chronique de jurisprudence financière Jean-Luc GIRARDI Louis RENOUARD Pierre ROCCA Président de section de la chambre régionale des comptes de Nord - Pas-de-Calais Premier conseiller de chambre régionale des comptes Rapporteur à la Cour des comptes Conseiller référendaire à la Cour des comptes Président de la chambre régionale des comptes du Centre Les Chambres régionales des comptes Clefs proposées (base Jade) : 135-02-04-01 (budget des communes) 쐍 135-02-05-002 (règles de procédures devant le tribunal administratif) 쐍 18-02-00-01 (équilibre du budget) 쐍 18-02-05 (contrôle des budgets des collectivités locales). CAA Bordeaux, arrêt du 23 octobre 2007, Commune de Pointe-à-Pitre, req. nº 05BX01886. Résumé : Dans le délai du recours pour excès de pouvoir, mais après épuisement du délai de saisine de la CRC par le préfet, des requérants ont saisi un TA de l’absence d’équilibre réel du budget. Le TA a fait droit à leur requête. La décision de ce dernier a été confirmée en appel. Références jurisprudentielles : • financières : CRC Franche-Comté, avis du 23 novembre 2004, Commune et CCAS de Grandfontaine, La Revue du Trésor nº 5-2007, p. 526 ; • administratives : CE, 23 décembre 1988, Département du Tarn c/ Sieur Barbut, req. nº 60678 쐍 TA Rennes, 12 mars 1997, Commune de Sarzeau 쐍 CE, 16 mars 2001, Commune de Rennes-les-Bains et M. X. Textes de référence : Code des juridictions financières, article L. 232-1 쐍 CGCT, article L. 1612-4. Commentaires Par délibération du 15 février 2000, le conseil municipal de la commune de Pointe-à-Pitre a approuvé le budget primitif de la commune pour l’année 2000. A la suite d’une requête engagée le 14 avril 2000 par des membres du Conseil municipal, ce budget a été annulé par le tribunal administratif de Basse-Terre le 23 juin 2005. La décision ici commentée est l’arrêt du 23 octobre 2007 (nº 05BX01886) par lequel la cour administrative d’appel de Bordeaux a confirmé le jugement du TA. La CRC a une compétence d’attribution et doit être saisie dès lors que l’anomalie constatée correspondant à l’un des cas suivants : retard ou absence de vote du budget (art. L. 1612-2 du CGCT), vote de celui-ci en déséquilibre réel (art. L. 1612-5 à L. 1612-7 et L. 1612-9), retard ou absence du compte administratif (art. L. 1612-12 et L. 1612-13), déficit de ce dernier de plus de 5 ou 10 % des recettes réelles de fonctionnement (art. L. 1612-14), absence ou insuffisance de crédits en vue du paiement d’une dépense obligatoire (art. L. 1612-15 [1]). Cette décision donne l’occasion d’examiner dans quelles circonstances le juge administratif est conduit à statuer en matière budgétaire (1) et de constater qu’il statue comme l’aurait fait la chambre régionale des comptes (2). Il sera rappelé qu’en revanche, les conséquences de la saisine du tribunal administratif diffèrent largement du traitement que permet l’intervention de la CRC (3). Outre la spécificité de ces matières, la compétence de la CRC est encore conditionnée par le respect des délais prévus par les dispositions ci-dessus. C’est ainsi que, s’agissant de l’absence d’équilibre réel du budget, la CRC n’est compétente que si elle est saisie dans le délai de trente jours prévu à l’article L. 1612-5. Celui-ci étant passé, le tribunal administratif peut en être saisi (CE, 23 décembre 1988, Département du Tarn c/ Sieur X ; 16 mars 2001, Commune de Rennes-les-Bains et M. X). 1. Le contrôle des actes budgétaires des collectivités territoriales et de leurs établissements publics est exercé, selon les cas, par la chambre régionale des comptes ou par le tribunal administratif, l’une ou l’autre de ces juridictions étant saisie par le représentant de l’Etat. Par ailleurs, et de façon générale, les décisions budgétaires sont, en tant que délibérations, susceptibles de faire l’objet d’un déféré au tribunal administratif, selon la procédure de droit commun prévue aux articles L. 2131-2 et L. 2131-6 du CGCT. Le TA de Besançon, par jugement du 29 avril 1994, 466 a annulé la délibération du 4 mars 1994 par laquelle la commune de Grandfontaine avait adopté son budget primitif pour l’exercice 1994 au motif que la délibération avait été adoptée sans aucun vote préalable. Celui de Rennes a annulé la délibération par laquelle une commune avait adopté son budget au motif que celui-ci ne comportait pas les annexes requises par la réglementation, situation sans incidence directe sur l’équilibre budgétaire (TA Rennes, 12 mars 1997, Commune de Sarzeau). Au cas d’espèce, les requérants ont saisi le juge administratif dans le cadre d’un recours pour excès de pouvoir. Leur décision est intervenue peu avant l’expiration du délai de droit commun de deux mois, soit bien après que le préfet ne soit plus en mesure de saisir la CRC au titre de l’article L. 1612-5 du CGCT. 2. Dès lors qu’il est saisi d’un budget considéré comme ne satisfaisant pas aux conditions de l’équilibre réel, le juge administratif adopte un raisonnement identique à celui de la CRC. En vertu de l’article L. 1612-4 du CGCT, il est fondé à rechercher si le budget a été voté en équilibre réel, ce qui implique, au-delà de la seule égalité des recettes et (1) Il est rappelé que la saisine au titre de cet article est ouverte non seulement au représentant de l’Etat mais aussi au comptable (sans précision) et à toute personne ayant un intérêt à agir. No 6 - Juin 2008 - chronique de jurisprudence financière des dépenses de chaque section, le fait que celles-ci aient été déterminées de manière sincère : Art. L. 1612-4 du CGCT. – « Le budget de la collectivité territoriale est en équilibre réel lorsque la section de fonctionnement et la section d’investissement sont respectivement votées en équilibre, les recettes et les dépenses ayant été évaluées de façon sincère [...] » (2). En la présente espèce, ainsi que l’expose l’arrêt d’appel, le juge administratif a constaté l’insincérité du budget, des prévisions de recettes ayant été surestimées et celles de dépenses sous-estimées. En effet, avaient été inscrites en recettes : – des subventions de la région Guadeloupe et du département dont l’attribution n’était pas certaine ainsi que des subventions au titre des fonds structurels européens qui n’avaient fait l’objet d’aucune décision d’attribution de la commission européenne notifiée à la commune ; – des emprunts qui n’avaient fait l’objet, à la date de la délibération en cause, d’aucun contrat de prêts conclu entre la commune et un organisme prêteur (3) ; – des produits de la fiscalité (l’octroi de mer et la taxe sur les carburants) surestimés au regard des prévisions pour 1999 et des résultats de 1998. S’agissant des inscriptions en dépenses : – celles de la section d’investissement avaient été minorées ; – les dépenses de personnel accusaient une diminution importante par rapport à 1999 alors même que deux protocoles prévoyant de substantielles augmentations de salaires avaient été signés suite à des grèves en fin 1999. 3. Si le constat du déséquilibre réel, au sens de l’article L. 1612-4 du CGCT, est en tous points comparable à celui qu’aurait pu effectuer la CRC, les conséquences des saisines respectives des deux juridictions sont bien différentes. Le juge administratif est, en pareil cas, limité par ses pouvoirs qui se résument à celui d’annuler la décision. Cette décision est susceptible de survenir longtemps après que le budget aura été exécuté (en l’espèce la saisine est du 14 avril 2000 et l’annulation du budget a été prononcée par le jugement du 23 juin 2005. Une fois prise, elle rend nécessaire l’adoption, quelque peu « irréelle » d’un nouveau budget, se substituant à celui qui est censé n’avoir jamais existé. La saisine de la CRC, à l’inverse, est conçue pour perturber le moins possible le fonctionnement des assemblées délibérantes. Elle est soumise à des conditions de délai très serrées qui sont respectées dans la très grande majorité des cas. Une étape est ménagée qui peut, si l’assemblée de la collectivité en est d’accord, s’achever par - No 6 - Juin 2008 l’adoption des mesures correctives proposées par la CRC. A défaut, celle-ci, par une seconde décision, donne au préfet un avis qui permet à celui-ci d’arrêter d’office un budget. En pareil cas, un « suivi » est assuré, de manière à veiller au retour de la collectivité vers une situation budgétaire plus satisfaisante. Cour administrative d’appel de Bordeaux arrêt du 23 octobre 2007, req. nº 05BX01886, Commune de Pointe-à-Pitre Vu la requête, enregistrée au greffe de la Cour le 14 septembre 2005, présentée pour la commune de Pointe-à-Pitre, représentée par son maire, par Me Gout ; La commune de Pointe-à-Pitre demande à la Cour : 1º D’annuler le jugement du 23 juin 2005 par lequel le tribunal administratif de Basse-Terre a annulé la délibération en date du 15 février 2000 par laquelle le conseil municipal de la commune de Pointe-à-Pitre a approuvé le budget primitif de la commune pour l’année 2000 ; 2º De rejeter la demande présentée par M. X, M. Y et M. Z devant le tribunal administratif de Basse-Terre ; 3º De mettre à la charge de M. X, M. Y et M. Z une somme de 2 000 c au titre de l’article L. 761-1 du Code de justice administrative et de les condamner aux entiers dépens ; Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l’audience ; Après avoir entendu, au cours de l’audience publique du 25 septembre 2007, le rapport de M. Péano, président-assesseur, et les conclusions de Mme Viard, commissaire du Gouvernement ; Considérant que la commune de Pointeà-Pitre demande à la Cour d’annuler le jugement du 23 juin 2005 par lequel le tribunal administratif de Basse-Terre a annulé la délibération en date du 15 février 2000 approuvant le budget primitif de la commune pour l’année 2000 ; Sur la recevabilité de la demande de première instance : Considérant que la délibération contestée a été adoptée par le conseil municipal de Pointe-à-Pitre le 15 février 2000 et que M. X et autres en ont demandé l’annulation au tribunal administratif par mémoire introductif d’instance enregistré le 14 avril 2000, soit avant l’expiration du délai du recours contentieux ; qu’ainsi la commune de Pointe-à-Pitre n’est pas fondée à soutenir que cette demande serait tardive et, par suite, irrecevable, alors même que les demandeurs, membres du Conseil municipal de la commune, ont participé à la séance au cours de laquelle a été adoptée la délibération contestée et que le délai de deux mois, dont ils disposaient pour introduire un recours pour excès de pouvoir dirigé contre cette délibération, a commencé à courir à compter de cette date ; Sur la légalité de la délibération contestée : Considérant qu’aux termes de l’article 8 de la loi du 2 mars 1982 repris aux articles L. 1612-4 à L. 1612-6 du Code général des collectivités territoriales : « le budget de la commune est en équilibre réel lorsque la section de fonctionnement et la section d’investissement sont respectivement votées en équilibre, les dépenses et les recettes ayant été évaluées de façon sincère » ; qu’il résulte de ces dispositions qu’une délibération approuvant un budget en équilibre apparent, mais en déséquilibre réel est illégale ; Considérant que, pour juger que le budget primitif pour l’année 2000 de la commune de Pointe-à-Pitre doit être regardé comme n’ayant pas été voté en équilibre réel, au sens des dispositions précitées de l’article 8 de la loi du 2 mars 1982, en raison du caractère non sincère des inscriptions budgétaires et qu’ainsi, M. X et autres sont fondés à soutenir que la délibération contestée du 15 février 2000 du conseil municipal de la commune de Pointeà-Pitre approuvant ce budget primitif pour l’année 2000 est illégale, le tribunal administratif s’est fondé sur les motifs qu’ « il résulte de l’instruction et qu’il n’est pas contesté que l’équilibre du budget primitif pour 2000 de la commune de Pointeà-Pitre a été atteint par l’inscription, en face des programmes de dépenses prévus, d’une part, de subventions de la région Guadeloupe et du département respectivement pour des montants de 2,5 MF et de 5,2 MF dont l’attribution n’était pas certaine, de fonds structurels européens estimés à 8,2 MF n’ayant fait l’objet d’aucune décision d’attribution de la commission européenne notifiée à la commune, d’autre part, d’emprunts, pour un montant supérieur à 27 MF qui n’avaient fait l’objet, à la date de la délibération en cause, d’aucun contrat de prêts conclu entre la commune et un organisme prêteur ; qu’en outre, il n’est pas contesté que figuraient, également, dans ce budget, des évaluations de recettes concernant le produit de l’octroi de mer et la taxe sur les carburants, trop élevées par rapport aux prévisions pour 1999 et aux résultats de 1998 et eu égard à la diminution de la population de 27 000 à 20 000 habitants, le produit de ces recettes (2) L’autre condition, portant sur le financement du remboursement du capital des emprunts, n’est pas en cause dans la présente affaire. (3) Condition rigoureuse, sauf si la collectivité parvient à conclure, sans trop de frais, un contrat qui lui ménage une certaine liberté quant au moment de lever l’emprunt. En la matière, la sévérité du juge administratif rejoint celle fréquemment exprimée par les CRC. 467 chronique de jurisprudence financière évoluant en fonction du nombre d’habitants ; qu’au surplus, les requérants soutiennent sans être contredits que les dépenses de la section investissement ont été minorées de même que les dépenses de personnel qui accusent une diminution de 5,3 MF par rapport à 1999 alors même que deux protocoles prévoyant de substantielles augmentations de salaires ont été signés suite à des grèves en fin 1999 » ; qu’en l’absence d’éléments nouveaux de nature à remettre en cause le bien-fondé de cette appréciation, il y a lieu, par adoption des motifs retenus par les premiers juges, de rejeter, sur ce point, les conclusions de la requête ; Considérant qu’il résulte de ce qui précède que, sans qu’il soit besoin d’examiner les fins de non-recevoir opposées à la requête, la commune de Pointe-à-Pitre n’est pas fondée à soutenir que c’est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Basse-Terre a annulé la délibération en date du 15 février 2000 approuvant le budget primitif de la commune pour l’année 2000 ; Sur l’application des dispositions de l’article L. 761-1 du Code de justice administrative : Considérant que les dispositions de l’article L. 761-1 du Code de justice administrative font obstacle à ce que soit mise à la charge de M. Z, de M. X et de M. Y, qui ne sont pas parties perdantes dans la présente instance, la somme que la commune de Pointe-à-Pitre demande au titre des frais exposés par elle et non compris dans les dépens ; qu’il y a lieu, dans les circonstances de l’espèce, en application des mêmes dispositions, de condamner la commune de Pointe-à-Pitre à payer à M. Z et à M. X la somme globale de 1 300 c au titre des frais exposés par lui et non compris dans les dépens ; Décide : Article premier. – La requête de la commune de Pointe-à-Pitre est rejetée. Art. 2. – La commune de Pointe-à-Pitre versera à M. Z et à M. X une somme globale de 1 300 c au titre de l’article L. 761-1 du Code de justice administrative. Conseil d’Etat, 23 décembre 1988, req. nº 60678, Département du Tarn Sur la recevabilité des demandes de première instance : Considérant qu’aux termes de l’article 8 de la loi du 2 mars 1982, applicable au buget du département en vertu de l’article 51 de ladite loi, dans sa rédaction issue de 468 l’article 13-II de la loi du 22 juillet 1982 : « Le budget de la commune est en équilibre réel lorsque la section de fonctionnement et la section d’investissement sont respectivement votées en équilibre, les recettes et les dépenses ayant été évaluées de façon sincère, et lorsque le prélèvement sur les recettes de la section de fonctionnement au profit de la section d’investissement, ajouté aux recettes propres de cette section, à l’exclusion du produit des emprunts, et éventuellement aux dotations des comptes d’amortissement et de provision, fournit des ressources suffisantes pour couvrir le remboursement en capital des annuités d’emprunt à échoir au cours de l’exercice ». Lorsque le budget d’une commune n’est pas voté en équilibre réel, la chambre régionale des comptes, saisie par le représentant de l’Etat dans un délai de trente jours à compter de la transmission prévue à l’article 2, le constate et propose à la commune, dans un délai de trente jours à compter de sa saisine, les mesures nécessaires au rétablissement de l’équilibre budgétaire et demande au Conseil municipal une nouvelle délibération. La nouvelle délibération du Conseil municipal, rectifiant le budget initial, doit intervenir dans un délai d’un mois à partir de la communication des propositions de la chambre régionale des comptes. Si le Conseil municipal n’a pas délibéré dans le délai prescrit, ou si la délibération prise ne comporte pas de mesures de redressement jugées suffisantes par la chambre régionale des comptes, qui se prononce sur ce point dans un délai de quinze jours à partir de la transmission de la nouvelle délibération, le budget est réglé et rendu exécutoire par le représentant de l’Etat dans le Département... » Considérant que si l’existence de la procédure prévue par les dispositions précitées fait obstacle à ce que soient présentées devant le juge de l’excès de pouvoir des prétentions dirigées contre les délibérations budgétaires du Conseil général et fondées sur la méconnaissance de la règle de l’équilibre réel, cette irrecevabilité ne peut être opposée aux personnes justifiant d’un intérêt lorsque le commissaire de la République n’a pas saisi la chambre régionale des comptes dans le délai de trente jours imparti par l’article 8 de la loi du 2 mars 1982 ; qu’en pareil cas, les demandeurs disposent pour invoquer le moyen tiré de cette méconnaissance d’un délai de deux mois qui commence à courir à l’expiration du délai de trente jours précité ; qu’en l’espèce, le commissaire de la République du département du Tarn n’ayant pas saisi la chambre régionale des comptes de la délibération du conseil général du Tarn du 31 mai 1983, les demandes présentées au tribunal administratif le 28 juillet 1983 par MM. Barbut et autres et le 1er septembre 1983 par M. Limouzy et fondées sur la méconnaissance par cette délibération de la règle de l’équilibre réel étaient recevables ; Sur la légalité de la décision modificative nº 1 votée le 31 mai 1983 : Considérant qu’il résulte nécessairement des dispositions précitées de l’article 8 de la loi du 2 mars 1982 que l’équilibre réel du budget constitue une condition de légalité des délibérations budgétaires ; Considérant qu’à la date à laquelle la décision modificative nº 1 a été votée, les prévisions de recettes du département du Tarn au titre de la seconde part de la dotation globale d’équipement, telles qu’elles avaient été établies par le ministère de l’Intérieur et de la Décentralisation, s’établissaient, ainsi que l’indiquait le rapport présenté au Conseil général, à 1 758 852 F ; que, même si cette somme n’avait qu’un caractère prévisionnel, le montant exact des versements effectués par l’Etat étant proportionnel aux paiements effectués par le Département au profit des communes récapitulés dans des états trimestriels d’engagement, le Conseil général ne pouvait inscrire, au titre de la seconde part de la dotation globale d’équipement, des recettes supérieures à 1 758 852 F ; qu’en inscrivant en recettes une somme de 5 245 442 F, égale au montant des engagements de subventions que le Département souhaitait prendre à l’égard des communes, au cours de l’année 1983, pour les années 1983, 1984 et 1985, le Conseil général a procédé à une évaluation entachée d’erreur de droit et a adopté une décision modificative dans laquelle, du fait de cette évaluation, la section d’investissement n’était pas en équilibre réel ; qu’il a ainsi méconnu les dispositions précitées de l’article 8 de la loi du 2 mars 1982 ; que cette méconnaissance entache d’illégalité dans sa totalité la décision modificative nº 1, laquelle, eu égard au lien existant entre l’équilibre de la section de fonctionnement et l’équilibre de la section d’investissement, présente un caractère indivisible ; qu’il résulte de tout ce qui précède que le département du Tarn n’est pas fondé à soutenir que c’est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Toulouse a annulé la délibération susvisée du Conseil général ; Décide : Article premier. – La requête du département du Tarn est rejetée. Art. 2. – La présente décision sera notifiée au département du Tarn à MM. Barbut, Brives, Cabane, Cayla, Sagnes et Limouzy et au ministre de l’Intérieur. No 6 - Juin 2008 - chronique de jurisprudence financière Clefs proposées (base Jade) : 18-01-03-01-01 (responsabilité - succession de comptables) 쐍 18-01-03-01-02 (réserves émises par le comptable entrant) 쐍 18-03-05 (créances des collectivités publiques - restes à recouvrer). CRC Picardie, jugement nº 2006-0159/999 du 5 juillet 2007 (audience du 5 juin 2007), Lycée agricole d’Airion (Oise). Résumé : Aucun état des restes à recouvrer n’ayant été produit, la Chambre prononce un débet à l’encontre d’un comptable sorti de fonctions au cours de la période en jugement pour le montant du solde injustifié au 31 décembre du dernier exercice jugé. Doctrine : Instruction budgétaire et comptable applicable aux établissements publics locaux d’enseignement et de formation professionnelle agricoles (M 99) 쐍 Instruction nº 01-020-M9 du 13 février 2001 sur la formulation de réserves par les agents comptables d’établissements publics locaux d’enseignement dépendant du ministère de l’Agriculture et de la Pêche sur la gestion de leurs prédécesseurs 쐍 Instruction nº 03-030-M0 du 9 mai 2003 sur les comptes de gestion dans le secteur public local. Références jurisprudentielles : • financières : C. comptes, 25 mars 1989, Office public d’habitations à loyer modéré de Roubaix (Nord) 쐍 C. comptes, 24 février 2005, Centre hospitalier de Bastia (Haute-Corse). Textes de référence : Article 60 de la loi nº 63-156 du 23 février 1963 modifié 쐍 Articles L. 231-10 et D. 131-40 du Code des juridictions financières. Commentaires Pour des raisons tenant non seulement à la fiabilité des comptes mais aussi au régime spécial de responsabilité des comptables publics – en particulier, leur obligation de justifier du non-recouvrement des recettes –, les instructions budgétaires et comptables (de même que l’instruction sur les comptes de gestion dans le secteur public local) prévoient que des états des restes à recouvrer doivent être produits à l’appui du compte de gestion sur chiffres pour justifier les soldes des comptes de prise en charge de titres (ou ordres) de recettes au 31 décembre de l’exercice. Lorsque des différences en moins sont constatées (entre l’état des restes et le solde à la balance de clôture), la responsabilité du comptable peut être mise en jeu (v. La Revue du Trésor nº 1-2008, CRC Corse, Commune de Castifao, p. 74). C’est, bien entendu, également le cas si aucun état des restes n’est produit : l’absence de production d’un état des restes à recouvrer peut, en effet, être assimilé à une différence en moins de la totalité du solde en écritures. Le présent jugement de la chambre régionale des comptes de Picardie traite précisément de ce cas de désordre important de la comptabilité, compliqué par une succession de mutations de comptables. 1. Les réserves La solution retenue s’écarte quelque peu de la jurisprudence habituelle, clairement explicitée par la Cour des comptes dans son arrêt du 25 mars 1989 concernant l’Office public d’habitations à loyer modéré de Roubaix (v. ci-dessous). Dans cet arrêt, la Cour précisait, en la matière (4), la portée de la disposition de la loi nº 63-156 qui veut que la responsabilité d’un comptable « ne peut être mise en jeu à raison de la gestion de leurs prédécesseurs que pour les opérations prises en charge sans réserve lors de la remise de service ou qui n’auraient pas été - No 6 - Juin 2008 contestées par le comptable entrant, dans un délai fixé par l’un des décrets prévus au paragraphe XII ci-après » (art. 60-III). Il était ainsi affirmé que cette simple faculté ne saurait entraîner l’obligation pour le juge des comptes de retenir la responsabilité du seul comptable entrant en fonctions dès lors qu’il est avéré que les faits générateurs se situent à une date antérieure à sa prise de fonctions. C’est d’ailleurs ce principe qui justifie qu’un comptable n’a pas, a priori, besoin d’émettre des réserves pour l’absence de recouvrement de titres devenus manifestement irrécouvrables avant sa prise de fonctions. Dans le cas des états de restes à recouvrer, il suffit, pour établir cette circonstance, d’examiner ceux produits (ou non) au 31 décembre de l’exercice précédent la remise de service à défaut de disposer de ceux qui devraient être établis à la date de sortie de fonctions (v. également La Revue du Trésor nº 1-2008). Au cas particulier, la Chambre a considéré que cette situation n’était pas avérée pour le comptable dont la responsabilité a été finalement retenue, entré en fonctions le 3 juin 1996, alors que son successeur, entré en fonctions le 27 septembre 1999, était couvert par ses réserves. La Chambre rejette, en outre, l’argument du comptable tenant à l’absence de notification de ces réserves dans les conditions prévues par l’instruction nº 37-113-V1 du 13 novembre 1997 (qui concerne les comptables non centralisateurs du Trésor et a précédé l’instruction nº 01-020-M9 propre aux agents comptables des établissements publics locaux d’enseignement et de formation professionnelle agricoles [5]). 2. Le montant du déficit imputable au comptable défaillant et le point de départ des intérêts du débet Le jugement s’écarte également du raisonnement tenu par l’arrêt « OPHLM de Roubaix » s’agissant du montant du débet prononcé. L’arrêt rappelait, en effet, que c’est au comptable en fonctions au 31 décembre qu’il appartient d’apporter la preuve de la concordance entre le solde porté au compte sur chiffres et l’état nominatif des restes afférents aux exercices antérieurs. Selon ce raisonnement, un comptable ne devrait être rendu responsable que des différences qui ont été constatées avant sa sortie de fonctions. En l’occurrence, si le montant du débet est fixé au montant du déficit existant à une date où le comptable mis en cause n’était plus en fonctions c’est, comme l’explique la Chambre, dans son propre intérêt puisque le montant des restes à recouvrer sur exercices antérieurs (identiques à ceux au 31 décembre de l’exercice précédent mais auxquels viennent s’ajouter les restes sur cet exercice précédent) avait diminué (6). Du strict point de vue de la tenue de la comptabilité, il est d’ailleurs préférable que le montant du débet soit fixé à la différence qui subsiste (si cette différence est inférieure au déficit strictement imputable au comptable mis en cause), car le débet a, dans ce cas, pour objet principal de rétablir la fiabilité des comptes et non pas tant de sanctionner une irrégularité. On notera, cependant, que le point de départ des intérêts du débet a été fixé à la date de sortie de fonctions du comptable mis en cause, considérée comme étant celle d’apparition du déficit, et non pas à « celle de la clôture de l’exercice à laquelle la différence est constatée », solution retenue par l’avis des chambres réunies de la Cour des comptes nº 3469 en date du 18 mars 1996. Cette question n’est, cependant, plus d’actualité puisque l’article 60-VIII de la loi nº 63-156 dispose désormais que « les débets portent intérêt au taux légal à (4) L’arrêt traite aussi bien de soldes débiteurs que de soldes créditeurs et de différences en moins que de différences en plus. (5) Laquelle prévoit que les réserves sont communiquées au comptable sortant par le directeur régional de l’agriculture et de la forêt, via le trésorier-payeur général seulement lorsque l’agent comptable est un agent du Trésor Public. (6) Sauf à imaginer des écritures d’ordre ou un versement spontané de la part de débiteurs non relancés, ce fait laisse supposer qu’une partie au moins des restes était identifiée. 469 chronique de jurisprudence financière compter du premier acte de la mise en jeu de la responsabilité personnelle et pécuniaire des comptables publics » lorsque ce premier acte est intervenu après le 1er juillet 2007 (v. art. 146-II de la loi nº 2006-1771 du 30 décembre 2006), et non plus « à compter de la date du fait générateur ou, si cette date ne peut être fixée avec précision, à compter de celle de leur découverte » (ancienne formulation du même article). 3. La production tardive des états des restes Enfin, on signalera que la Cour des comptes admet que l’état des restes à recouvrer puisse être produit en appel (v. ci-dessous, arrêt d’appel du 24 février 2005, CHG de Bastia). Dans ce cas, si la Cour infirme le débet prononcé pour le montant total du solde injustifié en première instance, elle renvoie l’affaire devant la Chambre à fin que l’état produit tardivement soit examiné et que la responsabilité du comptable en recettes puisse éventuellement être mise en jeu. On peut en déduire que le juge de première instance devrait, avant d’en arriver au débet, utiliser la faculté qui lui est donnée, en application de l’article L. 231-10 du Code des juridictions financières, de poursuivre l’injonction de production de l’état des restes à recouvrer manquant par une amende pour défaut de réponse à cette injonction. On sait, cependant, que la modicité de cette amende (actuellement, 3 c par injonction et par mois de retard en application de l’art. D. 131-40 du code) a conduit à son abandon progressif, dans la pratique. CRC Picardie, jugement du 5 juillet 2007 La chambre régionale des comptes de Picardie statuant en formation plénière, Vu les jugements du 15 décembre 2003, du 29 août 2005 et du 31 mars 2006 sur les comptes du lycée agricole d’Airion pour les exercices 1990 à 2000 ; [...] Vu l’effet de la prescription acquisitive susvisée sur la décharge de M. José A... du 3 juin 1996 au 31 décembre 1996 ; Vu les conclusions de Mme la Commissaire du Gouvernement ; Après avoir entendu en audience publique M. Richard, conseiller, en son rapport ; Mme Bosredon, commissaire du Gouvernement, en ses conclusions ; Après avoir délibéré en dehors de la présence du rapporteur et de Mme la Commissaire du Gouvernement ; Ordonne ce qui suit : Statuant définitivement, Injonction unique : compte 4121 « autres clients exercices antérieurs » - Solde débiteur de 379 034,40 F (57 783,42 g) en fin d’exercice 2000 : 470 Attendu que le solde débiteur en fin d’exercice 2000 du compte 4121 « autres clients exercices antérieurs », soit 379 034,40 F (57 783,42 c), n’est justifié par aucun état que le successeur de M. A... a formulé des réserves lors de sa prise de fonctions sur l’absence d’état de développement complet des soldes à la balance de sortie de fonctions de M. A... le 27 septembre 1999 ; que le solde du compte à la remise de service de M. A... était supérieur au solde de fin d’exercice 2000 ; Attendu qu’il a été enjoint à M. A... de produire la preuve du versement de la somme de 57 783,42 c dans la caisse du lycée agricole d’Airion ou toute autre justification à décharge ; Attendu que M. A... se réfère aux arguments qu’il avait développés dans sa réponse du 10 novembre 2005 au jugement précédent ; que dans ce courrier, M. A... faisait valoir que lors de sa prise de fonctions, l’état de développement détaillé de ces comptes et des autres comptes de tiers n’avait pas pu être fourni par son prédécesseur ; qu’ayant constaté des errements dans les restes à recouvrer, son action a été orientée vers le recouvrement effectif et que cela apparaît en comparant les soldes à son arrivée et à son départ ; qu’il a fourni au cours de sa gestion des explications à la Chambre sur l’insuffisance de certains documents remis par ses prédécesseurs à l’appui des comptes de gestion ; que le contenu des réserves formulées par son successeur ne lui aurait pas été notifié et que cela rend désormais toute régularisation impossible compte tenu de l’éloignement consécutif à sa mutation et de l’ancienneté de sa cessation de fonctions ; Attendu cependant que M. A... n’avait pas, au vu des pièces de mutation, formulé de réserves sur son prédécesseur ; que les explications qu’il aurait fournies à la Chambre sur l’insuffisance de certains documents remis par ses prédécesseurs ne figurent pas au dossier et ne pourraient pas, en tout état de cause, tenir lieu de réserves sur ses prédécesseurs ; que la circonstance que le contenu des réserves formulées par son successeur ne lui aurait pas été notifié ne peut l’exonérer de produire les justifications demandées, la nature des réserves en cause ayant au demeurant été rappelée dans le jugement précédent ; Attendu que M. A... ajoute que sa mise en cause personnelle pour l’intégralité du solde débiteur du compte « autres clients exercices antérieurs » lui paraît disproportionnée « dans la mesure où l’état des restes nominatif arrêté à la clôture de la gestion 1999 ou du moins le stock des titres sur exercices antérieurs restant à recouvrer doit faire apparaître un solde très proche de celui existant à la date de sa remise de service » ; Attendu toutefois qu’en l’absence d’état détaillé des restes, il s’avère que le solde du compte à la remise de service de M. A... était de 543 014,07 F (82 781,96 c), montant supérieur au solde au 31 décembre 1999, soit 509 468,46 F (77 667,96 c) , et également au solde de fin d’exercice 2000 (57 783,42 c) ; que cette situation montre seulement que le solde du compte a été ramené à un montant inférieur en fin 1999, puis a encore été réduit en fin 2000 et que c’est ce dernier montant qui est retenu à la charge de M. A..., et non le solde à la date de sa remise de service comme il l’indique dans sa réponse ; Attendu qu’en vertu des articles 11 et 12 du décret nº 62-1587 du 29 décembre 1962 portant règlement général sur la comptabilité publique et de l’article 60-I de la loi de finances pour l963 nº 63-156 du 23 février 1963, les comptables publics sont personnellement et pécuniairement responsables de la tenue de la comptabilité, de la conservation des pièces justificatives et du défaut de recouvrement des recettes qu’ils ont prises en charge dans leurs écritures ; qu’à cet effet ils sont tenus de justifier de ce recouvrement ou de l’existence des restes à recouvrer qui doivent figurer sur une liste détaillée ; qu’à défaut leur responsabilité personnelle et pécuniaire est engagée pour le montant des restes à recouvrer qu’ils n’ont pu justifier ; Attendu que la réponse du comptable n’est pas de nature à l’exonérer de sa responsabilité ; Attendu qu’à défaut de versement dans la caisse du lycée agricole d’Airion, il y a lieu de mettre à la charge de M. José A... la somme de 57 783,42 c majorée des intérêts de droit à compter du 27 septembre 1999, date de sa sortie de fonction. Par ces motifs : L’injonction prononcée par le jugement du 31 mars 2006 est levée ; M. José A... est déclaré débiteur de la somme de cinquante-sept mille sept cent quatrevingt-trois euros quarante-deux centimes envers la caisse du lycée agricole d’Airion, majorée des intérêts de droit à compter du 27 septembre 1999, date de sa sortie de fonction. En conséquence, le sursis à décharge de M. José A... pour sa gestion du 1er janvier 1997 au 27 septembre 1999 est maintenu. Conclusions du Ministère public nº C 2006-0159-999 du 24 mai 2007 [...] Sur le fond : Dans l’hypothèse où la Chambre estimerait régulière la procédure suivie, il y a lieu de conclure au fond. Le fondement de l’injonction formulée par la Chambre repose sur une défaillance en No 6 - Juin 2008 - chronique de jurisprudence financière matière de tenue de comptabilité et plus particulièrement l’absence de justification des restes à recouvrer. En réponse au dernier jugement, le comptable reprend les arguments qu’il a déjà développés en réponse au jugement du 29 août 2005 et relatifs à : – l’absence d’états de soldes des comptes de tiers à sa prise de fonction ; – la production à la Chambre d’explications sur l’insuffisance des documents remis par ces prédécesseurs ; – l’absence de notification des réserves de son successeur, cette circonstance rendant selon impossible toute rectification du fait de l’ancienneté de la situation et de son éloignement. Ainsi que le souligne le rapporteur la Chambre a déjà réfuté dans son jugement précédent ces arguments. Sur l’absence de réserves : Les dispositions de l’article 60-III de la loi nº 63-156 du 23 février 1963 précisent que la responsabilité du comptable ne peut être mise en jeu à raison de la gestion de son prédécesseur pour les opérations prises en charge sans réserve lors de la remise de service ou qui n’auraient pas été contestées par le comptable entrant, dans un délai fixé par l’un des décrets prévus au paragraphe XII du même article ». En l’absence de formulation de réserve, M. A... a accepté les opérations de son prédécesseur. A supposer établi les explications produites à la Chambre, qui ne figurent toutefois pas au dossier, celles-ci ne sauraient se substituer et produire les mêmes effets que l’émission de réserves dans les délais prescrits. Si la Cour des comptes, statuant en appel, le 27 novembre 1992, sur le jugement du lycée agricole de Meymac, a eu l’occasion de préciser que la responsabilité du comptable entrant ne saurait être engagée dès lors qu’il n’a pas pu se prononcer, selon la réglementation en vigueur, sur une situation qui ne lui pas été transmise régulièrement en raison de l’absence de remise de service et des pièces normalement jointes telles que les états de soldes, cette jurisprudence s’appuyait sur les éléments du dossier. Au cas particulier, un procès verbal de remise de service a bien été établi le 3 juin 1996. Cette remise de service précise qu’« après nous être fait remettre les livres, états, documents et pièces comptables relatifs au lycée d’Airion, Avons procédé à la remise de service à M. José A..., trésorier de Bresles ». La circonstance que la Chambre ne possède que le procès-verbal de remise de service précité et une balance générale des comptes ne saurait, en l’absence d’autres éléments et compte tenu des énonciations dudit procès-verbal, être suffisant à établir l’inexistence des états de soldes de comptes de tiers lors de - No 6 - Juin 2008 cette remise de service. Elle induit toutefois un doute. Mais nous rappelons à cet égard que l’instruction générale du 16 août 1966 sur l’organisation du service des comptables publics précise que « les énonciations du procès-verbal font foi jusqu’à preuve du contraire ». Nous constatons que les allégations du comptable ne sont appuyées d’aucun élément, d’aucune pièce. Sur l’absence d’états de restes à sa prise de fonctions et les explications du comptable : L’argument développé par le comptable tend à imputer à son prédécesseur la responsabilité de l’apparition du déficit. En vertu d’une jurisprudence constante, l’existence d’un montant de restes à recouvrer qui n’est pas justifié par des créances d’égal montant figurant à l’état de développement correspond à l’inscription, parmi les actifs retracés au compte, de créances n’ayant pas d’existence réelle, non identifiées ou ne pouvant être effectivement mises en recouvrement (C. comptes, 19 janvier 1989, Dubourg). Cette inscription non justifiée, considéré par le juge des comptes comme un manquant en deniers, engage la responsabilité du comptable ainsi que le prévoit le paragraphe IV de l’article 60 de la loi du 23 février 1963. Il ne suffit pas toutefois que la Chambre constate un déficit sous la gestion d’un comptable n’ayant pas émis de réserve pour engager sa responsabilité. En effet, en l’absence de réserve du comptable entrant, il est de jurisprudence constante qu’en matière d’apparition de déficit dans la comptabilité, le comptable « ne saurait être tenu pour responsable des écarts, même s’il n’a pas formulé de réserve sur la gestion de son prédécesseur à son entrée en fonctions, dès lors que le fait générateur de la responsabilité du comptable se situait à une date antérieure à sa prise de fonctions » (CC, 23 mars 1989, W... et D..., GAJF, p. 130 et s.). A cet égard la Chambre pourrait estimer suffisantes les allégations du comptable tendant à imputer la responsabilité de la défaillance en matière de tenue de comptabilité, à son prédécesseur. Si tel est le cas, elle ne pourra que lever et décharger M. A..., la Chambre ayant octroyé quitus audit prédécesseur. Compte tenu de l’absence totale d’éléments et de pièces permettant de retenir la thèse du comptable, solution qui a notre préférence, la Chambre paraît fondée à poursuivre la mise en œuvre de la responsabilité du comptable. Sur l’absence de notification des réserves par le trésorier-payeur général : La circonstance que les réserves de son successeur n’aient été notifiées au comptable par le trésorier-payeur général contrairement aux dispositions de l’instruction nº 37-113-V1 du 13 novembre 1997, qui vise à assurer une information, ne constitue nullement un élément s’opposant à l’action du juge des comptes. Sur l’absence de régularisation ultérieure, tenons à rappeler que le comptable qui s’exonère de la production des états de soldes des comptes de tiers s’en remet à ces successeurs pour leur établissement et la fixation du déficit. En conclusion, nous rappellerons qu’aux termes du paragraphe I de l’article 60 de la loi nº 63-156 du 23 février 1963 et de l’article 11 du règlement général sur la comptabilité publique, les comptables publics sont personnellement et pécuniairement responsables de la tenue de la comptabilité du poste comptable qu’ils dirigent et que la responsabilité personnelle et pécuniaire d’un comptable peut être mise en jeu par le juge des comptes au titre d’un solde de restes à recouvrer non justifié lors de la remise de service à son successeur. [...] Sur les intérêts de débet : Aux termes de l’article 60-VIII de la loi nº 63-156 du 23 février 1963, dans sa rédaction en vigueur jusqu’au 1er juillet prochain « les débets portent intérêt au taux légal à compter de la date du fait générateur ou si cette date ne peut être fixée avec précision à compter de celle de leur découverte ». Il vous est proposé de retenir la date de sortie de fonctions, soit le 27 septembre 1999. Cette date correspond à la découverte du fait générateur de la défaillance en matière de tenue de comptabilité. Corinne BOSREDON. Cour des comptes, arrêt du 25 mars 1989 La Cour, Vu le réquisitoire, en date du 6 mai 1988, par lequel le procureur général de la République l’a saisie de l’arrêté du trésorier-payeur général du Nord en date du 19 avril 1988, déclarant à titre conservatoire M. W..., ancien comptable de l’office public d’habitations à loyer modéré de Roubaix, débiteur envers cet établissement d’une somme de 76 837,32 F ; (...) Après avoir entendu M. Isnard, conseiller maître, en son rapport, et M. Fabre, conseiller maître, en ses observations ; Considérant que, dans son arrêté conservatoire de débet du 19 avril 1988, le trésorierpayeur général du Nord a fixé le débet susvisé à 76 837,32 F, somme égale à la différence en moins entre les états de restes à recouvrer et le solde des comptes 410 et 412, « locataires exercices courant et antérieurs », soit 74 711,38 F, et du compte 417, « organismes payeurs d’APL », soit 605,94 F, et à des sommes 471 chronique de jurisprudence financière payées à tort au compte 462, « dépôts de garantie des locataires », et non régularisées, soit 1 520 F ; Considérant qu’il avait été enjoint au comptable, dans le bordereau d’injonctions précité en date du 20 juillet 1987, de rapporter la preuve du reversement des sommes de 74 711,38 F et 605,94 F susmentionnées et, en ce qui concerne le compte 462, d’une somme de 4 022,73 F ; Considérant que l’arrêté du 19 avril 1988 a déclaré M. W... débiteur en premier lieu d’une somme de 74 711,38 F représentant la différence entre le montant des restes à recouvrer sur les locataires pour l’exercice 1982 et les exercices antérieurs portés au compte financier à la fin de la gestion 1982, d’une part, et les états de développement, d’autre part, différence qui est restée inchangée à la fin des gestions 1983, 1984 et 1985 ; Considérant que ce chiffre, qui se répartit en 20 146,73 F pour l’exercice 1982 et 54 564,65 F pour les exercices 1981 et antérieurs représente la différence entre le solde du compte 412, « locataires exercices antérieurs, au 31 décembre 1983 (4 297 651,11 F dont 2 609 663,29 F pour l’exercice 1982 et 1 687 987,82 F pour les exercices 1981 et antérieurs) et l’état de développement du compte 412 au 31 décembre 1983, établi par M. S..., comptable de l’office à partir du 1er octobre 1984, et rectifié conformément à la lettre de l’intéressé en date du 12 décembre 1986 (4 222 939,73 F, dont 2 589 516,56 F pour l’exercice 1982 et 1 633 423,17 F pour les exercices 1981 et antérieurs) ; Considérant qu’en l’absence d’états de restes à recouvrer définitifs à la date du 31 décembre 1982 pour les exercices 1981 et antérieurs et au moment du transfert des restes de l’exercice 1982 du compte 411 au compte 412 pour l’exercice 1982, l’insuffisance de justification des restes à recouvrer afférents aux exercices 1982 et antérieurs peut valablement être appréciée d’après l’état établi au 31 décembre 1983 ; Considérant qu’en vertu des articles 11 et 12 du décret du 29 décembre 1962 et de l’article 60 de la loi du 23 février 1963, les comptables publics sont personnellement et pécuniairement responsables de la tenue de la comptabilité, de la conservation des pièces justificatives des opérations et du défaut de recouvrement des recettes qu’ils ont prises en charge dans leurs écritures ; qu’à défaut de cet effet, ils sont tenus de justifier de ce recouvrement ou de l’existence des restes à recouvrer qui doivent figurer sur une liste détaillée ; qu’à défaut, ils doivent verser la différence existant entre le solde des comptes des restes à recouvrer inscrits à leur compte financier et le montant des restes dont ils ont pu justifier ; Considérant qu’aux termes de l’article 60, paragraphe III, de la loi du 23 février 1963 la 472 responsabilité pécuniaire des comptables publics s’étend à toutes les opérations du poste comptable qu’ils dirigent depuis la date de leur installation jusqu’à la date de cessation de fonctions ; Considérant que, si l’article 60, paragraphe III, de ladite loi dispose également que la responsabilité des comptables peut être mise en jeu à raison de la gestion de leurs prédécesseurs pour les opérations prises en charge sans réserve lors de la remise de service, ou qui n’auraient pas été contestées par le comptable entrant dans le délai fixé par l’un des décrets prévus au paragraphe XII, cette faculté ne saurait entraîner l’obligation pour le juge des comptes de retenir la responsabilité du comptable entrant en fonctions dès lors qu’il est avéré que les faits générateurs de la responsabilité se situent à une date antérieure à la prise de fonctions du nouveau comptable ; Considérant que le solde du compte 412, Locataires exercices antérieurs, doit être justifié à la date du 31 décembre, et que c’est donc au comptable en fonctions à cette date qu’il appartient d’apporter la preuve de la concordance entre le solde porté au compte financier et l’état nominatif des restes afférents aux exercices antérieurs ; que ne peut être mouvementé pendant la journée complémentaire de l’exercice, en ce qui concerne les restes à recouvrer sur les exercices antérieurs, que du fait d’annulations ou d’admission en non-valeurs de titres de recette, à l’exclusion d’émission de nouveaux titres et de la constatation des encaissements ; qu’en l’espèce les écarts injustifiés ne sauraient trouver leur origine pendant la journée complémentaire ; Qu’ainsi, c’est M. D..., receveur de l’office public d’HLM de Roubaix jusqu’au 31 décembre 1982, qui était responsable de la justification du solde du compte 412 concernant les restes à recouvrer sur les exercices 1981 et antérieurs figurant au compte financier de 1982, et donc des écarts constatés entre les écritures de ce compte et l’état de développement ; que M. W..., qui n’a été en fonctions que pendant la journée complémentaire de l’exercice 1982 en janvier 1983, ne saurait être tenu pour responsable de ces écarts même s’il n’a pas formulé de réserve sur la gestion de son prédécesseur à son entrée en fonctions, dès lors que le fait générateur de la responsabilité du comptable se situait à une date antérieure à sa prise de fonctions ; Qu’il convient donc, d’une part, d’infirmer à concurrence de 54 564,65 F, montant de la différence en moins sur les restes à recouvrer pour les exercices 1981 et antérieurs, l’arrêté conservatoire de débet du 19 avril 1988 pris à l’encontre de M. W..., d’autre part, d’enjoindre à M. D..., comptable de l’office d’HLM de Roubaix pendant l’année 1982, jusqu’au 31 décembre, de rapporter la preuve de la reconstitution dans la caisse de l’office de ladite somme de 54 564,65 F ; Considérant qu’en ce qui concerne l’exercice 1982, la justification nominative des restes ne devait pas nécessairement être apportée au 31 décembre 1982, mais, conformément à l’article 3435 de l’instruction M 31 sur la comptabilité des offices publics d’HLM, lors du transfert du solde des restes du compte 411 au compte 412 ; que la responsabilité de justifier ces restes incombait donc à M. W... et que celui-ci, en l’absence de réserve motivée à l’égard de son prédécesseur, est responsable de la différence en moins de 20 146,73 F entre les écritures et la justification nominative des restes à recouvrer ; qu’il y a donc lieu de confirmer à concurrence de ladite somme de 20 146,73 F l’arrêté conservatoire de débet du 19 avril 1988, en fixant les intérêts de droit à compter de la date de clôture de l’exercice 1982, au 31 janvier 1983 ; Considérant que l’arrêté du 19 avril 1988 a déclaré M. W... débiteur en second lieu d’une somme de 605,94 F représentant la différence entre le solde du compte 417, « organismes payeurs de l’APL », au 31 décembre 1983, et l’état de développement du solde, après les rectifications d’écritures qui ont eu pour effet de transformer le solde débiteur de ce compte de 1 507,48 F en un solde créditeur de 23 527,77 F et une régularisation de 0,24 F qui a ramené l’écart de 606,18 F (soit 24 133,95 – 23 527,77 F) à 605,94 F ; Considérant que, compte tenu de la nature de ces opérations, l’existence à l’état de développement de soldes créditeurs d’un montant total supérieur à celui figurant au compte pourrait être de nature à engager la responsabilité du comptable, puisque ces soldes représentent des sommes dues par l’office ; Mais considérant que l’état de développement du solde du compte 417 au 31 décembre 1982, signé par M. W... le 11 décembre 1983 et transmis par le trésorierpayeur général du Nord, fait au contraire apparaître un excédent des soldes débiteurs sur les soldes créditeurs supérieur aux soldes débiteurs portés aux comptes 1982 ; qu’au surplus, la lettre du receveur de l’office en date du 31 août 1987 indique qu’aucune différence n’a été constatée au 31 décembre 1982 ; Considérant qu’un écart qui existait au 31 décembre 1983, mais non au 31 décembre 1982, ne saurait engager la responsabilité du comptable au titre de l’exercice 1982 ; Considérant qu’il y a donc lieu d’infirmer l’arrêté conservatoire de débet pour la somme de 605,94 F ; No 6 - Juin 2008 - chronique de jurisprudence financière Considérant que l’arrêté du 19 avril 1988 a déclaré M. W... débiteur en troisième lieu d’une somme de 1 520 F, égale à la « somme en moins de 6 209,10 F correspondant à des sommes payées à tort » moins les régularisations ultérieures provenant du remboursement des trop-payés au compte 462 « dépôts de garantie des locataires » ; Considérant qu’il n’a pas été produit d’état de développement du solde du compte 462 pour les exercices 1978 à 1982 qui puisse apporter la preuve de la concordance entre les écritures et la liste nominative des dépôts ; mais considérant que les irrégularités relevées au sujet de ce compte se rapportent au paiement de dépenses indues, représentant des remboursements effectués à des locataires qui n’avaient pas versé de dépôt de garantie ou qui ont remboursés deux fois ; que la responsabilité de ces irrégularités incombe au comptable qui a effectué les paiements irréguliers ; Considérant qu’il résulte de la lettre du trésorier-payeur général du Nord en date du 31 août 1988 que le montant des sommes irrégulièrement payées et non reversées par les bénéficiaires de ces paiements indus se trouvait alors ramené à 1 370 F, dont 100 F payés avant 1982 et 1 270 F en 1982 (50 F le 31 mars à M. B... B..., 100 F le 19 mai à M. P..., 150 F le 19 mai à M. T..., 150 F le 3 août à M. H..., 60 F le 30 août à M. M..., 320 F le 3 août à M. W..., 150 F le 18 février à M. D...., 170 F le 3 août à M. B... et 120 F le 7 mai à un locataire non identifié) ; considérant qu’il y a donc lieu d’infirmer l’arrêté conservatoire de débet pour la somme de 1 520 F et d’en joindre à M. D..., comptable de l’office d’HLM de Roubaix du 1er janvier au 31 décembre 1982, qui a payé à tort les sommes susmentionnées de 50, 100, 150, 150, 60, 320, 150, 170 et 120 F, soit 1 270 F au total, de rapporter la preuve de la reconstitution desdites sommes dans la caisse de l’office ; Par ces motifs, Ordonne ce qui suit : Statuant définitivement, L’arrêté du trésorier-payeur général du Nord en date du 19 avril 1988 concernant le débet de M. W... est confirmé à concurrence de 20 146,73 F et infirmé pour le surplus. La somme de 20 146,73 F portera intérêts à compter du 31 janvier 1983, date de clôture de l’exercice 1982. Statuant provisoirement, Il est enjoint à M. D..., comptable de l’office d’HLM de Roubaix du 1er janvier au 31 décembre 1982, d’apporter la preuve de la reconstitution dans la caisse de l’office des sommes, d’une part, de 54 564,65 F, représentant le montant de la différence entre les écritures et les restes à recouvrer justifiés au titre des exercices 1981 et antérieurs, et, d’autre part, de 1 270 F, représentant les sommes - No 6 - Juin 2008 indûment payées au cours de l’année 1982 sur le compte 462 à titre de remboursement des dépôts de garantie de locataires et non reversées par les bénéficiaires des indus paiements. Il devra être satisfait aux dispositions du présent arrêt dans un délai de deux mois à compter du jour de sa notification. Cour des comptes, arrêt du 24 février 2005 La Cour, Vu la requête, enregistrée le 13 septembre 2004 au greffe de la chambre régionale des comptes de Corse, par laquelle M. M..., comptable du centre hospitalier général de Bastia (Haute-Corse), demande l’infirmation du jugement du 11 février 2004 de cette chambre régionale en tant qu’il l’a constitué débiteur des deniers de l’établissement d’une somme de 3 226 047,59 c, augmentée des intérêts de droit, requête qui est accompagnée d’une demande de sursis à exécution ; Vu les avis de réception faisant preuve de la notification de la requête en cause à toutes les parties désignées dans ledit jugement ; Vu le réquisitoire du procureur général de la République en date du 14 décembre 2004 appuyant la transmission de la requête précitée ; Vu les pièces de procédure de première instance, ensemble le jugement provisoire du 29 avril 2003 et les dispositions définitives du jugement du 11 février 2004 dont est appel ; Vu le Code des juridictions financières ; Vu l’article 60 de la loi de finances nº 63-156 du 23 février 1963 modifiée ; Vu le décret nº 62-1587 du 29 décembre 1962 portant règlement général sur la comptabilité publique ; Vu les conclusions du procureur général de la République en date du 21 février 2005 ; Après avoir entendu M. Thérond, conseiller maître, en son rapport et M. Lefoulon, conseiller maître, en ses observations ; Sur la recevabilité : Attendu que M. M..., comptable constitué en débet par le jugement définitif susvisé du 11 février 2004, a qualité et intérêt à en élever appel ; que sa requête a été déposée dans les formes et délai réglementaires ; qu’elle est donc recevable ; Sur la demande de sursis à exécution : Attendu que l’appel est en état d’être jugé ; qu’il n’y a donc pas lieu à statuer sur la demande de sursis à exécution ; Au fond : Attendu que la chambre régionale des comptes a constitué M. M... débiteur des deniers du centre hospitalier général de Bastia pour la somme de 3 226 047,59 c, augmentée des intérêts de droit à compter du 31 décembre 1996, au motif que le comptable avait été dans l’impossibilité de produire l’état de restes à recouvrer du compte 4141 au 31 décembre 1996 ; Attendu que l’appelant fait valoir, à l’appui de sa requête, d’une part, qu’il est en mesure de produire au juge d’appel l’état de restes à recouvrer en cause et, d’autre part, que son successeur, faute d’avoir formulé des réserves sur sa gestion au moment de sa prise de fonctions, avait endossé la responsabilité de produire l’ensemble des pièces à l’appui du compte financier 1996 ; Attendu que M. M... a effectivement communiqué à la Cour un état de restes à recouvrer arrêté à la date du 31 décembre 1996 et comportant 18 386 titres pour un montant de 3 198 449,78 c ; qu’en dépit de l’existence d’une différence en moins entre ce montant et celui du débet, différence que la chambre régionale des comptes pourra éventuellement prendre en compte pour apprécier la responsabilité personnelle et pécuniaire du comptable, le fondement juridique sur lequel s’appuyait la disposition attaquée du jugement du 11 février 2004 n’existe plus ; qu’il y a donc lieu d’infirmer ladite disposition ; Par ces motifs et sans qu’il soit besoin d’examiner le second moyen de la requête, Statuant définitivement, Ordonne : Le jugement de la chambre régionale des comptes en date du 11 février 2004 est infirmé en tant qu’il a constitué M. M... débiteur pour la somme de 3 226 047,59 c, augmentée des intérêts de droit. Il reviendra à la chambre régionale des comptes de donner au présent arrêt telle suite qu’il appartiendra. Conclusions du Ministère public nº CC76785 du 21 février 2005 Nous, procureur général de la République ; Vu le rapport nº 2005-052-0 revêtu du soit-communiqué du président de la 4e Chambre ; Ensemble les pièces à l’appui ; Considérant que, par jugement nº 03-023 du 29 avril 2003, la chambre régionale des comptes de Corse, statuant provisoirement sur les comptes présentés par M. Robert M..., comptable du centre hospitalier général de Bastia, pour les exercices 1994 du 1er janvier à 1998 au 1er janvier, a notamment enjoint à celui-ci d’apporter la preuve du reversement dans la caisse dudit centre des sommes de 1 808 446,64 c (11 862 632,30 F) 473 chronique de jurisprudence financière et 3 226 047,59 c (21 161 484,97 F) représentant deux différences existant entre le solde des restes à recouvrer inscrits au compte de gestion et le montant des restes dont il a pu être justifié ; Que, par jugement nº 04-004 du 11 février 2004, la chambre régionale a, statuant provisoirement, maintenu l’injonction prononcée à l’encontre de M. Robert M... de présenter dans le délai d’un mois les justifications prévues par l’instruction M 21 ou de reverser la somme de 1 808 446,64 c (11 862 682,30 F) dans la caisse du centre hospitalier général de Bastia et, statuant définitivement, l’a déclaré débiteur envers l’établissement de la somme de 3 226 047,59 c (21 161 484,97 F) augmentée des intérêts de droit calculés à compter du 31 décembre 1996 ; Que, par requête en date du 10 septembre 2004, enregistrée au greffe de la chambre régionale le 13 septembre 2004, M. Robert M... a interjeté appel de la disposition définitive du jugement précité qui lui avait été notifié le 15 juillet 2004 et sollicité le bénéfice du sursis à exécution ; Que, par lettres des 17 septembre et 17 novembre 2004, le commissaire du Gouvernement près la chambre régionale des comptes de Corse Nous a transmis le dossier complet de cet appel qui comporte notamment la preuve de la notification du recours à la directrice du centre hospitalier général de Bastia le 20 septembre 2004 ; Que, saisie par Notre réquisitoire nº 2004-30 du 14 décembre 2004, la Cour est en mesure de statuer sur cet appel ; Avons pris connaissance avec intérêt du rapport susvisé qui appelle de Notre part les observations suivantes ; Sur la procédure : Sur la recevabilité de l’appel : Relevons que le comptable a qualité et intérêt à agir et que sa requête répond aux conditions de forme et de délai réglementaires ; que l’appel est donc recevable ; Sur la demande de sursis à exécution : Observons que le dossier étant désormais en état d’être jugé au fond le sursis est désormais sans objet ; Sur le fond : Constatons qu’à l’appui de son recours, le requérant soulève deux moyens, de nature à entraîner selon lui l’infirmation du jugement, relatifs, d’une part, au fait qu’en appel il a fourni un état des restes à recouvrer et, d’autre part, à la circonstance que, son successeur n’ayant pas formulé de réserves, ce dernier devrait endosser la responsabilité de produire l’ensemble des pièces à l’appui du compte financier 1996 ; 474 Sur la production d’un état de restes à recouvrer au 31 décembre 1996 : Rappelons que dans le jugement attaqué rendu le 11 février 2004, la chambre régionale a déclaré le comptable débiteur de la somme de 21 161 484,97 F (3 226 047,59 c) envers le centre hospitalier général de Bastia avec intérêts au 31 décembre 1996 après avoir constaté que ce dernier était dans l’impossibilité de produire l’état des restes à recouvrer pour l’exercice 1996, contrairement à l’injonction qui lui avait été faite par le jugement provisoire de reverser la somme de 21 161 484,97 F dans la caisse du centre hospitalier ou de produire dans le délai d’un mois toutes autres justifications à sa décharge, ladite somme correspondant au solde du compte 4141 au 31 décembre 1996 ; Relevons que, devant la Cour, le comptable a transmis en annexe à sa requête un « état de restes à recouvrer nº 1 arrêté à la date du 31 décembre 1996 » comportant 18 386 titres pour un montant de 3 198 449,78 c ; Rappelons, ainsi que le précise le commentaire au GAJF, sous l’arrêt Bernard (v. en ce sens, C. comptes, 3e Chambre, 23 mars 1989, Bernard, comptable de l’OPHLM de Montreuilsous-Bois, GAJF, éd. 1996, p. 441), que « l’appel formé contre un jugement régulièrement prononcé a un effet dévolutif. On entend par là que le juge d’appel se trouve en situation, et au demeurant tenu, de rejuger complètement l’affaire au fond, dans les seules limites de ce qui a été soumis au premier juge (tantum devolutum tantum judicatum) et de ce dont il a été fait appel (tantum devolutum quantum appellatum) » ; Soulignons, en l’espèce, que la requête en appel ne porte que sur la demande d’infirmation d’un jugement de débet fondé sur l’absence de production d’un état de restes à recouvrer relatif à l’année 1996 à l’exclusion de toute autre prétention ; Constatons que le grief fait au comptable de ne pas avoir pu fournir un état des restes à recouvrer au 31 décembre 1996 ne peut être maintenu au stade de l’appel ; qu’en conséquence, la Cour, par l’effet dévolutif, n’étant saisie que de la non-production d’un document obligatoire, à l’exclusion notamment de toute appréciation sur les diligences du comptable ou sur sa gestion, ne peut que prononcer l’infirmation du jugement attaqué en relevant que le document est désormais produit ; Constatons que l’état de développement produit, en dépit du fait qu’il comporte la date du 31 décembre 1996, ne fait pas apparaître le même montant que celui qui figure en solde du compte 4141, à la clôture du même exercice, puisque, dans le premier cas, le total figurant sur le document indique la somme de 3 198 449,78 c (20 980 455,22 F) alors que, dans le second, le montant s’élève à 21 161 484,26 F (3 226 047,48 c) soit une différence non expliquée de 27 597,81 c (181 029,76 F) admise d’ailleurs par le comptable lui-même dans sa requête ; En concluons qu’il appartiendra à la chambre régionale des comptes d’en tirer, le cas échéant, les conséquences en ce qui concerne la responsabilité des comptables ; Sur l’absence de réserves du comptable successeur : Rappelons, à titre subsidiaire, que le requérant soutient également que son successeur n’a pas formulé de réserves sur sa gestion alors que les dispositions de l’article 60-III de la loi nº 63-156 du 23 février 1963 précisent que la responsabilité du comptable ne peut être mise en jeu à raison de la gestion de son prédécesseur pour les opérations prises en charge sans réserve lors de la remise de service ou qui n’auraient pas été contestées par le comptable entrant, dans un délai fixé par l’un des décrets prévus au paragraphe XII du même article ; Soulignons, à cet égard, que la jurisprudence de la Cour a d’ores et déjà eu l’occasion de préciser que la responsabilité du comptable entrant ne saurait être engagée dès lors qu’il n’a pas pu se prononcer, selon la réglementation en vigueur, sur une situation qui ne lui pas été transmise régulièrement (7) ; qu’en l’espèce, la circonstance que l’état des restes à recouvrer n’a pas été produit, lors de la passation de service entre M. M... et son successeur, apparaît de nature à s’interroger sur la possibilité pour ce dernier de formuler des réserves ; Que ce second moyen n’apparaît donc pas fondé. Hélène GISSEROT. (7) Voir en ce sens, C. comptes, 27 novembre 1992, lycée agricole de Meymac : « Considérant que le trésorier-payeur général de Corrèze n’a pas procédé dans les formes voulues à l’installation de M. Mi... (comptable entrant) en tant que comptable du lycée agricole forestier de Meymac ; qu’il n’a pas été dressé de procès-verbal constatant la remise du service à M. Mi... et que les pièces qui auraient dû y être jointes et notamment l’état des restes à recouvrer n’ont pas été établies ; que dès lors la responsabilité de M. Mi... ne saurait être engagée puisqu’il n’a pas pu se prononcer selon la réglementation en vigueur sur une situation qui ne lui a pas été transmise régulièrement ». No 6 - Juin 2008 - chronique de jurisprudence financière Clefs proposées (base Jade) : 18-01-04-06 (jugement des comptes - gestion patente) 쐍 18-01-03-02 (responsabilité des comptables) 쐍 18-03-02 (créances - recouvrement) 쐍 18-07-03 (voies de recours). CRC Auvergne, jugement nº 2007-194 du 21 novembre 2007, Syndicat mixte d’aide à domicile de Riom-Limagne. Résumé : Après avoir été mis en débet pour défaut de recouvrement d’une créance, un comptable demande la révision du jugement en apportant la preuve qu’à la date de celui-ci la créance avait bien été recouvrée. Mais il aurait fallu, en vertu d’une jurisprudence constante, qu’un cas de force majeure l’ait empêché de produire cette preuve lors de la première instance : cette condition n’étant pas remplie, sa demande a été rejetée sur le fond. Faite quelques jours plus tôt, par la voie de l’appel, sa requête aurait très probablement abouti. Références jurisprudentielles : • financières : – sur la révision : CC, 22 juin 1942, Receveur de la ville de Paris, Rec. p. 33 쐍 CC, Ch. réunies, 25 mai 1965, Office des anciens combattants et des victimes de guerre de la Guyane, Rec. p. 123 쐍 CC, 4e Ch., 5 décembre 1996, Commune de Fécamp, Rec. p. 160 쐍 CC, 6e Ch., 16 septembre 2002, CNAMTS, Rec. p. 78 ; – sur la prise en compte des pièces produites seulement en appel : CC, 9 juin 1908, Faré, trésorier de la fabrique de l’église Saint-Honoré d’Amiens, Rec. 1908, p. 25 쐍 CC, 4e Ch., 25 janvier 1989, Commune de Montigny-les-Cormeilles, Rec. p. 113 쐍 CC, 3e Ch., 9 mars 1989, OPHLM de Vitry-sur-Seine, Rec. 1989, p. 116 쐍 CC, 5e Ch., 24 octobre 1990, Hôpital de Lorient, La Revue du Trésor nº 5, mai 1991, p. 303 쐍 CC, 5e Ch., 25 mai 1993, Assistance publique de Marseille, Rec. p. 67, La Revue du Trésor nº 11-1993, p. 699 쐍 CC, formation interchambres d’appel, 10 juillet 1997, OPHLM de Puteaux, Rec. p. 104 쐍 CC, 4e Ch., 2 octobre 1997, Syndicat intercommunal de défense contre l’incendie et de protection de la nature de Haute-Corse 쐍 CC, 4e Ch., 31 mai 2001, SI de la Grande-Plagne 쐍 CC, 4e Ch., Commune de Maussane-les-Alpilles, 27 septembre 2001 쐍 CC, 4e Ch., 5 juillet 2006, Centre hospitalier Emile-Roux du Puy-en Velay 쐍 CC, 4e Ch., 5 septembre 2006, Commune de Saint-Chaffrey, 쐍 CC, 4e Ch., 5 septembre 2006, Syndicat mixte Orius-Provence 쐍 CC, 4e Ch., 19 octobre 2006, Commune de Corte, La Revue du Trésor nº 5-2007, p. 506 쐍 CC, 4e Ch., 22 février 2007, Lycée professionnel maritime du Guilvinec à Treffiagat ; • administratives : CE, 20 mars 2002, M. ..., TPG de la Martinique, req. nº 218995. Doctrine : GAJF, 5e édition 2007, 56-21 - Code des juridictions financières commenté, Le Moniteur 2007, p. 511. Textes de référence : Code des juridictions financières, articles L. 243-2, R. 243-13. Commentaires Par un jugement du 3 novembre 2006, la chambre régionale des comptes d’Auvergne a déclaré le comptable du syndicat mixte d’aide à domicile de RiomLimagne débiteur d’une somme de 2 001,57 c pour n’avoir pas effectué les diligences nécessaires au recouvrement d’une créance de ce montant. Ce jugement, devenu définitif le 28 janvier 2007, faute d’avoir été frappé d’appel, a fait l’objet d’une requête en révision adressée par le comptable au greffe de la Chambre le 7 février 2007. Bien que ce dernier ait pu produire la preuve que la somme litigieuse avait été versée dans la caisse de l’établissement public avant la date du jugement, la Chambre, par son jugement du 21 novembre 2007, a rejeté sa demande de révision dans la mesure où il n’avait pas établi qu’une circonstance de force majeure l’avait empêché de produire cette pièce avant le jugement du 3 novembre 2006. Cette décision est en tout point conforme aux textes qui régissent la procédure de révision et à la jurisprudence tant de la Cour des comptes que du Conseil d’Etat (1). Elle ne peut cependant qu’inciter à comparer la rigueur qui la sous-tend avec la souplesse dont témoigne le juge d’appel dans des circonstances similaires (2) : l’appel et la révision constituent ainsi deux voies de recours que tout distingue. - No 6 - Juin 2008 1. Les conditions exigées pour la révision à la demande du comptable : a) Les textes : Le Code des juridictions financières distingue deux voies de recours : l’appel et la révision. S’agissant de cette dernière, l’article L. 243-2 indique qu’« un jugement prononcé à titre définitif peut être révisé par la chambre régionale des comptes qui l’a rendu, soit à la demande du comptable appuyée des justifications recouvrées depuis le jugement, soit d’office ou sur réquisition du Ministère public, pour cause d’erreur, omission, faux ou double emploi ». Comme mentionné ci-dessus, la révision en cause dans la présente espèce est de la première catégorie, celle faite à la demande du comptable. Les règles en sont fixées à l’article R. 243-13 du CJF. Au plan de la pure procédure, il est précisé, en premier lieu, que le comptable peut faire la demande de révision après expiration des délais d’appel. Autrement dit, les deux voies de recours sont exclusives l’une de l’autre. Au cas d’espèce, le jugement de révision indique qu’à la date de la demande, le jugement de débet était devenu définitif. Il faut, en second lieu, que celle-ci soit adressée à la CRC elle-même, en tant qu’auteur du jugement dont la révision est demandée, et non à la Cour des comptes (CC, 4e Ch., 5 décembre 1996, Commune de Fécamp). La demande de révision doit s’appuyer sur la production de justifications recouvrées depuis le jugement. Tout autre motif conduirait à l’irrecevabilité de la requête. La Cour a ainsi confirmé en appel la décision par laquelle une CRC avait déclaré irrecevable une demande de révision fondée sur l’erreur de droit qu’elle aurait commise (CC, 4e Ch., 5 décembre 1996, précitée). Elle a fait application de cette même règle pour une demande dirigée contre une de ses décisions (CC, 6e Ch., 16 septembre 2002, CNAMTS). La requête est ensuite notifiée par le Ministère public aux autres personnes mentionnées à l’article R. 243-2, c’est-à-dire à toutes celles qui ont la possibilité de faire appel d’un jugement de CRC. Elles disposent d’un délai de quinze jours pour obtenir communication des pièces et produire un mémoire. En l’espèce, les personnes concernées n’ont pas adressé de mémoire dans le délai prescrit. Conformément au texte, la Chambre a ensuite statué par un jugement unique. Celui-ci a admis la recevabilité du recours. Sur le fond, il a pris acte que le comptable avait apporté la preuve qu’à la date du jugement la créance avait été recouvrée. En effet, il s’est trouvé que le remboursement du débiteur était intervenu le 24 octobre 2006, soit antérieurement au jugement, mais qu’une difficulté était survenue : le chèque reçu étant d’un montant supérieur à la créance, le dossier n’avait été soldé en comptabilité et n’avait donné lieu à la délivrance d’une déclaration de recette (PIE) que le 9 novembre 2006. Pour autant, s’appuyant sur la jurisprudence, la Chambre a rejeté la demande de révision. 475 chronique de jurisprudence financière b) La jurisprudence : La jurisprudence exige une condition supplémentaire : il faut que ce soit pour une raison de force majeure que le comptable n’ait pu produire la pièce justificative lors du jugement qui fait l’objet de la demande de révision. Les auteurs des GAJF font état, en ce sens, d’un arrêt de la Cour des comptes du 22 juin 1942, Receveur de la ville de Paris, et de celui, plus récent, du 16 septembre 2002, CNAMTS, précité. Cette jurisprudence a été confirmée en cassation : dans sa décision du 20 mars 2002, M. ..., TPG de la Martinique, le Conseil d’Etat a validé le raisonnement suivi par la Cour des comptes. Le raisonnement qui sous-tend cette exigence a été exposé dans l’arrêt du 22 juin 1942. La Cour, conformément aux conclusions du Parquet, y a décidé que pour l’ouverture du droit de révision, la qualification de « pièces recouvrées depuis l’arrêt » devait être réservée aux pièces antérieures à l’arrêt que, par suite de circonstances de force majeure, l’intéressé avait été dans l’impossibilité de produire au cours de la première instance. Elle en a déduit, a contrario, que les pièces qu’il était loisible au comptable de se procurer et de produire à la Cour, avant que soit rendue la décision définitive, ne présentaient pas ce caractère. Elle a justifié, dans l’arrêt luimême, la rigueur de cette solution en indiquant que « toute décision de révision rendue au vu de pièces effectivement recouvrées depuis l’arrêté définitif, mais que le comptable pouvait aisément obtenir à toute époque de l’instance, conférerait aux décisions du juge des comptes un caractère précaire incompatible avec le principe de l’autorité qui s’attache à la chose jugée ». La Cour a repris cette même argumentation dans sa décision CNAMTS du 16 septembre 2002 précitée. Pour mieux apprécier ce qui pourrait relever de la force majeure, on peut se référer à la décision du 25 mai 1965, Office des anciens combattants et des victimes de guerre de la Guyane. Le comptable exposait avoir été dans l’impossibilité de présenter des pièces à la Cour dans les délais qui lui avaient été impartis par un arrêt provisoire « en raison du fait que son successeur et mandataire ad hoc l’avait assuré qu’il n’en pouvait être trouvé trace » et indiquait que ces pièces n’avaient été retrouvées qu’ultérieurement à l’occasion de l’incinération des pièces périmées de la trésorerie générale de la Guyane. La Cour n’en a pas moins considéré que les circonstances invoquées par le comptable, « quelles que soient les difficultés qu’elles aient comportées pour lui », ne présentaient pas le caractère d’obstacle de force majeure requis par la loi pour l’ouverture du droit à révision. Au cas d’espèce, la CRC d’Auvergne ne pouvait guère reconnaître, dans les péripéties de l’encaissement du chèque, un 476 obstacle de force majeure et se trouvait amenée conformément à l’interprétation donnée aux textes par la jurisprudence, à rejeter la demande au fond. Faite quelques jours plus tôt par la voie de l’appel, cette même requête aurait eu toutes les chances d’aboutir : il existe, en effet, de ce point de vue, un contraste marqué entre l’appel et la révision. 2. Les preuves apportées en appel : A la différence de la révision, il est possible, pour un comptable, de produire lors de l’appel une pièce qui existait lors de la première instance mais qu’il n’avait pas alors communiqué à la CRC ou, plus généralement, de faire la preuve qu’il avait, en réalité, satisfait à l’injonction demandée par le jugement provisoire. Comme précédemment, la jurisprudence est constante, mais cette fois au bénéfice du comptable. On retrouve, dans une décision qui remonte au 9 juin 1908, Faré, trésorier de la fabrique de l’église Saint-Honoré d’Amiens, Rec. 1908, p. 25, la trame d’un raisonnement qui sera repris par la suite : – la Cour reconnaît, d’abord, que la décision du premier juge a été prise à bon escient, compte tenu des éléments dont il disposait ; – elle prend acte, ensuite, de ce que le requérant a produit en appel une pièce qu’il n’avait pas communiquée en première instance ; – elle en tire la conclusion qu’il convient d’infirmer le jugement. a) L’éventuelle négligence du comptable n’est pas sanctionnée : La rupture est totale entre la rigueur à l’égard des comptables lors de la révision et l’accueil des pièces pour la première fois en appel. Tout au plus trouve-t-on parfois dans l’arrêt de la Cour l’expression d’un reproche à l’égard du comptable pour son éventuelle négligence sans qu’il en résulte un quelconque effet de droit. L’ancien arrêt mentionné ci-dessus reprochait ainsi au comptable de ne pas avoir produit la pièce en temps utile : « Attendu que, si le requérant a eu le tort, ainsi qu’il l’a reconnu dans sa requête, de ne pas fournir en temps utile les explications demandées par les premiers juges, les justifications complémentaires produites à la Cour à l’appui du pourvoi sont de nature à dégager sa responsabilité ». Ce type d’attendu s’est fait rare par la ensuite. Dans ses conclusions sous l’arrêt du 10 juillet 1997, OPHLM de Puteaux (cf. ci-après), le procureur général indiquait que la Cour ne pouvait « que relever le comportement négligent du comptable, eu égard à des préoccupations de bon fonctionnement de l’Administration et de la juridiction des comptes, sans qu’il soit possible de lui donner une traduction juridictionnelle », ce que fit la Juridiction en mentionnant dans son arrêt : « Attendu que ces justifications auraient pu et dû être présentées à la chambre régionale des comptes en réponse à l’injonction qu’elle avait prononcée [...] ». b) Les jugements infirmés : les cas les plus simples : La prise en compte, lors de l’appel, de pièces non communiquées en première instance a conduit l’infirmation : – de jugements pour dépenses irrégulières, soit en raison de la production de nouvelles pièces (CC, 9 juin 1908, précité ; CC, 4e Ch., 31 mai 2001, SI de la Grande-Plagne), soit parce que le comptable a apporté la preuve que le reversement, par compensation, des dépenses irrégulières avait déjà été effectué à la date du jugement (CC, 4e Ch., 5 juillet 2006, Centre hospitalier EmileRoux du Puy-en-Velay) ; – de jugements pour défaut de recouvrement de créances, la preuve étant apportée, soit que la créance était déjà recouvrée antérieurement au jugement (CC, 4e Ch., 25 janvier 1989, Commune de Montigny-lès-Cormeilles, Rec. p. 113 ; 2 octobre 1997, Syndicat intercommunal de défense contre l’incendie et de protection de la nature de Haute-Corse ; 22 février 2007, Lycée professionnel maritime du Guilvinec à Treffiagat) – situation la plus proche du cas d’espèce, soit que le comptable avait effectué les diligences voulues (CC, 3e Ch., 9 mars 1989, OPHLM de Vitry-sur-Seine, Rec. 1989, p. 116 ; CC, 5e Ch., 24 octobre 1990, Hôpital de Lorient, La Revue du Trésor nº 5, mai 1991, p. 303 ; CC, 5e Ch., 25 mai 1993, Assistance publique de Marseille, Rec. p. 67, La Revue du Trésor nº 11-1993, p. 699). Il convient de relever, à propos de la plus récente décision rendue en la matière (Lycée professionnel de Treffiagat), que la requête de la comptable appelante s’appuyait sur un tout autre moyen et que c’est en examinant des éléments joints à celle-ci que la Cour a constaté que la créance litigieuse avait été recouvrée avant le jugement. Sans même examiner le moyen mis en avant par la requérante, la Cour a infirmé le jugement sur le seul fait que l’injonction avait été satisfaite et que le jugement de la CRC se trouvait sans objet. c) Les jugements infirmés : éléments apparus après le jugement : Les situations rencontrées ne sont pas toujours aussi claires. Il arrive que le juge d’appel, « examinant la situation au jour de son arrêt » (concl. du procureur général sous CC, 4e Ch., 5 septembre 2006, Syndicat mixte Orius-Provence) tienne compte d’éléments apparus après le jugement. Dans cette affaire, le comptable du syndicat mixte, mis en débet par jugement de la CRC de Provence-Alpes-Côte d’Azur du 31 août 2005 à raison d’une dépense irrégulière (un double paiement), en avait obtenu le reversement le 13 septembre 2005 suite à un titre de recettes émis le 17 mai 2005. La Cour a considéré qu’« à la date d’effet du jugement, le reversement était intégralement No 6 - Juin 2008 - chronique de jurisprudence financière réalisé ; que, dès lors, le jugement de la chambre régionale des comptes ne [pouvait] qu’être infirmé. » Là encore, le comptable appelant avait avancé de tout autres moyens : c’est la Cour elle-même qui a relevé que la dépense avait été régularisée. S’agissant des jugements de CRC relatifs à la tenue de la comptabilité, la Cour admet des régularisations postérieures au jugement, reposant, dans certains cas, sur des faits qui lui étaient antérieurs, découlant, dans d’autres cas, d’éléments nouveaux. 1º Dans son arrêt du 10 juillet 1997, OPHLM de Puteaux, précité, la Cour a admis une régularisation fondée sur des éléments non pris en compte lors du jugement de la chambre régionale des comptes d’Ile-deFrance du 23 avril 1996. Le comptable de cet établissement avait été mis en débet au vu d’une discordance portant sur le compte qui enregistrait les dépôts de garantie des locataires (l’état de développement des soldes montrait des dettes d’un montant supérieur à celui figurant au compte). Peu de temps après le jugement, il avait pu obtenir de l’ordonnateur la régularisation de ce solde sur la base d’éléments qui existaient à la date du jugement (des dépôts, très anciens, étaient prescrits). Considérant que le comptable aurait pu obtenir cette régularisation avant le jugement, et tout en recommandant la mention, déjà évoquée ci-dessus, sur le comportement négligent de celui-ci, le procureur général a conclu en faveur de l’infirmation de la décision de la CRC et a été suivi par la Cour. De manière analogue, un comptable avait été mis en débet par la chambre de Provence-Alpes-Côte d’Azur pour une somme correspondant à la différence entre le montant du solde des valeurs inactives relevées à la balance de sortie du compte de gestion de l’exercice 1992 et celui du solde inscrit à la balance d’entrée de l’exercice 2003. Il avait fait ensuite valoir devant la Cour que cette différence s’expliquait par le fait que n’avaient pas été prises en compte, au moment du jugement, les valeurs inactives de la caisse des écoles de la commune (CC, 4e Ch., Commune de Maussane-les-Alpilles, 27 septembre 2001). 2º Il arrive que la Cour prenne en compte des régularisations postérieures au jugement et qui ne font pas référence à des éléments existants au moment où il a été prononcé. Par jugement du 26 avril 2005, la CRC de Provence-Alpes-Côte d’Azur avait mis en débet le comptable de la commune de Saint-Chaffrey en raison de la différence, constatée au 31 décembre 2002, entre le solde du compte 4114 « Redevables - exercices antérieurs » et l’état de développement de soldes présenté à l’appui de ce compte. Le comptable a produit en appel des pièces relatives aux opérations comptables de l’exercice 2005 qui ont permis à la Cour de constater que, au 31 décembre 2005, le solde du compte 4114 concordait désormais avec l’état de développement - No 6 - Juin 2008 de ce solde. Indiquant que c’était sans préjudice de la compétence de la chambre régionale pour juger les comptes 2005 de cette commune, la Cour a considéré que ces pièces lui permettaient d’infirmer le jugement de la CRC. De manière analogue, elle a réduit le montant d’un débet, prononcé le 13 septembre 2005 par la CRC de Corse pour des dépenses payées sans mandatement, au motif que l’écriture résiduelle au compte 47218 avait été apurée par un mandat du 7 décembre 2005 (CC, 4e Ch., 19 octobre 2006, Commune de Corte, La Revue du Trésor nº 5-2007, p. 506). CRC Auvergne, jugement nº 2007-194 du 21 novembre 2007 Vu le jugement nº 2006-0214 du 3 novembre 2006 par lequel il a été statué sur les comptes rendus pour les exercices 1999 à 2003 par M. Jean C. jusqu’au 31 décembre 2001 et par M. Alain R. à compter du 1er janvier 2002, en qualité de comptables du Syndicat mixte d’aide à domicile de Riom-Limagne ; Vu les pièces établissant que le jugement précité est devenu définitif le 28 janvier 2007 ; Vu la requête du 7 février 2007, enregistrée au greffe de la Chambre le 8 février 2007, par laquelle M. Alain R. a demandé la révision du jugement précité l’ayant déclaré débiteur de la somme de 2 001,57 c non recouvrée sur la Mutualité de la fonction publique ; Vu les pièces enregistrées au greffe de la Chambre le 1er août 2007, que M. Alain R. a transmises en complément de sa demande de révision du 7 février 2007 ; Vu le Code des juridictions financières ; Vu le Code général des collectivités territoriales ; Vu le décret du 29 décembre 1962 portant règlement général sur la comptabilité publique ; Vu la loi de finances nº 63-156 du 23 février 1963 et notamment l’article 60 ; Vu les lettres du 19 février 2007 par lesquelles le commissaire du Gouvernement a informé les parties de la demande de révision du jugement du 3 novembre 2006 formulée par M. Alain R. ; Vu les lettres en date du 9 octobre 2007 informant les parties de l’ordre du jour de l’audience publique du 25 octobre 2007 ; Après avoir entendu en audience publique Emile Guignard, président de section, en son rapport et Maud Child, commissaire du Gouvernement, en ses conclusions ; Après avoir délibéré hors la présence du rapporteur et du commissaire du Gouvernement ; Ordonne ce qui suit : Statuant définitivement, Attendu que, faute d’avoir apporté la preuve du recouvrement d’une créance du Syndicat mixte d’aide à domicile de Riom-Limagne sur la Mutualité de la fonction publique, au besoin sur ses deniers personnels, ou toute autre justification à décharge, M. Alain R. a été déclaré débiteur envers ledit syndicat de la somme de 2 001,57 c, par jugement définitif du 3 novembre 2006 ; Attendu qu’il résulte des dispositions combinées des articles L. 243-2 et R. 243-13 du Code des juridictions financières qu’un jugement prononcé à titre définitif peut être révisé par la chambre régionale des comptes qui l’a rendu, sur demande du comptable appuyée des justifications recouvrées depuis le jugement ; que cette demande, déposée après expiration des délais d’appel, doit exposer les faits et moyens invoqués et être accompagnée des justifications sur lesquelles elle se fonde ; Attendu que la demande de révision du jugement du 3 novembre 2006 déposée par M. Alain R. a été transmise à la Chambre après expiration du délai d’appel dudit jugement et qu’elle est justifiée par des pièces établissant que la créance du Syndicat mixte d’aide à domicile de Riom-Limagne d’un montant de 2 001,57 c a été recouvrée ; que, par conséquent, cette requête en révision peut être examinée par la Chambre ; Attendu que, régulièrement informées par le Ministère public près la Chambre, les parties à l’affaire n’ont pas produit de mémoire dans les délais prescrits ; Attendu que M. R. a joint à sa demande de révision une déclaration de recette P1E établie le 9 novembre 2006 et mentionnant le recouvrement de la créance le 6 novembre 2006, soit à une date postérieure à la lecture publique du jugement du 3 novembre 2006 ; Attendu que M. R. a ensuite adressé à la Chambre, le 31 juillet 2007, la lettre datée du 13 octobre 2006 par laquelle la Mutualité de la fonction publique lui a adressé un chèque daté du 24 octobre 2006, en règlement de sa dette envers le Syndicat mixte d’aide à domicile de Riom-Limagne ; Attendu qu’un comptable ne peut invoquer à l’appui de sa demande de révision que des justifications qui, existant avant le jugement, n’avaient pu être produites avant le prononcé dudit jugement, en raison d’une circonstance de force majeure ; qu’en l’espèce, M. R. n’a pas établi qu’une telle circonstance de force majeure l’a empêché de produire à la chambre régionale des comptes d’Auvergne, avant le jugement du 3 novembre 2006, un justificatif du recouvrement de la somme de 2 001,57 c ; Par ces motifs, La requête en révision du jugement du 3 novembre 2006 formulée par M. Alain R. est rejetée. 477 chronique de jurisprudence financière Conclusions du Ministère public nº 193 du 11 septembre 2007 (extraits) 2. La procédure de révision : articles L. 243-2 et R. 243-13 : L’article L. 243-2 ouvre comme voie de recours la révision d’un jugement prononcé à titre définitif. La procédure utilisée varie en fonction des circonstances de droit et de fait, en particulier selon l’auteur de la requête. Au cas particulier, l’initiateur de la demande de révision est le comptable mis en débet par la Chambre, et la procédure adéquate est celle prévue à l’article R. 243-13 du Code des juridictions financières, qui dispose que : « Le comptable peut demander à la chambre régionale des comptes, après expiration des délais d’appel, la révision d’un jugement définitif rendu sur ses comptes en produisant des justifications recouvrées depuis ledit jugement. La requête en révision doit être déposée ou adressée par lettre recommandée au greffe de la Chambre. Elle doit comporter l’exposé des faits et moyens invoqués par le requérant et être accompagnée d’une copie du jugement attaqué et des justifications sur lesquelles elle se fonde. La requête est notifiée par le Ministère public aux autres personnes mentionnées à l’article R. 243-2 qui disposent d’un délai de quinze jours pour obtenir communication des pièces et produire un mémoire ». Au cas particulier, M. Alain R. a déposé une demande de révision du jugement susvisé, à l’issue du délai d’appel ; conformément à la réglementation, la révision comportait l’exposé des faits et moyens invoqués par M. R. et était accompagnée d’une copie du jugement attaqué et des justifications sur lesquelles la requête se fonde. La requête est donc recevable. Elle est appuyée par la justification du recouvrement de la créance, objet du débet, trois jours après le jugement définitif de débet. La requête a été notifiée par le Ministère public à toutes les parties à l’affaire ; celles-là n’ont pas utilisé le délai de quinze jours qui leur était offert pour produire un mémoire. Dans ces conditions, l’instruction en vue de décider de la suite à donner à la requête de M. Roudet pouvait être effectuée. 3. Sur le fond de la requête : Ainsi qu’il est rapporté, il ne suffit pas pour justifier une demande de révision d’avoir recouvré les sommes, objet du débet. En effet, la jurisprudence constante des juridictions financières exige le cumul de deux conditions : d’une part, que les pièces justificatives produites à l’appui de la demande de révision n’aient pas 478 pu l’être lors de la première instance pour des raisons de force majeure et, qu’elles aient une incidence sur la décision prise. Au cas présent, la seconde condition est remplie puisque la créance a été recouvrée ; le remboursement du débiteur est d’ailleurs intervenu le 24 octobre 2006, soit avant le jugement définitif. Le chèque en cause étant supérieur au montant dû, le dossier n’a été soldé en comptabilité que le 9 novembre 2006. La voie de recours utilisée dans ce cas aurait dû être l’appel devant la Cour des comptes. A cet égard, la jurisprudence du 5 juillet 2006 de la Cour des comptes sur les comptes du centre hospitalier Emile-Roux du Puy-en-Velay est claire : « Attendu qu’il ressort (...) que les sommes contestées ont été reversées (...) ; que lesdits reversements (...), ont été effectués avant la date d’effet du jugement du 28 avril 2005 (...) ; attendu qu’en conséquence, si la chambre régionale des comptes d’Auvergne a constitué à bon droit le comptable en débet, au vu des éléments dont elle disposait, il y a lieu d’infirmer ledit jugement. » Néanmoins, aucune raison de force majeure n’étant apportée par le requérant, la demande de révision ne répond pas à la seconde des conditions posées par la jurisprudence et ne devrait pas pouvoir être décidée par la Chambre. Le refus de la révision du jugement confirmant une charge définitive pour le comptable, une audience publique devrait être organisée avant la décision de la Chambre. Considérant que ne peuvent, en conséquence, être regardés comme pièces recouvrées depuis l’arrêt des certificats administratifs établis, pour les besoins de la cause, postérieurement à la décision attaquée, ou des documents antérieurs à celle-ci qu’il était loisible au comptable de se procurer et de produire à la Cour avant que ne soit rendue la décision définitive, soit, spontanément, soit comme suite à la demande qui lui en aurait été faite par un arrêt provisoire antérieur ; Considérant que, toute décision de révision rendue au vu de pièces effectivement recouvrées depuis l’arrêt définitif, mais que le comptable pouvait aisément obtenir à toute époque de l’instance, conférerait aux décisions du juge des comptes un caractère précaire incompatible avec le principe de l’autorité qui s’attache à la chose jugée ; [...] Considérant que les certificats administratifs établis les 10 février 1941 et 12 mars 1942 sont postérieurs à l’arrêt dont la révision est demandée ; Considérant que si les bons de commande sont antérieurs à ce dernier, il s’agit en l’espèce de documents facilement recouvrables et qu’il n’est pas établi que des obstacles pratiquement insurmontables aient empêché le comptable de les adresser à la Cour comme suite aux injonctions prononcées par l’arrêt du 17 mai 1933 (dernière date) et continuées faute de réponse, par l’arrêt du 15 juillet 1938 (dernière date) ; Maud CHILD. Décisions relatives à la révision Cour des comptes, arrêt du 22 juin 1942, Ville de Paris Considérant que pour formuler sa demande le comptable se fonde sur l’article 14 de la loi du 16 septembre 1807 qui dispose que la Cour, nonobstant l’arrêt qui aurait jugé définitivement un compte, peut procéder à sa révision sur la demande du comptable appuyée de pièces justificatives recouvrées depuis l’arrêt ; Considérant que le comptable a produit à ce titre, au soutien de sa demande, des bons de commande en date des 8 octobre et 6 novembre 1924 et des certificats administratifs établis les 10 février 1941 et 12 mars 1942 [...] ; Considérant que la qualification de pièces recouvrées pour l’ouverture du droit à révision doit être réservée aux pièces antérieures à l’arrêt que, par suite de circonstances de force majeure, l’intéressé aurait été dans l’impossibilité de produire au cours de la première instance ; Considérant que dès lors les pièces appuyant la requête n’ont pas, au sens de l’article 14 de la loi du 16 septembre 1807, le caractère de pièces recouvrées depuis l’arrêt ; [...] Par ces motifs, Statuant définitivement, Ordonne ce qui suit : La requête en révision du sieur G. est rejetée. Cour des comptes, 4e Ch., 5 décembre 1996, Commune de Fécamp Sur la recevabilité de l’appel : Attendu que par sa requête du 13 mai 1996, M. I. a demandé la révision par la Cour du jugement de débet du 12 juillet 1995 rendu par la chambre régionale des comptes ; Que les demandes en révision doivent être portées devant les juges mêmes qui ont No 6 - Juin 2008 - chronique de jurisprudence financière rendu le jugement qu’il s’agit de réviser ; qu’ainsi cette requête, portée devant un juge incompétent, est irrecevable ; Attendu au contraire que la requête du 27 mai, par laquelle M. I. a élevé appel du jugement du 7 février 1996 qui a déclaré irrecevable sa demande en révision du jugement qui l’avait constitué en débet, a été compétemment adressée à la Cour ; que cet appel a été introduit dans les formes et les délais réglementaires ; qu’il est donc recevable ; Au fond : Attendu qu’aux termes de l’article 76, premier alinéa, du décret du 23 août 1995 susvisé, le comptable ne peut demander à la chambre régionale des comptes la révision d’un jugement définitif qu’en produisant des justifications recouvrées depuis ledit jugement ; Attendu que la demande de révision de M. I. était fondée sur l’erreur de droit qu’aurait commise la chambre régionale des comptes dans son jugement du 12 juillet 1995 et qu’elle était appuyée de pièces déjà produites pendant l’instance de compte ; qu’ainsi, c’est à bon droit que cette Chambre a déclaré cette demande irrecevable ; Par ces motifs, Statuant définitivement, comptes n’a pas entaché son arrêt d’erreur de droit ; qu’ainsi, M. M. n’est pas fondé à demander l’annulation de l’arrêt du 2 décembre 1999. Cour des comptes, 6e Ch., arrêt du 16 septembre 2002, CNAMTS Vu la requête enregistrée par le greffe central le 11 mars 2002, par laquelle M. B. a demandé à la Cour la révision de l’arrêt précité des 19 mars et 20 juillet 2001, qui, au vu des réponses apportées aux injonctions nº 5 de l’arrêt nº 24927 et nº 2 de l’arrêt nº 26470, a constitué M. B. débiteur de la CNAMTS, pour des montants respectifs de 1 791 000 F (273 036,19 c) et 1 396 881,50 F (212 953,21 c) ; Vu les justifications produites à l’appui de la requête ; La requête présentée par M. Jacques I. est rejetée. Conseil d’Etat, 20 mars 2002, req. nº 218995, M. M. Considérant qu’aux termes de l’article 32 du décret du 11 février 1985 relatif à la Cour des comptes, alors en vigueur : « le comptable peut demander à la Cour des comptes la révision d’un arrêt définitif rendu sur ses comptes en produisant des justifications recouvrées depuis ledit arrêt » ; Considérant que pour rejeter la demande de révision formée par M. M., la Cour des comptes s’est fondée sur le fait que celui-ci ne justifiait pas qu’une circonstance de force majeure l’aurait empêché de produire la justification du recouvrement de la somme litigieuse qui lui avait été demandée par l’arrêt provisoire du 25 avril 1996, avant que l’arrêt définitif de la Cour, en date du 3 décembre 1998, le déclarant débiteur vis-à-vis de l’Etat de la somme de 41 130,73 F n’ait été rendu ; qu’en se fondant sur ce motif pour estimer que la requête de M. M. ne satisfaisait pas aux conditions posées par l’article 32 du décret du 11 février 1985, la Cour des - No 6 - Juin 2008 Considérant qu’une révision décidée au vu de pièces que le comptable aurait dû produire en temps utile, en réponse à une injonction prononcée par voie d’arrêt provisoire, conférerait aux arrêts définitifs de la Cour un caractère de précarité incompatible avec l’autorité de la chose jugée ; qu’il y a donc lieu de rejeter la demande de révision portant sur les dispositions relatives aux aides du FORMMEL. Décisions d’appel admettant des pièces non produites en première instance Vu le Code des juridictions financières ; Vu la note du 5 septembre 2002, par laquelle le procureur général informe la Cour qu’en application de l’article R. 143-1 du Code des juridictions financières, ce recours a été notifié le 25 juin 2002 au ministre de l’Economie, des Finances et de l’Industrie, au ministre de la Santé, de la Famille et des Personnes handicapées et au président de la CNAMTS et demande au Premier président de transmettre le dossier à la 6e Chambre afin qu’il soit statué sur le recours en révision ; [...] Ordonne ce qui suit : Considérant que M. B. n’excipe d’aucune circonstance de force majeure pour expliquer la non-production des pièces justificatives demandées après la réception de l’arrêt provisoire des 29 octobre, 12, 16 et 29 novembre 1999 et 24 janvier 2000 ; 1. Sur les aides du FORMMEL : Attendu que pour demander la révision de l’arrêt précité, M. B. se fonde sur le fait que la Cour aurait commis une erreur de droit en considérant que la procédure mise en place pour le versement des aides du FORMMEL à l’informatisation des cabinets médicaux était irrégulière et que les pièces justificatives dont la production avait, en vain, été exigée par l’arrêt provisoire, sont produites par l’agent comptable à l’appui de sa requête en révision ; Attendu qu’aux termes de l’article R. 143-1 du Code des juridictions financières, « le comptable peut demander à la Cour des comptes la révision d’un arrêt définitif (...) en produisant des justifications recouvrées depuis ledit arrêt » ; Considérant, d’une part, que l’erreur de droit n’est pas un motif de révision prévu par le Code des juridictions financières ; Considérant, d’autre part, que la qualification de justifications recouvrées depuis l’arrêt, dont la révision est demandée, ne peut être accordée qu’à des pièces qui existaient antérieurement audit arrêt, mais n’avaient pu être produites par l’agent comptable par suite d’impossibilité tenant à des circonstances de force majeure ; Cour des comptes, arrêt du 9 juin 1908, Faré, trésorier de la fabrique de l’église Saint-Honoré d’Amiens Considérant que le conseil de préfecture de la Somme a bien jugé en condamnant définitivement à reverser la somme de 5 325,50 F le requérant qui s’était abstenu de produire aucune justification en réponse aux injonctions des arrêtés antérieurs des 19 mai 1905 et 12 mars 1906 ; Mais considérant qu’à l’appui de sa requête en pourvoi, le requérant a produit des pièces et documents qui n’avaient pas été soumis à l’appréciation des premiers juges ; [...] Attendu que, si le requérant a eu le tort, ainsi qu’il l’a reconnu dans sa requête, de ne pas fournir en temps utile les explications demandées par les premiers juges, les justifications complémentaires produites à la Cour à l’appui du pourvoi sont de nature à dégager sa responsabilité. Cour des comptes, 4e Ch., arrêt du 25 janvier 1989, Commune de Montigny-lès-Cormeilles Attendu qu’il résulte des pièces produites à la Cour par le requérant, qu’à la suite des diligences effectuées par lui, la somme de 5 100 F avait été effectivement encaissée par le comptable antérieurement au prononcé du jugement du 4 janvier 1988 ; Attendu que si l’on doit noter, pour les regretter, le caractère incomplet de l’information de la Chambre et la négligence de M. G. à répondre exactement au jugement précité du 4 février 1988, comme il lui 479 chronique de jurisprudence financière était enjoint de le faire, il suffit de constater qu’à la date de reddition du jugement de débet, les motifs de droit et de fait sur lesquels il était fondé n’étaient plus établis ; Qu’en conséquence le jugement en cause ne pouvait imposer de charge à M. G. au titre de l’insuffisance des diligences faites par lui pour le recouvrement d’une somme qui avait été versée antérieurement à la caisse communale. Cour des comptes, formation interchambres d’appel, arrêt du 10 juillet 1997, OPHLM de Puteaux Attendu que par le jugement du 13 juillet 1990 susvisé, la chambre régionale des comptes d’Ile-de-France, constatant que l’état de développement du solde du compte 462 (dépôts de garantie des locataires) présentait au 31 décembre 1996 une différence de 34 512,63 F avec le solde de ce compte et qu’ainsi, l’office était exposé à devoir rembourser à ses locataires l’excédent constaté, a enjoint à la comptable de faire cesser cette discordance ou, à défaut, de fournir la preuve de son reversement ; Attendu que, cette injonction étant restée sans réponse, la chambre régionale des comptes a, par jugement définitif du 23 avril 1996, constitué Mlle D. débitrice envers l’office de la somme de 34 512,63 F augmentée des intérêts de droit à compter du 3 février 1996 ; Attendu que, dans sa requête, Mlle D. soutient qu’elle n’est pas débitrice de la somme qu’il lui est demandé de reverser et qu’un certificat administratif de l’ordonnateur viendra préciser « les modalités de la régularisation » ; Attendu qu’en effet, le 11 décembre 1996, la requérante a fait parvenir à la chambre régionale des comptes les pièces suivantes : 1º Un certificat administratif (nº 7) en date du 31 juillet 1996 par lequel le président de l’office, habilité par délibération du conseil d’administration du 12 septembre 1995, demande au comptable en poste de « bien vouloir annuler les titres de recette émis par l’office pour un montant de 12 029,64 F et non encaissés pour les cautions établies entre les années 1940 à 1961 au compte de tiers 462 (...) » ; 2º Un titre de recette exécutoire nº 317 sur le comptable de l’office, daté du 31 juillet 1996, d’un montant de 22 482,99 F, et qu’elle estime avoir ainsi apporté la preuve de la régularisation demandée ; Attendu que le certificat administratif nº 7 précité, remplacé ultérieurement par un certificat administratif nº 29/96 du président de l’office habilité par une délibération du conseil d’administration du 27 mars 1997, tend à autoriser le retrait de l’état nominatif P 681 480 de cautions perçues de 1940 à 1961, lesquelles, à tort, n’avaient pas été imputées au compte 462 ; Attendu que ces cautions, dont le montant s’élève à 12 069,64 F, sont apparemment prescrites au profit de l’office ; que, dès lors, l’ordonnateur a pu décider de les retirer de l’état de développement des restes ; Attendu que le titre de recette de 22 482,99 F en date du 31 juillet 1996, produit par ailleurs, a pour effet, au terme de diverses écritures comptables, de virer ladite somme du compte 490 (recettes à classer) au compte 462 ; que ce virement peut être accepté dès lors que, depuis plusieurs années, ces cautions avaient été portées par erreur au compte 490 ; Attendu que ces régularisations étant opérées, la concordance entre le solde du compte 462 et l’état nominatif produit à l’appui de ce compte se trouve rétablie ; Attendu que ces justifications auraient pu et dû être présentées à la chambre régionale des comptes en réponse à l’injonction qu’elle avait prononcée ; qu’ainsi, le juge de première instance aurait été en mesure de lever ladite injonction ; qu’à défaut de ces justifications, c’est à bon droit qu’il a constitué l’appelante débitrice, mais que ces justifications étant à présent produites, le débet ne peut être confirmé. Par ces motifs, Statuant définitivement, Ordonne ce qui suit : Le jugement susvisé de la chambre régionale des comptes, du 23 avril 1996, est infirmé. Conclusions du procureur général OPHLM de Puteaux (extraits) Deux questions sont ici posées à la Cour : quelle est la valeur de ces régularisations ; quelles en sont les conséquences pour la présente instance ? [...] Deuxième question : les conséquences d’une admission des régularisations produites ; la Cour, saisie par l’effet dévolutif de l’appel, Nous paraît nécessairement devoir infirmer le jugement qui lui est déféré, si elle admet la justification des régularisations cidessus ; c’est ainsi que la Cour a pu juger, lorsqu’elle était juge d’appel des conseils de préfecture ; dans la période récente et à plusieurs reprises, ainsi que le relevait le président Ducher dans son ouvrage « La Cour des comptes - juge d’appel », lors de l’examen de dossiers d’appel de jugements de chambre régionale des comptes, la Cour a constaté que les informations indispensables à la solution du litige n’avaient pas été portées à la connaissance des premiers juges : les exemples donnés portent sur des justifications antérieures au jugement définitif de la chambre régionale des comptes et non produites par le comptable en réponse au jugement provisoire ; en l’espèce présente, la régularisation demandée a été obtenue postérieurement au jugement définitif mais on ne voit pas ce qui empêchait le comptable de faire le nécessaire antérieurement ; cela lui aurait épargné une mise en débet ; Au total, la Cour ne peut que relever le comportement négligent du comptable, eu égard à des préoccupations de bon fonctionnement de l’Administration et de la juridiction des comptes, sans qu’il soit possible de lui donner une traduction juridictionnelle ; dans ces conditions et sous ces réserves, Nous ne voyons pas d’obstacle à l’infirmation du jugement attaqué. Hélène GISSEROT. Appelée par la chambre régionale à produire la preuve de la régularisation de la discordance des 34 512,63 F apparaissant entre le solde du compte de « dépôts de garantie des locataires » et l’état de développement nominatif, Mlle D. ne s’est pas exécutée ; Cour des comptes, 4e Ch., arrêt du 2 octobre 1997, Syndicat intercommunal de défense contre l’incendie et de protection de la nature de Haute-Corse Nous constatons donc que la chambre régionale ne pouvait pas procéder autrement qu’elle l’a fait en prononçant le débet dans les conditions susmentionnées ; Attendu que la chambre régionale des comptes de Corse a, par le jugement dont est appel, constitué Mme T. débitrice envers le Syndicat intercommunal de défense contre l’incendie et de protection de la nature de la somme de 9 003 F pour n’avoir pas fait les diligences nécessaires pour recouvrer les contributions de la commune de Montegrosso ; A l’appui de sa requête en appel, l’intéressée, qui ne conteste aucunement la procédure contradictoire suivie en premier ressort, produit les justifications des régularisations qui lui avaient été vainement demandées par la chambre régionale et qui sont postérieures au jugement définitif attaqué ; Attendu que l’appelante fait valoir qu’à la suite d’un arrêté du sous-préfet de Calvi, en date du 10 septembre 1996, rendu à sa demande et portant mandatement d’office desdites créances sur le budget No 6 - Juin 2008 - chronique de jurisprudence financière primitif de la commune de Montegrosso pour 1996, ladite somme de 9 003 F a été recouvrée le 18 décembre 1996, antérieurement audit jugement ; Attendu que Mme T. s’étant abstenue de donner connaissance de ce mandatement d’office et de ce recouvrement à la chambre régionale des comptes, c’est à bon droit que celle-ci, en l’état de son information, l’a constituée en débet, mais qu’en l’état de l’information sur appel, ce débet ne peut être confirmé. Cour des comptes, 4e Ch., arrêt du 5 juillet 2006, Centre hospitalier Emile-Roux du Puy-en-Velay Vu la requête, enregistrée au greffe de la chambre régionale des comptes d’Auvergne le 2 novembre 2005, par laquelle M. A., comptable du centre hospitalier Emile-Roux du Puyen-Velay de 1997 à 2002, a élevé appel et sollicité le sursis à exécution du jugement du 28 avril 2005 par lequel ladite chambre l’a constitué débiteur envers le centre hospitalier de diverses sommes versées au docteur E., à raison de 8 370,54 c, et au docteur D., à raison de 6 677,06 c, augmentées des intérêts de droit ; [...] Attendu que M. A., sans contester le caractère irrégulier des dépenses en cause, fait valoir qu’il a obtenu la régularisation « par déduction du complément de rémunération versé à tort sur les paies d’avril 2005 », soit à une date antérieure au prononcé du débet définitif ; Attendu que l’appelant produit, à l’appui de sa requête, la copie du bulletin de paie des deux agents pour le mois d’avril 2005 ; que ces pièces font état, dans la colonne « à déduire », sous la rubrique « 4050 complément de salaire 2002 », d’une somme de 8 370,54 c à l’encontre de M. E. et de 6 677,06 c à l’encontre de M. D. ; Attendu que, lors de la mise en état de l’appel, le directeur de l’hôpital a présenté un mémoire attestant du fait que, « suite au jugement de la chambre régionale des comptes relatif aux années 1999-2002, et notamment aux injonctions émises à l’encontre de M. le Docteur D. et M. le Docteur E., les rémunérations versées de manière indue ont été totalement régularisées par reprise sur salaires sur les paies d’avril à juin 2005 » ; Attendu que, aux termes du paragraphe VI de l’article 60 de la loi du 23 février 1963 susvisée, « le comptable public dont la responsabilité est engagée ou mise en jeu a l’obligation de verser immédiatement de ses deniers personnels une somme égale [...] au montant [...] de la dépense payée à tort » ; que le paragraphe VII du même article prévoit la constitution en débet du « comptable - No 6 - Juin 2008 public dont la responsabilité pécuniaire est engagée ou mise en jeu et qui n’a pas versé la somme prévue au paragraphe VI » ; Attendu qu’il résulte de ces dispositions que le reversement de dépenses irrégulièrement payées est de nature à dégager la responsabilité du comptable lorsqu’il est intervenu avant la mise en débet de ce dernier ; que le reversement, par les bénéficiaires, des sommes qu’ils ont indûment perçues a le même effet exonératoire qu’un versement du comptable sur ses deniers propres ; Attendu qu’il ressort tant de l’attestation de l’ordonnateur que des bulletins de paie du docteur E. et du docteur D., tels qu’il sont produits par l’appelant pour le mois d’avril 2005, que les sommes contestées ont été reversées au centre hospitalier Émile-Roux par prélèvement sur le montant des sommes dues aux deux médecins pour ledit mois ; que lesdits reversements, compte tenu du fait que le mandatement de la paie est intervenu le 22 avril 2005, ont été effectués avant la date d’effet du jugement du 28 avril 2005 susvisé ; Attendu qu’en conséquence, si la chambre régionale des comptes d’Auvergne a constitué à bon droit le comptable en débet, au vu des éléments dont elle disposait, il y a lieu d’infirmer ledit jugement. Par ces motifs, Statuant définitivement, Ordonne : Le jugement de la chambre régionale des comptes d’Auvergne, en date du 28 avril 2005, est infirmé. Cour des comptes, 4e Ch., arrêt du 5 septembre 2006, Commune de Saint-Chaffrey Attendu que, par le jugement du 26 avril 2005 susvisé, la chambre régionale a constitué le requérant débiteur envers la commune de Saint-Chaffrey de la somme de 394 255,46 c augmentée des intérêts de droit à compter du 31 décembre 2002 ; que cette somme correspond à la différence constatée au 31 décembre 2002 entre le solde du compte 4114 « redevables - exercices antérieurs » et l’état de développement de soldes présenté à l’appui dudit compte ; Attendu que les états de développement de soldes doivent présenter un montant égal au solde du compte correspondant dans le compte de gestion ; Attendu qu’à la date de son jugement, la chambre régionale a constaté que le comptable n’avait pas justifié devant elle de la différence constatée et a pu, de ce fait, engager la responsabilité pécuniaire dudit comptable ; Attendu, toutefois, que le requérant produit en appel des pièces relatives aux opérations comptables de l’exercice 2005 de la commune de Saint-Chaffrey ; que, sans préjudice de la compétence de la chambre régionale pour juger les comptes de ladite commune, ces pièces permettent à la Cour de constater que, au 31 décembre 2005, le solde du compte 4114 concorde désormais avec l’état de développement de ce solde ; qu’il y a lieu dès lors d’infirmer le jugement dont est appel. Cour des comptes, 4e Ch., arrêt du 5 septembre 2006, Syndicat mixte Orius-Provence Attendu que, par le jugement du 31 août 2005 susvisé, la chambre régionale des comptes de Provence-Alpes-Côte d’Azur a constitué Mme M., débitrice de la somme de 7 202 c (47 242 F TTC, 39 500 F HT) versée au vu du mandat nº 5, émis le 1er octobre 2001 sur le compte 617, au Comité interconsulaire de Vaucluse pour « participation à l’étude du chantier rail-route de Cavaillon » au motif que cette somme correspondait à une prestation payée antérieurement par la comptable par le mandat nº 39 émis le 14 novembre 2000 sur le même compte 617 pour la somme de 47 637 F TTC (39 500 F HT) à la SARL Jonction ; Attendu que la comptable avance que les deux paiements ne sont pas intervenus au cours du même exercice, que les deux factures n’étaient pas identiques, notamment dans leur intitulé, que leurs montants, en raison de l’évolution du taux de TVA applicable, n’étaient pas les mêmes et que, la comptabilité du syndicat mixte n’étant tenue que toutes taxes comprises, elle ne pouvait constater l’identité des facturations hors taxes ; Attendu, toutefois, qu’aucun de ces motifs, compte tenu de la référence à la même délibération du conseil syndical et à une même opération, comme de la similitude des montants, n’aurait dû interdire à la comptable de suspendre le second paiement et d’interroger l’ordonnateur ; que, dès lors, elle a engagé sa responsabilité ; Attendu, au surplus, que le syndicat mixte Orius-Provence a émis le 17 mai 2005 un titre de recette à l’encontre du Comité interconsulaire de Vaucluse pour obtenir le reversement de la somme de 7 201,99 c correspondant au mandat nº 55 susvisé ; Attendu que ce titre a été recouvré en totalité le 13 septembre 2005 ; qu’ainsi, à la date d’effet du jugement, le reversement était intégralement réalisé ; que, dès lors, le jugement de la chambre régionale des comptes ne peut qu’être infirmé. 481 chronique de jurisprudence financière Clefs proposées (base Jade) : 18-05-02-01-02 (crédits de paiement - insuffisance). CRC Champagne-Ardenne, jugement nº J 2007-0260 du 27 novembre 2007, Lycée Charles-de-Gaulle à Chaumont (Haute-Marne). Résumé : Les crédits disponibles de deux chapitres étant devenus insuffisants, bien qu’ayant été abondés par une décision modificative, la chambre régionale des comptes prononce un débet pour tous les mandats payés à partir du dépassement. Elle considère, toutefois, que le premier mandat n’a été irrégulièrement payé que pour le montant excédant les crédits disponibles. Références jurisprudentielles : • financières : C. comptes, 4 février 1988, Bureau d’aide sociale de la commune de Matour 쐍 CRC Ile-de-France, 12 février 1988, Commune de Villepreux 쐍 CRC Corse, 7 octobre 1992, Collège Georges-Clemenceau à Sartène 쐍 C. comptes, 1er juillet 1993, Syndicat intercommunal d’électrification du sud de la Corse 쐍 C. comptes, 9 décembre 1993, Commune de Grasse. Doctrine : Revue du Trésor nº 11/2007 sous Communauté de communes des cantons de Carignan-Mouzon-Raucourt, p. 1021. Textes de référence : Article 60 de la loi nº 63-156 du 23 février 1963 쐍 Articles 12 B, 27 et 37 du règlement général sur la comptabilité publique. Commentaires Cette espèce représente un cas typique de dépassement des crédits budgétaires votés, révélateur d’une pratique, relativement courante parmi les comptables des établissements publics locaux d’enseignement (v., ciaprès, CRC Corse, 7 octobre 1992, Collège Georges-Clemenceau à Sartène), mais aussi du Trésor (v., ci-avant, Commune de SaintDizier ou encore CRC Ile-de-France, 12 février 1988, Commune de Villepreux, dans un cas où le comptable avait pourtant été destinataire d’une injonction pour l’avenir), consistant pour le comptable à penser qu’il n’aura aucune difficulté à obtenir une régularisation alors même que cette régularisation serait insusceptible de l’exonérer de sa responsabilité (C. comptes, 4 février 1988, Bureau d’aide sociale de la commune de Matour). Au cas particulier, aucune régularisation n’a d’ailleurs été obtenue malgré une décision modificative et la Chambre croit devoir rejeter explicitement l’argument du comptable selon lequel le conseil d’administration de l’établissement aurait voté sans difficulté une nouvelle décision modificative si on le lui avait demandé. La chambre régionale des comptes de Champagne-Ardenne prend soin de citer tous les mandats payés en dépassement et elle ne considère pas que le premier mandat ayant provoqué le dépassement a été payé irrégulièrement pour son montant total (v. également les jugements des CRC de Corse et d’Ile-de-France), ce qui constitue une différence notable par rapport aux autres cas de paiement irrégulier comme, par exemple, celui du dépassement des seuils des marchés à l’époque où ce type de contrôle s’imposait aux comptables (8) [C. comptes, 1er juillet 1993, Syndicat intercommunal d’électrification du sud de la Corse et département de la Corse-du-Sud ; 9 décembre 1993, Commune de Grasse]. Dans ces cas, en effet, même si la Cour des comptes avait été amenée (sur appel du procureur général dans le premier cas cité) à préciser que les paiements antérieurs au dépassement n’étaient pas irréguliers, elle a admis que tous les paiements à compter de celui provoquant le dépassement l’étaient (9). Si la jurisprudence en matière de respect des 482 autorisations budgétaires est moins sévère, on rappellera que le dépassement des crédits n’en constitue pas moins une cause de suspension de paiement, en application de l’article 37 du règlement général sur la comptabilité publique. Enfin, il peut être noté que, pour des raisons semble-t-il d’équité, la Chambre fixe le point de départ des intérêts à une date qui ne correspond pas au premier acte de la mise en jeu de la responsabilité personnelle et pécuniaire du comptable (nouvel art. 60-VIII de la loi nº 63-156, le premier jugement ayant été rendu, en l’occurrence, après le 1er juillet 2007), mais à la date de la réponse au premier jugement. Dans les cas similaires cités, la chambre de Corse avait choisi la date du paiement et celle d’Ile-de-France la date du jugement provisoire. CRC Champagne-Ardenne, jugement du 27 novembre 2007 La chambre régionale des comptes de Champagne-Ardenne, (...) Vu et entendu, lors de l’audience publique du 15 novembre 2007, le rapport de présentation de M. Amine Amar, conseiller et le commissaire du Gouvernement en ses conclusions ; Sur la première injonction : Attendu que le budget primitif de l’exercice 2002, voté par chapitre, a prévu au chapitre C (Entretien), des crédits à hauteur de 104 008,24 c ; que ce montant a été porté à 121 683,92 c, soit une augmentation de 11 615,68 c, par les décisions budgétaires modificatives groupées nos 1 à 9 de 2002 et porté ensuite à 126 183,92 c, soit une augmentation complémentaire de 5 100 c, par la décision budgétaire modificative nº 11 de 2002, devenue exécutoire à compter du 31 octobre 2002 ; qu’à la clôture de l’exercice 2002, les dépenses payées au chapitre C (Entretien) ont été de 145 208,16 c, ce qui représente un dépassement des crédits régulièrement ouverts de 18 424,24 c ; Attendu que la comptable a effectué le paiement, en dépassement des crédits ouverts au budget de l’exercice 2002, de cinq mandats imputés au chapitre C (Entretien) [suit un tableau]. Attendu que Mme X... a payé, à compter du mandat nº 512 du 9 décembre 2002, pour une partie de son montant, jusqu’au mandat nº 590 du 31 décembre 2002 en dépassement des crédits ouverts au chapitre C (Entretien) des dépenses pour un total de 18 424,24 c ; Attendu qu’aux termes de l’article 60-I de la loi nº 63-156 du 23 février 1963, « les comptables publics sont personnellement et pécuniairement responsables des contrôles qu’ils sont tenus d’assurer en matière de recettes, de dépenses et de patrimoine dans les conditions prévues par le règlement général sur la comptabilité publique » ; Attendu qu’en application des dispositions de l’article 12 du décret nº 62-1581 du 29 décembre 1962, « les comptables sont tenus d’exercer..., en matière de dépenses, le contrôle de la disponibilité des crédits » ; Attendu que la disponibilité des crédits se détermine au niveau du chapitre et que la régularité du paiement s’apprécie au jour de son exécution ; Attendu qu’en référence aux documents budgétaires produits au titre de l’exercice 2002, Mme X... a effectué des paiements en dépassement de crédits pour un montant total de 18 424,24 c ; que le niveau de contrôle par le comptable des crédits sur les comptes concernés s’effectue à partir du montant des crédits inscrits en dépenses ; que la responsabilité du comptable se trouve engagée pour ces paiements irréguliers ; Attendu que, par jugement en date du 23 août 2007, il a été enjoint à Mme X... d’apporter la preuve, dans le délai de deux mois à compter (8) Dans le cadre du nouveau Code des marchés publics, l’instruction codificatrice nº 07-024-MO du 30 mars 2007 relative aux pièces justificatives des dépenses du secteur local estime que le comptable « ne doit pas contrôler le respect par l’ordonnateur des règles de passation des marchés publics (seuils des marchés à procédures formalisées, modalités de publicité et de mise en concurrence des marchés à procédures adaptées...) ». En 2003, l’instruction précédente précisait déjà : « la nomenclature met en œuvre la décision des ministres de ne plus faire intervenir les comptables publics dans le contrôle du seuil des marchés publics : c’est la présentation de la dépense par l’ordonnateur qui indique au comptable la nature des pièces exigibles ». (9) Certains débets ont, néanmoins, continué à être prononcés pour un montant calculé simplement par différence entre le total des mandats payés et le montant du seuil applicable. No 6 - Juin 2008 - chronique de jurisprudence financière du jour de la notification du jugement, du versement dans la caisse du lycée Charles-deGaulle à Chaumont de la somme de 18 424,24 c ou de produire toutes les justifications à sa décharge ; Attendu que, dans sa réponse à l’injonction en date du 24 septembre 2007, Mme X... ne conteste pas les faits ; qu’elle en attribue l’origine à l’absence de vigilance de sa part ; Attendu que l’argument selon lequel le conseil d’administration aurait « voté sans problème » une décision modificative au budget ne peut être retenu ; Attendu que le premier acte de la mise en jeu de la responsabilité personnelle et pécuniaire du comptable est constitué par le jugement du 30 août 2007 ; qu’il sera fait, vu la notification tardive du jugement par le comptable supérieur, une juste appréciation des circonstances en retenant la date de réponse du comptable comme point de départ des intérêts ; Attendu que l’injonction prononcée par le jugement du 23 août 2007 peut être levée ; Par ces motifs, Ordonne ce qui suit, Statuant définitivement publique, après audience L’injonction prononcée par le jugement du 23 août 2007 est levée ; Mme X... est constituée débitrice envers le lycée Charles-de-Gaulle à Chaumont de la somme de 18 424,24 c (dix-huit mille quatre cent vingt-quatre euros et vingt-quatre centimes) augmentée des intérêts au taux légal calculés à compter du 24 septembre 2007. CRC Corse, jugement du 7 octobre 1992 [...] Statuant définitivement, Attendu qu’il ressort de l’examen des pièces justificatives produites à l’appui des comptes de l’exercice 1990 du collège Georges-Clemenceau que les paiements suivants ont été effectués au chapitre B (viabilisation) [suit un tableau] . Attendu que pour l’exercice 1990, figurait au chapitre B du budget primitif une somme de 82 500 F, et que dès lors une somme de - No 6 - Juin 2008 5 227,30 F a été payée par le comptable au-delà des autorisations budgétaires, votées au chapitre par l’assemblée délibérante ; Attendu qu’une décision budgétaire modificative nº 3, en date du 13 juin 1991, figure parmi les pièces générales produites à l’appui du compte de l’exercice 1990, que son objet consiste en la diminution des crédits inscrits au chapitre A (activités pédagogiques) d’une somme d’un montant de 5 227,30 F et en l’augmentation des crédits inscrits au chapitre B (viabilisation) d’une somme d’un montant équivalent ; Attendu que ce document précise que « la DBM nº 3 de régularisation sur le budget de l’exercice 1990 (...) est votée à l’unanimité (...). L’agent comptable informe le conseil que le contrat souscrit avec EDF doit être révisé (...) les puissances souscrites sont insuffisantes et explique les dépenses d’électricité très supérieures aux prévisions budgétaires » ; Attendu qu’ainsi le comptable a payé le mandat nº 53/11 au bénéfice de l’Office d’équipement hydraulique de la Corse, en date du 31 janvier 1991, d’un montant de 8 490,40 F, alors que les crédits n’étaient pas, au jour du paiement, disponibles pour la totalité de la somme en cause ; Attendu que, par jugement du 7 mai 1992 susvisé, la chambre régionale des comptes de Corse a enjoint à Mme Liliane P... de produire la décision budgétaire modificative à partir de laquelle elle a exercé le contrôle de la disponibilité des crédits, et à défaut d’apporter la preuve du versement de la somme en cause dans la caisse du collège ; Attendu qu’en réponse ledit comptable accuse réception du jugement provisoire susvisé et produit la copie d’une demande de remise gracieuse adressée au ministre de l’Education nationale ; que ladite demande présente un caractère prématuré, la responsabilité du comptable n’étant mise en cause qu’à titre provisoire ; qu’il ressort toutefois de son examen que le comptable ne conteste pas les faits qui lui sont opposés, et qu’il reconnaît notamment que le crédit disponible au chapitre B, lors de la présentation du mandat précité d’un montant de 8 490,40 F, était seulement de 3 273 F, et que dès lors il a payé une somme de 5 227,30 F au-delà des autorisations budgétaires ; que le comptable fait cependant valoir, qu’au moment du paiement, il avait l’intime conviction que l’assemblée délibérante régulariserait a posteriori le dépassement de crédit ; qu’enfin ledit comptable fait ressortir, qu’en l’espèce, l’établissement n’a subi aucun dommage ; Attendu qu’aux termes du décret nº 62-1587 du 29 décembre 1962, et plus particulièrement de son article 12, les comptables publics sont tenus d’exercer le contrôle de la disponibilité des crédits ; que de surcroît par jugement du 6 juillet 1989, notifié le 19 septembre 1989, la chambre régionale des comptes de Corse avait enjoint au comptable en fonction au collège Georges-Clemenceau de s’assurer, à l’avenir, de l’ouverture régulière des crédits avant d’effectuer les paiements des mandats qu’il prend en charge ; que ladite disponibilité s’apprécie au jour même du paiement ; qu’en outre, ainsi que le soulignait la Cour des comptes dans un arrêt Commune de Cuers en date du 25 mars 1991, il appartient au juge des comptes « d’élever d’office une difficulté toutes les fois que la vérification des comptes lui révèle qu’une dépense a été irrégulièrement payée, alors même que cette dépense n’aurait causé aucun préjudice financier à la personne publique » ; qu’ainsi, les arguments exprimés par le comptable sont, en l’espèce, inopérants ; que, dès lors, il est établi qu’une somme de 5 227,30 F a été irrégulièrement payée ; Attendu que l’article 60-I de la loi nº 63-156 du 23 février 1963 dispose à son deuxième alinéa que les comptables publics sont personnellement et pécuniairement responsables des contrôles qu’ils sont tenus d’exercer en matière de dépenses, dans les conditions prévues au décret précité ; que l’article 60-IV de la même loi précise que la responsabilité pécuniaire, ci-dessus évoquée, se trouve engagée dès lors qu’une dépense a été irrégulièrement payée ; qu’aux termes de l’article 60-VIII de la même loi, les débets portent intérêt au taux légal à compter de la date du fait générateur ; Considérant, dès lors, que la Chambre constate qu’aucun reversement portant sur la somme de 5 227,30 F n’a été constaté, que la date du fait générateur est celle du paiement irrégulier en cause, à savoir le 31 janvier 1991 ; Par ces motifs, Mme Liliane P... est déclarée débitrice envers le collège Georges-Clemenceau de la somme de 5 227,30 F (cinq mille deux cent vingt-sept francs trente centimes) ; la somme due portera intérêt au taux légal à compter du 31 janvier 1991, date du fait générateur de la responsabilité du comptable. 483 chronique de jurisprudence financière Clefs proposées (base Jade) : 18-05-01-01 (dettes des collectivités publiques - liquidation erronée) 쐍 18-05-06 (dettes des collectivités publiques - pièces justificatives). CRC Nord - Pas-de-Calais, jugement nº 2007-0082 du 9 novembre 2007, Caisse de crédit municipal de Lille. Résumé : La chambre régionale des comptes constatant que la seule pièce justificative détenue par le comptable, d’ailleurs très imprécise, ne lui permettait pas de payer un traitement sur la base de l’indice retenu par l’ordonnateur, procède au calcul de ce qu’elle estime être le trop-payé et le met à la charge du comptable. Références jurisprudentielles : • administratives : CE, nº 111385, 6 octobre 1995, Ville d’Amiens 쐍 CE, nº 139295, 10 mars 1997, Département du Haut-Rhin 쐍 CAA Nantes, nº 02NT01321, 21 novembre 2003, Ville de Brest. Doctrine : Instruction codificatrice nº 07-024-M0 du 30 mars 2007 relative aux pièces justificatives des dépenses du secteur local. Textes de référence : Articles L. 1617-2, D. 1617-5 et D. 1617-19 à D. 1617-21 du Code général des collectivités territoriales 쐍 Article 60 de la loi nº 63-156 du 23 février 1963 쐍 Articles 12 B, 13 et 37 du règlement général sur la comptabilité publique 쐍 Décret nº 55-622 modifié du 20 mai 1955 portant statut des caisses de crédit municipal 쐍 Décret nº 81-389 du 24 avril 1981 relatif au statut du personnel des caisses de crédit municipal 쐍 Décret nº 87-1097 modifié du 30 décembre 1987 portant statut particulier du cadre d’emplois des administrateurs territoriaux 쐍 Décret nº 87-1098 modifié du 30 décembre 1987 portant échelonnement indiciaire applicable aux administrateurs territoriaux 쐍 Arrêté du 23 février 1989 portant échelonnement indiciaire applicable à l’emploi de directeur de caisse de crédit municipal 쐍 Loi nº 92-518 du 15 juin 1992 relative aux caisses de crédit municipal 쐍 Décret nº 93-445 du 23 mars 1993 relatif à l’intégration dans la fonction publique territoriale des directeurs de caisses de crédit municipal 쐍 Décret nº 2007-450 du 25 mars 2007 modifiant le Code général des collectivités territoriales (partie réglementaire). Commentaires La nomenclature des pièces justificatives des dépenses du secteur public local, issue actuellement du décret nº 2007-450 du 25 mars 2007 modifiant le Code général des collectivités territoriales (partie réglementaire), prévoit que le premier paiement de la rémunération doit notamment être justifié par un acte d’engagement mentionnant, entre autres informations, « le grade, l’échelon, l’indice de traitement ou le taux horaire ou les modalités de la rémunération de l’agent ». En l’absence de ces précisions, et même dans les cas où la nomenclature n’est pas applicable (10), le comptable est, en effet, dans l’incapacité de contrôler l’exactitude de la liquidation comme le lui prescrit l’article 13 du règlement général sur la comptabilité publique. Il devrait donc suspendre le paiement, en application de l’article 37 du règlement général et de l’article L. 1617-2 du Code général des collectivités territoriales. Pour ne pas l’avoir fait, le comptable de la caisse de crédit municipal de Lille s’était vu, dans un premier temps, infliger une injonction d’avoir à apporter la preuve du reversement de l’intégralité des sommes irrégulièrement payées. En réponse, il arguait du fait que la décision de titularisation précisait bien que l’agent en question était nommé « au grade d’administrateur territorial hors classe ». Finalement, la Chambre, accueillant ce moyen, admet que le paiement n’a été irrégulier que pour partie : sans retenir les bases indiquées par le comptable, elle fixe, en effet, le montant du débet à la différence entre la rémunération calculée selon l’indice utilisé pour le mandatement et celle qui résultait du premier échelon du grade seul mentionné sur la pièce justificative invoquée. 484 Pour autant, comme la pièce ainsi admise datait de 1993 (11), force est de constater que la Chambre écarte implicitement l’application automatique des durées prévues par les dispositions statutaires relatives à l’avancement, considérant, sans doute, que, comme toute modification apportée aux éléments de rémunération, un changement d’échelon doit être justifié par une « décision de l’autorité investie du pouvoir de nomination portant modification de la situation administrative de l’intéressé entraînant une modification de sa rémunération avec indication de la date d’effet » (rubrique 21021.3 de l’actuelle nomenclature des pièces justificatives). De fait, le statut particulier du cadre d’emplois des administrateurs territoriaux (décret nº 87-1097 modifié) prévoit des durées « minimales » et « maximales » pour le temps à passer dans chacun des échelons des différents grades. Le temps à passer effectivement dans un échelon ne peut donc être présupposé et un changement d’échelon doit, en principe, faire l’objet d’un arrêté spécifique (12) dont le juge administratif peut contrôler la légalité (cf. références jurisprudentielles s’agissant des administrateurs territoriaux). La Chambre rejette, en outre, explicitement le moyen tiré d’une délibération, postérieure aux paiements incriminés, qui émettait l’opinion que la Caisse n’a subi aucun préjudice, question qui est d’ailleurs toujours étrangère au régime de responsabilité propre aux comptables publics. Enfin, on notera que, en fixant le point de départ des intérêts du débet à la date du premier jugement bien que ce jugement ait été rendu bien avant le 1er juillet 2007 (v. art. 146-II de la loi nº 2006-1771 du 30 décembre 2006) et non pas à la date du dernier paiement incriminé, la Chambre fait bénéficier le comptable des nouvelles dispositions de la loi nº 63-156 (nouvel art. 60-VIII). CRC Nord - Pas-de-Calais, jugement du 9 novembre 2007 La Chambre, (...) Vu les conclusions du commissaire du Gouvernement ; Après avoir entendu à l’audience M. Guy Sayaret, magistrat, en son rapport, et M. Frédéric Advielle, commissaire du Gouvernement, en ses conclusions ; Ordonne : Statuant définitivement, Attendu que par jugement nº 2005-681 en date du 9 février 2006 notifié le 11 mai 2006, il a été enjoint à M. Jean-Louis M... d’apporter la preuve du reversement dans la caisse du crédit municipal de Lille de la somme de 50 027,25 c, relative à la rémunération de M. X... en 2002, ou toute autre justification à sa décharge ; Attendu que dans sa réponse, le comptable relève que la Chambre, dans le jugement précité du 9 février 2006 reformulant (10) La nomenclature concerne, désormais, tous les établissements publics locaux dotés d’un comptable public (art. D. 1617-19 modifié du Code général des collectivités territoriales). L’article premier du décret nº 55-622 modifié affirme que « les caisses de crédit municipal sont des établissements publics communaux de crédit et d’aide sociale ». (11) Le décret prévoyant l’intégration dans la fonction publique territoriale des directeurs de caisses de crédit municipal date du 23 mars 1993 (décret nº 93-445). A partir du seul jugement, on ignore si l’intéressé remplissait bien les conditions pour être intégré et pour l’être au grade d’administrateur hors classe. (12) A l’inverse d’un changement de chevron à l’intérieur d’un échelon situé dans l’échelle dite lettres dont la durée est uniformément fixée à un an par l’arrêté du 29 août 1957 modifié relatif aux emplois supérieurs de l’Etat classés hors échelle. No 6 - Juin 2008 - chronique de jurisprudence financière l’injonction nº 4 du précédent jugement, n’a pas retenu l’absence de préjudice causé à l’établissement ; Attendu qu’il produit une délibération du conseil d’orientation et de surveillance de la caisse de crédit municipal en date du 11 juillet 2006 estimant que le paiement de la rémunération de M. X... a été régulier puisqu’il correspond à un service fait et n’a pas entraîné de préjudice pour l’établissement ; Attendu que la Chambre n’a pas à invoquer l’existence d’un préjudice pour mettre en jeu la responsabilité du comptable public ; que l’absence de préjudice peut être alléguée auprès du ministre pour obtenir une remise gracieuse du débet prononcé ; Attendu que la délibération précitée ne peut, pour la Chambre, constituer une pièce justificative des paiements du comptable, au regard des motifs mentionnés et de sa date de production postérieure aux paiements ; Attendu que, dans sa réponse, le comptable précise que M. X... a été rémunéré sur la base de la hors échelle A 3 du grade d’administrateur territorial hors classe, au lieu de la hors échelle A 1 du même grade ; que le débet prononcé devrait donc être calculé sur la base de la différence entre les indices de ces deux échelons ; Attendu que la Chambre, en l’absence de toute décision d’évolution de carrière, ultérieure à l’arrêté du 14 juin 1993 recrutant M. X... au grade d’administrateur territorial hors classe, ne peut admettre la validité de la créance au titre de la rémunération versée à M. X... en 2002 que sur la base de celle qui aurait dû être calculée avec l’indice de départ de la carrière d’administrateur territorial hors classe, soit l’indice majoré 657 ; qu’il en résulte un trop-payé égal à la différence entre la rémunération versée sur la base de la hors échelle A 3 de ce grade et celle qui aurait dû l’être sur la base de l’indice 657 ; Attendu que ce trop-payé s’élève pour l’année 2002 à 9 081,64 c, soit la différence entre la rémunération effectivement perçue par M. X... égale à 63 467,52 c et celle qu’il aurait dû percevoir, soit 54 385,88 c, ainsi que le font ressortir les décomptes joints en annexe au jugement ; Par ces motifs, L’injonction unique prononcée dans le jugement précédent est levée ; M. Jean-Louis M... est constitué débiteur envers le crédit municipal de Lille de la somme de 9 081,64 c, assortie des intérêts - No 6 - Juin 2008 décomptés au taux légal à partir du 18 novembre 2004, date du premier jugement mettant en jeu la responsabilité du comptable ; En conséquence, le sursis à décharge de M. Jean-Louis M... pour la période du 1er janvier 2002 au 31 décembre 2002 est maintenu. Conclusions du Ministère public nº 2007-0293 du 30 mai 2007 [...] Sur le fond du dossier : Rappelons que, par injonction susvisée, la Chambre a enjoint M. Jean-Louis M... d’apporter la preuve du reversement dans la caisse du crédit municipal de la somme de 50 027,25 c relative à la rémunération de M. X... en 2002, ou toute autre justification à sa décharge ; Observons qu’en réponse, le comptable public, après s’être interrogé sur la substitution des motifs de cette nouvelle injonction par rapport à la précédente, précise « que dès lors que la chambre régionale des comptes ne remet pas en cause la validité de l’arrêté [en l’occurrence, un arrêté du maire de Lille, en date du 14 juin 1993], le comptable avait une base légale pour contrôler la validité de la créance puisque le directeur général aurait dû être payé au minimum à l’échelle A 1, cependant sa rémunération a été calculée sur la base de l’indice A 3, alors dans ce cas le débet prononcé devrait être calculé sur la différence entre les deux indices dans l’hypothèse où le directeur général aurait dû percevoir un traitement plus faible » ; Que, par ailleurs, et bien que précisant que « la régularité du paiement s’analyse au moment de celui-ci et qu’une délibération rétroactive ne peut constituer une pièce justificative valable pour un paiement antérieur », M. Jean-Louis M... joint à sa réponse une délibération du conseil d’orientation et de surveillance datée du 11 juillet 2006 « estimant ces paiements réguliers, ceux-ci n’ayant pas causé de préjudice au crédit municipal de Lille, dès lors qu’ils correspondent à un service fait » ; Rappelons qu’à la suite de l’arrêté en date du 14 juin 1993 nommant M. X... directeur de la caisse du crédit municipal de Lille et le titularisant dans le cadre d’emploi des administrateurs territoriaux, cette personne est rémunérée sur la base d’un indice par référence à la hors-échelle A, 3e chevron, situation qui est celle relevée par la Chambre dans son jugement qui porte sur l’année 2002 ; Précisons, qu’en application de l’article 13 du décret nº 62-1587 du 29 décembre 1962 portant règlement général sur la comptabilité publique, les comptables sont tenus d’exercer, en matière de dépenses, le contrôle de la validité de la créance, lequel porte notamment sur l’exactitude des calculs de liquidation ; Relevons, qu’au cas d’espèce, le comptable ne disposait pour effectuer ce contrôle de liquidation que d’un arrêté du maire de Lille, en date du 14 juin 1993, « titularisant M. X... dans le cadre d’emploi des administrateurs territoriaux au grade d’administrateur territorial hors classe » ; Estimons, dès lors, que faute de disposer, à la fois de l’échelon de cet agent et de son indice de traitement, le comptable public aurait dû suspendre le paiement en application de l’article 37 du décret du 29 décembre 1962 et en informer l’ordonnateur ; qu’en ne mettant pas en œuvre ces dispositions, le comptable public a engagé sa responsabilité pécuniaire prévue à l’article IV de la loi nº 63-156 du 23 février 1963 (art. 1er de ce même texte à compter du 1er juillet 2007) « pour le déficit ou le manquement en denier constaté » ; Considérons que ce déficit ou ce manquement en denier ne peut, en effet, résulter que de la différence entre le premier échelon du grade d’administrateur territorial hors classe (soit l’indice brut 801) et la rémunération calculée sur la base de la horséchelle A, 3e chevron, soit selon les calculs effectués par votre rapporteur une différence égale à 13 343,61 c ; Indiquons, par ailleurs, comme le précise le comptable dans sa réponse, que la responsabilité du comptable public doit s’apprécier au vu des seuls éléments disponibles lors de l’ouverture de sa caisse ; qu’à cet égard, la délibération susvisée du 11 juillet 2006 ne saurait être prise en compte par la juridiction, même si elle pourra utilement être présentée à l’appui de la demande de remise gracieuse adressée au ministre des Finances ; Concluons, dès lors, au prononcé d’un débet à l’encontre de M. Jean-Louis M... pour un montant total de 13 343,61 c, débet qui portera intérêt à compter « du premier acte de la mise en jeu de la responsabilité personnelle et pécuniaire du comptable public » si votre jugement intervient après le 1er juillet 2007, soit, en l’occurrence, le 9 février 2006 qui est la date de votre jugement provisoire. Frédéric ADVIELLE. 485