mais les utopies sont faites pour être de
courts échecs, non ? Des petites défaites
qui font place à de nouveaux rêves ? Il faut
se consoler et savoir que les petits naufrages
deviennent souvent, avec le temps, sans
qu’on le sache, de petites victoires muettes.
C’est pourquoi je veux aussi embrasser
l’échec, la faille de cet effacement. L’impuissance face à ce rêve qui devient un abysse
où se perdre, et peut-être même s’évaporer
doucement. C’est un fantasme au sens
créatif du mot. Une extrapolation du réel,
celui qui n’existe pas, de toute façon, car il
est forgé par notre perception des choses.
JEU 160 DOSSIER : ACTORAL | 19
Nos vies sont inexplicables, alors autant les déployer sur les possibles.
Et les mettre face à l’impossible, aussi.
Pour que la vie trouve des brèches dans l’insondable,
y loge un nid où germer, pousser et prendre toute la place.
Pour que la vie prenne toute la place.
le sillonne, le crible et le perfore ; qu’une
Avec maladresse et incohérence.
éponge qui se gonfle et qui se vide au
rythme de ses pas, qui, comme ça, se
Avec incertitude et beauté.
désagrège et se recompose avec de l’inédit.
Une chose pénétrable qui se transforme au
Avec tristesse et amour.
cours des jours. Peut-être que je suis tout
ce qui me sectionne pour édifier des choses
Avec indiscipline et foisonnement.
nouvelles qui ne seront plus moi. Nous
Et tant qu’à percevoir les choses, autant les
discerner avec inventivité. Avec magie et
enchantement.
LA MAGIE
Parce qu’il faut s’absenter et laisser surgir
le prodigieux. Nos vies sont inexplicables,
alors autant les déployer sur les possibles.
Et les mettre face à l’impossible, aussi.
Pour que la vie trouve des brèches dans
l’insondable, y loge un nid où germer,
pousser et prendre toute la place. Pour que
la vie prenne toute la place. Avec maladresse
et incohérence. Avec incertitude et beauté.
Avec tristesse et amour. Avec indiscipline et
foisonnement. Parce que nous sommes tous
l’enfant que nous avons été, et que cet enfant
a été ligoté. Parce qu’il faut s’émerveiller
encore ; s’émerveiller des choses simples et
croire à ce que l’on rêve. Avoir la foi. Parce
qu’on ne se rassemble plus devant ce qu’il y
a d’énigmatique. Parce que les messes sont
disparues, brûlées pour la liberté, et qu’elles
ont emporté, avec elles, les territoires sacrés
où l’on pouvait se recueillir, ensemble,
devant ce qu’il y a d’obscur et de secret.
Parce qu’on ne se rassemble plus devant
la beauté du mystère. Parce qu’on ne peut
plus être humble ensemble devant ce qu’il y
a de plus grand. Parce que la logique a pris
toute la place et que le surnaturel est rendu
sensationnel, alors que s’élever devant ce
qu’on ne comprend pas ne devrait pas être
extraordinaire. Ça devrait être un geste
quotidien, ça devrait faire partie de notre
vie de tous les jours. Aussi, pour redonner
un peu d’enchantement au monde, bientôt,
moi aussi, je vais disparaître, comme par
magie, devant vos yeux éblouis. Parce que je
ne veux pas être qu’illusionniste.
Peut-être que c’est ce que mon grand-père
m’a laissé en héritage. Peut-être qu’un petit
Polo Thorez m’habite depuis toujours
et me dicte mon métier. Peut-être qu’il
m’hypnotise depuis l’enfance, que je suis
inconscient depuis tout ce temps. Peutêtre que c’est le bagage qui m’a été légué. Et
que je dois transmettre moi aussi. Laisser
au monde des rituels nouveaux, à remplir
du présent. Provoquer la rencontre pour
respirer l’instant. Encourager la réunion
des masses avec des messes sans dieu. Sans
dieu, mais avec tout le reste. Céder ma place
à l’avenir aussi, en propulsant vers l’avant
quelque chose du passé. Peut-être que nous
sommes tous des passeurs et que c’est ce qui
forme la colonne vertébrale de l’humanité.
Peut-être qu’il faut se souvenir du futur,
que c’est ce qui compose notre mémoire
collective. Peut-être qu’il faut inspirer et
avancer vers l’horizon, en étant poussés
par l’expiration des fantômes des temps
jadis. Peut-être qu’il faut que j’invente les
temps anciens, tout ce qui se cache dans
les cases derrière les noms des cahiers
généalogiques de ma grand-mère ; qu’il faut
aussi que j’imagine ce qui habitera les cases
qui me suivront. Et comme ça, faire naître
exponentiellement de nouvelles cases, les
enfanter.
Peut-être que c’est ce qui doit m’animer.
Peut-être que c’est ce que je suis ; que je
ne suis qu’un regard qui tente de traverser
les siècles ; qu’un regard doucement et
maladroitement confectionné par ce qui
55
sommes probablement des confettis sur
le sol, poussés par le vent. Des confettis
lancés par un magicien oublié. Et on fait
des amas incontrôlables parfois. Et ça crée
quelque chose. Et on se retrouve seul dans
une flaque aussi, à certains moments. Et ça
crée autre chose.
Mon grand-père était magicien. Je l’ai
décidé. Pas prestidigitateur. Magicien. Pas
de trucages, pas d’illusions, pas de fauxsemblants, pas d’artifices. Je l’ai décidé.
Il avait le pouvoir de partir en fumée, de
s’évaporer et de traverser le temps. Mon
grand-père était magique, c’est décidé. C’est
donc une vérité. Comme toutes les autres
que l’on génère. Pour se rassurer peut-être.
Ma grand-mère, elle, a accouché de notre
lignée en l’improvisant sur du papier.
C’est comme ça qu’elle a mis au monde ses
ancêtres aussi. C’est dit. Et moi. Moi… Ça
reste à inventer. •
Auteur et metteur en scène, directeur
de la compagnie Création Dans la
Chambre, Félix-Antoine Boutin a
créé plusieurs spectacles depuis sa
sortie de l’École nationale de théâtre
en 2012. Mentionnons Un animal
(mort) (2016), Les Dévoilements
simples (strip-tease) (2015), Koalas
(2014) et Orphée Karaoké (2014).
Après une résidence de recherche
de plus d’un an à L’L (Bruxelles)
et à Montévidéo (Marseille), Petit
guide pour disparaître doucement
sera créé à l’automne 2016,
à Marseille et à Montréal.
20 | DOSSIER : ACTORAL JEU 160
Antonija Livingstone dans Cat Calendar (2005),
qu’elle a créé avec Antonia Baehr. © Daniel Adams
ANTONIJA
LIVINGSTONE :
PENSER ET
DANSER « ENTRE »
56
JEU 160 DOSSIER : ACTORAL | 21
Performeuse et
chorégraphe,
Antonija Livingstone
se décrit plutôt comme
quelqu’un qui « crée
des choses avec la
danse ou des choses
qui dansent ». Quelque
part entre l’Allemagne
et Montréal, elle a
accepté de nous parler
de son parcours,
de sa démarche
et de Supernatural,
le spectacle qu’elle
a créé avec
Simone Aughterlony
et Hahn Rowe.
Andréane Roy
LE
public montréalais connaît
Antonija Livingstone grâce
à Culture, Administration
& Trembling (FTA 2014),
A Situation for Dancing
(FTA 2007), à ses collaborations avec
Benoît Lachambre et à ses participations
au festival Edgy Women depuis 1999. En
France et ailleurs, elle se fait connaître
avec son solo The Part (2004), mais surtout
grâce à ses nombreuses collaborations avec
Meg Stuart, avec qui elle danse depuis 2002
(en tournée actuellement avec Sketches/
Notebook).
des échappées, des chemins de traverse, et
j’ai appris à chorégraphier en autodidacte,
sur le terrain. Grâce à un travail intense
auprès du chorégraphe Benoît Lachambre,
qui a été pour moi comme un grand frère,
j’ai pu intégrer ma pratique hybride du
mouvement et apprivoiser différents types
de création collaborative. J’ai été conviée
par Meg Stuart à rejoindre sa compagnie,
en Europe, en 2002. J’ai dansé à la limite de
mes capacités avec Meg, et cette exigence
m’a appris à appréhender le corps comme un
matériau, libéré des carcans des traditions
et du genre.
LE CORPS COMME MATÉRIAU
Qu’est-ce qui vous a poussée à créer vos propres
œuvres ?
Comment la danse contemporaine est-elle entrée
dans votre vie ?
ANTONIJA LIVINGSTONE – Je n’aurais
pas pu faire autre chose. C’était clair dès
le début. J’avais des difficultés à l’école et
un comportement revêche, mais l’étude des
disciplines du mouvement m’attirait parce
que c’était plus direct, cela répondait à mon
besoin de travailler avec mon corps dans
l’espace et le domaine de l’haptique, ce qui
nous dirige forcément vers une autre forme
d’intelligence et d’imagination. J’ai grandi
au sein d’une famille de géologues dans les
mines d’or du Yukon, mais j’ai développé
une dévotion absurde pour le ballet, la
contact improvisation, les arts martiaux et
la danse dans les boîtes gaies. Malgré les
blessures, les échecs et les doutes, la danse,
dans ma vie, est là pour rester. L’éducation
formelle et le milieu institutionnel ne m’ont
jamais réussi. Cependant, j’ai rencontré
des mentors iconoclastes à Vancouver, à
New York et ailleurs. J’ai toujours trouvé
57
A. L. – Ma première création, la performance
solo The Part (2004), était une proposition,
comme un cadeau, destinée à mes chers
collègues Benoît Lachambre, Vera Mantero
et Meg Stuart. Il s’agissait d’exploiter les
clichés du genre et de la représentation,
notamment à travers les figures du père
Noël et de la femme fatale, pour faire surgir
la vie dans toute sa fluidité et sa complexité.
Je joue encore The Part, et c’est toujours un
défi. Je ne cherche surtout pas à reproduire
une forme d’une création à l’autre. J’aime le
travail in situ. Le discours, c’est l’œuvre en
soi qui l’écrit. Elle définit aussi ses propres
lois et critères. Je vois la danse comme une
chose ou comme une composante d’une
chose qu’il est possible d’utiliser pour
produire une transformation. La danse est
présente si elle est expérimentée à travers
le prisme d’autre chose : une recherche du
mouvement, une tâche, un (impossible)
désir, un accident, un remède.
22 | DOSSIER : ACTORAL JEU 160
UNE APPROCHE « CURATORIALE »
Vous avez toujours travaillé de manière
collaborative et vous dites que vous approchez
la chorégraphie comme une pratique de
commissariat – vous employez plutôt le terme
anglais curation, plus évocateur selon vous.
D’où cela vient-il ?
A. L. – J’ai été malade. L’étymologie du
mot curare, duquel dérive le mot anglais
curation, signifie « soumettre à une cure,
guérir, prendre soin ». L’acte d’élaborer
une cure requiert aussi de choisir les
matériaux en fonction de leur qualité pour
développer des recettes et des méthodes.
J’ai eu besoin de traiter mes propres
maladies. J’accorde beaucoup d’importance
au processus. Quelles conditions de
création chorégraphique vont améliorer
ma qualité de vie ? Quelles technologies
et expérimentations peuvent rendre les
gestes « chorégraphiques » ? Je m’engage à
découvrir de la danse dans les choses et les
situations. Alors que commissariat est à la
mode dans le milieu de l’art actuel, je dis
non merci ! J’insiste sur la réappropriation
de curation pour ses bienfaits particuliers.
Je me suis donc davantage intéressée au
concept d’exposition d’une pratique et
au fait de considérer une proposition ou
une étude comme une forme artistique en
soi – inachevée, inachevable, crue. Objet
amateur ou incomplet, peut-être, mais
néanmoins conçu comme tel, délibérément.
Si je choisis de travailler dans ce domaine,
avec tout ce qui vient avec, notamment la
précarité fondamentale du milieu des arts
en général, j’aime en profiter (à entendre
aussi dans un sens non monétaire) lorsque
je performe. Ainsi, j’aime prendre mon
temps et créer de l’espace pour des manières
d’être qui sont importantes ou stimulantes.
C’est aussi ce qui explique pourquoi j’ai
été très soucieuse ces dernières années de
supplanter l’« entreprise spectatoriale »
(business of spectatorship) par une pratique
du témoignage.
Culture, Administration &Trembling
d’Antonija Livingstone, présenté au
FTA 2014, dans une installation de
l’artiste visuelle Dominique Pétrin.
© Stephen Thompson
PRÉSENCES RARES ET DOUCEUR RADICALE
Votre travail ébranle les normes, mais toujours
avec tendresse. La pratique artistique est-elle
pour vous un moyen de préserver des présences
douces ou menacées ?
A. L. – La question de la présence est au
cœur de ma démarche. Qui et comment ?
Quel corps ? Quels rapport et regard
entre les corps sont présents ? Avec quelles
connaissances et ignorances écrit-on,
ensemble ? Comment travailler en détail et
poétiquement les problématiques actuelles,
notamment à travers mon affinité pour
les présences rares et les pratiques en
voie de disparition ? Par exemple, dans
Culture, Administration & Trembling, j’ai
creusé ces enjeux. Les propositions des
collaboratrices, l’artiste visuelle Dominique
Pétrin et la chorégraphe Jennifer Lacey,
ont été essentielles à l’écriture de l’œuvre.
L’écriture de la pièce repose sur cette
collection de pratiques et de remèdes qu’on
« performe » ensemble : plutôt comme
une « manif » (le malebreastfeeding1, par
1. Pour plus de détails sur ce spectacle et les pratiques en question,
notamment le malebreastfeeding, consulter mon article « Le commun,
une utopie ? », paru dans Jeu 157, 2015.4, p. 20-25.
58
exemple). Il est vrai que quelques-uns ont
peur des trois serpents qui manifestent avec
nous – et que certains ont aussi peur du
malebreastfeeding ! –, mais il y a souvent un
effet homéopathique qui opère. Le danger
imaginé est diminué, car le contact se fait
dans une situation très harmonieuse. En
Grèce antique, on attribuait aux serpents
des vertus thérapeutiques : pensons au bâton
d’Asclépios qui demeure un symbole de la
médecine à ce jour. La fraîcheur du corps
des serpents, puis la lenteur et la langueur
avec laquelle ils se meuvent apaisent les
gens souffrant d’épuisement nerveux. Les
serpents nous amènent vers une temporalité
différente. En tournée depuis les dernières
années, j’observe comment Culture,
Administration & Trembling nous touche
et nous soigne tous. Que des gens profitent
du trembling (tremblement), c’est de la vraie
magie !
JEU 160 DOSSIER : ACTORAL | 23
Vos créations travaillent sur le rythme et la durée,
nous entraînant dans un état de contemplation
des corps en présence. Est-ce là une manière
de faire contrepoint au monde dans lequel nous
vivons, où tout s’atomise et s’accélère ?
A. L. – Absolument. Le chaos est le terrain,
et je travaille dans l’extrême simplicité, à
partir du détail, de la qualité sculpturale et
de l’intelligence sensible des corps. Je suis
souvent intéressée par le presque rien. J’ai
l’impression que c’est ce dont nous avons
le plus besoin et que c’est même un geste
très politique que nous pouvons poser
aujourd’hui : prendre soin de cet espace
contemplatif et se donner le temps de le
faire. La douceur radicale est un idéal, mais,
de toute façon, lutter et fêter (danser) vont
souvent ensemble.
SUPERNATURAL
Supernatural, que vous présenterez à l’Usine C
en octobre 2016, est une œuvre que vous signez
avec Simone Aughterlony et Hahn Rowe.
A. L. – Ce spectacle se distingue de mes
autres collaborations en ce que nous avons
bénéficié de ressources substantielles
pendant un long processus en trio. Toutes
les autres pièces que j’ai faites dans ma
carrière ont été réalisées par périodes
intensives très courtes. C’est très précieux
de travailler avec de telles ressources, et le
résultat le prouve bien. Heureusement, on
tourne Supernatural souvent et dans des
lieux très différents, notamment un jardin
français classique, un stationnement à
Los Angeles, un musée à Vienne pour une
durée de six heures... Je suis une artiste tout
terrain, sans doute.
Au cœur de votre démarche, on observe une
autre constante : l’exploration de la thématique
des identités non binaires et le détournement
des stéréotypes. Les théories queer semblent
être une grande inspiration, notamment pour
Supernatural.
A. L. – Il me semble réducteur d’aborder
mon travail du seul point de vue de la
politique identitaire. Le queer est une façon
de vivre, une affinité avec ce qui se trouve en
périphérie. C’est une méthode, un humour
– mais ce n’est pas le sujet de Supernatural
ni de mon œuvre en général. Je veux plutôt
parler de liberté, de transformation. Il serait
trop littéral de dire que Supernatural ne
parle que de sexualité et de déconstruction
des genres. Nous utilisons les corps nus,
comme les autres matières crues, en état de
découverte. La reconnaissance de l’énergie
érotique qui est partout présente nous
permet d’aborder ces sujets sous la forme
d’une proposition postpornographique,
où nous comprenons que les plaisirs sont
omniprésents et multiples.
Qu’y a-t-il derrière le titre Supernatural ? Est-ce
une allusion au paradoxe entre nature et artifice,
comme en témoigne l’installation qui réunit en un
même espace néons, tapis rose bonbon, hache
et bûches de bois ?
A. L. – C’est un rassemblement d’idées
avant tout. Certes, nous avons échangé
autour des ouvrages de Paul (Beatriz)
Preciado, Manifeste contra-sexuel et Testo
Junkie, ainsi que Queer Phenomenology de
Sara Ahmed, pour ne nommer que ceux-là,
mais la question du legs de la sexualité queer,
anarchiste et féministe n’est pas la finalité de
l’œuvre. Le titre provisoire, une proposition
de Simone, était In disguise. Entre les
étapes de création, j’ai passé beaucoup de
temps seule dans les forêts de la ColombieBritannique, entourée de cèdres géants,
et dans ma maison en Nouvelle-Écosse,
au bord de la mer sauvage. C’est naturel,
certes, mais c’est aussi au-delà… Quand on
s’y retrouve, cela nous paraît surnaturel.
59
La question de la
présence est au cœur
de ma démarche.
Qui et comment ?
Quel corps ?
Quels rapport et regard
entre les corps sont
présents ? Avec quelles
connaissances et
ignorances écrit-on,
ensemble ? Comment
travailler en détail
et poétiquement
les problématiques
actuelles, notamment à
travers mon affinité pour
les présences rares
et les pratiques en voie
de disparition ?
– Antonija Livingstone
24 | DOSSIER : ACTORAL JEU 160
60
JEU 160 DOSSIER : ACTORAL | 25
Supernatural de Simone Aughterlony,
Antonija Livingstone et Hahn Rowe,
présenté au festival Actoral à Marseille
(2015) et à Montréal (2016).
Sur la photo : Simone Aughterlony et
Antonija Livingstone. © Jorge León
On est très humble dans ce contexte, mais
surtout pas déguisé. On est plutôt dévoilé,
à nu. J’ai ramené cette idée de titre à mes
collègues. Petit à petit, le développement
conceptuel s’est ouvert à la pensée de Jane
Bennett, auteure du livre Vibrant Matter :
A Political Ecology of Things. En intégrant
ce regard à notre travail, nous avons pris
conscience de l’agencement des différents
matériaux avec lesquels nous jouions et
nous nous sommes interrogés sur leur
résonance et leur présence, au sens de
qualité, vibration et affect. À partir de là,
nous avons inventé ensemble une pratique
physique qu’on appelle new-sociation. C’est
un travail de réorientation des sens et de
déconstruction de la hiérarchie habituelle
des corps et des actions au sein de notre
environnement. Comment la qualité, la
texture et la sonorité d’une chose peuventelles modifier la présence et la disposition
des corps ? Par exemple, quand je fends
du bois avec une hache, ce sont ces objets
qui me « chorégraphient ». Supernatural
témoigne de cette idée selon laquelle nous
faisons partie d’un paysage, qui est à la fois
naturel, artificiel et magique, et que nous
pouvons coécrire ensemble, tout comme
nous pouvons aussi être récrits par lui, nous
tous, à nouveau. •
Andréane Roy détient des baccalauréats
en études théâtrales (Université du
Québec à Montréal) et en littérature
comparée (Université de Montréal).
Elle est candidate à la maîtrise en théâtre
(UQAM). Elle travaille aussi comme
conseillère dramaturgique, auprès,
notamment, de Christian Lapointe
et de Hanna Abd El Nour.
61
26 | DOSSIER : ACTORAL JEU 160
Le centre Montévidéo à Marseille, lieu d’artistes
où est établi le festival Actoral. © Pierre Gondard
DE MARSEILLE
À MONTRÉAL
Pour en savoir plus sur la relation qui unit
Actoral Marseille à Actoral Montréal,
nous avons posé quelques questions
à Hubert Colas, fondateur et
directeur artistique du festival,
et à Danièle de Fontenay,
directrice artistique de l’Usine C.
Christian Saint-Pierre
62
D
anièle de Fontenay a été rapidement
séduite par le caractère transversal
du festival, qu’elle a découvert
en 2012. « Actoral est transversal en ce
qu’il permet la rencontre des écritures
contemporaines dans tous les domaines
des arts, explique la directrice artistique
de l’Usine C, mais aussi en ce qu’il suscite
des maillages artistiques entre des créateurs
issus de champs d’expression fort différents.
Cet événement international réunit des
productions originales et novatrices à la
fine pointe des recherches et des questionnements actuels sur l’art et la notion de
représentation. J’y ai reconnu les mêmes
préoccupations qui animent bon nombre
de créateurs au Québec, ainsi que certains
théâtres, à commencer par l’Usine C. »
JEU 160 DOSSIER : ACTORAL | 27
L’Usine C accueille l’édition montréalaise d’Actoral.
© Pierre Manning
63
28 | DOSSIER : ACTORAL JEU 160
« Tout en restant très attentifs aux formes émergentes,
nous avons pu continuer le compagnonnage avec des artistes
qui avaient fait partie de l’aventure dès le début et qui maintenant
sont reconnus. Nous sommes restés fidèles à cette ligne de développement
des nouvelles écritures
dans tous les domaines
pratiques. Je trouvais important que tous les
Si la directrice artistique a choisi d’accueillir
écrivains – qu’ils écrivent de la littérature,
Actoral, c’est d’abord et avant tout pour
artistiques. »
de la poésie sonore ou des textes pour la
favoriser la diffusion des créations québécoises et canadiennes en territoire
francophone, pour que se produisent des
échanges professionnels avec des créateurs
de la France, de la Belgique ou de la Suisse.
« La relation qui unit l’Usine C et Actoral
est basée sur la confiance et la complicité,
explique-t-elle. Elle nous permet de découvrir
des artistes et de les faire découvrir. » La
directrice précise que la circulation des
productions ou des projets s’opère toujours
sur la base d’un accord artistique, en tenant
compte de la nature du projet et de ses
besoins : « Ça peut être une résidence, comme
celle qui nous relie à L’L à Bruxelles et à
Montévideo à Marseille. Ça peut aussi être la
création d’un texte inédit avec la participation
de la Société des auteurs et compositeurs
dramatiques (SACD). Ou encore des productions déjà créées, qui tournent grâce à
la collaboration du Conseil des arts et des
lettres du Québec. Actoral donne l’occasion
aux artistes québécois de tisser des liens
avec des praticiens dynamiques et novateurs
qui, comme eux, redéfinissent les genres
et les formes de l’art actuel ailleurs dans la
francophonie. Pour le public montréalais,
c’est l’occasion de découvrir de nouveaux
créateurs, et pour notre métropole culturelle
internationale, celle de faire rayonner ses
artistes à l’étranger. »
DE MONTÉVIDÉO À ACTORAL
Actoral est fondé à Marseille en 2000,
dans la continuité de la création du Centre
Montévidéo, qui répondait à la nécessité
pour Hubert Colas d’avoir un lieu pour sa
propre compagnie. « Ce lieu, explique-t-il,
je souhaitais le partager, y inviter d’autres
artistes. Le désir est né d’imaginer un moment où nous puissions réunir les artistes
ayant bénéficié d’une résidence pour qu’ils
présentent leurs projets en cours, des pistes
de travail, des lectures. À l’époque, quelque
chose dans les écritures de théâtre avait besoin
de bouger, il était nécessaire d’ouvrir un lieu
à Marseille qui puisse accueillir ces nouvelles
scène – puissent trouver à Montévidéo un
lieu où se rencontrer et se confronter les uns
aux autres. Nous étions attentifs à de jeunes
artistes qui pratiquaient ce qu’on appelle les
nouvelles écritures scéniques. Montévidéo
était ouvert aux nouvelles formes. Actoral
a été imaginé comme un temps fort ; nous
l’avons renouvelé l’année suivante. »
– Hubert Colas
Rapidement, il est apparu nécessaire d’interroger toutes les formes artistiques. « Le
festival a grandi chaque année, la dynamique
créée à partir de 2007 autour de la
candidature de Marseille au titre de Capitale
européenne de la culture a imposé Actoral
dans le paysage culturel de la ville. Dès les
premières éditions, j’ai souhaité que d’autres
structures locales y soient associées. Depuis,
Marseille a bougé. Actoral s’est posé dans
plusieurs lieux, et le champ du contemporain
est de plus en plus présent dans la ville.
J’en suis très heureux. Tout en restant très
attentifs aux formes émergentes, nous avons
pu continuer le compagnonnage avec des
artistes qui avaient fait partie de l’aventure
dès le début et qui maintenant sont reconnus.
Nous sommes restés fidèles à cette ligne de
développement des nouvelles écritures dans
tous les domaines artistiques. Actoral se
développe maintenant dans d’autres villes,
selon des affinités : à Toulouse, avec Jacky
Ohayon au Théâtre Garonne et Pascal
Papini au Théâtre Sorano ; à Montpellier,
avec Rodrigo García à Humain trop humain ;
et, bien sûr, à Montréal, avec Danièle de
Fontenay à l’Usine C. »
UN STIMULANT COUSINAGE
Hubert Colas parle d’une véritable complicité avec Danièle de Fontenay. « Nous
avons des échanges tout au long de l’année,
précise-t-il. Par exemple, en ce moment,
Marie Brassard est en résidence à Montévidéo
et, dans deux mois, nous accueillons FélixAntoine Boutin. La première édition du
festival à Montréal a été nourrie par une
64
écoute entre les deux continents. Le dialogue
se poursuit, tout en élargissant les perspectives.
Il ne s’agit pas simplement de présenter des
pièces, mais aussi d’accompagner des artistes,
ce qui implique de trouver d’autres lieux de
diffusion que les nôtres pour qu’ils puissent
produire et créer. Cette complicité s’est
d’ailleurs élargie en intégrant L’L, un centre
à Bruxelles qui soutient les artistes émergents.
JEU 160 DOSSIER : ACTORAL | 29
Fire of emotions de Pamina de Coulon, qui sera
présenté à Actoral Montréal en 2016. © Flavie Leleu
Les échanges avec Danièle me permettent
aussi de regarder les choses autrement. »
Le directeur d’Actoral considère qu’il existe
une effervescence toute particulière, spécifique au contexte québécois : « C’est une
énergie qui me fait toujours revenir, continuer ce cousinage, rencontrer de nouveaux
artistes qui joueront avec nous le jeu des cor-
respondances. Ce n’est pas un hasard si Justin
Trudeau a été élu comme premier ministre ! Il
fait partie d’une nouvelle génération qui regarde en face le passé et nomme les choses, et
je pense que ça fera un bien fou au pays et au
monde s’il arrive à mener sa politique économique, culturelle et écologique. L’Europe se
referme sur elle-même, comme s’il n’y avait
plus de projet de civilisation, alors qu’elle
65
était vouée à lancer un élan de générosité, de
préoccupation pour l’humanité. Les artistes
en Europe offrent un reflet de cette situation
et essaient de témoigner d’une certaine inquiétude. Tout ceci se retrouve d’une manière
ou d’une autre dans les formes, les complémentarités, le désir d’ouverture. À Actoral,
à Marseille ou à Montréal, nous sommes en
quête de cela, dans un désir de partage. »
30 | DOSSIER : ACTORAL JEU 160
Howl de Mathias Varenne, qui sera présenté à
Actoral Montréal en 2016. © Mathias Varenne
OUVERT SUR LA FRANCOPHONIE
Hubert Colas explique que la sélection
des œuvres se fait lentement. « Ce sont des
histoires d’accompagnement, précise-t-il.
C’est ce qui donne la texture de chaque édition
d’Actoral. Nous accompagnons Antonija
Livingstone dans sa nouvelle création avec
Nadia Lauro à Marseille et à Montréal, et
nous allons présenter Supernatural, sa pièce
précédente. C’est une façon de déployer son
univers. Antonija sera d’ailleurs en résidence
à Montévidéo en juillet. Nous avons des
fidélités, il s’agit de prendre des risques
et d’accompagner les artistes dans leurs
prochaines créations. »
Depuis quelques années, Hubert Colas
développe des relations avec la francophonie,
de manière à faciliter la circulation des
œuvres : « Outre Montréal, nous travaillons
avec la Suisse et la Belgique. Les artistes
invités ont des écritures scéniques particulières. Je pense notamment à Toshiki
Okada, mais aussi à Théo Mercier, qui est
avant tout un plasticien, ou encore à Kate
McIntosh, qui vient de la performance, tout
comme Miet Warlop. Nous avons imaginé
aussi des événements-rencontres entre deux
artistes autour d’un projet d’une demi-heure,
des préfigurations de futurs spectacles.
L’édition 2016 est également marquée par la
présence de deux monuments de la culture
belge et flamande : Alain Platel et Jan Fabre.
Ce dernier est rarement venu à Marseille. Il
est à la fois plasticien, chorégraphe, metteur
en scène. Ce type de maillage entre artistes
à différents moments de leur parcours
m’intéresse tout particulièrement. »
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« À Montréal, précise Colas, il y aura des
échos de la Belgique, notamment avec la
présence de Salvatore Calcagno, qui est aussi
au programme du Kunstenfestivaldesarts.
Geneviève et Matthieu ont été produits
à Actoral Montpellier, et ils seront à
Montréal en octobre, pour revenir dans un
an et demi à Marseille. Dans le cru 2016,
il y aura aussi Vincent Thomasset, pour la
première fois au Québec, Olivia Rosenthal,
écrivaine qui présente son travail sous la
forme de performances, Pamina de Coulon,
Florian Pautasso, Mathias Varenne, Lorenzo
De Angelis, Fanny de Chaillé, Alexander
Vantournhout et Bauke Lievens. » •
Les propos d’Hubert Colas ont été recueillis
par Smaranda Olcèse.
JEU 160 DOSSIER : ACTORAL | 31
UN ENDROIT OÙ L’ON
VOIT À L’INTÉRIEUR
DES GENS
Guillaume Corbeil et Florian Pautasso
Florian Pautasso dirige
Stéphanie Aflalo dans
Tu iras la chercher,
un monologue de
Guillaume Corbeil sur la
vaste question de l’identité.
Le metteur en scène français
et l’auteur québécois
reviennent sur les tenants
et les aboutissants
de leur rencontre.
Tu iras la chercher de Guillaume Corbeil,
mis en scène par Florian Pautasso
et interprété par Stéphanie Aflalo (Les
Divins Animaux), sera présenté à Actoral
Montréal en 2016, après l’avoir été à
Marseille en 2015. © Philippe Ulysse
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32 | DOSSIER : ACTORAL JEU 160
LES
MÉANDRES
DE LA
PENSÉE
Florian Pautasso
Ce
projet est né d’une commande
que m’a faite Hubert Colas,
directeur du festival Actoral
à Marseille. Il m’a proposé trois textes
de Guillaume Corbeil : Cinq visages pour
Camille Brunelle, Unité modèle et Tu iras
la chercher, le monologue d’une femme aux
prises avec sa perception d’elle-même et de
ce qui l’entoure. L’aspect actif, mouvant de la
langue, à la fois très concret et insaisissable,
et cet autotutoiement déroutant qui rend
incertain l’identité même de celle qui parle
m’ont fait sentir qu’il pouvait se passer
quelque chose entre ce texte et moi.
C’est la perspective de proposer ce
rôle à Stéphanie Aflalo qui a achevé
de me convaincre de choisir Tu iras la
chercher. Guillaume a dédié la pièce à une
comédienne, et je trouve qu’on sent que
ce texte est né d’une fascination. Je suis
moi-même très sensible au travail avec les
actrices ; j’ai plusieurs fois écrit pour elles.
La présence intense de Stéphanie, son esprit
retors, sa sensibilité et son intelligence
m’ont laissé imaginer que sa rencontre avec
cette écriture pouvait se faire avec un certain
éclat. Elle est aussi une artiste entière : elle
est metteure en scène et suit en parallèle des
études de philosophie. J’ai besoin d’avoir
en face de moi un artiste autonome, qui
n’est pas dépendant de moi pour tisser des
liens entre ce qu’il joue et le monde, entre
ce qu’il a à défendre et sa propre intimité.
Elle – c’est le nom du personnage – évolue
dans une confusion de chaque seconde et
remet en question peu à peu tout ce qui
constitue la réalité : le paysage urbain qui
l’entoure, mais aussi ses propres souvenirs,
sa voix, son apparence, son comportement
social. Cette vision du monde, qualifiée de
« dépressive », constamment flottante, qui
la gangrène insidieusement, nous avons
essayé de la faire exister petit à petit et avec
finesse. Il était important pour nous que le
spectateur suive au plus près les méandres
de la pensée de cette femme, même
lorsqu’elle frôle la folie, sans pour autant
la juger. L’interprétation est donc fragile,
évoluant sur un fil ténu, dans une étrangeté
latente.
Le texte réveille une série de questions liées
à ce qui constitue l’identité. Suis-je unique ?
Ou suis-je la somme de multiples héritages
assemblés ? Est-il possible d’être conforme
à ce que l’on souhaiterait être ? Ce que je
souhaite être, est-ce vraiment moi qui le
souhaite ? Et puis, qui suis-je ? Le vertige
de cette question tient aussi à l’angoisse
qu’il n’y ait en réalité personne en coulisses
derrière ce moi-noyau. Qu’en est-il de moi,
68
une fois ce moi dépossédé de sa voix, de ses
gestes, de ses émotions, de ses souvenirs, et
du pouvoir de ne pas douter ? Qu’en est-il
de moi une fois ce moi vidé de tout ce qui
le fondait et permettait de le reconnaître
comme tel ? Ce sont d’ailleurs, entre autres,
les problématiques identitaires similaires
à celles que rencontre l’acteur qui ont
intéressé Stéphanie dans ce texte. Au cours
des répétitions, elle me parlait beaucoup du
film Inland Empire de David Lynch.
UNE FEMME EN LUTTE
La femme de Tu iras la chercher est en
perpétuelles action et interaction avec le
monde social, et, pourtant, c’est sa parole
intérieure qu’on nous donne à entendre.
Quand Elle parle, elle peine à se reconnaître.
JEU 160 DOSSIER : ACTORAL | 33
Tu iras la chercher de Guillaume Corbeil, mis en
scène par Florian Pautasso. © Philippe Ulysse
Il était important pour nous que le spectateur
suive au plus près les méandres de la pensée
de cette femme, même lorsqu’elle frôle la folie,
sans pour autant la juger.
L’interprétation est donc fragile,
évoluant sur un fil ténu,
dans une étrangeté latente.
– Florian Pautasso
Sophie Van Everdingen, subtils échos de
souffles et de synthétiseurs, ainsi que les
reflets lumineux verdâtres fluctuant dans
l’étendue du plateau éclairé par Philippe
Ulysse viennent aider à faire basculer
imperceptiblement la représentation dans un
autre degré de réalité, plus mystérieux, à la
fois introspectif et transcendantal, puisqu’il
s’agit pour le protagoniste d’une fusion
d’un instant avec ce qu’on pourrait appeler
l’image de son idéal.
Agir conformément à ce qu’on attend d’elle
lui est difficile. Dans ses pensées, elle est
au cœur de questionnements existentiels et
tente d’apparaître aux yeux des autres de la
manière la plus convenue. Elle lutte pour que
son apparence ne pose pas de problème, alors
qu’intérieurement des problèmes cruciaux
se posent, et violemment. Le théâtre, c’est ce
lieu là, à la fois un lieu de société, et en même
temps un endroit où l’on voit à l’intérieur
des gens, où l’on dit à voix haute ce qui reste
emmuré dans un contexte social. C’est de là
que je tire la force théâtrale du texte.
Je souhaitais que la traversée mentale et
les chemins tortueux que cette femme
emprunte soient au premier plan, soient ce
à quoi le spectateur assiste. Ainsi, les effets
visuels et sonores ont été pensés pour porter
l’interprète, et teinter légèrement l’ambiance.
L’espace duquel parle cette femme ne pouvait
pas être clairement identifiable. J’ai préféré
disposer un certain nombre d’éléments
évocateurs : un espace réduit en panneaux de
liège, des objets symboliques reliés par des
fils épinglés, une grosse lampe industrielle
braquée au-dessus de la tête de l’interprète.
J’avais en tête un imaginaire policier et
psychiatrique, comme si cette femme
enquêtait sur elle-même, tentait d’établir
le profil psychologique d’une personne
recherchée à l’aide d’une série d’indices. Et
c’est bel et bien ce qui se passe dans la pièce :
il s’agit d’une traque.
Au moment où la femme s’approche de
son but et où le trouble de la personnalité
s’accentue, l’environnement sonore de
69
Au festival Actoral, à Marseille, nous avons
présenté une forme d’une trentaine de
minutes. Montréal sera pour nous l’occasion
de présenter une deuxième version plus
longue, et, par la même occasion, d’oser
davantage. •
Florian Pautasso est comédien,
auteur et metteur en scène. Il dirige
la compagnie Les Divins Animaux,
au sein de laquelle il a monté ses textes,
dont Show funèbre à 7 voix. Il a également
créé des spectacles écrits « au plateau »,
comme Quatuor Violence et Flirt.
Sa prochaine création, Notre foyer,
est prévue pour 2018.
34 | DOSSIER : ACTORAL JEU 160
Tu iras la chercher de Guillaume Corbeil, mis en scène
par Sophie Cadieux et interprété par Marie-France
Lambert (Espace GO, 2014). © Caroline Laberge
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JEU 160 DOSSIER : ACTORAL | 35
UN LABYRINTHE
D’IMAGES,
DE DOUBLES
ET DE MÊMES
Si le cinéma fige sur la pellicule la version
parfaite d’une scène, d’une histoire, le théâtre
permet de faire coexister de multiples versions
d’un être, d’une scène, d’une émotion… En fait,
non seulement il le permet, mais c’est sa nature.
– Guillaume Corbeil
Guillaume Corbeil
Il
est toujours étrange de s’asseoir
dans une salle pour recevoir un texte
qu’on a écrit dans une mise en scène
à laquelle on n’a pas participé. On débarque
de l’avion, on dort un petit peu pour se
remettre du décalage horaire et nous voilà
assis dans un théâtre qu’on ne connaît pas,
devant un décor qu’on n’a jamais vu de sa vie.
Cette fois, je suis à Marseille, au festival
Actoral. Hubert Colas et la Société des
auteurs et compositeurs dramatiques (SACD)
ont arrangé un mariage entre le metteur en
scène Florian Pautasso et moi autour de Tu
iras la chercher. Dans une petite boîte en
liège, l’actrice entame le spectacle. « Tu es
là / Le dos droit / Les bras de chaque côté
du corps. » Si je reconnais les mots qu’elle
dit, mon texte me paraît aussi étranger. Il
y a peut-être le fait que Stéphanie Aflalo,
l’actrice, est beaucoup plus jeune que MarieFrance Lambert, qui a interprété Elle lors
de la création à Espace GO. Il y a aussi la
mise en scène, qui éclaire certains passages
de nouvelles façons, qui crée un nouveau
rythme, qui nous donne à entendre une
nouvelle musique, un nouveau sens…
Ce sont les mêmes mots, mais je jurerais
entendre un tout autre texte.
C’est cette idée qu’on avait explorée, Sophie
Cadieux et moi, la première fois qu’on avait
présenté ce monologue. Il s’agissait d’une
série de quatre lectures, avec quatre actrices
différentes, dans quatre lieux d’Espace
GO : quai de déchargement (Marie-Pier
Labrecque), vestiaire (Monia Chokri), salle de
conférence (Sophie Vajda) et salle de répétition
(Sophie Cadieux). Épaulée par Gaétan Paré,
chacune mettait en scène son monologue.
Après l’événement, plusieurs spectateurs
nous ont avoué être convaincus que le texte
présentait des différences d’une version à
l’autre : certains passages auraient été coupés
ici, d’autres auraient été ajoutés là… En vérité,
c’étaient toujours les mêmes mots. Il y a là,
je trouve, le sens même de l’interprétation :
la partition a beau être identique, l’actrice,
en se l’appropriant, crée une nouvelle œuvre.
La manière dont elle s’y prend, sa voix, son
intelligence émotive, tout ça ne modifie pas
seulement la mise en scène, mais le sens du
texte et, avec lui, l’histoire qui est racontée.
Ce qui m’a particulièrement plu dans cette
expérience, c’est qu’elle vient répondre à
la problématique de Tu iras la chercher. Le
personnage d’Elle se sent prisonnière des
évidences et en vient à se demander comment
exister en tant que sujet dans un labyrinthe
d’images, de doubles et de mêmes. Ne
sommes-nous pas tous la répétition d’une
seule et même personne ? s’interroge-t-elle.
Oui, notre expérience du monde est
standardisée par un lot de modèles qu’on
nous donne à rêver, mais en interprétant le
monde, comme une actrice son texte, nous
révélons notre singularité.
UN AUTRE ÊTRE POSSIBLE
Quand Sophie est passée de l’autre côté de la
table pour mettre en scène mon texte, avec
Marie-France Lambert dans le rôle d’Elle,
nous avons cherché une façon d’utiliser
le fruit de notre petit laboratoire. Sur la
page privée Facebook qui nous servait de
lieu de discussion, l’idée nous est venue de
reprendre le texte, c’est-à-dire de le jouer
deux fois. Ginette Noiseux, directrice
artistique de GO, a d’abord cru que nous
plaisantions, mais, bien vite, elle a compris
notre sérieux et nous a laissés aller. MarieFrance Lambert, quant à elle, a demandé
si, dans ce cas, elle pouvait avoir un cachet
double, et nous lui avons dit non. Lors des
premiers enchaînements, l’actrice n’avait
aucune difficulté à jouer le texte une
première fois. En entamant la reprise, des
mots lui échappaient et elle inversait des
passages. Elle venait pourtant de réciter
son monologue sans aucune difficulté – elle
71
connaissait le texte. Mais la répétition le
faisait changer. Comme si elle ne reprenait
pas la première scène, mais devait en
apprendre une nouvelle.
À Marseille, dans mon fauteuil, dans une des
salles de la Friche la Belle de Mai, ce n’est
pas une autre facette de mon personnage que
je découvre, mais un autre être possible. Les
vêtements et la coiffure sont les mêmes, la
femme qui est dedans est autre. Pendant la
représentation, je m’émerveille de certains
détails : « C’est vrai, elle peut être comme
ça, aussi. » Je vais souvent voir et revoir mes
spectacles et, chaque soir, j’espère assister à la
représentation parfaite, à celle où il n’y aura
pas d’erreur, où le rythme sera soutenu. Je
pourrai alors l’enregistrer dans ma mémoire
et me dire : ça y était, c’était ça. L’expérience
des reprises me fait réaliser que le spectacle
se trouve en vérité dans la somme de tous les
possibles. Si le cinéma fige sur la pellicule la
version parfaite d’une scène, d’une histoire,
le théâtre permet de faire coexister de
multiples versions d’un être, d’une scène,
d’une émotion… En fait, non seulement il le
permet, mais c’est sa nature. Dans la mise en
scène de Florian, on ne joue le texte qu’une
seule fois. Mais, en regardant le spectacle,
je le fais dialoguer avec tous les autres que
j’ai vus. Et si toutes ces Elle font la même
chorégraphie sur un plancher de danse
sociale, elles sont toutes uniques. •
Diplômé en écriture dramatique à l’École
nationale de théâtre, Guillaume Corbeil
a écrit un recueil de nouvelles, L’Art de la
fugue (L’instant même, 2011), un roman,
Pleurer comme dans les films (Leméac,
2009), une biographie du metteur en scène
André Brassard (Libre Expression, 2010)
et une relecture de contes de fées,
Trois princesses (Quartanier, 2016).
Pour la scène, il a écrit : Nous voir nous
(Cinq visages pour Camille Brunelle),
Tu iras la chercher et Unité modèle.
36 | DOSSIER : ACTORAL JEU 160
Vincent Thomasset
inaugure Médail Décor
en tentant d’expliquer
au public comment
il en est arrivé là. Il
parle très vite et bouge
beaucoup. Ce texte
est la retranscription
approximative,
d’après vidéo, de cette
séquence improvisée.
L’auteur, metteur en
scène et comédien a
choisi de garder la
structure chaotique et
les fautes de syntaxe
inhérentes à ce type
d’exercice.
L’ARRIVÉE
AU
THÉÂTRE
Vincent Thomasset
Je
vais essayer de vous dire un peu
comment j’en suis arrivé là, aujourd’hui, à faire le spectacle qui va suivre
devant vous. C’est toute une période qui a
précédé, qui pourrait s’appeler : « L’arrivée au
théâtre ». Vous allez comprendre comment.
Forcément, si je remonte le plus en arrière
possible, ça a commencé avec les premiers
mots, peut-être, que j’ai entendus. Souvent,
les premiers mots que j’ai entendus, quand
j’étais gamin, c’était avant de m’endormir.
On me chantait : « Plafond monsieur ici
voilà. » Après, du coup, je me suis mis...
Faut pas que j’aille trop vite... Mais je
vais aller vite quand même. Après, je me
suis mis à lire. Je me suis mis à lire, j’ai lu
beaucoup d’histoires, jusqu’au moment où
je suis tombé sur l’histoire qui a forcément
influencé mon travail.
Médail Décor de Vincent Thomasset,
qui sera présenté à l’Usine C à
l’automne 2016, à l’occasion d’Actoral.
Sur la photo : Lorenzo De Angelis.
© Julie Balagué
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JEU 160 DOSSIER : ACTORAL | 37
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38 | DOSSIER : ACTORAL JEU 160
Tout de suite, j’ai su que je ne voulais pas faire de théâtre.
Je me suis dit que je devais attendre d’en avoir vraiment envie.
Parce que, je voyais bien, mes amis metteurs en scène, chorégraphes,
ils devaient trouver de l’argent, c’était beaucoup d’énergie,
faut avoir des amis qui travaillent gratis,
tout ça, plein de choses, et puis,
quand tu trouves de l’argent, bien, il ne faut pas te planter,
alors souvent, tu utilises de bonnes vieilles recettes.
J’avais 12 ans, je lisais Poil de carotte,
quand j’ai pris le bouquin interdit dans la
bibliothèque de mes parents : ça s’appelait
Treblinka. Treblinka, c’était quoi ? Ben
c’était Treblinka, Seconde Guerre mondiale.
En fait, je me rappelle d’une scène. Je
m’en suis rappelé, il y a quelques années,
quand j’ai commencé à faire mon boulot.
Je me disais : mais pourquoi, lorsque je
vois des spectacles, j’aime bien rentrer
dans les histoires, partir loin, et, en même
temps, je ressens le besoin de toujours voir
comment ça se construit tout ça ? Donc,
dans Treblinka, il y a une scène dont je me
souviens, c’est l’arrivée en gare de Treblinka.
Tu peux arriver de deux façons à Treblinka,
soit tu sais que t’es mal barré, tu devines a
priori comment tout ça va continuer, soit
tu penses arriver en pays neutre, avec les
valises et cætera. Pour rationnaliser les flux,
ils avaient construit une gare, une fausse
gare, un décor de gare, Médail Décor, avec
de vraies fleurs, une fausse horloge... Du
coup, les gens descendaient plus ou moins
sereinement, après, c’était la suite. De
l’usage de la fiction !
PAR ACCIDENT
Ces choses-là, ça a forcément influencé mon
métier. Ensuite, je me suis mis à écrire. J’ai
vraiment écrit, mais écrit pour moi, genre
poète maudit. J’étais artiste romantique, tout ce
que j’écrivais était hyper important, je voulais
mourir fou et cætera, et cætera. Je ne savais pas
ce que je voulais faire de ma vie. Je suis tombé
en dépression, pour ça et X raisons. Résultat,
je me suis retrouvé en classe préparatoire
littéraire, un truc pour l’élite, mais j’étais pas
vraiment l’élite. Je me suis cassé la gueule. Je
n’étais pas surdoué du tout. Je ne savais pas
ce que je voulais faire. Et là, je suis sorti avec
une fille qui faisait du théâtre. Du coup, j’ai
découvert le théâtre par accident.
Après, qu’est-ce qui s’est passé ?... J’ai voulu
faire du théâtre. Donc, ça a commencé à
me sortir de la dépression, de vouloir faire
du théâtre, de vouloir aller quelque part.
J’ai voulu faire du théâtre, j’ai présenté
les concours, que je n’ai pas eus. J’ai fait
beaucoup de petits boulots, six, sept années,
huit années de petits boulots. J’ai écrit des
textes, pas mal de textes. Je suis sorti petit
à petit du romantique, ça s’est déplacé
sur la fiction, un petit peu, j’ai écrit des
monologues, je ne les ai jamais sortis, je ne
les sortirai certainement jamais. Il y avait La
Femme aux trous, L’Homme aux lunettes,
des trucs comme ça, l’homme qui avait peur
des mots avec des lunettes pour voir flou...
Je n’ai pas réussi les concours. Qu’est-ce que
j’ai fait ? Je suis allé voir des spectacles, je me
suis formé « à l’école du regard ».
En tant que spectateur, je ne me suis pas
dit que j’allais faire artiste, chorégraphe,
metteur en scène et tout ça. Non, pas du
tout. En même temps, je me projettais
dans plein de choses, jusqu’au moment
où... Alors d’abord, avant tout, oui, il y a
eu ce metteur en scène que j’ai rencontré,
un auteur et metteur en scène à qui j’avais
filé mes textes. Il m’a dit : « Ah, c’est pas
mal, tout ça, viens faire des stages. » J’ai fait
des stages, j’ai bossé professionnellement
grâce à ça. Après, parallèlement à ça, à
mon expérience de spectateur, j’allais voir
du théâtre, j’étais fasciné par comment ça
marche tout ça, la machine, les comédiens et
74
plein de choses. Petit à petit, j’ai bifurqué.
J’ai eu de grands rendez-vous avec le
théâtre, mais j’ai bifurqué. Au théâtre, trop
souvent, on voulait me « parler des choses »
– la guerre, l’amour, la mort, par la mise en
scène, le texte, et cætera –, alors, du coup, je
suis allé voir de plus en plus de danse, d’arts
plastiques. Là, au moins, dans ce que j’allais
voir, je pouvais plus facilement me faire mon
propre chemin. Jusqu’au moment où j’ai
appris que, dans un Centre chorégraphique
national, il y avait un concours qui n’était
pas réservé aux jeunes, donc je l’ai passé à
33 ans. Je suis rentré là-dedans, j’en ai 40
aujourd’hui, je suis rentré là-dedans et j’ai
commencé à faire mes propres expériences.
C’est quoi mes propres expériences ? Tout
de suite, j’ai su que je ne voulais pas faire de
théâtre. Je me suis dit que je devais attendre
d’en avoir vraiment envie. Parce que, je
voyais bien, mes amis metteurs en scène,
chorégraphes, ils devaient trouver de l’argent,
c’était beaucoup d’énergie, faut avoir des
amis qui travaillent gratis, tout ça, plein de
choses, et puis, quand tu trouves de l’argent,
bien, il ne faut pas te planter, alors souvent,
tu utilises de bonnes vieilles recettes. J’ai
préféré prendre le temps de créer mes propres
outils. Surtout, j’ai attendu d’avoir envie de
faire des spectacles. Du coup, qu’est-ce qui
s’est passé ? J’ai passé plein d’années, non
pas à me planter, quoique... ! En tout cas,
j’ai fait plein de performances, j’appelais ça
des « expositions ». J’avais cherché ça dans le
Dictionnaire historique de la langue française
d’Alain Rey, c’est un super bouquin. Je vous le
dis parce que vraiment, c’est super, il n’y a pas
tous les mots, mais il y a les « mots racine », et
j’avais cherché le mot « exposition ».
JEU 160 DOSSIER : ACTORAL | 39
J’ai préféré prendre le temps de créer mes propres outils.
Surtout, j’ai attendu d’avoir
envie de faire des spectacles.
EXPOSITIONS
Les expositions, c’est super intéressant.
D’abord, c’est l’exposition d’une œuvre,
et moi, pendant les deux, trois premières
années, j’ai travaillé sur les débuts, les prédébuts des pièces. Donc, « exposition d’une
œuvre », après, ça voulait dire « abandonner ».
Par exemple, lorsque tu « exposais ton
enfant », à je ne sais plus quel siècle, ça
voulait dire que tu l’abandonnais, au seuil de
l’église, de la forêt, tu l’abandonnais, grosse
métaphore de la création ! Après, c’était
« l’exposition d’un bâtiment », sud, est et
ouest. Il s’avère que je faisais, je disais que je
faisais des Topographies des forces en présence, donc c’était parfait, le lieu, l’endroit dans
lequel tu t’inscris. Enfin, plus récemment,
c’est « l’exposition d’une marchandise »,
offre et demande. Là, ben c’est ça, vous êtes
là, je suis là, on peut pas s’en extraire, de
l’offre, de la demande et, voilà, marchandise !
Bref, ensuite, qu’est-ce que je voulais dire ?
Donc, qu’est-ce que j’ai fait ?... J’ai écrit
un texte, c’est le premier que j’ai écrit :
Topographie des forces en présence. C’était le
nom générique des performances, je le faisais
dire par un logiciel de reconnaissance vocale
pendant qu’on faisait des trucs physiques sur
le plateau, ou plutôt dans des endroits plus
ou moins improbables.
Ensuite est arrivé le jour où j’ai eu envie de
faire des spectacles. C’était en 2011. J’en
avais marre de convoquer les gens pour
voir des objets dont j’étais plus ou moins
content. Je voulais aller plus loin, être
capable de reproduire les choses. Dans Sus
à la bibliothèque !, il y avait un chœur, et
ça, c’était hyper bien. Après le logiciel de
reconnaissance vocale, travailler avec un
chœur, ça permettait d’aller plus loin, sans
forcément tomber dans les problématiques
de théâtre, savoir comment jouer, et caetera.
C’était bien. J’étais avec Lorenzo, le danseur
qui portait un anorak parce qu’on répétait,
en général, dans des lieux qui étaient hyper
froids. Du coup, je me suis dit que c’était
bien pratique, ça lui permettait d’échapper
au public tout en restant sur le plateau...
Sus à la bibliothèque !
de Vincent Thomasset
(2011). © Ilanit Illouz
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40 | DOSSIER : ACTORAL JEU 160
C’était mon premier spectacle, mais
quand même ! Après le chœur, c’était une
reprise d’équitation. J’avais fait beaucoup
d’équitation, c’est un art martial, dresser son
cheval pour la bataille. Ça me permettait de
mettre en jeu les rapports de force que j’avais
connus en travaillant en tant qu’acteur. En
tant qu’interprète, je savais ce que c’était
que de bosser pour un metteur en scène,
devoir se fondre dans le désir du metteur en
scène, je trouvais ça pas mal de ramener ça à
l’équitation.
Ensuite, c’étaient Les Protragronistes, la
deuxième pièce. Après le logiciel de reconnaissance vocale, le chœur, je passe en mode
lecture. Les « protragronistes » ont disparu,
je me retrouve seul. Lorenzo enlève enfin son
anorak et finit par jouer avec une chambrière,
un long fouet, pendant que je me protège
derrière une botte de paille. Le troisième
épisode, c’est quoi ? Petit à petit, j’arrive
au théâtre, je commence même à apprendre
des textes par cœur. On se retrouve juste
Lorenzo et moi, le chœur a disparu, et là,
vous allez voir, une espèce de groupe, de
communauté qui arrive... Et puis, Médail
Décor, c’est le magasin de mon grand-père,
après la guerre, la Seconde Guerre mondiale.
Époque trouble, passé trouble, je vous le dis
là, mais j’en dis pas plus que ça. Voilà ! •
Les Protragronistes de Vincent
Thomasset (2012). Sur la photo :
Lorenzo De Angelis.© Ilanit Illouz
Depuis 2011, Vincent Thomasset a créé une série de spectacles
intitulée La Suite : Sus à la bibliothèque !, Les Protragronistes et
Médail Décor. En 2013, il crée Bodies in the Cellar à la Ménagerie
de Verre (Paris). En 2015, il adapte pour la scène les
Lettres de non-motivation de Julien Prévieux, puis reprend
l’intégralité de La Suite au Centre Pompidou à l’occasion
du Festival d’automne à Paris.
76
JEU 160 DOSSIER : ACTORAL | 41
Pour nous faire découvrir sa démarche, entrer dans sa vision du monde,
Salvatore Calcagno a opté pour l’autoportrait. Depuis le plateau de sa
nouvelle création,
Io sono Rocco,
le metteur en scène
s’est entretenu...
avec lui-même.
Io sono Rocco de
Salvatore Calcagno
sera présenté à
l’Usine C en 2016
à l’occasion du
festival Actoral.
Sur la photo :
Chloé de Grom.
© Michel Boermans
Je suis
Rocco
Salvatore Calcagno
77
42 | DOSSIER : ACTORAL JEU 160
Je me suis rêvé
metteur en scène
pour pouvoir toucher
à tout en même
temps. Jouer et
danser à travers
le corps de mes
performeurs, les
mettre en lumière,
en costumes, en
musique…
La Vecchia Vacca de Salvatore Calcagno,
présentée à la Chapelle à l’hiver 2015. Sur la
photo : Coline Wauters. © Michel Boermans
« Création »... On peut dire que
le mot résonne intensément pour moi, ces
dernières semaines. Je suis « en plein dedans »,
comme on dit. On est en plein dedans.… Ce
« on » très fort qui est l’une des raisons pour
lesquelles j’ai commencé à faire du théâtre
(ou, du moins, pour lesquelles j’ai continué).
« On », c’était aussi mon amie Émilie
Flamant, comédienne, et moi, notre décision
commune d’en faire un métier, et toutes les
collaborations qui ont suivi, renforçant plus
encore notre amitié. Le théâtre : avant tout
une histoire de rencontres…
Je suis entré à l’Institut national supérieur
des arts du spectacle et des techniques de
diffusion (INSAS) à 18 ans ; j’étais le plus
jeune de ma promotion. Mais ce retard à
rattraper (je peux le dire aujourd’hui : je ne
connaissais du théâtre que mes instincts), je
crois l’avoir transformé en hypercuriosité,
en hyperéveil à tout ce que l’école et les
autres pouvaient m’apporter. Des salles de
théâtre, je connaissais essentiellement ce qui
était dans le programme scolaire et quelques
précieux livres, prêtés par mon professeur.
Aux examens d’entrée de l’INSAS, j’avais
glissé au jury un convaincant « J’apprends
vite », sur lequel j’ai toujours voulu tenir
mes promesses. J’ai grandi en même temps
que ces années d’école... jusqu’à la création
de mon projet de fin d’études, La Vecchia
Vacca, avec lequel on a tourné, notamment
à Montréal, à la Chapelle.
Aujourd’hui, quatre ans après ma sortie, je
monte mon troisième spectacle, Io sono
Rocco, qui sera présenté pour la première fois
les 26, 27 et 28 mai au Kunstenfestivaldesarts.
Il est la suite logique du travail entamé plus
tôt. Au fur et à mesure des années, ma
recherche (qui a commencé dans l’enfance,
je crois, alors que j’étais fasciné par les
spectacles de fin d’année du cours de danse
de ma grande sœur) s’est concrétisée. Depuis
Gnocchi (ma première forme, présentée à
l’école, où il était question d’un « inceste
culinaire », comme j’aime à en reprendre la
formule), je construis une à une les pièces
d’un puzzle plus grand, qui serait une
sorte d’« explosion », de « condensé » de
recherches, d’obsessions, de fantasmes. Par
« obsessions », j’entends images, lumière,
rythme, couleurs... Je me suis rêvé metteur
en scène pour pouvoir toucher à tout en
même temps. Jouer et danser à travers le
corps de mes performeurs, les mettre en
lumière, en costumes, en musique…
Je n’ai pas de superobjectif à atteindre tout
au bout, de « super-spectacle-consécration ».
Il s’agit plutôt d’une lumière qui guide,
découvre peu à peu des zones d’ombre et en
plonge d’autres dans le noir ; le voyage étant
finalement plus important que la destination.
C’est un risque qui m’excite de plus en plus
et avec lequel je flirte manifestement dans
Io sono Rocco, où, par exemple, je travaille
pour la première fois avec un danseur et
une chanteuse d’opéra. Même si, dans cette
recherche, je décline à nouveau des éléments
qui me sont chers, comme la question de
la maternité au cœur de La Vecchia Vacca,
l’érotisme du Garçon de la piscine ou encore
les tomates de Gnocchi…
78
JEU 160 DOSSIER : ACTORAL | 43
Le titre du spectacle, Io sono Rocco (« Je suis Rocco »),
comme réaffirmation du moi (et par là du « nous »)
peut d’ailleurs faire écho à la déferlante
« Je suis Charlie » ou « Je suis Bruxelles ».
C’est marrant, il y a presque quelque chose
de schizophrène dans le fait de dire « Je suis »…
IO SONO ROCCO
Io sono Rocco, c’est d’abord la redécouverte,
quelque temps après le décès de mon
père, de ses vinyles d’Ennio Morricone.
Depuis l’enfance, je suis fasciné par les
vieux westerns, la retenue – et l’explosion
à la fois – de sentiments très forts, qui se
manifestent à travers le lyrisme des paysages
ou des hardes de chevaux qui galopent. C’est
incroyable comment, à travers des histoires
finalement très simples, la tension peut être
maintenue des heures durant… Et puis la
puissance évocatrice de la musique est assez
incroyable ! Sergio Leone a construit certains
de ses films en partant de la musique et non
l’inverse, comme cela se fait habituellement.
La musique guide, structure le film, comme
s’il s’agissait d’un « opéra muet ».
On dit de mon théâtre qu’il est cinématographique ; je n’ai jamais caché mes
références (Fellini pour la folie de ses
personnages ou encore Visconti, qui justifie
mes obsessions). Pour faire travailler les
acteurs – comme pour mettre en espace à
proprement parler –, j’utilise très souvent
l’idée de caméra. Les personnages du Garçon
de la piscine, par exemple, répondaient dans
la première scène aux questions imaginaires
et inaudibles d’une caméra. Dans Io sono
Rocco, je me sers essentiellement de l’idée de
caméra pour le jeu sensible des acteurs. Je dis
à la comédienne : « Là, la caméra zoome sur
ta main qui balaie tes cheveux », ou encore
« Lorsque tu marches, la caméra te suit en
travelling dans un parking désaffecté et le
son de tes talons aiguilles résonne. »
De la même manière, j’ai choisi de partir
de la musique pour créer un « chapitre
chorégraphié (et fantasmé) de mon journal
intime », dont le cœur dramaturgique serait
la question du deuil après une mort ou une
séparation. Lorsque j’ai réécouté pour la
première fois ces disques, j’ai eu une sensation
très étrange. D’un coup m’est revenu en
mémoire le silence très particulier qui a suivi
le décès de mon père. Les gens étaient en
mouvement, partaient ou arrivaient, mais
dans un silence que je n’oublierai jamais.
C’était comme si, pour la première fois, je
pouvais entendre, sentir, et même saisir le
silence. Dans Io sono Rocco, c’est l’un des
axes sur lesquels nous travaillons. Sur le
plateau, les êtres se mouvant silencieusement
(mais, paradoxalement, accompagnés de
musique) semblent suspendus dans le temps.
Du western, je n’emprunte pas les
histoires, mais les codes, les archétypes
(des personnages très définis, presque
caricaturaux, drôles sans que ce soit du
ressort de la comédie). Puis quelque chose de
l’ordre de la catharsis aussi, je crois… Dans
les westerns, il y a toutes ces choses tentantes
mais impossibles (ou du moins déconseillées)
dans la vie : la division du monde entre bons
et mauvais, l’idée de vengeance qui efface
tout. Io sono Rocco, c’est l’histoire de la Mort
(avec une majuscule ; elle sera interprétée par
Chloé de Grom, comédienne dans tous mes
spectacles) qui s’invite à la table de Rocco ;
et de Rocco qui décide de la défier, dans un
duel qui devient presque amoureux. En cela,
je pense que le spectacle est politique, ou en
tout cas au cœur de l’actualité. La mort prend
plein de formes différentes : elle s’insinue
79
tantôt sournoisement, sous un déguisement,
tantôt avec le visage de l’horreur… C’est un
peu comme si, aujourd’hui, j’avais besoin
de dire : « On n’a pas peur, on est plus forts,
on va continuer à vivre et à avancer. » Ici, ce
besoin se concrétise à travers les traits d’un
héros. La scène comme possibilité de créer
celui à qui on aurait dû penser avant, celui
dont le dessein – et non des moindres – est
de « tuer la mort ». S’il y arrive, sera-t-il libre
et, si oui, à quel prix ?
Le titre du spectacle, Io sono Rocco (« Je suis
Rocco »), comme réaffirmation du moi (et
par là du « nous ») peut d’ailleurs faire écho
à la déferlante « Je suis Charlie » ou « Je suis
Bruxelles ». C’est marrant, il y a presque
quelque chose de schizophrène dans le fait
de dire « Je suis »… Le deuil, c’est aussi cette
nécessité d’un nouveau départ, ce besoin
de renaissance, cette pulsion de vie. Je suis
toujours émerveillé qu’à un décès dans une
famille équivale souvent une naissance. A-ton toujours besoin de voir la mort pour
regarder la vie ? Cette pulsion de vie ne
pouvait être, selon moi, incarnée que par un
danseur, car la danse a ce pouvoir de raconter
avec force les états – sans les mots, mais en
les vivant et, par là, en les dépassant presque.
Parallèlement, il y a comme une volonté de
ne « pas prendre position », possibilité que
m’offre la danse… Puis aussi ce truc où le
corps dit : « Je t’apprivoise... »
44 | DOSSIER : ACTORAL JEU 160
Io sono Rocco de Salvatore Calcagno.
Sur la photo : Axel Ibot et Chloé de Grom.
© Michel Boermans
80
JEU 160 DOSSIER : ACTORAL | 45
Dans mes précédents spectacles, je faisais
déjà danser le corps de mes comédiens ; ici,
je fais jouer Axel Ibot, danseur. Dans mon
travail, il est question de gestes quotidiens
comme puissants révélateurs des émotions,
de qui on est. Quid d’une cigarette dans Le
Garçon de la piscine ou de tartines beurrées
à vive allure dans La Vecchia Vacca ? Pour Io
sono Rocco, les mots sont lâchés : pantomime,
mimodrame. C’est une forme idéale, qui
non seulement engage le corps, mais peut
être vecteur de rire, de poésie et d’absurdité.
J’adore créer et montrer l’absurdité au
théâtre. Le rire est très important pour
moi : ça met ensemble, ça libère et, en même
temps, ça fait réfléchir.
ICI ET MAINTENANT
Travailler avec un danseur (et la chanteuse
lyrique Elise Caluwaerts) est l’une des
raisons pour lesquelles j’évite le plus
possible de parler de « spectacle » quand
je parle de Io sono Rocco. Pas parce que
ce n’en est pas un ou pour justifier une
quelconque faiblesse, mais parce qu’il
s’agit d’une recherche et que je souhaite
l’assumer comme telle, jusque dans la façon
dont cette recherche sera (concrètement)
mise en lumière. Je veux qu’on soit dans
l’ici et maintenant, et que tout serve cet
ici et maintenant (le mette en évidence, le
magnifie…), ce qui n’était pas le cas dans
mes spectacles précédents, où je faisais
surgir beaucoup de temps et d’espaces
différents de ceux de la représentation. Cela
n’enlève rien à l’idée de voyage qui m’est
très chère, mais le présent de la performance
est capital.
Dans mon travail, il est question de
gestes quotidiens comme puissants révélateurs
des émotions, de qui on est. [...]
Pour Io sono Rocco, les mots sont lâchés :
pantomime, mimodrame.
C’est une forme idéale, qui non seulement
engage le corps, mais peut être vecteur de rire,
de poésie et d’absurdité.
En ce moment, nous sommes en répétition
à Bruxelles, au Théâtre Varia, et ce, jusqu’au
moment des représentations, fin mai.
Cela fait suite à une première période de
recherche à Montévidéo (Marseille) et à
une première présentation de maquette au
Théâtre de Vanves, à l’occasion du Festival
Artdanthé. Je trouve toujours cela très
délicat de présenter une étape de travail ;
mais là, ça a été vraiment bénéfique. Puis ça
a mis toute l’équipe à l’apogée de cette idée
de hic et nunc. On a décidé de changer de
salle à la dernière minute, la musique s’est
arrêtée et les performeurs ont dû s’adapter
et recommencer la proposition au début,
l’accessoire d’Axel a explosé ! Et, pourtant,
on est très heureux de cette première
expérience publique ; j’y ai vu des choses
que je n’aurais pas pu voir autrement et
sur lesquelles je sais aujourd’hui qu’on
peut travailler. Pour la première fois, j’ai
vraiment vu jouer mes acteurs et perçu tout
le potentiel comique que je soupçonnais et
espérais ! •
81
Né à La Louvière dans une famille
sicilienne, Salvatore Calcagno insuffle
dans son théâtre une forte dimension
autobiographique et populaire. Dans
ses mises en scène, Le Garçon de la
piscine, La Vecchia Vacca et maintenant
Io sono Rocco, une écriture scénique
millimétrée témoigne d’une obsession
assumée pour le rythme, la couleur, la
lumière, la forme et le détail.
46
DOSSIER
: ACTORAL
JEU 160
La |Jamésie
de Geneviève
et
Matthieu, au Centre d’exposition
de Rouyn-Noranda en 2015. La
performance sera présentée à
l’Usine C en 2016 à l’occasion
du festival Actoral. © Nancy Belzil
PINE, DÉPINE
82
JEU 160 DOSSIER : ACTORAL | 47
Formé en 1999 à
Rouyn-Noranda,
le duo amoureux
Geneviève et Matthieu
est connu pour son
imaginaire débridé
et débordant.
Les créateurs de
La Jamésie, un
spectacle qui tient
à la fois de la
performance,
de la chanson et
de l’art plastique,
nous entraînent ici
dans leur folie.
EN JAMÉSIE
Geneviève et Matthieu
83
48 | DOSSIER : ACTORAL JEU 160
« Incognito, bien dans ma peau,
je recommence ma vie à zéro. »
Voilà. Pine, dépine, c’est ça.
A
vant de commencer à lire, ce serait
le fun de mettre une chanson de
Kashtin. Tu tapes ça dans YouTube
et hop ! Hip hop. Ça ajoute à
l’expérience, ça donne le ton. Est-ce que
c’est possible d’ouvrir une porte sur
l’univers ? « Incognito, bien dans ma peau,
je recommence ma vie à zéro. » Voilà. Pine,
dépine, c’est ça. Ouvrir des portes. C’est
beau la vie, il faut pas manquer ça !
– Allô !
– Allô.
« Parce que c’est de mingue au Témiscamingue, pis ça changera pas ! », qu’il dit
Jean-Jacques. Surf and turf. Terre et mer.
Pine, dépine. Partir. On était assez bien.
2009. Partis plus qu’un mois. On revenait
d’un symposium. Dans la van, à la radio,
entendu pour la première fois : la Jamésie.
« Ostie que c’est beau comme nom ! »
On s’est mis à rêver. Imagine. Jamaïque.
Californie. Indonésie. Non, c’est pas ça.
On s’est rendu compte qu’on parlait de
météo locale. La Baie-James, on connaissait,
oui. La Jamésie ? Non. « C’est pas un mot
inventé ? » Imagine sans imagination. Une
porte s’est ouverte dans notre espace mental.
Encore 1 000 kilomètres pour nous rendre
au kilomètre zéro.
OSTIE
En Jamésie. Tout a commencé. Entendu
parler. Soleil en Jamésie. Si tu viens avec
moi. Viens. On va y aller. Forêt vierge. « Be
careful, very slippery », said George, our old
inuk guide. L’idée qu’on se fait. Des filles
rires. Et si on y était. Filles rires. Guide
de lumière et forêt. Loin, encore plus loin.
Nous chez vous. Vous chez nous. Toi mon
tout mon toi. Toinou. La Jamésie, ostie.
Huiles essentielles, l’huile essentielle. L’huile
sur toile. Tshinanu, Tshinanu. Œuvre de vie.
Livre de vie. Ma biographie. Choisi, choix,
choisir. Huile essentielle. Fille éternelle.
Une pancarte, en silence, un cri, un souhait.
Tshinanu. Tshinanu. J’ai oublié mon nom.
Je ne sais plus comment je m’appelle. La
Jamésie, ostie ! Non, je ne monterai pas dans
l’autobus du show-business. Et, s’ils sont
loin, c’est peut-être pour pas être proches.
Paradis perdu. Voir la terre en deux de
deux. Gauche droite. Idle no more. Notre
Plan Nord. Vivre avec les animaux. Vivre
avec l’huile essentielle. L’huile essentielle.
Vie éternelle. Ceux qui voyagent savent
comment. On prend toujours un train pour
quelque part. Se rendre au camp d’hiver
no 2. Pine, dépine, « ostie qu’on dépine ! ». Se
rendre au camp d’été no 1. Dire bye. Exagérer
même pas salut pis bye. À la suite, à suivre.
NU
Artistiquement seul dans l’atelier. Fleur de
corps nu. Évangéliste romantique. J’ai mal
à l’aise. Naturistes dans un décor de fausses
montagnes. L’idée d’être ensemble corps nus
au creux d’une histoire. Collectivement sans
visage. Tu pues, c’est plate, t’es tellement beau.
Montre-moi ton Témis. Artistiquement seul
dans l’atelier. Surréaliste forestier mésadapté.
Étendus au nord de la Jamésie, espace vierge
du monde entier. Là où la terre se sépare
en deux. Crise d’apocalypse deux pour un.
Trop pour rien simplement nus. L’économie
de ne pas dépenser, ne pas acheter en gros.
Vivre avec les animaux, les tordus, les exclus.
Vivre avec les artistes. Artistiquement. Il
n’est pas tard, il est encore tôt. Loin, c’est
comme ne pas être proche. Tout dépend de
comment on le dit.
de maître trop pleine. Exposition. Majeure
en cinéma, mineure en études médiévales.
Seul au MuCEM. Seul dans l’atelier. On
revient du Marais, 3e arrondissement, vue
panoramique, paysage, disparaître. Prière de
ne pas déranger, je suis en vacances. Paraît que
ça se dit entre BGL, « poursuis ta démarche ».
ON DIT ÇA
Je le dis « sans censure ». C’est vrai que j’y
pense. La Jamésie est partout. J’aime ce mot.
On se le dit « sans censure ». Qu’on seul dise.
Sans censure. Tel quel. Jasmin nous a appris à
dire « les maudits artistes ». Asteure on dit ça.
Maudits artistes. C’est comme le commissaire
qui nous a dit l’autre jour : « Je ne suis pas
bon pour écrire des textes d’exposition, je
n’ai pas le temps non plus. » On a même
vu une photo d’une gang de commissaires
d’exposition qui faisait une table ronde. Le
ministère. Mystère. On a déjà rencontré
des élus pour savoir où en était un projet de
rénovation urgente déposé au ministère de la
Culture et des Communications. L’empire
de la création. Au fur et à mesure, la source
d’où jaillissent les dés de la destinée. Estce qu’il y a quelqu’un qui veut prendre ta
place ? On dit ça de même. Geneviève et
Matthieu discutent longuement devant le
livre des secrets. « On pourrait continuer
le texte comme ça. Comment ? Barré. Le
pas retenu, le rejeté, le meilleur, ce premier
jet. Mais comment on joue un texte barré ?
Facile. »
COMME DISAIENT LES QQISTES – L’art,
Des gens se lèvent un peu, partout, un peu
d’espoir demain. Dehors, c’est tranquille
encore. Combien, artistiquement, il y aura
de l’eau à boire ? À quatre pattes se bourrer
la face d’eau, la face dans la rivière, la face
pleine d’eau de source sûre. Témoin, on y est
presque. Après-demain, peut-être que oui.
Seul dans l’atelier. J’ai un artiste à donner.
Trop romantique, trop nu. Ça pue le corps
nu qui surchauffe. Éclairé par un spot à
gauche. Clair-obscur d’une senteur de classe
84
c’est facile.
GENEVIÈVE – Facile… Quel beau mot,
quelle belle rime, un peu comme toi et moi ?
MATTHIEU – Non, moi ça me fait penser à
Rime.
COMME DISAIENT LES QQISTES – Je suis
un artiste.
GENEVÈVE ET MATTHIEU – Ah oui, ah
bon, pauvre con.
JEU 160 DOSSIER : ACTORAL | 49
« Geneviève, tu es Hardy. »
C’est vrai, j’ai le même double menton.
L’amour est aveugle. Qui aurait cru.
CRISS CROSS À MARSEILLE
Geneviève et Matthieu marchent gaiement
sur le chemin humain, trop humain. Une
camionnette s’arrête et un homme s’écrit :
« Bonjour les comédiens ! » On est partis
à rire, c’est sûr. On a dit à Grégoire qu’on
travaillait des beats hip-hop. En tout cas,
ça nous faisait penser au hip-hop. Faire la
rime avec hip-hop. Hop hip hip hop, reste,
restauration. Criss, criss criss, criss cross.
Hop hip hip hop, reste, restauration. Criss,
criss criss, criss cross. Parce que le hip-hop,
c’est ton ami. Comme dirait Téki Latex : « Tu
sais, le hip-hop sera toujours là pour toi. »
Parfait. Ça sonne. C’est rythme. « Le hiphop ne te lâchera pas. » Totalement down.
Totally spice. Dream in. Fall in. Keep in. To
back of love. Ça donne le goût de danser.
Danse, Rico, danse. Comme y dit, danse, on
a besoin de danser. Danse, Rico. On a le goût
de danser. On a le goût de bouger. On a le
goût de se masturber. Ça rime. Il y a une fille
à La Sarre qui veut déménager à Rouyn, elle
s’appelle Rime.
Grégoire dit que je pourrais m’inspirer d’un
homme noir pour mon prochain personnage.
L’homme noir. La masse obscure. Il y a
un lien à faire. Une rime à aimer. Fille de
La Sarre, Rime. Il y a aussi l’homme nu
et un homme nu à retrouver. « Tu peux
même jouer Othello dans Shakespeare et
faire référence à Stanislavski qui raconte
que, quand il était débutant, il s’était mis
du cirage noir pour jouer Othello… Oh !
Desdémone. Bon retour ! » J’aime ça qu’on
me souhaite un bon retour. Un aller-retour
et je reviens de Marseille. « Geneviève, tu
es Hardy. » C’est vrai, j’ai le même double
menton. L’amour est aveugle. Qui aurait cru.
On trouve qu’en général le théâtre, c’est de
même, théâtralement vôtre, c’est en général
que ça se passe. Un peu comme la poésie,
c’est plate mais c’est le fun. Il y a les rimes.
Même quand ça rime pas, ça rime. C’est
surprenant. Le théâtre, c’est pareil, ça crie,
ça parle fort, ça prononce. C’est de même
en général. On pourrait dire ça de pas mal
toute. « Fuck toute », qu’y disent les jeunes.
Je me demande combien de fois on écrit
« Marseille » dans un livre sur Marseille.
On peut dire « cette ville », ou « 2e ville de
France », ou « 3e ville si Lyon est 2e cette
année-là », ou tout simplement « Marseille ».
COMME DISAIT UN AMI – L’art, c’est
redondant.
GENEVIÈVE ET MATTHIEU – Cliff oui ! •
La Jamésie de Geneviève et Matthieu, au
Centre d’exposition de Rouyn-Noranda
en 2015. © Christian Leduc
Geneviève et Matthieu sont ensemble depuis 1997.
Inspirés par l’art et la vie, ils créent des performances,
produisent des installations, des disques, ils organisent
la Biennale d’art performatif de Rouyn-Noranda et
s’investissent dans le centre d’artistes l’Écart.
85
50 | DOSSIER : ACTORAL JEU 160
Le plasticien Théo Mercier,
parrain de la 16e édition marseillaise
d’Actoral, nous parle de sa démarche et
du spectacle qu’il présentera à Montréal,
Radio Vinci Park.
THÉO MERCIER :
L’HUMAIN TENDU
VERS L’OBJET
Christian Saint-Pierre
Le
travail de Théo Mercier,
plasticien né à Paris en 1984,
s’appuie
principalement
sur l’objet. « Soit l’objet
issu de ma propre fabrication, expliquet-il, soit l’objet trouvé, l’artefact, l’objet
archéologique. J’ai l’impression que mon
œuvre s’apparente parfois davantage au
musée anthropologique, au musée des arts
décoratifs ou au musée des arts populaires
qu’au musée d’art contemporain. »
Que ce soit en empruntant la forme de
vanités, ces natures mortes à implication
philosophique, représentations de la mort,
ou sous la forme d’investigations autour de
civilisations disparues, la notion de temps
est partout dans le travail de Mercier.
« Il m’arrive même de travailler sur des
civilisations disparues avant d’être nées,
lance-t-il. Je crée des objets qui seraient
comme des pièces à conviction, à même
de prouver une existence. Qu’ils soient
rituels, décoratifs, modernes ou anciens,
Radio Vinci Park de Théo Mercier, parrain de
l’édition marseillaise d’Actoral en 2016. Son
spectacle sera présenté ensuite à Montréal.
Sur la photo : Cyril Bourny. © Erwan Fichou
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JEU 160 DOSSIER : ACTORAL | 51
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52 | DOSSIER : ACTORAL JEU 160
j’essaie toujours de leur donner l’illusion
d’une véritable raison d’exister, un usage
symbolique, esthétique ou purement pratique, une fonction fantasmée. »
ANTHROPOLOGIE IMAGINAIRE
Ainsi, la démarche de Théo Mercier est
traversée par cette idée d’inventer des
mondes de toutes pièces : « Je m’imagine
parfois en tant qu’explorateur ramenant des
trésors exotiques de terres inconnues. Dans
une démarche proche de l’anthropologie
imaginaire, j’invente des mondes qui
se nourrissent du monde existant, qui
entretiennent des frontières très fines avec
le réel. Dans cette optique, je suis intéressé
par des pratiques d’artisans, des rituels,
des légendes. J’ai effectivement travaillé
certains de mes objets de manière magique,
au Mexique par exemple, dans des régions
reculées, avec des gens qui utilisent des
techniques ancestrales. »
Il y a peu, avec une pièce intitulée Du futur
faisons table rase, l’artiste a entrepris un
travail performatif. « Je ne conceptualise
pas en amont mes sculptures et mes objets
plastiques, explique-t-il. Je ne pars jamais
d’une page blanche ou d’un concept, mais
d’un objet ou d’un espace, de quelque chose
de physique. Dans les conditions données,
alors que j’étais pensionnaire à la Villa
Médicis, je me suis dit que, peut-être, je
pourrais imaginer un spectacle. Cette pièce
porte quelque chose de programmatique
dans son titre même. Elle venait à l’encontre
de ce que j’étais en train de vivre à ce
moment-là, dans une ville comme Rome où
le temps semble complètement figé. Entouré
de musées, de vieilles sculptures, de vieilles
peintures, de vieilles pierres, j’ai eu le désir
de m’intéresser au présent et au vivant. »
Le résultat est une fresque, faite de collages,
« dont le déroulement dans le temps
s’apparenterait à celui d’un curseur qui
balaye la scène de gauche à droite ». « C’est
un spectacle dont l’esthétique est en lien
direct avec sa méthode de fabrication,
explique Mercier. Il a pu se faire grâce à
Pauline Jambet, Marlène Saldana et Jonathan
Drillet, Sexy Sushi, Philippe Katerine (dans
la deuxième version) et François Chaignaud,
qui ont répondu à mon invitation. Il était
destiné à avoir une vie très courte : il a été
joué quatre fois ; il devait être joué seulement
deux fois au départ. »
La radio d’entreprise des Parkings Vinci,
« leader européen du stationnement et
l’un des joueurs majeurs en Amérique du
Nord », a grandement intéressé, pour ne
pas dire inspiré le créateur. « La mission
de cette radio, précise-t-il, est de diffuser
une atmosphère, je cite, “élégante et
rassurante”. Son programme, composé
par des musicologues, véhicule un certain
vitalisme, des interprétations très enlevées,
légères, et le volume est étudié de manière à
ce qu’on puisse entendre si quelqu’un nous
suit. D’emblée, dans son énoncé, cette radio
raconte et accompagne le danger, en essayant
de le faire oublier. »
LE CASCADEUR, LE DANSEUR ET
LA CLAVECINISTE
Ainsi, Radio Vinci Park met en présence deux
entités très fortes : « L’une est noire, masquée
– le corps-machine du motard, gainé de cuir –
et l’autre est blanche, très offerte, ouverte – le
corps du danseur, déployant sa voix comme
objet de parade. Leur dialogue reprend
le mythe postindustriel de la rencontre
impossible de l’homme et de la machine.
J’aime aussi le parallèle entre la moto et
le clavecin : des objets mécaniques d’une
précision extraordinaire, qui demandent
une grande maîtrise, des objets précieux,
impeccables, bien huilés, qui parlent aussi
du fétichisme des instruments, comme
des prolongements du corps. Je souhaitais
finalement rendre vivante la radio, lui donner
une forme humaine par la présence de MariePierre Brabant. »
À Montréal, l’artiste va présenter Radio
Vinci Park, un duo entre François
Chaignaud, danseur, et Cyril Bourny,
cascadeur, accompagné par Marie-Pierre
Brabant au clavecin. « C’est une rencontre
dans un stationnement chargé de fantasmes
et d’angoisses, explique Mercier, c’est une
ode à l’amour impossible, un spectacle
forain, un combat de chiens, une corrida,
une scène mythologique… Tout le travail a
consisté à dilater le plus possible la relation
entre le motard et le danseur, pour laisser
de la place aux spectateurs. Cette pièce part
d’un lieu, le garage qu’était auparavant la
Ménagerie de verre, à Paris, aujourd’hui un
espace pluridisciplinaire dédié à la création
contemporaine. Le parking est un élément de
la cartographie urbaine tellement chargé de
fantasmes et d’angoisses, une représentation
des enfers contemporains. C’est un lieu de
silence angoissant. »
« C’est une rencontre
dans un stationnement chargé de
fantasmes et d’angoisses, [...] c’est une ode à
l’amour impossible, un spectacle forain, un combat
de chiens, une corrida, une scène mythologique… »
– Théo Mercier
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JEU 160 DOSSIER : ACTORAL | 53
Théo Mercier. © Assaf Shoshan
Radio Vinci Park met en scène « un jeu
fantastique, un lieu souterrain où tout peut
s’incarner, se désincarner, prendre vie,
mourir, renaître ». « Il s’agit d’objectifier le
plus possible l’humain, explique Mercier, la
silhouette immobile du motard évoquant la
statuaire, une thématique qui existait déjà
dans Du futur faisons table rase, où François
Chaignaud incarnait cette suite de huit
sculptures antiques. Par ailleurs, dans mon
travail de sculpteur, j’ai davantage tendance
à rendre l’objet vivant. Par exemple, dans
la dernière exposition que j’ai faite au
Mexique, j’ai invité une dizaine de mariachi
qui imitaient des objets au milieu d’objets
qui imitaient des humains. Cette tension
entre l’animé et l’inanimé me passionne.
Je crée des objets qui regardent du côté de
l’humain. Je me rends compte que, dans
mon travail de metteur en scène, je suis
passionné par l’humain tendu vers l’objet.
Les deux démarches se situent à la limite
d’une impossibilité. Ce sont précisément ces
zones d’impossibilité et de contradictions
déjà fortement présentes dans mon travail de
sculpture que je recherche dans mon travail
de théâtre. »
PERDUS DANS LE TEMPS
L’artiste estime que son travail « se déplace
en permanence entre le futur et le passé ».
« J’essaie de proposer des objets perdus dans
le temps, explique-t-il, fantastiques, dans le
sens où ils n’ont ni géographie ni époque.
Ce sont des hybrides qui entretiennent
cette ambiguïté quant à leur provenance
temporelle. Par exemple, Radio Vinci Park
parle de quelque chose de très contemporain
– de la moto, du souterrain, du parking – et,
en même temps, ça pourrait être une scène
antique, on ne saurait pas vraiment la situer
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dans le temps. C’est quelque chose que j’essaie
de plus en plus de développer dans mes
objets : une incertitude quant à leur origine,
leur authenticité, un jeu en permanence entre
le vrai, le faux, le trompe-l’œil. »
Dans sa prochaine création, La Fille du
collectionneur, Théo Mercier va parler
d’art, « en prenant comme entrée privilégiée
l’œuvre, débarrassée de son contexte économique, de son contexte historique et
surtout de la figure de l’artiste, une œuvre
autonome, une œuvre flottante, métisse,
autosuffisante, comme un organisme vivant,
carnivore ». •
Les propos de Théo Mercier ont été recueillis
par Smaranda Olcèse.
Festival actoral
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