Utilisation des outils informatiques et du téléphone dans l

Utilisation des outils informatiques et du téléphone dans
l’association : quelles limites ?
Dans l’exercice de leur activité professionnelle, les salariés utilisent souvent un téléphone et/ou un poste de travail
informatique qui peut être connecté à Internet et doté d’une messagerie électronique.
L’utilisation sur les lieux de travail de ces outils informatiques et de communication est présumée être à des
fins professionnelles. L’utilisation à des fins personnelles est cependant tolérée mais elle doit rester raisonnable
et ne doit pas affecter la sécurité (des salariés et des réseaux informatiques) ou la productivité de l’entreprise.
Les salariés doivent également respecter deux valeurs inhérentes à leur contrat de travail : la discrétion et la
loyauté.
Depuis plusieurs années, la jurisprudence s’efforce de définir le cadre d’utilisation des nouvelles technologies
en précisant les limites du droit d’expression tel qu’il s’exerce spécifiquement à travers elles : SMS, courriels, blogs
et réseaux sociaux. Mais les solutions restent incertaines dès lors que l’utilisation d’Internet met à mal la
distinction entre vie personnelle et vie privée.
1. Contrôle de lutilisation des outils informatiques
1.1
Utilisation dInternet
Internet peut être utilisé à des fins professionnelles sur le lieu de travail mais aussi personnelles.
En effet, selon la jurisprudence, l’employeur ne peut pas totalement interdire l’utilisation d’Internet par les
salariés à des fins personnelles (consultation de sites et téléchargement de fichiers).
Cependant cette utilisation doit être raisonnable et ne doit pas nuire au bon fonctionnement de
l’association. En effet l’utilisation d’Internet sur le lieu de travail peut être considérée comme abusive, et ainsi
ne pas respecter l’obligation de loyauté, si elle est trop fréquente (empiète largement sur le temps de travail) ou si
son contenu est déplacé (consultation de sites pornographiques, téléchargement illégal de musiques ou films, ...).
Le problème est de réussir à déterminer les limites du raisonnable afin de pouvoir concilier les droits du salarié
(respect de la vie personnelle) et le bon fonctionnement de l’entreprise. Pour exemple, dans un arrêt de la Cour
d’appel de Rennes du 20 novembre 2013 (n°12-03567), les juges ont considécomme abusives des connexions
internet à des fins personnelles repsentant 20% du temps de travail du salarié. En revanche, la Cour d’appel
de Bordeaux en date du 15 janvier 2013 (n°11-02062) a estimé que ne constituait pas un usage abusif, une heure
par semaine de connexion Internet à des fins personnelles.
L’employeur est en droit de fixer les conditions et limites de l’utilisation d’Internet sans que cela ne constitue
une atteinte à la vie privée des salariés.
S’il en existe un, le comité d’entreprise devra être consulet informé du cadre mis en place par l’employeur
(art L.2323-32 du Code du travail).
Par la suite les salariés devront être informés des dispositifs de contrôle mis en place, de leurs finalités et de
leurs modalités (art. L.1222-4 du Code du travail). L’employeur devra également déclarer ces dispositifs à la CNIL
(Commission Nationale de l’Informatique et des Libertés).
Exemples : L’employeur peut mettre en place des dispositifs de filtrage de sites non autorisés (sites à caractère
pornographique, pédophile, d’incitation à la haine raciale,...). Il peut également fixer des limites dictées par l’exigence
de curi de l’organisme telles que l’interdiction de técharger des logiciels, de se connecter à un forum ou se
connecter à des « tchats », dacder à une bte aux lettres personnelles par Internet compte tenu des virus qu’un tel
acs est susceptible de présenter, ou bien mettre en place un dispositif de conservation des données des connexions
(avec une durée de conservation de 6 mois).
Si des procédures disciplinaires, pouvant aller jusqu’au licenciement, sont susceptibles d’être engagées sur la
base de ces conditions d’utilisation, les salariés doivent en être explicitement informés au préalable.
Nous vous conseillons donc de mentionner les règles d’utilisation au sein du règlement intérieur, d’une charte
informatique, d’une note de service ou encore d’un document d’accueil des nouveaux embauchés.
1.2 L’utilisation des réseaux sociaux par les salariés
A propos de l’usage des réseaux sociaux, Facebook, Twitter..., la même tolérance de la jurisprudence est de mise,
même si elle est parfois indécise :
Dans un arrêt de la Cour d’appel de Chambéry en date du 25 vrier 2016 (n° 15-01264), les juges ont claré
que « compte tenu du fait que le salarié n'était soumis à aucun horaire ainsi que le prévoit expresment son
contrat de travail, le fait d'avoir le cas échéant, pu consacrer un temps aussi limi à l'envoi de tweets non
professionnels, y-compris à des horaires commument retenus comme travaillés ce qui n'est pas démont, alors que
le salar était au demeurant du fait de ses fonctions, connec à internet de manière quasi continue, ne peut être
retenu comme fautif ».
Les juges recherchent si l’utilisation du réseau social durant les heures de travail est abusif ou excessif en tenant
compte de l’emploi du salarié, du contexte professionnel ainsi que du temps passur le réseau social et de la
fréquence des connexions.
-> L’utilisation par l’employeur d’écrits du salarié réalisés sur les réseaux sociaux
Le Conseil de Prudhommes de Boulogne Billancourt en date du 19 novembre 2010 a par exemple considéré
que l’employeur qui avait licencié un salarié ayant incité à la rébellion de sa hiérarchie et avait dénigré son
entreprise et un supérieur hiérarchique, pouvait produire devant le tribunal les échanges de ses salariés sur
Facebook ayant eu lieu en dehors du temps de travail et depuis leur ordinateur personnel. Les pages
incriminées ne relevant pas de la vie privée, la preuve par les captures d’écran ne peut être consie comme
ayant éobtenue à l’insu de leur auteur et ne peut, en conséquence, constituer une preuve illicite.
Dans la même lignée, la Cour d’appel de Reims en date du 9 juin 2010 a considéré que l’employeur n’avait pas violé
le secret de la correspondance : qu « attendu que nul ne peut ignorer que Facebook, qui est un seau accessible par
connexion internet, ne garantit pas toujours la confidentialité nécessaire ; [...] ; que le mur s'apparente à un forum de
discussion qui peut être limité à certaines personnes ou non ; que Monsieur X... évoque un acs bloq à son profil sur
Facebook à toute personne non souhaitée ; que toutefois en mettant un message sur le mur d'une autre personne
dénommée « ami », il s'expose à ce que cette personne ait des centaines d' « amis » ou n'ait pas bloq les acs à
son profil et que tout individu inscrit sur Facebook puisse accéder librement à ces informations (coordonnées, mur,
messages, photos) ; que
dans ces conditions, contrairement à ce qu'avance le salarié, il ne s'agit pas d'une
atteinte à la sphère prie au regard de tous les individus, amis ou non qui peuvent voir le profil d'une
personne et acder à son mur et aux messages qu'elle écrit ou qui lui sont adress
»
En revanche, la Cour d'appel de Rouen dans un arrêt du 15 novembre 2011 a énoncé qu’ « il ne peut être affirmé
de manière absolue que la jurisprudence actuelle nie à Facebook le caractère d'espace privé, alors que ce réseau
peut constituer soit un espace privé, soit un espace public, en fonction des paramétrages effectués par son
utilisateur ».
Une distinction sera à faire selon que la confidentialité du compte Facebook sera restreinte aux seuls amis du
salarié ou qu’elle sera ouverte à tous.
Les propos sur Facebook, s lors qu’ils sont accessibles à tous, ont un caractère public. Ils pourront donner lieu à
sanction par l’employeur.
Ainsi, dans un arrêté de la Cour dAppel de Reims en date du 24 octobre 2012, les juges ont considéré que le
salarié qui ne restreint pas la confidentialité de son compte Facebook, peut être sanctionné pour ses propos.
Une distinction est à faire entre lespace privé du salarié qui reste confidentiel et lespace public qui peut donner
lieu à une sanction.
La Cour d'appel de Besançon dans un arrêt du 15 novembre 2011 (n°11-674) a déclaré que « le réseau Facebook a
considéré que facebook constitue un réseau nécessairement consiré, au regard de sa finalité et de son organisation,
comme un espace public ; qu'il appartient en conséquence à celui qui souhaite conserver la confidentialité de ses
propos tenus sur Facebook, soit d'adopter les fonctionnalités idoines offertes par ce site, soit de s'assurer
préalablement auprès de son interlocuteur qu'il a limité l'acs à son "mur" ». Elle a ainsi confir le licenciement pour
faute grave d’une salare.
Enfin, le Tribunal correctionnel de Paris en date du 17 janvier 2012 avait condamné pour injures publiques un
légué syndical qui avait publ sur Facebook des propos comportant des expressions outrageantes à l'encontre de
la direction de l'entreprise, le Tribunal ayant relevé que les expressions incriminées excédaient les limites de la
critique admissible, y compris lorsqu'elle s'exerce dans un cadre syndical.
En l’espèce, le délégué syndical avait posté sur le mur Facebook de son syndicat « [...] boulot de merde, boite de
merde, chef de merde [...] ». Les termes tenus par ce salarié excédaient les limites de la critique admissible et
pouvaient s’analyser en injures publiques.
L'injure publique est une injure pouvant être entendue ou lue par un public inconnu et imprévisible c'est-à-dire
par un nombre indéterminé de personnes étrangères aux deux protagonistes et sans liens étroits entre elles.
L'injure pourra être qualifiée de non publique si elle est prononcée devant un cercle restreint de personnes
formant une communauté d'intérêt.
Attention
: Ce n’est pas parce que les propos d’un salarié ne sont pas considérés comme des injures publiques
en droit nal qu’ils ne pourront pas caractériser un abus de la liberté d’expression pouvant donner lieu à un
licenciement.
-> La daction dune charte
L’utilisation massive des réseaux sociaux par les salariés doit inciter les entreprises à encadrer ce type de pratique,
notamment par la rédaction d’une charte spécifique. Si une charte sur les nouvelles technologies est déjà en place
dans la structure, vous pouvez y insérer une partie sur les réseaux sociaux afin d’encadrer leur utilisation.
L’utilisation d’Internet par les organisations syndicales :
La loi envisage deux modalités d’utilisation d’Internet par les organisations syndicales au sein de l’entreprise : - soit
sur un site syndical mis en place sur l’Intranet de l’entreprise ;
- soit par diffusion sur la messagerie électronique de l‘entreprise. Cette diffusion doit rester compatible avec les
exigences de bon fonctionnement du réseau informatique de l’entreprise et ne pas entraver l’accomplissement du
travail.
Le Code du travail n’envisage l’accès par les organisations syndicales à l’Intranet et à la messagerie électronique de
l’entreprise que par gociation d’un accord conclu préalablement qui doit finir les conditions d’accès des
syndicats à ces réseaux et les modalités pratiques et techniques pour préserver la liberté de choix des salariés
d’accepter ou de refuser ces messages.
L’utilisation à des fins syndicales des réseaux externes d’Internet n’est pas non plus interdite, sous condition de
respect de certaines obligations, notamment celle de discrétion.
1.3 Utilisation de la messagerie électronique
Utilisation de la messagerie professionnelle à des fins personnelles
Tout comme lutilisation dInternet, il existe une tolérance pour lutilisation de la messagerie
professionnelle à des fins personnelles.
Les salariés peuvent ainsi échanger des courriers électroniques entre eux ou avec une personne extérieure à
l’entreprise, à condition de ne pas en faire une utilisation abusive et déloyale (fréquence et contenu).
Un courrier électronique émis ou reçu par un salarié peut donc avoir le caractère de correspondance privée
et l’employeur devra en respecter le secret.
La Cour de cassation a affirmé, dans un arrêt du 2 octobre 2001 (arrêt Nikon), qu’un employeur ne saurait
prendre connaissance des messages personnels d’un employé sans porter atteinte à la vie privée de
celui-ci et au principe du secret des correspondances, quand bien me une utilisation à des fi ns
privées aurait été proscrite par l’employeur.
Pour autant, le principe du secret des correspondances connaît des limites dans la sphère professionnelle. Tout
ce qui n’est pas identifié comme « personnel »/« privé »/« confidentiel » est puté être professionnel, de
sorte que l’employeur peut y accéder librement.
Il appartient donc au salard’identifier les messages qui sont personnels dans l’objet du message ou dans le
nom du répertoire dans lequel ils sont stockés.
Droit de contrôle de lusage de la messagerie par lemployeur
Des exigences de sécurité, de pvention ou de contle de lencombrement du réseau peuvent conduire les
entreprises à mettre en place des outils de contrôle de la messagerie.
Les dispositifs de contrôle de la messagerie doivent faire l’objet de la même consultation et publicité que ceux
contrôlant l’utilisation d’Internet :
- consultation du comité dentreprise ;
- information individuelle des salars sur les dispositifs, leurs finalités, la durée pendant laquelle les
données sont conservées ou sauvegardées ;
- déclaration à la CNIL.
Exemple : En cas d’archivage automatique des messages électroniques, les salariés doivent être informés des modalis
d’archivage, de la durée de conservation des messages et des modalis dexercice de leur droit d’accès.
Concrètement, quel type de contrôle peut mettre en place l’employeur et dans quelles conditions ?
Afin de ne pas risquer de porter atteinte à la vie prie des salariés, l’employeur doit fixer les conditions de
consultation de messagerie, notamment en cas dabsence des salariés (au sein dune charte
informatique, du règlement intérieur, d’une note de service, ...).
Comme déjà vu ci-dessus, les tribunaux considèrent que tous les messages reçus ou envoyés depuis le poste
de travail mis à disposition par l’employeur ont, par principe, un caractère professionnel. L’employeur peut
donc les consulter.
Toutefois, si le message est clairement identifié comme « personnel » pri »/ « confidentiel »
l’employeur ne doit pas en prendre connaissance.
Il peut toutefois accéder aux messages personnels en présence du salarié ou après l’avoir invité à être
présent ou encore en cas de risque particulier
1
(comme la suspicion d'un acte de concurrence déloyale)
pour l’entreprise.
Attention :
La Cour de Cassation rappelle qu’un message relevant de la vie privée ne peut être utilisé pour
sanctionner le salarié qui en est l’auteur ou le destinataire. Tant que le salarié fait preuve de modération
s’agissant de l’utilisation personnelle de la messagerie professionnelle (fréquence et contenu), la Cour
appelle les entreprises à faire preuve d’une relative tolérance.
De plus, si l’employeur peut toujours consulter les fichiers qui n’ont pas été identifiés comme personnels par
le salarié, il ne peut pas les utiliser à son encontre dans une procédure judiciaire s’ils s’avèrent relever de sa
vie privée car « la protection du respect de l'intimi de la vie prie qui implique en particulier le secret des
correspondances resurgit alors» (Cass. Ch. Mixte, 18 mai 2007).
En cas de départ du salarié ?
Les modalités de fermeture du compte utilisateur du salar doivent être organisées dans la charte
informatique. L’employeur doit avertir le salarié de la date de fermeture de son compte afin de lui permettre
de vider sa messagerie. L’adresse électronique nominative du salarié doit ensuite être supprimée par
l’employeur.
Que faire en cas de désaccord ?
Le principe reste la concertation entre le salarié et son employeur. Toutefois, si la relation de confiance est
entamée, tout litige pourra être porté devant le juge qui appréciera si l’employeur a ou non commis une
atteinte à la vie privée du salarié.
1.4 Stockage des fichiers informatiques
a. Possibilide stocker des fichiers personnels sur un ordinateur professionnel ou une clé USB
Les fichiers et dossiers créés par le salarié à l’aide de l’ordinateur mis à sa disposition pour les besoins de son
travail sont présumés avoir un caractère professionnel.
Il en va de même lorsque les fichiers et dossiers sont stockés sur une clé USB appartenant à la structure ou
bien au salarié et connectée à lordinateur professionnel (arrêt de la Cour de Cassation du 12/02/2013).
Cependant dès lors que le salarié a identifié comme « personnel »/« privé »/« confidentiel » des fichiers et
dossiers stockés sur le disque dur ou une clé USB, l’employeur ne peut pas en principe procéder à leur
ouverture.
b. Droit daccès encad de lemployeur
Même si des fichiers sont identifs comme « personnel »/« privé »/ « confidentiel », l’employeur garde la
possibilité de les ouvrir s’il respecte une des conditions suivantes :
- le salarié est présent ou a é invité à être psent ;
- l’existence d’un risque ou d’un évènement particulier pour l’entreprise.
1
En cas de risque particulier, l’employeur devra solliciter aups d’un juge judiciaire l'intervention d'un huissier, en présence
du salar, pour acder aux messages personnels. Le juge devant appcier si cette désignation pond à un motif légitime
pour la préservation des droits de l'employeur.
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