La certification des comptes du régime général

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Chapitre I
La certification des comptes du régime
général
LA CERTIFICATION DES COMPTES DU REGIME GENERAL
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_____________________ PRESENTATION_______________________
La loi organique du 2 août 2005 a donné une pleine consécration
aux exigences de régularité, de sincérité et d’image fidèle du patrimoine et
de la situation financière que doivent respecter les comptes des organismes
de sécurité sociale. La loi organique précise que « les régimes obligatoires
de base de sécurité sociale et les organismes concourant à leur
financement appliquent un plan comptable unique fondé sur le principe de
la constatation des droits et obligations. Les opérations sont prises en
compte au titre de l’exercice auquel elles se rattachent indépendamment de
leur date de paiement ou d’encaissement ». Ces dispositions organiques
sont d’application directe. C’est donc dès la clôture des comptes de 2005
qu’il convient d’apprécier les progrès dans la qualité comptable et
s’interroger parallèlement sur la préparation de l’étape suivante, la
certification.
L’état d’avancement de la préparation de la certification des
comptes du régime général sera d’abord présenté, puis diverses
observations seront faites sur les comptes de 2005 au regard d’une part
des suites données aux précédentes remarques de la Cour et, d’autre part,
des exigences normatives en matière de qualité comptable.
I - Les travaux préparatoires à la certification
La Cour devra établir chaque année « un rapport présentant le
compte-rendu des vérifications qu’elle a opérées en vue de certifier la
régularité, la sincérité et la fidélité des comptes des organismes nationaux
du régime général et des comptes combinés de chaque branche et de
l’activité de recouvrement du régime général, relatifs au dernier exercice
clos, établis conformément aux dispositions du livre 1er du code de la
sécurité sociale (...) » (article LO. 132-2-1 du code des juridictions
financières).
6
COUR DES COMPTES
Les comptes des établissements publics et les comptes combinés des
branches et de l’activité de recouvrement
Les comptes des établissements publics nationaux (CNAMTS,
CNAVTS, CNAF, ACOSS) retracent pour l’essentiel d’une part leur
activité de tête de réseau (pour l’ACOSS, il s’agit de la centralisation des
flux financiers du recouvrement ; pour la CNAMTS, la CNAVTS1 et la
CNAF, il s’agit du versement de dotations aux caisses locales) et d’autre
part diverses opérations financières avec d’autres organismes de sécurité
sociale, divers autres organismes publics et l’Etat, et, pour l’ACOSS, la
gestion commune de la trésorerie2.
Les comptes combinés de chaque branche (maladie, accidents du
travail et maladies professionnelles, vieillesse et famille) regroupent, après
un traitement approprié qui sera présenté plus loin, les comptes de
l’établissement public national et ceux des organismes de base. Ces
derniers procèdent selon les cas au paiement des prestations aux assurés
sociaux ou au recouvrement des cotisations.
Pour que cette mission puisse être menée à bien, quatre grandes
séries de conditions doivent êtres remplies.
-
les comptes des organismes de base, qui ne sont pas soumis
directement au certificateur (à la différence de ceux des établissements
publics nationaux) doivent présenter un niveau de qualité suffisant
pour que les comptes combinés soient en état eux-mêmes d'être
certifiés ;
-
les normes comptables applicables aux comptes combinés doivent
êtres complètement définies ;
-
les organismes concernés doivent avoir pris les mesures suffisantes
en matière de contrôle et d’audit interne pour rendre leurs comptes
auditables ;
-
la Cour doit définir une stratégie appropriée au vu des risques
identifiés ; à cet égard, les systèmes d’information doivent assurer la
traçabilité des opérations et garantir le chemin de révision.
1. La CNAVTS n’est pas uniquement tête de réseau. Elle gère en effet directement les
pensions ayant donné lieu à liquidation des retraités résidant en Ile-de-France.
2. Les comptes de l’établissement public ACOSS retracent aussi, en comptes de tiers,
la gestion de diverses activités et le recouvrement de ressources pour le compte
d’autres entités publiques ou semi-publiques. La CNAF a également une importante
activité pour compte de tiers publics.
LA CERTIFICATION DES COMPTES DU REGIME GENERAL
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A – Le pouvoir de validation des comptes des
organismes de base
Préalablement au vote de la loi organique du 2 août 2005, la loi de
financement de la sécurité sociale pour 2005 a introduit dans le code de la
sécurité sociale un article L. 114-63 qui dispose que les comptes annuels4
des organismes de base de sécurité sociale qui sont présentés par l'agent
comptable, établis sous sa responsabilité et visés par le directeur sont
transmis à l'organisme national de la branche ou du régime qui les
« valide et établit le compte combiné de la branche ou du régime ».
Le processus de validation est plus ambitieux que la seule
centralisation des comptes des organismes de base qui était jusqu'alors
régie par le décret du 19 septembre 2001. II apparaît dans les textes
concomitamment avec la notion de comptes combinés (cf. infra).
Autrement dit, pour que les comptes combinés des branches ou des
régimes 5 puissent désormais être produits, il faut que les comptes des
organismes de base qui en sont les éléments constitutifs avec ceux de
l'organisme national soient validés par ce dernier.
1 – Un rôle nouveau pour les agents comptables nationaux
Le décret du 30 décembre 2005, pris en application de l'article
L. 114-6 du code de la sécurité sociale6, complété par un arrêté, définit
les éléments constitutifs du processus de validation qui s’articule ainsi :
-
les agents comptables des organismes de base de sécurité sociale,
après avoir établi les comptes annuels, les transmettent, à fin de
validation, aux agents comptables des organismes nationaux chargés
de leur centralisation, selon un calendrier fixé par ces derniers ;
-
la validation effectuée par l'agent comptable national consiste à
attester que les comptes annuels des organismes locaux sont réguliers,
3 . L’article L. 114-6 du CSS a été légèrement modifié dans sa forme par la loi
organique du 2 août 2005.
4 . Le texte mentionne aussi les comptes infra-annuels : il s’agit en pratique des
balances mensuelles qui, centralisées par les organismes têtes de réseau et
réceptionnés par la mission comptable permanente (MCP), permettent aux pouvoirs
publics de suivre l’évolution des recettes et des dépenses des régimes de base.
5. Les développements du A concernent l’ensemble des régimes de base de sécurité
sociale et pas seulement le régime général.
6. Journal officiel du 31 décembre 2005. Ce texte réécrit l’article D. 144-4-2 du code
de la sécurité sociale.
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COUR DES COMPTES
sincères et donnent une image fidèle de leur résultat, de leur situation
financière et de leur patrimoine ;
-
les contrôles de l'agent comptable national sont effectués selon un
référentiel commun de validation des comptes dont les principes sont
approuvés par arrêté ministériel, après avis du haut conseil
interministériel de la comptabilité des organismes de sécurité sociale
(HCICOSS) ;
-
l'agent comptable national présente un rapport de validation qui
comporte deux parties, l'une relative à l'expression de son opinion sur
les comptes annuels des organismes locaux, l'autre comportant le
compte rendu de ses vérifications. L'agent comptable national établit
un seul rapport, pour l'ensemble des comptes qu'il valide, mais celui-ci
comprendra autant d'opinions que nécessaire ;
-
après avoir centralisé et validé les comptes annuels des organismes
de base, l’agent comptable national arrête les comptes combinés
annuels. Le texte précise qu'il opère les corrections ou compléments
d'écriture nécessaires, ce qui lui confère un pouvoir de réformation des
comptes. Les comptes combinés sont ensuite visés par le directeur de
l'organisme national.
Le dispositif est mis en oeuvre à partir des comptes de l'exercice
2006. Il traduit le choix du Parlement et du Gouvernement de ne pas avoir
recours à une mission de commissariat aux comptes pour certifier les
comptes des organismes de base, à l'inverse du choix fait par exemple, il
est vrai dans un contexte différent, pour les ASSEDIC dont les comptes
sont intégrés dans les comptes combinés de l'UNEDIC.
L'agent comptable national se voit ainsi reconnaître des
attributions proches de celles d'un commissaire aux comptes de droit
commun alors qu'il est lui-même le producteur et le signataire des
comptes combinés.
En donnant à l'agent comptable national un tel pouvoir de
validation, les textes cités précédemment lui confèrent, dans tous les cas,
l'autorité suffisante sur les organismes du réseau concerné pour obtenir la
production de comptes locaux de qualité.
Néanmoins, la validation ne saurait être assimilée à une véritable
certification. L'agent comptable national assure la direction de la fonction
comptable de la branche, de l’activité ou du régime concerné. Au regard
LA CERTIFICATION DES COMPTES DU REGIME GENERAL
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des normes internationales de l'audit des comptes7, il doit être considéré
comme un auditeur interne qui cumulerait cette fonction avec celle de
directeur comptable du réseau.
2 – Le référentiel commun de validation
Pour remplir sa mission, l'agent comptable national s'appuie sur un
référentiel commun de validation des comptes des organismes de base.
Elaboré par un groupe de travail du haut conseil constitué pour
l'essentiel d'agents comptables nationaux et de leurs représentants, avec le
soutien de la MCP, le référentiel commun de validation est destiné à
prendre la forme d'un arrêté interministériel renvoyant lui-même à un
« document commun » assorti d'annexes, à son tour décliné dans des
instructions applicables à chaque branche ou activité de chaque régime.
Le projet d'arrêté et ses annexes ont fait l'objet d'un avis favorable
du haut conseil dans sa séance du 27 avril 2006. Le texte définit les
principes du référentiel. Ceux-ci sont repris dans l'encadré ci-dessous.
Eléments constitutifs du référentiel de validation des comptes
des organismes de base
1. « le plan de compte annoté inter-régimes » : celui-ci détaille et
commente, dans le cadre du plan comptable unique des organismes de
sécurité sociale, la liste des comptes communs aux différents régimes ;
2. « une liste de contrôles des comptes locaux » : il s'agit, d'une part
des contrôles communs assurés par les organismes nationaux selon une
périodicité annuelle ou infra-annuelle et, d'autre part, des contrôles
communs que les organismes locaux doivent pratiquer eux-mêmes ;
3. « des indicateurs de délais et de qualité des comptes » : un
indicateur commun de délai de transmission des comptes par les
organismes locaux et au moins un indicateur de qualité de ces comptes
doivent être établis ;
4. « les principes du contrôle interne du domaine de la comptabilité
générale et des domaines des gestions budgétaires » ;
5. « les principes du contrôle interne des gestions techniques » ;
6. « les principes du contrôle interne informatique ». Les règles de
ce contrôle interne doivent couvrir a minima les domaines suivants :
organisation de la politique de sécurité des systèmes d’information ;
7. Cf. les normes internationales de l’audit et de missions d’assurance émises par
l’IFAC (International Federation of Accountants) et notamment les normes n° 600
(utilisation des travaux d’un autre auditeur) et n° 610 (examen des travaux de l’audit
interne).
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COUR DES COMPTES
gestion documentaire ; différents aspects des exigences en matière de
sécurité ;
7. « le dossier de clôture8 des gestions budgétaires ». Il s'agit de
l'obligation de formalisation du dossier que chaque organisme de base
devra élaborer pour la clôture des gestions budgétaires9 ;
8. « le dossier de clôture des gestions techniques »10.
Le référentiel de validation renvoie en outre à l’existence de guides
d’audit. Les organismes nationaux vérifient « notamment au moyen
d'audits » l'application du référentiel et, à cette fin, « les guides d'audit
décrivent les grandes étapes permettant d'aboutir à la formulation d'une
opinion sur les comptes des organismes audités au regard des objectifs
généraux de l'audit des comptes ». Il s’agit bien ici d’un audit interne qui
doit être fondé sur une analyse des risques.
La Cour estime que ce dispositif devra sans doute évoluer au cours
des prochaines années, au fur et à mesure de la mise en oeuvre de la
validation des comptes par les agents comptables nationaux. A terme, il
est souhaitable qu’au sein du référentiel commun, apparaisse plus
nettement la démarche commune d’audit interne à mettre en œuvre pour
la validation des comptes des organismes de base.
B – L’évolution des normes comptables
L'amélioration générale des comptes repose sur le caractère
complet et approprié des normes comptables de la sécurité sociale. Si
l’édifice normatif reste à compléter, des avancées doivent néanmoins être
relevées dans différents domaines, sous l'impulsion du haut conseil, de la
direction de la sécurité sociale et de la mission comptable permanente.
8. Le dossier de clôture doit comprendre principalement la présentation sous forme de
feuille maîtresse des comptes pertinents permettant la comparaison, pour chaque cycle
identifié, avec l’exercice antérieur ainsi qu’une revue analytique et un programme de
travail présentant l’autorévision effectuée par l’organisme de base.
9. La gestion budgétaire regroupe les dépenses administratives (personnel, fonctionnement) et les dépenses relatives aux fonds nationaux (par exemple les fonds d’action
sanitaire et sociale).
10 . On appelle gestion technique les opérations afférentes à la perception des
cotisations, au versement des prestations et aux transferts financiers entre branches ou
régimes et avec l’Etat.
LA CERTIFICATION DES COMPTES DU REGIME GENERAL
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1 – Un dispositif normatif en construction
La comptabilité de la sécurité sociale n’a pas été organisée à partir
de normes spécifiques. En effet, la loi organique du 2 août 2005 fait
directement référence au plan comptable unique fondé sur le principe de
la constatation des droits et obligations.
Le plan comptable unique des organismes de sécurité sociale
(PCUOSS) renvoie au plan comptable général qui s'applique, sauf en cas
de dispositions spécifiques contraires issues d’un texte législatif ou réglementaire11. L’avantage procuré par un référentiel comptable largement
commun avec celui des entreprises n'est pas négligeable. On a ainsi
l'assurance que la norme comptable des organismes de sécurité sociale
suit les importantes évolutions de ces dernières années dans le cadre de la
convergence recherchée avec les IFRS12.
En revanche, toutes les innovations du PCG s'appliquent telles
quelles. Il en va ainsi par exemple de la comptabilisation des actifs par
composants introduite par le règlement du comité de réglementation
comptable (CRC) n° 2004-06 du 23 novembre 2004, alors même qu’une
telle innovation aurait sans doute justifié une réflexion préalable sur sa
portée et ses enjeux pour la sécurité sociale, y compris sur la notion de
contrôle.
Il paraît nécessaire aujourd’hui que les instances compétentes (haut
conseil et MCP) engagent une réflexion de fond sur l’adaptation des
normes comptables générales à la sécurité sociale, au vu notamment des
travaux de l’IPSAS Board et du recueil des normes comptables de l’Etat
qui peuvent servir de référence utile13.
11. La conclusion à en tirer est qu’en l’absence d’un référentiel de normes de portée
générale propres à la sécurité sociale (au contraire de ce qui a été prévu pour l’Etat),
ce sont bien les règlements du comité de la réglementation qui s’appliquent : à savoir
le PCG et les règlements ultérieurs qui l’ont modifié.
12 . International Financial Reporting Standards, anciennement normes IAS. Le
règlement européen du 11 septembre 2002 rend obligatoire l’application des IFRS
dans les comptes consolidés des sociétés cotées pour les exercices ouverts à compter
du 1er janvier 2005. Précisons également que les règles du plan comptable général
applicable aux entreprises évoluent dans le sens d’une convergence recherchée et
progressive avec les IFRS.
13. Notamment en ce qui concerne la comptabilisation des produits régaliens, des
charges d’intervention ou des engagements à mentionner dans l’annexe.
12
COUR DES COMPTES
2 – L’élaboration d’une norme de combinaison des comptes et de
présentation des états financiers combinés
Au-delà des dispositions de l’article L. 114-6 du code de la sécurité
sociale, la loi ne définit pas plus avant ce que sont les comptes combinés
des branches et de régimes de la sécurité sociale.
Le décret du 30 décembre 2005 déjà cité dispose que « les comptes
combinés annuels des organismes de sécurité sociale mentionnés au
quatrième alinéa de l'article L. 114-6 sont constitués par la combinaison,
selon des modalités appropriées, des comptes de l'organisme national
concerné, des comptes des organismes de base ainsi que de ceux des
autres organismes compris dans le périmètre de combinaison,
conformément à une norme arrêtée en la matière après avis du haut
conseil de la comptabilité des organismes de sécurité sociale et du conseil
national de la comptabilité ».
Elaboré par un groupe de travail du haut conseil14, le texte qui
consiste en un dispositif normatif à annexer à un arrêté interministériel, a
fait l’objet d’un avis favorable du haut conseil le 27 avril 2006 et du
conseil national de la comptabilité le 30 juin 2006.
a) Les principales caractéristiques de la norme15 de combinaison
Le parti pris a été de rattacher la norme « sécurité sociale » au
règlement du 12 décembre 2002 du CRC sur la combinaison des comptes
venant compléter et amender le règlement n° 99-02 sur la consolidation.
La norme de combinaison des comptes des organismes de sécurité sociale
ne porte , au-delà de cette référence, que sur les aspects spécifiques.
La combinaison permet à une entité d’intégrer dans sa comptabilité
les comptes d’autres entités même si ces dernières sont dépourvues de
liens en capital avec la première, ce qui est le cas des régimes de sécurité
sociale. Elle repose, sous cette réserve essentielle, sur les mêmes
techniques que la consolidation.
L’entité combinante est, de par la loi (art. L. 114-6 du CSS),
l'organisme national tête de réseau.
14. Le haut conseil a consulté, à différents stades, outre les agents comptables des
branches, la compagnie nationale des commissaires aux comptes et la Cour ellemême.
15. Le terme « norme » a disparu lors de la consultation du CNC qui a souhaité y
substituer celui de règles.
LA CERTIFICATION DES COMPTES DU REGIME GENERAL
13
La définition du périmètre de combinaison inclut les comptes des
organismes de base de droit commun appartenant aux régimes, soumis à
un contrôle juridique et financier de l’organisme tête de réseau et assurant
la gestion des prestations de sécurité sociale ou le recouvrement des
cotisations : CPAM, CRAM, CAF et URSSAF. Sont assimilés en outre à
ces derniers les organismes des réseaux assurant des prestations de
service au bénéfice des premiers et dont les comptes remontent
directement au niveau national, par exemple les centres informatiques des
branches maladie et famille16.
b) Les difficultés particulières de la combinaison dans le domaine de
la sécurité sociale
Une première difficulté apparaît avec les organismes partagés entre
plusieurs branches : les CGSS et les CRAM17. Alors que dans le droit
commun de la combinaison, le cas est marginal et traité comme tel dans
le règlement de 2002, il s’agit, au contraire, d’une situation fréquente
pour la sécurité sociale. Il faudra donc préciser, de manière appropriée et
dans un document opposable au certificateur, les cas de « combinaison
partagée » et les méthodes de partage entre les branches.
Une autre difficulté correspond aux entités locales qui sont
effectivement sous le contrôle de l'organisme national tête de réseau mais
qui ont des activités étrangères à la sécurité sociale au sens strict et qui
sont soumises à un autre plan de comptes que le PCUOSS. La norme
énonce qu'en principe tous les organismes financés par les caisses locales
et sous le contrôle du régime doivent voir leurs comptes combinés, sauf
en cas d'activité distincte de celle de la branche et non significative en
termes de flux financiers. La solution retenue implique néanmoins de
rendre compte de ces exclusions dans l'annexe et, en outre, d'inscrire aux
comptes combinés les provisions pour risques et charges qui s'avéreraient
nécessaires.
16. Voir le chapitre IV, I, D dans le rapport de la Cour sur la sécurité sociale de
septembre 2006.
17. Les CGSS gèrent, dans les départements d’outre-mer, les prestations des branches
maladie, AT-MP, vieillesse et assurent le rôle des URSSAF. Elles gèrent également
les régimes des exploitants et des salariés agricoles. Les CRAM sont d’une part des
organismes participant au réseau de l’assurance maladie et de la branche AT-MP et,
d’autre part (et surtout) les échelons régionaux de la branche vieillesse.
14
COUR DES COMPTES
c) La présentation des données comptables
S'agissant des méthodes d'évaluation et de présentation, la norme
renvoie non seulement au PCUOSS mais, comme il est normal, au plan
comptable général. Elle apporte quelques précisions sur ce que doivent
contenir les états financiers combinés : un bilan de synthèse, un compte
de résultat de synthèse et une annexe. Le contenu de l’annexe est celui
prévu par le règlement CRC sur la combinaison qui lui-même renvoie aux
dispositions sur la consolidation quant aux informations à fournir, la
norme se bornant à ajouter quelques exigences propres au cas des
comptes combinés de la sécurité sociale18.
Il reste une dernière et importante difficulté relevée par le haut
conseil et qui concerne les comptes d'entités, tierces par rapport à la
branche, mais participant à la gestion du régime général et dont les
données comptables doivent être reprises dans les comptes combinés. Il
ne s’agit pas directement d’un problème de combinaison car ces données
sont intégrées directement dans celles de la caisse nationale ou dans celles
des caisses locales.
A cet égard se pose en particulier le problème des états comptables
émanant des mutuelles participant, en application de la loi, à la gestion
des prestations en nature d’assurance maladie. Il y a là un important
chantier pour permettre d'obtenir une qualité des comptes que le
certificateur juge suffisante. En effet, les opérations des mutuelles étant
directement intégrées dans les comptes de la branche maladie, il n’existe
pas d’état comptable retraçant spécifiquement ces opérations. Pour cette
raison, le haut conseil préconise que les informations comptables donnent
lieu à un rapport particulier d'audit du ou des commissaires aux comptes
de l'entreprise ou de l'organisme mandataire. Il appartient désormais au
ministère chargé de la sécurité sociale de définir le véhicule juridique
approprié pour faire de cette préconisation une réelle obligation. Lors de
sa séance du 27 avril 2006, le haut conseil a souhaité que la direction de
la sécurité sociale étudie la possibilité, en concertation avec les branches
du régime général, les autres régimes et les mutuelles, d’un texte
18. Des modèles d'états financiers combinés seront inclus dans la nouvelle version du
PCUOSS en cours d'achèvement, étant rappelé que le PCUOSS actuel comporte des
modèles d'états financiers pour les comptes « simples » tant des caisses locales que
des caisses nationales.
LA CERTIFICATION DES COMPTES DU REGIME GENERAL
15
réglementaire imposant cette mission particulière d’audit comptable19. La
Cour recommande qu’un tel texte soit préparé rapidement.
3 – La poursuite de divers travaux de modernisation comptable
Dans plusieurs domaines, des travaux importants sont menés pour
améliorer le cadre normatif comptable de la sécurité sociale.
a) La refonte du PCUOSS
La mission comptable permanente achève en ce moment la refonte
du PCUOSS de 2001. Il convient en effet de mettre à jour la partie
générale au vu des textes législatifs et règlementaires cités précédemment
et d’entériner la création de nouveaux comptes autorisés par la MCP
depuis 2001 pour les nécessités des réformes de la sécurité sociale. Il est
également nécessaire de mieux rapprocher, à chaque fois que cela
s’impose, le PCUOSS du plan comptable général dans ses évolutions
récentes.
Enfin, à la demande du CNC, la refonte du PCUOSS permettra de
compléter ou modifier le tableau des faits générateurs pour assurer
pleinement le respect des droits constatés s’agissant en particulier des
impôts et taxes recouvrés par l’Etat pour le compte de la sécurité sociale
(voir infra).
La Cour invite la direction de la sécurité sociale à mener à bien en
ce sens ses travaux avec les administrations fiscales concernées.
b) La redéfinition du mode de présentation des comptes de l’ACOSS
Comme la Cour l’avait relevé en 2005, la présentation actuelle des
comptes de l’ACOSS n’est pas satisfaisante car elle ne donne pas une
image fidèle du résultat de son activité. En effet, si le compte combiné du
recouvrement présenté par l’ACOSS fait apparaître en produits du compte
de résultat, comme il se doit, la totalité des produits recouvrés pour le
compte des branches du régime général de la sécurité sociale 20 , en
revanche, le reversement effectué à ces dernières n’apparaît pas en
charges dans les comptes de l’ACOSS. C’est uniquement sous forme de
19. Ce qui supposera aussi des consultations appropriées avec la compagnie nationale
des commissaires aux comptes. Cette mission concernerait d’autres organismes
intervenant pour le compte soit du régime général, soit d’autres régimes (il en est ainsi
des régimes spéciaux qui continuent à gérer les prestations familiales par délégation
de la CNAF).
20. Ainsi que pour certains autres régimes et les fonds de financement.
16
COUR DES COMPTES
résultat net affecté, au bilan, que ces reversements sont traités. La
conséquence en est de faire apparaître un « résultat » qui n’a aucune
signification économique et qui altère la valeur patrimoniale réelle de
l’entité ACOSS21.
A l’initiative du haut conseil, un groupe de travail a élaboré une
proposition qui a été retenue par celui-ci dans sa séance du 27 avril 2006.
Elle consiste à comptabiliser dorénavant une charge équivalente au
montant des produits constatés pour chacune des branches22, dès lors que
ces produits sont notifiés aux branches et qu’ils sont comptabilisés par
nature dans les comptes annuels de celles-ci23.
Ce dispositif devrait être en principe effectif pour la présentation
du compte de résultat 2006. La Cour en prend acte et sera attentive à la
nouvelle présentation des comptes de l’ACOSS qu’elle aura à certifier
dans ce nouveau cadre et dont la quote-part de capitaux propres sera
comptabilisée en immobilisation financière dans les comptes de l’Etat.
c) Les problèmes posés par les imbrications entre procédure
budgétaire et procédure comptable
En 2005 également, la Cour avait fait état des difficultés résultant
de la pleine application de la comptabilité en droits constatés dans le
domaine de la gestion budgétaire24.
Deux séries de mesures sont intervenues depuis lors pour remédier
à cette situation.
En premier lieu, après consultation du CNC et du haut conseil, le
directeur de la sécurité sociale25 a demandé aux organismes nationaux de
corriger un certain nombre d’erreurs ou de procéder à des changements de
méthodes comptables à la clôture 2005 afin de mettre fin aux situations
dérogatoires répertoriées (cf. infra).
21. Voir le rapport de la Cour sur les comptes de l’Etat de l’exercice 2005, p. 116.
22 . Désormais, un produit pour une caisse nationale est donc une charge pour
l’ACOSS et inversement une charge pour une caisse (admission en non valeur,
remise, abandon de créance) est un produit pour l’ACOSS.
23. Il en va de même pour les autres régimes bénéficiaires.
24. Voir note 11 p. 10. Seule la partie des dépenses du régime général encadrées par
un budget (environ 5 % des charges, soient les dépenses de gestion administratives et
celles afférentes aux fonds d’action sanitaire et sociale et de prévention) est concernée
par les développements du c).
25. Par lettre du 6 décembre 2005 sous le timbre de la MCP.
LA CERTIFICATION DES COMPTES DU REGIME GENERAL
17
En second lieu, par une lettre du 23 janvier 2006 adressée aux
agents comptables, le directeur de la sécurité sociale a fait siennes les
principales conclusions du groupe de travail chargé d’élaborer le
référentiel de validation sur les obstacles à lever en vue d’assurer une
correcte application de la comptabilité d’exercice dans le domaine des
gestions budgétaires. En effet, jusqu’en 2005, les règles applicables à la
gestion budgétaire s’opposaient à une correcte comptabilisation des
charges en droits constatés (par exemple, en raison du caractère limitatif
des crédits ouverts pour les amortissements ou provisions).
Pour l’essentiel, cette lettre renvoie à la redéfinition nécessaire des
règles du jeu dans le cadre des conventions d’objectifs et de gestion26. La
Cour prend acte que de telles améliorations ont été apportées dans les
nouvelles COG passées par l’Etat avec la CNAVTS, la CNAF et
l’ACOSS et relève qu’il en est de même dans celles en cours de
finalisation avec la CNAMTS.
Il reste que deux problèmes ne sont toujours pas résolus
aujourd’hui. D’une part, il importe que les dispositions règlementaires, à
l’évidence obsolètes, du code de la sécurité sociale soient rapidement
réécrites voire purement et simplement abrogées27. D’autre part, l’un des
errements majeurs relevés ces dernières années, l’imputation en compte
de tiers des dépenses d’action sanitaire et sociale de l’assurance maladie,
lorsque celles-ci excèdent les crédits budgétaires limitatifs, a persisté en
2005. La Cour recommande qu’il soit mis fin, avant la clôture des
comptes 2006, à cette situation irrégulière28 et qui dure depuis longtemps.
d) La définition d’un nouveau calendrier de reddition des comptes
Les textes récents cités plus haut définissent également un nouveau
calendrier pour la reddition des comptes tant des branches et de l’activité
de recouvrement que des autres régimes de base.
En premier lieu, désormais, les comptes doivent avoir été
définitivement arrêtés le 15 mars suivant la clôture de l’exercice et les
tableaux de centralisation des données comptables (TCDC29) transmis à
cette date à la MCP. Cela revient à avancer de 15 jours la date de
26. Par exemple, il y a lieu de ne pas enfermer les écritures d’amortissements et de
provisions et de reprises de provision en gestion budgétaire dans le cadre de
prévisions limitatives.
27. Il s’agit en particulier des articles D. 253-17 et D. 253-19.
28. Voir infra, p. 35.
29. Le TCDC présente, sous une forme standardisée par la MCP, le compte de résultat
combiné de la branche, de l’activité ou du régime.
18
COUR DES COMPTES
production de ces états par rapport à celle retenue (à titre transitoire) pour
les années 2002 à 2004. En second lieu, les états financiers complets
(bilan, compte de résultats, annexes) devront être produits au plus tard à
la MCP et à la Cour des comptes le 15 avril.
Ce nouveau calendrier a pu à peu près être respecté dès 2005.
C – La préparation de la mise en état d’être certifiés
des comptes des branches et de l’activité de
recouvrement
Les observations qui suivent rendent compte de l’état de
préparation des caisses nationales, principalement dans la mise en place
du référentiel commun de validation des comptes des organismes de base.
1 – Les branches maladie et AT/MP
a) Le contrôle interne
S’agissant d’abord du contrôle interne sous ses différents aspects,
la caisse nationale a engagé un important travail de définition nationale
des processus de gestion en vue de faire ressortir les risques majeurs et les
moyens de les réduire ou de les prévenir par diverses actions. Cette
démarche vise à élaborer des « plans de maîtrise socle » (PMS).
Cette démarche, lancée avant l’adoption de la loi organique,
déborde les seuls impératifs de contrôle interne afférents à la production
de comptes d’une qualité que le certificateur juge suffisante Elle vise à
mettre en cohérence, à l’échelle de l’ensemble du réseau, toutes les
initiatives prises en la matière depuis 1993.
Au mois de juillet 2006, la démarche avait permis l’adoption de 15
PMS dont sept se rapportant à des processus majeurs de production et 4
PMS concernant les activités financières et comptables.
Il reste cependant un important travail à accomplir. Plusieurs
processus de production ne seront couverts qu’en 2007. Il n’était pas,
pour l’instant, envisagé un PMS « hôpitaux » en raison d’un contexte
mouvant, non plus que des PMS « cliniques » et « mutuelles » alors que
ces postes de dépenses représentent environ la moitié des dépenses
d’assurance maladie. Enfin, des PMS centraux doivent aussi être
élaborés, correspondant aux processus propres de la caisse nationale, tels
que les processus comptables de centralisation et combinaison.
LA CERTIFICATION DES COMPTES DU REGIME GENERAL
19
b) Les dossiers de clôture
Seul a pu être mis au point pour la clôture des comptes 2005 un
dossier de clôture des gestions budgétaires et un questionnaire d’auto
évaluation de la qualité comptable des organismes de base. Une première
exploitation de ces documents a été réalisée en juin 2006.
S’agissant du dossier de clôture de la gestion technique, celui-ci
restait à concevoir à la même date et seule une partie des processus de
gestion techniques pourra être au mieux couverte (cf. infra).
c) L’audit des comptes des organismes de base
Pour assurer la nouvelle fonction de validation qui vient s’ajouter à
celle de centralisation, l’agent comptable a créé une nouvelle division au
sein de ses services. Cette division est composée de 4 auditeurs
comptables recrutés au 3ème trimestre 2005.
S’agissant du guide d’audit des gestions budgétaires, élaboré de
concert avec les équipes d’auditeurs des autres branches, il était en état
quasi définitif en mai 2006, les auditeurs de la CNAMTS ayant pu le
tester dans deux CPAM.
En ce qui concerne le guide d’audit des gestions techniques (qui
représente l’enjeu majeur en termes financier et de risque), sa réalisation
s’avère beaucoup plus lourde et difficile que prévu. En effet, les auditeurs
ont entrepris, à juste titre, de dresser une cartographie des processus et
des risques associés en commençant par les processus majeurs de
production du réseau. Il leur faut dresser à ce titre des logigrammes et des
matrices de risque sans pouvoir s’appuyer sur des travaux préalables
suffisants. A la fin du premier semestre 2006, ils n’avaient pu établir que
le document d’audit afférent au processus « règlement à l’acte ».
L’effectif d’auditeurs internes n’est manifestement pas à la hauteur
des besoins. Sur la base d’un audit des comptes sur place de chaque
caisse une fois tous les trois ans par exemple (venant compléter les
travaux annuels sur pièces à partir des dossiers de clôture), il faudrait au
minimum une quinzaine d’auditeurs internes à temps plein pour que les
travaux de validation puissent être convenablement menés.
d) Autres aspects
Enfin, des problèmes particuliers se posent avec le rôle dévolu aux
mutuelles (par exemple pour les agents publics de l’Etat et les étudiants)
auxquelles est déléguée la mission de gestion des règlements à l’acte de
l’assurance maladie. Les flux financiers représentaient 5,4 Md€ en 2004
20
COUR DES COMPTES
(sur 131,6 Md€ de charges totales). Les données comptables qui en
émanent sont intégrées directement au niveau des CPAM. Celles-ci
effectuent des audits sur les sections locales mutualistes mais ces audits
ne peuvent en aucun cas donner des assurances suffisantes quant à
l’exhaustivité, à la régularité et au respect du principe de séparation des
exercices des écritures comptables ainsi reprises par les caisses locales.
Pour l’instant, le dispositif de validation des comptes confié à l’agent
comptable national ne permet pas à celui-ci d’étendre ses diligences aux
mutuelles, même si de récentes initiatives ont été prises en matière de
contrôles des systèmes d’information.
Au total, si les travaux déjà réalisés en vue de la validation sont de
qualité et la voie suivie sur le plan des méthodes est prometteuse, il
apparaît que les conditions d’une validation acceptable des comptes des
organismes de base ne seront pas réunies pour l’exercice 2006.
2 – La CNAVTS
Au-delà d’un nombre limité de caisses servant des prestations30, la
branche vieillesse a plusieurs atouts pour la certification de ses comptes
combinés. Des faiblesses potentielles apparaissent toutefois.
a) Le contrôle interne de portée générale
La branche vieillesse s’est dotée depuis 1998 d’un dispositif
conséquent de contrôle interne. Depuis 2005, elle a engagé une démarche
de contrôle de la qualité de la liquidation au moyen d’indicateurs de la
qualité de la liquidation (IQL).
Compte tenu des dispositifs de contrôle interne en vigueur, un
élément essentiel du référentiel de validation que constituent les principes
du contrôle interne des gestions techniques pourrait en principe être
satisfait.
b) Les dossiers de clôture et guides d’audit
Pour les comptes de l’exercice 2005, l’agent comptable a défini un
dossier de clôture couvrant non seulement la gestion administrative, mais
aussi les gestions techniques (prestations obligatoires et action sanitaire et
sociale).
30. 14 CRAM, la caisse régionale d’assurance vieillesse de Strasbourg, les quatre
CGSS des départements d’outremer et l’agence Ile-de-France de la caisse nationale,
soit 20 entités ou structures au total.
LA CERTIFICATION DES COMPTES DU REGIME GENERAL
21
L’agent comptable national a demandé aux caisses de lui
transmettre une partie des éléments du dossier de clôture31. Il effectuera
une restitution à chaque caisse de l’adéquation des éléments transmis à
ses demandes. La validation par l’agent comptable des comptes des
organismes de base pour l’exercice 2006 aura été par conséquent
précédée par une démarche couvrant l’ensemble des activités des caisses.
Le guide d’audit relatif aux cycles de la gestion technique est
inachevé et certains cycles ne sont pas rédigés. Lorsqu’une rédaction est
intervenue, la partie correspondante du guide peut être considérée comme
achevée après validation par les correspondants locaux.
c) Les moyens consacrés à l’audit des comptes des organismes de
base
Un département dédié à la validation et rattaché à la direction de la
gestion des fonds nationaux a été créé. Par ailleurs, un (ou plusieurs)
correspondant local de validation des comptes a été désigné au sein de
chaque caisse. Pour trois caisses dites « pilote », les correspondants
participent à des travaux à caractère national (enrichissement du projet de
guide d’audit, déclinaison du référentiel de validation des comptes).
S’agissant de la mise en œuvre du dossier de clôture pour
l’exercice 2005, seules trois caisses seront auditées par le département de
validation des comptes32. Cet échantillon limité ne permettra pas de faire
apparaître comment les organismes locaux, pris ensemble, ont identifié,
après une analyse de risque se rapportant aux différents critères de qualité
comptable, les déficiences du contrôle interne et mis en oeuvre des
actions correctrices.
Les effectifs du département de validation des comptes sont en
effet limités. Ils s’élèvent actuellement à deux auditeurs. Un troisième
recrutement est prévu à l’automne. En deçà de cinq auditeurs, il paraît
difficile que le département mène à bien ses missions.
3 – La CNAF
Si la CNAF et les CAF se sont pleinement engagées à mettre en
place une qualité comptable ayant pour objectif d’obtenir la certification
de leurs comptes, tous les outils de validation ne seront pas opérationnels
avant 2007.
31. Liste des audits, feuilles maîtresses, revues analytiques, programme de travail et
feuilles de travail des circularisations.
32. Cinq autres caisses font toutefois l’objet d’une revue partielle.
22
COUR DES COMPTES
a) Le contrôle interne
Pour le contrôle interne, la branche famille s’appuie sur la
démarche de « maîtrise des risques » (MDR) qui a débuté avec la
convention d’objectifs et de gestion 2001-2004 et a abouti en 2005.
La COG 2005-2008 a confirmé la politique de maîtrise des risques.
Celle-ci doit concerner, outre des objectifs de qualité de service, la
maîtrise des risques financiers et de fraude. Elle dépasse ainsi les seuls
aspects de la régularité comptable.
Ainsi, en 2006, au titre de la certification des comptes, la CNAF
doit intégrer dans le référentiel national des risques liés aux processus les
règles relatives aux contrôles internes définis pour la validation des
comptes par l’agent comptable national et les normes édictées en matière
de sécurité informatique par le référentiel commun de validation.
b) L’audit interne
La démarche préparatoire de l’audit des comptes locaux par la
caisse nationale est sur le point d’être achevée et a donné lieu à la
rédaction d’un guide d’audit. Les cartographies des processus
informatiques des gestions techniques des CAF, les matrices des risques
et les programmes de travail ont été réalisés et sont en cours de
validation. Disponible en juin 2006, le guide ne traite pas de la CNAF en
tant qu’établissement public ni des procédures des écritures de
combinaison.
L’agence comptable ne paraît pas suffisamment dotée de moyens
d’audit (seulement deux auditeurs pour effectuer les missions33). Chaque
organisme ne pourrait être contrôlé au mieux qu’une fois tous les six ans
par l’un des deux auditeurs.
c) Le dossier de clôture
Un premier dossier de clôture a été transmis à l’ensemble des CAF
le 30 décembre 2005. Les auditeurs nationaux exploiteront leurs résultats
au cours du second semestre 2006 afin d’établir une deuxième version du
dossier de clôture prévue pour septembre 2006.
33 . Il faut toutefois ajouter aux deux auditeurs quatre « conseillers techniques »
chargés au siège de travaux de validation sur pièces.
LA CERTIFICATION DES COMPTES DU REGIME GENERAL
23
d) Des questions importantes ne sont pas réglées
Des problèmes spécifiques se posent pour les opérations menées en
relation avec l’Etat et les autres branches, régimes ou fonds compris dans
le périmètre de la certification de la branche famille. Ainsi, toutes les
opérations de prestations familiales gérées par les régimes spéciaux sont
transmises à la CNAF pour intégration dans les comptes combinés, sans
aucune garantie quant à leur fiabilité ou au respect du principe des droits
constatés. Comme pour les mutuelles, les états comptables retraçant ces
opérations devraient faire l’objet de rapports particuliers d’audit des
commissaires aux comptes des organismes concernés.
Au total, en l’absence d’un dispositif de validation complet et d’un
effectif suffisant d’auditeurs internes, l’exercice comptable 2006 aura un
caractère encore expérimental.
4 –
L’ACOSS
L’essentiel des travaux préparatoires en cours porte sur la mise en
œuvre du référentiel de validation des comptes dans le domaine des
gestions techniques et du contrôle interne informatique.
Dans le secteur du recouvrement, les difficultés se trouvent en
particulier dans la capacité de suivre le chemin de révision des opérations
qui conduisent du dépôt des déclarations par les entreprises aux comptes
d’ensemble du secteur. La multiplicité des procédures, l’instabilité
juridique de l’ensemble (chaque année apportant des mesures nouvelles et
modifications diverses), l’inégal degré d’informatisation des opérations,
l’empilement des applications informatiques greffées sur un système
national de production de conception déjà ancienne, constituent autant de
contraintes. Un des points essentiels de contrôle est la capacité des entités
de base à rapprocher les paiements des déclarations des cotisants. Il faut
également pouvoir vérifier la répartition des droits constatés entre les
entités bénéficiaires finales (les trois caisses nationales « dépensières » et
diverses autres entités), ainsi que les allègements de charge
correspondants. Or, le système de remontée d’informations révèle
maintes anomalies qui exigent la mise à plat de l’ensemble.
La construction du référentiel de validation propre au
recouvrement se poursuit (dossiers de clôture, guides d’audit) et des tests
ont été réalisés dans deux URSSAF sur les nouveaux outils.
Par ailleurs, nonobstant l’intérêt des travaux déjà engagés, le degré
de qualité du contrôle interne des entités constituant l’ensemble de
l’activité recouvrement n’est pas connu avec précision mais un important
travail méthodologique est en cours au niveau national.
24
COUR DES COMPTES
La cellule d’audit créée au sein de l’agence comptable compte,
depuis août 2006, cinq équipes d’audit, chacune constituée d’un auditeur
agent comptable et d’un auditeur comptable et financier34. Chaque équipe
est responsable d’un portefeuille géographique d’organismes.
Il ressort au final que l’audit des comptes 2006 des organismes de
base en vue de leur validation devrait se révéler difficile à réaliser. Les
auditeurs n’auront pas pu tester en vraie grandeur ceux des dispositifs
d’audit des gestions techniques qu’ils auront complètement achevés.
D – La préparation de la mission nouvelle de la Cour
Dans son précédent rapport, la Cour avait indiqué que, comme
pour la mission de certification des comptes de l’Etat, elle s’inspirerait
des normes d’audit internationales. Comme l’indique le rapport annuel de
mai 2006 sur les comptes de l’Etat, la Cour se réfère en particulier aux
normes de la fédération internationale des experts-comptables (IFAC) qui
servent elles-mêmes de référence aux institutions supérieures de contrôle.
La Cour doit être en mesure de donner une assurance raisonnable que les
états financiers sont exempts d’anomalies significatives35.
La Cour fonde son approche sur l’analyse des risques de tous
types36 susceptibles d’avoir une influence sur la qualité et la lisibilité des
comptes. Elle se réfèrera dans ses travaux aux objectifs ou critères
d’audit internationalement reconnus en ce qui concerne les catégories de
transactions, les soldes et la présentation des états financiers tels que par
exemple l’existence, l’exhaustivité, l’évaluation, l’appartenance
(s’agissant des droits et obligations), le rattachement des enregistrements
et des soldes comptables au bon exercice et la présentation exacte des
états financiers37.
34. Ils ont été pressentis et formés dès l’automne 2005, mais ne sont officiellement
auditeurs que depuis début juillet 2006.
35. Une donnée est significative dès lors que son omission ou son inexactitude est
susceptible de modifier les décisions prises par les utilisateurs sur le fondement des
états financiers. Le caractère significatif est apprécié en fonction du montant ou de la
nature de la donnée ou de l’information : pour ce faire la Cour définit un seuil de
signification et des seuils de travail de niveau inférieur.
36. On se réfère ici particulièrement aux normes de l’IFAC n° 315 « compréhension
de l’entité et de son environnement et identification des risques d’erreurs
significatives » et n° 320 « caractère significatif en matière d’audit ».
37. Pour une explication complète, voir le rapport de la Cour sur les comptes 2005 de
l’Etat, pp. 46 et 47 et pour le dernier état des exigences internationales de l’audit des
comptes, la norme révisée n° 500 de l’IFAC.
LA CERTIFICATION DES COMPTES DU REGIME GENERAL
25
Pour ce faire, la Cour doit se former une opinion sur l’ensemble
des dispositifs de contrôle interne mis en place par chaque organisme
national pour sécuriser non seulement les processus d’élaboration des
comptes proprement dits mais plus globalement les processus afférents
aux grands cycles d’opérations de gestion technique ou de gestion
budgétaire se traduisant par des flux financiers retracés dans les comptes.
D’une première analyse de risques la Cour a dégagé trois niveaux
de préoccupations et donc de vérifications à opérer pour lui permettre
d’obtenir l’assurance raisonnable que les comptes ne comportent pas
d’erreur significative.
1 – Le risque afférent aux conditions de la validation en 2006
Pour les raisons exposées précédemment, le référentiel sur lequel
la Cour s’appuiera n’aura pas pu être testé en vraie grandeur de manière
complète ou même suffisante avant la première année de certification, ce
qui ne lui permettra pas de formuler une première appréciation globale
sur sa pertinence. Les audits comptables internes sur lesquels elle devra
s’appuyer n’auront pas pu être conduits en quantité et en étendue
suffisante pour la clôture des comptes 2006.
Tant que la Cour n’aura pas l’assurance suffisante de l’existence
d’un contrôle interne et d’un audit interne complets, opérationnels et
probants, elle sera contrainte, dans la limite de ses propres moyens, à des
diligences supplémentaires sur les organismes de base.
2 – L’audit des systèmes d’information
Les gestions technique et budgétaire, ainsi que les opérations
comptables locales et nationales, reposent sur des applications
informatiques dont il y a lieu de s’assurer de la fiabilité et de la capacité à
offrir un chemin de révision à l’auditeur externe.
Conformément aux bonnes pratiques de l’audit des comptes, le
certificateur doit prendre en compte l’environnement informatique et son
incidence sur la démarche d’audit. Pour ce faire il doit avoir une
connaissance suffisante de cet environnement pour mesurer l’influence de
celui-ci sur le risque inhérent et le risque lié au contrôle.
La Cour, sur la base de ses travaux passés et de travaux
complémentaires, a tracé une première cartographie des systèmes
d’information des quatre branches. Néanmoins, au vu de l’ampleur des
systèmes et des enjeux, elle a adopté une démarche progressive d’audit
dont la première étape en 2006 est présentée dans l’encadré ci-dessous.
26
COUR DES COMPTES
La démarche d’audit informatique retenue par la Cour en 2006
L’importance des travaux d’audit informatique à réaliser pour la
certification des comptes de la sécurité sociale a conduit la Cour à faire
appel à des cabinets extérieurs qui interviendront dans le cadre de l’article
L. 140-3 du code des juridictions financières, prévoyant que la Cour peut
recourir, pour des enquêtes de caractère technique, à l’assistance d’experts
désignés par son Premier président. Elle a donc procédé à un appel
d’offres pour choisir les prestataires à qui elle confiera cette mission
d’audit.
Pour chacune des branches, les travaux réalisés dans ce cadre au
cours du second semestre 2006 sont décomposés en trois phases :
- en premier lieu, il est nécessaire de procéder à une cartographie
complète des systèmes d’information, à partir des travaux sommaires déjà
réalisés par la Cour et des différents documents déjà élaborés par les
branches. Cette cartographie permettra, d’une part, d’appréhender
globalement les systèmes d’information et, d’autre part, de déterminer les
zones de risque et d’identifier, pour les exercices suivants, les applications
autres que celles déjà sélectionnées qui devront faire l’objet d’un audit ;
- ensuite, sera réalisée une revue générale informatique. Cette revue
générale a pour objectif d’apprécier le niveau de couverture des risques
inhérents à l’utilisation d’outils informatisés, indépendamment des
activités de contrôle mises en œuvre au niveau de chaque processus
opérationnel. Le parti pris par la Cour, pour cette première année, est de
couvrir tout le champ de l’organisation de la fonction informatique de
chaque branche (conception des logiciels, distribution et support, sécurité
et gestion des projets informatiques), avec un niveau de profondeur
restreint. Les zones de risque qui auront été identifiées à l’occasion de ce
premier audit seront approfondies dans le cadre des audits réalisés pour les
exercices suivants ;
- enfin, les travaux préparatoires réalisés par la Cour ont permis
d’identifier, pour chaque branche, une application (ou un ensemble
d’applications), en fonction de leur importance pour la production des
comptes, dont un audit est considéré comme prioritaire. Il s’agit : pour la
branche recouvrement, du SNV2 (système national version 2, qui constitue
le cœur du système de production des URSSAF) ; pour la branche
maladie, de l’ensemble applicatif composé d’IRIS, de « dettes », de
« paiement-mandatement », de CONDOR, de PJ et de QUALIFLUX pour
les fonctionnalités relatives aux feuilles de soins (contrôle, liquidation,
ordonnancement et liquidation) traitées par l’assurance maladie ; pour la
branche vieillesse de l’Outil Retraite (application de liquidation et de
paiement des retraites) ; pour la branche famille de CRISTAL (gestion des
prestations familiales et des opérations pour compte de tiers). Les résultats
de ces audits permettront à la Cour d’évaluer les risques résiduels.
Pour les années suivantes, les audits des autres applications
devront être programmés en fonction des risques identifiés lors des
LA CERTIFICATION DES COMPTES DU REGIME GENERAL
27
travaux de l’année 2006, notamment les travaux de cartographie prévus
en première phase.
3 – L’audit des opérations comptables traitées au niveau national
et de la combinaison des comptes
La Cour devra se livrer à des vérifications sur les opérations
traitées par les établissements têtes de réseau. Quatre ensembles
présentent un enjeu particulier :
-
les opérations financières avec l’Etat au titre de la participation de
celui-ci au financement de certaines catégories de prestations, d’une
part, et, d’autre part, en tant que celui-ci assure le recouvrement
d’impôts et de taxes affectés à la sécurité sociale via l’ACOSS ;
-
les opérations de compensation et de transfert avec différents autres
régimes ou établissements publics (dont les fonds de financement) ;
-
les dotations aux organismes de base en vue du financement des
opérations de gestion budgétaire et de gestion technique ;
-
les opérations d’inventaire dans la mesure où celles-ci sont effectuées
à l’initiative de la tête de réseau.
Les vérifications concernant les dettes et surtout les créances du
régime général sur l’Etat revêtent, dès les comptes de 2006, une
importance particulière tant pour la certification des comptes de l’Etat
que celle des comptes de la sécurité sociale, l’absence d’identité entre les
uns et les autres obligeant à en tirer les conséquences dans les comptes de
l’autre partie notamment sous forme de provisions pour dépréciation.
Enfin, si les opérations de centralisation et de combinaison
comptable ne sont pas dépourvues de risques, les travaux préparatoires
menés en 2005 par la Cour lui permettent de préciser les conditions dans
lesquelles l’audit de ces processus pourra être assuré en 2006.
*
*
*
Au total, il apparaît fort improbable que, en dépit de progrès
notables, le dispositif central sur lequel est fondée la production de
comptes combinés en état d’être certifiés, à savoir la validation des
comptes des organismes de base par l’agent comptable national, soit
pleinement opérationnel pour la clôture de l’exercice 2006.
Pour remplir sa mission légale de la meilleure façon, la Cour a
identifié le « noyau dur » des opérations sur lesquelles ses diligences lui
permettront d’émettre une opinion avec un degré d’assurance raisonnable.
28
COUR DES COMPTES
Ce noyau dur comprend les opérations significatives comptabilisées
nationalement, l’architecture globale des systèmes d’information ainsi
que les applications et processus majeurs, les dispositifs de contrôle et
d’audit interne mis en place dans le cadre de la validation des états
financiers locaux et les principales prestations de gestion technique.
Pour l‘accomplissement de ses diligences, la Cour entend se situer
dans une perspective pluriannuelle. Elle étalera ainsi sur trois exercices
(2006, 2007, 2008) la réalisation d’un audit complet des processus et des
opérations conduisant à la production des comptes combinés et des
comptes des établissements publics. Elle accompagnera de la sorte la
montée en charge du dispositif de validation des comptes parallèlement
au déploiement progressif des audits informatiques qu’elle fait réaliser.
Dans ces conditions, le premier rapport qu’elle remettra en juin
2007 sur l’exercice 2006 comportera, outre l’exposé de ses diligences, les
éléments d’appréciation qu’elle aura pu raisonnablement établir sur les
états financiers du régime général.
II - Observations sur les comptes de l’exercice 2005
La Cour a procédé à une revue des comptes des établissements
publics et des comptes combinés du régime général de l’exercice 2005
dans une double perspective :
-
apprécier les suites données à ses recommandations antérieures ;
faire une première évaluation de la qualité des états financiers au
regard des exigences normatives de la loi organique ainsi que de la
future norme sur la combinaison des comptes.
Les comptes 2005 des organismes de sécurité sociale enregistrent
tous un ensemble de changements de méthodes et de corrections d’erreurs
résultant d’une orientation commune à toutes les branches. Chaque
catégorie de comptes combinés appelle ensuite des commentaires
spécifiques.
A – Les changements de méthode et corrections
d’erreurs comptables
En accord avec le président du conseil national de la comptabilité
et après avis du président du haut conseil, le directeur de la sécurité
sociale a autorisé en décembre 2005 les organismes nationaux du régime
LA CERTIFICATION DES COMPTES DU REGIME GENERAL
29
général à procéder à une série de régularisations à l’occasion de la clôture
des comptes de l’exercice 2005.
Pour procéder à ces régularisations, deux modalités ont été
prévues avec l’accord de l’autorité normative comptable :
-
l’application de la disposition de l’article 314-1 du règlement CRC
n° 99-03 (plan comptable général) qui permet, en cas de changement
de méthode comptable, de passer, à l’ouverture de l’exercice, les
écritures nécessaires au seul bilan par imputation aux capitaux propres.
Toutefois cette régularisation ne peut avoir pour effet de rendre la
situation nette négative, une information explicative doit être fournie
en annexe et des comptes pro forma des exercices antérieurs doivent
être produits ;
-
dans les autres cas (modifications ne résultant pas d’un changement
de méthode comptable), la correction se fait par imputation au compte
de résultat avec les mêmes exigences en matière d’information
comptable.
Ces mesures ont permis de mettre fin à des errements jusqu’alors
autorisés par la tutelle dans le domaine de la gestion administrative.
En effet, en contradiction avec les principes d’une comptabilité en
droits constatés, les comptes des établissements publics, ceux des
organismes de base et a fortiori les comptes combinés dans leur forme
actuelle ne présentaient pas la totalité des charges à rattacher à l’exercice
dans le domaine de la gestion du personnel. Ni les droits acquis des
personnels au titre des congés non pris ni les charges prévisibles de prime
d’intéressement au titre de l’exercice n’étaient jusqu’alors pris en compte.
Si une telle pratique pouvait s’abriter derrière l’ambiguïté des
dispositions règlementaires citées précédemment38, elle est aujourd’hui
contraire aux termes de la loi organique du 2 août 200539.
Il convient désormais de constater la totalité des charges à rattacher
sous forme de charges à payer ou de provisions. Mais la manière dont la
régularisation est opérée diffère :
-
pour les congés payés, la charge de dette provisionnée40 à ce titre et
inscrite pour la première fois au bilan 2005 pour les exercices 2004 et
38. Voir aussi à cet égard le rapport de la Cour sur la sécurité sociale de septembre
2005, p. 293.
39. Voir les articles LO III-3, VII et L. 114-5 du CSS dans leur rédaction issue de la
loi organique.
30
COUR DES COMPTES
antérieurs est imputée directement sur le compte de report à nouveau
des branches (sous réserve d’un traitement particulier pour
l’ACOSS) en application de la disposition sur les changements de
méthode comptable ;
-
pour la prime d’intéressement, en revanche, il n’a pas été admis
d’appliquer la règle du changement de méthode car les caisses locales
avaient antérieurement été mises en mesure, par une dotation
budgétaire spécifique, de faire les corrections adéquates. En
conséquence, le compte de résultat 2005 enregistre à la fois la charge
de prime d’intéressement 2004 et celle de la provision constituée pour
2005.
Alors que l’impact de la régularisation de la prime d’intéressement
est relativement limité en termes financiers (la provision se monte à un
peu plus de 29 M€ pour les branches maladie et accidents du travail à
rapprocher d’un montant de charges de gestion administrative de
5,34 Md€) il n’en est pas de même en ce qui concerne l’impact sur le
bilan des branches de la régularisation des congés payés (cf. infra).
Des régularisations ont été également opérées dans le domaine des
gestions techniques. Elles visent à combler deux types de lacunes :
-
en premier lieu, la prise en compte au bilan des branches maladie et
accidents du travail des dettes accumulées depuis 1983 à l’égard des
hôpitaux en application d’une disposition règlementaire spécifique (cf.
infra) ;
-
en second lieu le constat d’une provision pour rappel de prestations et
d’une provision pour dépréciation de créances d’indus dans la branche
famille (cf. infra).
Dans les deux cas, la régularisation est effectuée selon la modalité
autorisée du changement de méthode comptable (régularisation par
imputation de la dette ou de la provision constatée au titre des exercices
antérieurs à 2005 sur le compte de report à nouveau au passif du bilan).
L’impact de cette régularisation est significatif.
La Cour prend acte de régularisations qui satisfont à certaines
recommandations anciennes de sa part. Elle constate sur le fond qu’elles
sont justifiées par leur finalité et permettent ainsi de satisfaire aux
exigences de tenue d’une comptabilité en droits constatés.
40. Nonobstant l’appellation de dette « provisionnée » sur congés à payer, il s’agit
bien, en comptabilité, de charges à payer constatées au 31 décembre et génératrices
d’une dette.
LA CERTIFICATION DES COMPTES DU REGIME GENERAL
31
Elle considère toutefois que la régularisation par l’imputation
directe aux fonds propres est une procédure dont le caractère exceptionnel
doit être souligné. Désormais, les régularisations concernant des
opérations passées dont l’enregistrement n’aurait pas respecté le principe
des droits constatés et qui interviendraient postérieurement au
31 décembre 2005 devront, s’agissant de corrections d’erreurs, passer par
le compte de résultat de l’exercice.
Enfin, la Cour relève que si, d’une manière générale, ces
régularisations respectent les exigences rappelées par le CNC41, il n’a pas
en revanche été fourni par les organismes nationaux de compte pro forma
de l’exercice antérieur après retraitement. La Cour souhaite que la
publication des comptes 2006 soit assortie non seulement de ceux de
2005 à titre comparatif mais également de ceux de 2004 pro forma.
B – Les comptes combinés 2005
La Cour présente ici de manière sélective quelques observations
sur les comptes combinés qui ne sauraient être assimilées à l’expression
d’une opinion globale sur les comptes.
1 – Les comptes produits par la CNAMTS42
a) Aspects généraux
La Cour a eu à sa disposition les tableaux de centralisation des
données comptables le 22 mars et les projets d’états financiers le 12 avril.
Les états financiers en leur forme définitive ont été soumis au conseil de
la CNAMTS le 6 juin et la Cour les avait reçus début mai. Si les comptes
des branches maladie et AT-MP sont bien distincts, leur annexe est
commune, contrairement à la lettre du décret du 30 décembre 2005.
Par ailleurs, l’annexe présente à juste titre le périmètre de
combinaison et fournit des explications sur les raisons conduisant à en
exclure certains fonds ou organismes. Un effort réel pour donner une
41. Il s’agit du respect de la condition selon laquelle la situation nette ne doit pas être
rendue négative et de la nécessité de fournir une information appropriée dans
l’annexe.
42 . Les développements qui suivent concernent la branche maladie. Pour ce qui
concerne la branche AT-MP, on se bornera à relever que le bilan combiné enregistre
le même type de régularisations comptables que celui de la branche maladie (congés
payés et dettes de l’article 58).
32
COUR DES COMPTES
information plus complète et en phase avec les exigences de la future
norme de combinaison est à souligner.
La Cour estime cependant que des progrès sont encore à faire sur
deux aspects :
-
mieux distinguer dans les entités ou activités « exclues » celles
totalement extérieures à l’assurance maladie car échappant au contrôle
de la caisse nationale et celles qui, tout en étant hors du compte de
résultat combiné, sont rattachées par la trésorerie à la caisse nationale
et qui ont également un impact sur les fonds propres combinés
(FORMMEL, FASQV, aide médicale, aide d’urgence et CMUC) ;
-
mieux justifier l’exclusion des UGECAM43 par référence à la norme
de combinaison et surtout présenter à titre d’information les comptes
centralisés de celles-ci, ce qui permettrait notamment d’avoir une
image complète de leur situation patrimoniale.
b) Les comptes combinés de la branche maladie
Le bilan combiné
Le bilan combiné 2005 fait apparaître une très importante
progression des masses débitrices et créditrices, de 19,1 Md€ à 26 Md€. Il
ne saurait être question de se livrer à un commentaire exhaustif des
évolutions profondes des principaux postes. Seuls certains aspects
significatifs et nouveaux sont commentés.
Tout d’abord, les capitaux propres totaux ont été ramenés de
7,5 Md€ à 2,78 Md€ en 2005 après un double mouvement de
« recapitalisation » et d’apurement des pertes et du résultat négatif 2005.
Pour le seul fonds national de l’assurance maladie (FNAM), qui
constitue le fonds principal de l’assurance maladie, le report à nouveau
positif de 200444 de 5,63 Md€ a été majoré d’un nouveau versement de la
CADES de 6,61 Md€ destiné à couvrir le déficit 2005. Viennent en
déduction directe du report à nouveau les imputations afférentes aux
conséquences des changements de méthode comptable, principalement
2,87 Md€ au titre des dettes à l’égard des hôpitaux et 407 M€ au titre des
congés payés. Après l’imputation au bilan du résultat négatif du FNAM,
43. Il s’agit d’entités dotées de la personnalité juridique et qui gèrent des établissements de santé ou des établissements médico-sociaux liés pour des raisons historiques
à la sécurité sociale.
44. C’est-à-dire le solde positif constaté à la clôture 2004 par suite du versement de
35 Md€ de la CADES effectué cette année là et destiné à couvrir les déficits
accumulés depuis 1999.
LA CERTIFICATION DES COMPTES DU REGIME GENERAL
33
soit 8,1 Md€ (c’est-à-dire le déficit de la gestion technique de la branche
maladie en 2005), le montant du report à nouveau au titre de 2005
s’établit à 870 M€. En y ajoutant les capitaux propres des autres fonds on
atteint à la clôture le chiffre de 2,78 Md€.
Les informations appropriées sont fournies en annexe des comptes
combinés et les opérations sont, sur le fond, conformes aux exigences du
passage à une comptabilité en droits constatés. La Cour relève cependant
que les régularisations comptables par imputation directe au bilan n’ont
été rendues possibles que grâce à l’excédent cumulé des versements de la
CADES. Seuls ceux-ci ont permis à la CNAMTS d’avoir une situation
nette positive .
S’agissant des provisions pour risques et charges, ce poste connaît
une forte augmentation puisqu’il passe de 4,87 Md€ en 2004 à 7,29 Md€
en 2005. Aux provisions pour soins de ville qui permettent, après calcul
sur des bases statistiques internes à la CNAMTS, de constater à la clôture
de l’exercice le montant réel des dépenses de soins pour la fin de l’année
(en raison du décalage dans l’envoi et le traitement des feuilles de soins)
et aux provisions sur les cliniques et les établissements médico-sociaux,
viennent s’ajouter, pour la première fois, des provisions au titre des
règlements aux hôpitaux. L’inscription en provision du montant estimé de
la part activité pour le 4ème trimestre est une conséquence directe de la
réforme de la tarification à l’activité. Par construction, ce montant n’est
pas connu à la clôture des comptes. La Cour ne conteste pas le principe de
cette inscription, rendue inévitable par les décalages induits par les
nouvelles modalités, d’ailleurs elles-mêmes transitoires, des règlements
financiers aux hôpitaux. Elle constate que si la procédure nouvelle ainsi
induite pour les caisses locales45 est bien décrite dans les instructions
internes à la CNAMTS, en revanche le montant total retenu (soit
2,14 Md€ de dotations) n’est guère justifié dans l’annexe aux comptes de
2005, qui se contente de donner une explication générale de trois lignes.
Le rapport annuel de l’agent comptable n’est pas plus explicite sur
ce point. En réalité, les données chiffrées nécessaires sont fournies par la
direction de l’hospitalisation et de l’organisation des soins du ministère
de la santé. Seule cette administration a été en mesure, finalement, de
fournir des éléments de justification. La Cour invite donc la CNAMTS,
d’une part, à présenter une annexe beaucoup plus précise et complète à
l’appui des comptes de 2006 et, d’autre part, à convenir d’une procédure
formalisée de notification des données estimatives du 4ème trimestre en
45. Qui se voient notifier le chiffre à inscrire à leur balance de clôture par la caisse
nationale selon des modalités similaires à celles des provisions pour soins de ville.
34
COUR DES COMPTES
provenance du ministère de la santé, avec une documentation convenable
du mode de calcul.
S’agissant des dettes d’exploitation, elles se trouvent de manière
symétrique à ce qui a été dit plus haut, majorées de la dette « hôpitaux »
et des charges à payer au titre des congés payés. Si le mode d’apurement
en 2006 de ces dernières ne soulève en principe pas de difficulté, aucune
indication n’est fournie sur les échéances de remboursement de la dette
dite de l’article 58 (2,3 Md€).
La dette à l’égard des hôpitaux : les créances dites de l’article 58
Lors du passage, en 1983, de la tarification au prix de journée au
financement par la dotation globale, les hôpitaux ont constitué une
créance qui ne s’est pas résorbée. Il résulte en effet de l’article R. 714-9 du
CSS (qui codifie l’article 58 du décret du 11 août 1983) que la dette au
titre des facturations de la période précédente est couverte par les
versements au titre du règlement de la dotation globale par douzièmes
mensuels, ce qui crée un décalage constant depuis lors puisque le premier
versement de l’année N a été comptablement destiné à apurer la dette au
titre de N-1.
Or la comptabilité de la sécurité sociale n’étant pas en droits
constatés à cette époque et la situation n’ayant pas été régularisée en 1997,
les organismes nationaux et locaux d’assurance maladie n’avaient jamais
constaté de dette à l’égard des hôpitaux, alors même que les bilans de ces
établissements publics comprenaient bien à leur actif une créance qu’il
incombait d’ailleurs à leur agent comptable de soigneusement
individualiser.
C’est désormais chose faite à la clôture de 2005 et ceci est
satisfaisant tant pour des raisons comptables que parce que cet exercice
marque le passage à un nouveau mode de financement.
Il reste à s’assurer de la réalité et de l’exactitude, caisse par caisse,
et, hôpital par hôpital, des dettes ainsi reconstituées. En effet, il ressort des
premières diligences de la Cour que, dans un certain nombre de cas, les
caisses ne disposaient plus de l’information nécessaire et ont dû s’en
remettre aux renseignements fournis par les établissements de santé.
Il importe que le ministère de tutelle définisse sans tarder le mode
d’apurement de ces dettes46 qui n’ont pas vocation à demeurer dans les
bilans des caisses.
Parmi les autres dettes d’exploitation de caractère nouveau sont à
relever celles résultant des charges à payer au titre de la part activité des
46. Il existe également d’autres dettes, dites de l’article 110, qui correspondent au
même objet que les dettes de l’article 58 à l’égard des établissements sociaux et
médico-sociaux. Elles ont donné lieu au même traitement à la clôture de 2005.
LA CERTIFICATION DES COMPTES DU REGIME GENERAL
35
hôpitaux pour le 3ème trimestre 2005. Les montants retenus sont en
principe clairement vérifiables (par rapprochement avec les données des
ARH) et sont justifiés dans la procédure définie par la CNAMTS.
L’annexe aurait pu toutefois être plus explicite sur ce point.
Enfin, figurent en compte d’attente à la clôture de l’exercice, sur
divers sous-comptes de la classe 47, des sommes d’un montant cumulé de
165,2 M€ et qui représentent des dépenses d’action sanitaire et sociale en
dépassement de budget. Il s’agit de dépenses de caractère obligatoire47
qui, en vertu de pratiques permises par la CNAMTS, se trouvent imputées
en compte d’attente par les caisses locales quand celles-ci ont épuisé leurs
crédits budgétaires (cf. supra). Si elle avait eu à certifier les comptes
2005, la Cour aurait demandé une correction sur ce point et, à défaut,
aurait formulé une réserve.
On se limitera à deux remarques sur l’actif du bilan combiné.
Tout d’abord le c/4095 « prestataires- avances et acomptes sur
prestations » enregistre une créance de 3,39 Md€ (contre 0,1 Md€ en
2004). Il s’agit en quasi-totalité de la partie non apurée de l’avance de
trésorerie consentie aux hôpitaux pour les cinq premiers mois de l’année
2005 dans le cadre du passage à la tarification à l’activité. Or, il existe
une incertitude majeure, aujourd’hui, sur les échéances et les modalités de
recouvrement de cette avance dont il y a tout lieu de penser qu’elle va
s’accroître en 2006 par l’effet de la montée en puissance de la « part
activité ». Afin de garantir la pleine sincérité des comptes, la CNAMTS
devra être en mesure de fournir des indications sur l’apurement de ces
avances dans l’annexe aux comptes. La Cour sera très attentive à cette
question.
Parmi les créances figurant au c/444 « prestations prises en charge
ou remboursées par des entités publiques », un montant de 681 M €
correspond au cumul des créances de la CNAMTS au titre de l’aide
médicale d’Etat. Le compte de résultat combiné dit « rattaché » de l’aide
médicale est présenté en équilibre : le total des charges est équilibré par le
total des produits et ceux-ci sont constitués en quasi-totalité des
versements de l’Etat. Or, il s’agit pour une part croissante de créances sur
l’Etat (et pour le dernier exercice de produits à recevoir) car celui-ci règle
ses dettes avec un retard lui-même croissant. Le montant figurant à l’actif
du bilan de la CNAMTS représente un cumul de créances depuis 2003 et
non apurées au 31 décembre 2005. Cette situation s’explique par la sousdotation des crédits budgétaires prévus à cette fin, les versements effectifs
de l’Etat servant au mieux à apurer une partie des dettes des exercices
47. Correspondant à la prise en charge du ticket modérateur d’affections graves non
couvertes en gestion technique.
36
COUR DES COMPTES
passés. Contrairement à d’autres cas de créances sur l’Etat, qui sont en
général apurées au cours de l’exercice suivant, force est de constater que
le recouvrement de cette créance n’est pas assuré, l’Etat manifestant de
plus en plus de réticences à honorer les factures de la CNAMTS 48 .
Comme elle l’a indiqué dans son rapport sur les comptes de l’Etat, la
Cour sera attentive au montant qui sera inscrit par l’Etat à son bilan
d’ouverture 2006 et elle demandera à la CNAMTS d’en tirer les
conséquences s’il apparaît que la totalité de sa créance sur l’Etat n’est pas
reconnue.
Le compte de résultat
Le compte de résultat combiné fait apparaître un déficit de 8 Md€.
Compte tenu des développements qui précèdent, il existe une
incertitude sur l’exactitude de ce chiffre.
Les charges d’un montant total de 135,7 Md€ englobent plus de
7 Md€ de provisions pour prestations sociales. A l’incertitude qui
s’attachait au calcul des provisions pour soins de ville (dans le sens d’une
surestimation constatée les années précédentes 49 ) s’ajoute désormais
celle afférente à la part activité des hôpitaux dont la méthode d’estimation
retenue n’est pas d’une grande clarté50. Pour être complète, l’analyse des
dotations aux provisions devrait aussi porter, dans cet ensemble, sur
celles concernant les cliniques et établissements médico-sociaux qui font
l’objet du même type de traitement statistique par la CNAMTS que les
soins de ville. Or, le risque d’une sous-estimation des provisions sur les
cliniques paraît avéré selon les données les plus récentes de la direction
de la sécurité sociale.
Par ailleurs, le montant des charges devrait être majoré de 165 M€
ce qui, toutes choses égales par ailleurs, dégraderait d’autant le déficit.
Il y a là autant de raisons pour poursuivre l’amélioration de la
présentation des états financiers en 2006.
Enfin, les produits ont connu une forte progression pour les raisons
explicitées infra (cf. comptes combinés de l’ACOSS). Ceci contribue à la
limitation du déficit. A cet égard, le mécanisme nouveau d’enregistrement
48. Il importe, bien sûr, que les factures adressées par la CNAMTS comportent les
explications ou justifications supplémentaires qui seraient estimées nécessaires par
l’Etat débiteur.
49. Cette surestimation a été ramenée à des proportions beaucoup plus limitées en
2005 (de l’ordre de 40 M€).
50 . Selon la CNAMTS, on constaterait a posteriori un sous provisionnement de
49 M€.
LA CERTIFICATION DES COMPTES DU REGIME GENERAL
37
de la taxe sur les tabacs pour la fin 2005 (explicité infra) a permis
d’accroître encore les produits, ce qui a limité d’autant le déficit.
2 – Les comptes produits par la CNAVTS
Les comptes combinés de la branche vieillesse pour l’exercice
2005 font apparaître plusieurs limites.
a) L’application du principe des droits constatés
Les prestations qui n’ont pu être ventilées en l’absence de mise en
place de certaines fonctionnalités de l’outil retraite en 2003 (dits
« paiements hors électronique ») sont traitées en dotations aux provisions
pour prestations légales, l’apurement se faisant lors du rattachement aux
comptes de charges correspondants. Les dotations ainsi constatées (pour
un montant brut de 148,5 M€ en 2005) ne correspondent pas aux
prestations dues au titre de l’exercice, mais à celles qui ont été payées au
cours de celui-ci. Cette situation traduit une exception injustifiée à
l’application du principe des droits constatés.
b) La présentation des documents comptables
Le compte de résultat et le bilan combinés ont vocation à être
présentés sous la forme de documents synthétiques comportant, pour le
premier, des soldes intermédiaires (résultats d’exploitation, financier et
exceptionnel). En principe, l’annexe a notamment pour objet de détailler
et d’expliciter les informations qu’ils contiennent. Les comptes combinés
de la branche vieillesse pour l’exercice 2005 ne répondent pas à ces
critères.
Le tableau de centralisation des données comptables (TCDC) fait
office de compte de résultats combiné. Il fournit le détail par sous-compte
des produits et des charges et fait masse de tous les produits et de toutes
les charges pour dégager un résultat unique à caractère global. Le bilan
combiné est également très détaillé. Dans ces deux documents, les
principales grandeurs et leurs évolutions n’apparaissent pas ou mal.
L’annexe ne contient pas explicitement les informations
importantes de l’exercice. Ainsi, si elle indique une créance de 4 626 M€
sur des « organismes concourant au financement des régimes obligatoires
de base », l’annexe ne précise pas que cet intitulé recouvre en fait une
seule et même entité : le fonds de solidarité vieillesse, qui prend en
charge des cotisations et des prestations. Or, les créances de la branche
vieillesse sur le FSV représentent un quart de son actif, elles ont crû de
manière continue (elles s’élevaient à 1 780 M€ au 31 décembre 2003) et
38
COUR DES COMPTES
les lois de financement de la sécurité sociale adoptées à ce jour n’ont pas
prévu les moyens d’interrompre leur augmentation ni, a fortiori,
d’inverser la tendance.
La situation du FSV
Dans son rapport sur les comptes de l’Etat pour 2005, la Cour a
estimé que, s’agissant d’un établissement public administratif placé sous
son contrôle, l’Etat a, dans le silence des lois de financement de la sécurité
sociale sur les moyens d’y parvenir, la responsabilité d’assurer le
rééquilibrage des recettes et des dépenses du FSV. Elle en a déduit qu’il
convenait que l’Etat constate à son bilan d’ouverture au 1er janvier 2006
une provision pour risques et charges à concurrence de la valeur absolue
de la situation nette du FSV au 31 décembre 2005.
L’absence de provisionnement par la branche vieillesse du régime
général de sécurité sociale de ses créances sur le FSV, qui constitue une
question distincte de la précédente, sera quant à elle examinée par la Cour
dans le cadre de la certification des comptes combinés de la branche
vieillesse pour l’exercice 2006.
c) La description des changements de méthodes par l’annexe
L’annexe omet le plus souvent d’indiquer l’incidence des
changements de méthodes sur la physionomie du compte de résultat ou du
bilan. De manière ponctuelle, cette dernière lacune est atténuée par le
rapport de l’agent comptable, mais ce document ne fait pas partie des
comptes combinés des organismes de sécurité sociale qui comprennent, à
titre limitatif, un compte de résultat et un bilan combinés ainsi qu’une
annexe.
d) La description des faits marquant de l’exercice par l’annexe
L’annexe aux comptes combinés pour l’exercice 2005 comporte
une rubrique nouvelle relative aux faits marquants de l’exercice. Elle
décrit imparfaitement l’adossement à la branche vieillesse du régime
général de sécurité sociale d’une partie des prestations du régime spécial
d’assurance vieillesse des industries électriques et gazières 51 . Elle est
muette sur la question essentielle de la régularisation de l’assurance
vieillesse des parents au foyer (AVPF).
51. Loi du 9 août 2004 relative au service public de l’électricité et du gaz et aux
entreprises électriques et gazières.
LA CERTIFICATION DES COMPTES DU REGIME GENERAL
39
L’adossement d’une partie des prestations du régime d’assurance
vieillesse des industries électriques et gazières
L’annexe fait état des relations comptables de la CNAVTS avec le
fonds de réserve des retraites (FRR), qui assure jusqu’en 2020, pour le
compte de la CNAVTS, la gestion financière de la part, fixée à 40 %, de
la soulte à la charge de la caisse nationale des industries électriques et
gazières (CNIEG) dont cette dernière doit s’acquitter dès 2005
(3 060 M€). A ce titre, elle omet de mentionner la contrepartie au passif
du bilan (produits constatés d’avance), de l’enregistrement en immobilisations financières d’une créance sur le FRR (3 322 M€ 52 ). En
n’indiquant pas que le document intitulé « calcul de la rémunération de la
soulte EDF » qu’elle incorpore est l’annexe comptable prévue par une
convention avec le FRR organisant la gestion des fonds versés par la
CNIEG, elle ne permet pas d’en comprendre la portée.
La soulte IEG53
La soulte correspond à la somme actualisée au taux de 2,5 % des
droits d’entrée sur 25 ans et est fixée à 7 649 M€. Ce montant comprend,
d’une part, un versement de la CNIEG au FRR avant le 30 juin 2005
correspondant à 40 % de la soulte (3 060 M€) et, d’autre part, pour les
60 % restants (4 589 M€ correspondant à un montant non actualisé de
5 740 M€), un versement annuel sur 20 ans (de l’exercice 2005 à
l’exercice 2024) d’une somme fixe de 287 M€. A compter de 2006, cette
somme est majorée du taux de l’inflation prévisionnelle hors tabac prévue
par le projet de loi de finances annuel. A compter de 2007, le taux est
corrigé de l’écart constaté au titre de l’année précédente entre le taux
prévisionnel et le taux constaté.
Au lieu de l’annexe, c’est le rapport de l’agent comptable qui
décrit l’incidence sur le résultat comptable de la branche vieillesse du
changement de périmètre lié à l’adossement d’une partie des prestations
du régime d’assurance vieillesse des industries électriques et gazières.
Après sommation des produits54 et des charges55 liés à cette opération,
52. Outre les 40 % de la soulte versés par la CNIEG au FRR (3 060 M€), ce montant
comprend les intérêts au 30 juin 2005 versés par la CNIEG, la quote-part du résultat
de la gestion financière au 2ème semestre 2005 des sommes précitées nettes des frais
de gestion et la quote-part des plus values latentes au 30 juin 2005 (262 M€ au total).
53. Voir le chapitre X du rapport de la Cour sur la sécurité sociale de septembre 2006,
pp. 321-322.
54 . Cotisations versées par la CNIEG (817 M€), prise en charge de prestations
(majorations enfants) par le FSV (48 M€) et versement annuel par la CNIEG au titre
des 60 % de la soulte (287 M€).
55. Prestations de retraites dues à la CNIEG (1 377 M€).
40
COUR DES COMPTES
elle s’élève à -225 M€, soit 10,6 % de la dégradation du résultat net de la
branche vieillesse intervenue en 2005 par rapport à l’exercice précédent.
Aucun document ne décrit le résultat économique de l’adossement, qui,
pour la première année de cette opération, est favorable en revanche à la
branche vieillesse (à hauteur de 37 M€) 56 . Il convient de faire une
description de cette opération en annexe.
La régularisation partielle des cotisations dues par la branche famille
au titre de l’assurance vieillesse des parents au foyer
L’annexe omet de relater la régularisation partielle effectuée au
titre de l’assurance vieillesse des parents au foyer (AVPF). Le rapport de
l’agent comptable mentionne sans commentaire l’enregistrement de
produits et de charges au titre de cette opération.
L’AVPF
Instaurée en 1972, l’AVPF est une prestation sociale qui fait
intervenir deux branches de la sécurité sociale. En effet, l’AVPF est une
cotisation personnelle, à la charge de la branche famille, qui ouvre un droit
à pension de retraite au titre du régime général, versée par la branche
vieillesse, à des personnes qui bénéficient de certaines prestations
familiales, ne travaillent pas lorsqu’elles vivent en couple et satisfont par
ailleurs, seules ou en couple, à des conditions de ressources. La cotisation
individuelle est calculée par application du taux de cotisation (somme de
la part employeur et de la part salariale) à une assiette forfaitaire égale, par
mois, à 169 fois le SMIC horaire au 1er juillet de l’année précédente. Dans
les comptes combinés de la branche famille pour 2005, la charge
prévisionnelle liée à l’AVPF au titre des droits relatifs à 2005 s’élève à
3 917 M€ (7,4 % des charges totales). Dans ceux de la branche vieillesse
du régime général, elle a pour contrepartie un produit identique (4,9 % des
produits totaux).
Les contributions antérieures à 1996 avaient donné lieu à des
régularisations à caractère forfaitaire. Pour les exercices suivants, aucune
régularisation ne leur avait été appliquée. Ainsi, les produits dans les
comptes de la branche vieillesse (les charges dans les comptes de la
branche famille) pour les exercices 1996 à 2004 ont correspondu à de
simples acomptes non soldés par des droits réels justifiés. Ces pratiques
ont porté atteinte aux principes de réalité et d’exhaustivité : les produits
enregistrés (ou les charges pour la branche famille) n’ont pas correspondu
à ceux découlant de l’obligation juridique, précisément définie, liée à
56. Par rapprochement de l’incidence négative sur le résultat comptable, soit -225 M€,
avec les 262 M€ enregistrés en créance sur le FRR au-delà des 40 % de la soulte
versés par la CNIEG à ce dernier.
LA CERTIFICATION DES COMPTES DU REGIME GENERAL
41
l’AVPF, mais ont été de simples montants provisoires représentatifs de
celle-ci.
La régularisation dans les comptes combinés des deux branches
pour l’exercice 2005 au titre des exercices 1996 à 2004 a été effectuée de
la manière suivante : pour 1996 à 2001, elle s’est traduite par un enregistrement de 266 M€ en charges exceptionnelles dans les comptes
combinés de la branche vieillesse (en produits exceptionnels dans les
comptes combinés de la branche famille) ; pour 2002 à 2004, elle a donné
lieu à un enregistrement de 307 M€ en produits d’exploitation (en charges
d’exploitation dans les comptes combinés de la branche famille). Il en
résulte ainsi une incidence favorable sur le résultat en 2005 de la branche
vieillesse de 41 M€.
Cette régularisation appelle :
-
une critique : la régularisation a altéré la physionomie des comptes de
résultats des branches vieillesse et famille. En effet, les régularisations
pour les exercices 2002 et 2003 ont été classées en produits
d’exploitation (en charges d’exploitation pour la branche famille)57.
En dehors de la régularisation correspondant à l’exercice antérieur (en
l’espèce, 2004), toutes les régularisations devraient être classées en
éléments exceptionnels ;
-
une réserve d’interprétation : contrairement à l’acception commune
selon laquelle, pour les exercices antérieurs à 2002, les reports effectifs
au compte individuel des bénéficiaires58 au 31 décembre 2005 corrigés
des anomalies59 correspondraient aux reports à attendre, la régularisation n’a pas mis un terme définitif aux régularisations à opérer au titre
des exercices précités ;
-
une mise en garde : l’AVPF ne doit pas conduire ni, a fortiori, servir
à transférer une partie du résultat de la branche vieillesse à la branche
famille ou vice versa. Or, en raison des défaillances du dispositif de
57. 18,9 M€ au titre de 2002 et 116,6 M€ au titre de 2003.
58. Pour la tenue du compte vieillesse des intéressés, les CAF doivent établir avant le
28 février de chaque année N+1 une déclaration nominative annuelle (DNA) pour
chaque bénéficiaire devant être affilié à l’AVPF au titre de l’année civile N.
Parallèlement, des bordereaux représentatifs de créances sont adressés par les CAF
aux CRAM chargées de les centraliser et de les transmettre à la CNAVTS pour
remontée à la CNAF à titre de justificatif de dépenses.
59. Bénéficiaires qui ont droit à l’AVPF, mais pour lesquels les données transmises
par les CAF n’ont pu être appariées à celles dont disposent les CRAM sur les mêmes
bénéficiaires en raison d’une absence ou d’une non-reconnaissance du numéro
d’identification au répertoire (NIR).
42
COUR DES COMPTES
gestion, la qualité des éléments à caractère forfaitaire pris en compte
pour la régularisation effectuée dans les comptes pour l’exercice 2005
est inégale60. Surtout, la régularisation n’a pas été étendue, comme elle
aurait dû l’être, aux exercices non prescrits antérieurs à 1996.
La Cour recommande que dans les comptes de chaque exercice, et
sans attendre l’émission par les CAF de la quasi-totalité des documents
justificatifs relatifs aux droits nés au titre d’un exercice, les branches
famille et vieillesse opèrent des régularisations, se fondant sur la totalité
des éléments d’information connus ou pouvant être appréhendés, au titre
de l’ensemble des années de cotisation non prescrites. Afin d’améliorer la
qualité des comptes produits, l’ampleur des régularisations nécessaires
doit diminuer. A cette fin, il convient d’avancer la date réglementaire
(28 février) et revoir les procédures d’envoi des documents justificatifs
par les CAF (les envois interviennent au mieux en mai ou juin), de façon
à ce qu’un nombre significativement accru de ces documents soit
transmis dans des délais compatibles avec l’établissement des comptes
combinés des deux branches.
En tout état de cause, la Cour souhaite que l’annexe donne toute
l’information nécessaire à l’obtention de l’image fidèle du patrimoine, de
la situation financière et du résultat de la CNAVTS.
3 – Les comptes produits par la CNAF
Les tableaux de centralisation des données comptables et les
projets d’états financiers (bilan et compte de résultat) ont été mis à la
disposition de la Cour respectivement les 21 et 24 mars 2006, le projet
d’annexe l’a été le 24 mai. Les états financiers ont été présentés le 4
juillet 2006 pour approbation par le conseil d’administration de la CNAF.
La mise en œuvre des recommandations de la Cour a eu un impact
important sur l’évolution de certains comptes de la branche famille.
a) Le bilan
L’une des particularités du bilan de la branche famille tient à
l’importance des comptes de tiers. Il s’agit de flux financiers relatifs aux
prestations versées pour le compte de l’Etat et des départements (aide
personnalisée au logement, allocation de logement à caractère social,
revenu minimum d’insertion…).
60. La valorisation des anomalies détectées (exercices 1996 à 2004) est correctement
justifiée. Mais, par nature, les hypothèses sur l’envoi partiel par les CAF de leurs
éléments (98 % pour 2002, 90 % pour 2003 et 88 % pour 2004) sont plus fragiles.
LA CERTIFICATION DES COMPTES DU REGIME GENERAL
43
Au passif, les capitaux propres baissent de 2,5 Md€ en raison
d’une part de l’imputation du résultat courant de la branche de -1,3 Md€
et, d’autre part, du prélèvement de près de 1,2 Md€ sur le report à
nouveau pour les régularisations liées aux changements de méthode
comptable (voir supra).
Pour ces régularisations, conformément aux recommandations de
la Cour et aux directives de la DSS, la CNAF a constitué une provision
pour rappel de prestations légales de 869 M€ imputée pour 851 M€ sur le
report à nouveau pour les exercices antérieurs à 2005 et pour 18 M€ sur le
résultat de l’exercice 2005. Elle n’a imputé en compte de résultat que
10 M€ sur les 105 M€ de provisions pour créances douteuses, les indus
constatés au 31 décembre 2004 pour un total de 95 M€ étant
comptabilisés directement sur le report à nouveau.
Pour les droits aux congés payés acquis et non pris, elle a imputé la
charge à payer qui aurait dû être constituée fin 2004 sur le report à
nouveau pour 181 M€ et sur les comptes de charges correspondants pour
5 M€ au titre de l’exercice 2005. En outre, un montant de 44 M€ a été
prélevé sur le report à nouveau au titre du passage en 2005 aux droits
constatés pour le complément de la PAJE (garde) qui avait été traité en
décaissement en 200461 . Enfin, s’agissant de la prime d’intéressement
concernant les personnels de gestion administrative et des œuvres
d’action sociale, la CNAF a passé une écriture de dotation aux provisions
pour 15 M€.
Au total, les régularisations opérées fin 2005 par imputation directe
sur le report à nouveau s’élèvent à près de 1,2 Md€. Une partie de ces
régularisations a fait progresser de façon très importante le poste
« provisions pour risques et charges » afférentes aux prestations, celui-ci
passant de 7,2 M€ fin 2004 à 893,5 M€ à la fin 2005.
b) Le compte de résultat
La CNAVTS et la CNAF ont régularisé la situation de l’allocation
vieillesse des parents au foyer (AVPF) pour la période de 1996 à 2004.
Pour la CNAF, ces régularisations ont abouti à un produit exceptionnel de
266 M€ et à des charges d’exploitation pour 307 M€ (cf. supra, les
comptes combinés de la CNAVTS).
61. Cette opération exceptionnelle a été autorisée par la MCP le 10 janvier 2006 après
consultation du CNC. Elle s’ajoute donc à la liste des régularisations par le seul bilan,
mentionnées dans la lettre du directeur de la sécurité sociale aux caisses nationales du
6 décembre 2005 précitée.
44
COUR DES COMPTES
Par ailleurs, la CNAF a enregistré en comptes de charges la
contribution de 3,4 Md€ du fonds national des prestations familiales au
fonds national de l’habitat (FNL) alors que le montant exact de la
contribution a été définitivement arrêté lors de la séance du conseil de
gestion du FNH le 3 janvier 2006. En toute rigueur, il aurait été
nécessaire de traiter ce montant en charges à payer voire en provision. En
outre, cette charge pose une difficulté juridique quant à l’exactitude de
son montant pour les exercices 1997 à 2005. La contribution du FNPF,
fixée à hauteur de 46 % de la charge par le décret du 30 décembre 1985, a
été portée à 50,28 % en 1997 puis à 54,50 % à compter du 1er janvier
2005 par des décisions du conseil de gestion du FNH qui ne dispose
pourtant d’aucune compétence en ce domaine. Afin de satisfaire à
l’exigence de régularité comptable, la modification des clés de répartition
nécessitait un texte réglementaire de niveau approprié. Un décret du
12 mai 2006 a finalement abrogé le décret de 1985 et a défini un nouveau
dispositif. La Cour examinera la régularité des opérations effectuées à ce
titre en 2006.
Pour la première fois et conformément aux préconisations de la
Cour, la CNAF a également enregistré plus de 1,5 Md€ de produits à
recevoir pour les remboursements dus par l’Etat au titre de la prise en
charge des exonérations de cotisations ainsi que ceux dus par l’Etat et les
départements au titre des prestations servies par les CAF pour leur
compte.
c) L’annexe
L’information comptable et financière fournie à l’appui des
comptes n’est pas satisfaisante. L’agent comptable national a élaboré une
annexe faisant état du référentiel comptable, du périmètre de
combinaison, des règles et méthodes comptables, des engagements hors
bilan et des changements de méthode comptable. La seule mention de la
nature des engagements hors bilan et de leur montant total ne saurait
suffire.
Aucun élément n’est fourni dans l’annexe ni dans le rapport de
l’agent comptable sur le montant de 2,6 Md€ de provisions pour créances
douteuses et ayant trait à la part des cotisations sociales et de contribution
sociale généralisée établie et non encore encaissée au 31 décembre ainsi
qu’à l’évaluation des produits à recevoir, qui s’élèvent à 6,3 Md€. Bien
que la CNAF reçoive ces informations de l’ACOSS, cela ne devrait
toutefois pas être un obstacle à un effort nécessaire d’information.
LA CERTIFICATION DES COMPTES DU REGIME GENERAL
45
4 – Les comptes produits par l’ACOSS
a) Aspects généraux
Les comptes combinés 2005 de l’activité recouvrement ont été
produits par l’agent comptable de l’ACOSS dans les délais prévus le
15 avril 2006, soit avec un mois d’avance sur l’année précédente.
Les comptes combinés se présentent comme un bilan par grandes
masses, un compte de résultat conçu de même et une annexe. Un bilan et
un compte de résultat détaillés figurent à la suite, ainsi que des
informations relatives au recouvrement pour compte de tiers et aux écarts
de combinaison.
En dépit de progrès, l’annexe n’adopte pas encore la forme
préconisée par le plan comptable général. Certains de ses éléments font
référence à des documents externes.
Par ailleurs, le mode de calcul des produits à recevoir et des
provisions, effectué en partie de façon statistique, manque de clarté,
l’annexe renvoyant à une lettre circulaire elle-même peu explicite.
Les produits à recevoir
Les produits à recevoir sont des produits de l’exercice dont les
montants ne sont pas exactement connus au dernier jour de l’exercice et
qui font donc l’objet d’une estimation. En réalité, dans les entreprises, il
s’agit de factures qui, au 31 décembre, ne sont pas encore prêtes mais sont
envoyées entre le 31 décembre et les écritures de fin d’exercice (un mois
après). L’inscription des produits à recevoir en fin de gestion et leur
extourne au 1er janvier suivant sont donc des opérations formelles. Il
pourrait en aller de même dans les URSSAF, les déclarations du dernier
mois ou du dernier trimestre parvenant dans les premiers jours de janvier.
C’est l’impossibilité de traiter les données dans les délais voulus qui a
conduit à des estimations statistiques.
Les écarts de combinaison font l’objet d’un développement dans
l’annexe, long mais peu explicite. Ces écarts s’expliquent par le fait que
certaines opérations réciproques de fin d’exercice entre URSSAF sont
enregistrées dans une URSSAF mais non dans une autre. Ils sont passés,
d’un exercice à l’autre, de 226 000 à 856 000 euros, ce qui est peu par
rapport aux masses en jeu, mais est dû aux efforts considérables opérés
pour réduire ces écarts. La combinaison, malgré son automatisation dans
une application particulière, exige de longs et minutieux traitements.
Certains points auraient cependant dû faire l’objet de mentions
dans l’annexe. Par exemple, le montant record (3,375 Md€) en 2005 de la
46
COUR DES COMPTES
taxe sur la consommation des tabacs aurait dû être expliqué de la manière
suivante. En premier lieu, jusqu’en août, l’ACCT a versé mensuellement
les sommes encaissées. Un passage à un rythme bi-hebdomadaire décidé
à la demande de l’ACOSS a abouti au versement quasi simultané de la
recette du mois précédent et du mois en cours. En outre, le principal
opérateur dans ce domaine a été invité, sur instruction ministérielle, à
anticiper sa déclaration afférente aux tabacs mis à la consommation en
décembre (normalement faite le 5 janvier et payée en trois versements les
25 janvier, 5 février et 15 février suivants). Arrêtant ses comptes au
23 décembre, cet opérateur a déposé sa déclaration le 28 (mais n’a pas
anticipé son paiement). Cependant, utilisant irrégulièrement la procédure
dite du crédit d’enlèvement qui n’existe que pour les opérateurs en
douane ayant déposé caution 62 , la DGDDI a considéré la déclaration
comme une recette effective et autorisé le versement anticipé de 190 M€
à l’ACOSS le 28 décembre, en sorte que, en 2005, l’ACOSS a encaissé
13 mois et 23 jours de taxe. Du point de vue de cette dernière, il n’y avait
rien d’irrégulier, le « fait générateur » (qui est pour elle la notification du
versement des droits au comptant) étant intervenu en 2005. Néanmoins,
l’opération mérite d’être signalée compte tenu de son impact favorable
sur les comptes de la branche maladie63. D’autre part, les suites en ont été
constatées dès février 2006, quand le paiement qui aurait dû normalement
être enregistré à cette date ne l’a pas été puisqu’il avait été anticipé. Ceci
montre la nécessité que, comme mentionné précédemment, la notion de
fait générateur des impôts et taxes affectés à la sécurité sociale soit
clarifiée dans le PCUOSS, afin de garantir la permanence des méthodes
comptables s’agissant particulièrement des droits indirects et de la TVA.
Des évolutions apparemment surprenantes
Si l’ensemble des cotisations (hors CSG) est passé de 143,4 Md€ à
148,6 Md€ (dont 808 M€ au titre des industries électriques et gazières) et
si la CSG a atteint 70,5 Md€ (contre 65,7 Md€ en 2004), l’évolution la
plus remarquable est celle des impôts et taxes affectés, qui ont bondi de
2,9 Md€ à 6 Md€. Cette progression s’explique par la création d’une série
de taxes par la LFSS 2005 (862 M€) et par la progression des droits tabac,
avec en contrepartie la disparition des droits sur les alcools, exception
faite des boissons « prémix ».
62. Ce qui leur permet de régler leurs droits à intervalles convenus et non pas au jour
le jour, comme ce devrait être le cas pour les droits au comptant.
63 . Cet impact a été encore plus fort sur les comptes du FFIPSA. En effet, le
versement considéré a représenté pour lui environ 300 M€.
LA CERTIFICATION DES COMPTES DU REGIME GENERAL
47
L’annexe n’est pas explicite sur l’évolution des créances de
l’ACOSS sur l’Etat64 qui passent de 2,220 Md€ à 3,291 Md€ de fin 2004
à fin 2005 (+1 071 M€)65. Si l’accroissement des dettes de l’Etat est liée
en partie à la sous dotation budgétaire en loi de finances, l’explication
principale est en réalité purement comptable.
En effet, en 2004, les versements destinés à compenser les
allègements généraux de cotisation liés à la « loi Fillon » avaient été
effectués à l’ACOSS avant que celle-ci ait adressé à l’Etat la note de débit
correspondante. L’Etat était ainsi en avance de 1 255 M€. En réalité, les
produits à recevoir au titre de la même loi se montaient à 1 812 M€, mais,
tout en figurant bien en créance au bilan, ils n’étaient pas compris dans
les comptes de tiers individualisés retraçant la situation des débiteurs et
créanciers au 31 décembre 2004. Les autres mesures emplois 66
représentant au total une créance de l’ACOSS sur l’Etat de 2,1 Md€, cette
« avance » de l’Etat avait pour effet de diminuer (en apparence) sa
créance à 846 M€, alors que, en prenant en compte les produits à
recevoir, elle était en réalité de 2,6 Md€. En 2005, cette situation ne n’est
pas produite et, en fin d’exercice, l’Etat devait encore 199 M€ à l’ACOSS
pour les seules mesures Fillon et 2 965 M€ pour l’ensemble des
allègements, soit une progression de 2 119 M€. Si l’on neutralise cette
anomalie comptable de l’exercice 2004, on constate que la progression
n’a été que de 400 M€ environ.
5 – Deux observations susceptibles de déboucher sur des réserves
La première a trait à une série de dettes anciennes de l’Etat qui ont
déjà fait l’objet d’exposés dans les précédents rapports de la Cour. Elles
se montent à 1,227 Md€67. Le directeur de l’ACOSS, constatant que rien
n’indiquait une intention de l’Etat de payer tout ou partie de cette dette,
avait fait part de son intention de provisionner les sommes
correspondantes. Par un courrier du 28 décembre 2005, les ministres
compétents se sont opposés à la passation d’une provision, au motif que
le bilan d’entrée de l’Etat, passant à une comptabilité de droits constatés
au 1er janvier 2006, mentionnerait cette dette.
64. Exonérations mesures emplois et divers.
65. Voir le rapport sur les comptes de l’Etat de 2005, pages 151-153.
66. Au nombre de 36, certaines d’un montant faible, voire nul, d’autres très importantes.
67. A savoir 713 M€ de mesures FOREC pour janvier 2000, 58 M€ pour les mêmes
mesures pour janvier 2001, 320 M€ pour le plan textile et 135 M€ pour les
exonérations de cotisations d’allocations familiales pour les bas salaires cumulées
entre 1993 et 1997.
48
COUR DES COMPTES
Le refus de provisionnement, en opportunité, par la tutelle, est
discutable. En effet, pour provisionner une dette, il suffit de constater
qu’elle n’a pas été payée en temps et lieu et de façon prolongée. La
solvabilité du débiteur ne suffit pas à garantir le paiement des dettes.
C’est d’ailleurs ce que fait ordinairement l’ACOSS qui tient compte des
risques en matière de recouvrement pour estimer le montant de ses
provisions. L’ACOSS aurait dû, depuis déjà plusieurs années,
provisionner cette créance. En outre, si elles n’étaient pas reconnues par
l’Etat, les dettes en question devraient faire l’objet du constat d’une perte.
La seconde observation a trait au solde de la compensation des
exonérations de portée générale (lois Aubry, Robien et surtout Fillon)
pour 2005.
L’article 56 de la loi de finances initiale pour 2006 a rétabli dans le
code de la sécurité sociale un article L. 131-8 disposant que, désormais,
un transfert de ressources fiscales dûment énumérées (et non, comme
jusque là, des dotations budgétaires) remplacerait la compensation des
exonérations de ce type, un mécanisme permettant par ailleurs de vérifier,
au moins jusqu’en 2008, qu’il y aurait compensation intégrale. La loi ne
comportant aucune disposition rétroactive, elle ne pouvait s’appliquer que
pour les exonérations nées en 2006 et au-delà.
Or l’article 2 de l’arrêté du 2 février 2006 « fixant les règles
comptables relatives à l’application de l’article 56 » précité a disposé
que « à titre exceptionnel, les impôts et taxes versés à compter du
1er janvier 2006 aux organismes bénéficiaires sont rattachés aux comptes
de l’exercice 2005 de ces organismes pour un montant correspondant à
l’évaluation, au 31 décembre 2005, des allègements visés au I de l’article
L. 131-8 relatifs au mois de décembre ou au dernier trimestre de l’année
2005 ».
Du point de vue des comptes 2005 de l’activité du recouvrement,
cette décision est sans incidence apparente, puisque, comme l’indique
l’arrêté cité, les sommes sont versées en 2006 pour couvrir « l’évaluation,
au 31 décembre 2005, des allègements relatifs au mois de décembre ou au
dernier trimestre de l’année 2005 ». Ces allègements de fin d’année
faisant l’objet de produits à recevoir, il s’agit sur le fond d’une opération
LA CERTIFICATION DES COMPTES DU REGIME GENERAL
49
dénouée sur l’exercice 2006 puisque les PAR font l’objet, au 1er janvier,
d’une contre-passation d’écriture68.
Sur le fond, cette opération soulève au moins deux questions.
La première est évidemment qu’a été ainsi créé un décalage qui se
retrouvera en fin d’année. En effet, si les produits encaissés en janvier
2006 servent à couvrir les allègements de décembre 2005, les produits de
décembre 2006 serviront à compenser plus ou moins les exonérations de
novembre, et le décalage persistera.
En deuxième lieu, cette pratique pose à nouveau la question de la
correcte définition du fait générateur des impôts et taxes recouvrés par
l’Etat pour la sécurité sociale. Il n’en est que plus urgent d’apporter, dans
le cadre de la révision du PCUOSS, les précisions qui s’imposent pour les
différentes catégories d’imposition. La Cour s’attachera à vérifier d’année
en année le strict respect des méthodes comptables, ou, en cas de
changement de celles-ci, leur correcte justification accompagnée, en cas
d’impact significatif, d’une reconstitution pro forma des comptes de
l’exercice précédent. En aucun cas, il ne pourrait être dérogé à ces
principes par des interventions ponctuelles du pouvoir réglementaire.
________________________ SYNTHESE _________________________
Comme l’a prévu la loi organique du 2 août 2005 relative aux lois
de financement de la sécurité sociale, la Cour est chargée de procéder aux
vérifications en vue de certifier les comptes de l’exercice 2006 des
établissements publics et les comptes combinés des branches et de l’activité
de recouvrement du régime général.
Dans cette perspective, la Cour a effectué au cours du premier
semestre une revue des comptes 2005. Elle a constaté des améliorations
substantielles répondant à ses observations antérieures. Elle a aussi pu
formuler de nombreuses observations aux organismes concernés. Certaines
sont reprises dans le présent chapitre. La Cour considère qu’un effort
important reste à accomplir pour améliorer la qualité des comptes.
68. La somme en cause, au 31 décembre, est inscrite en compte de produit (en crédit)
et, en débit, à un compte de tiers spécial. Le 1er janvier, l’opération inverse est passée :
l’exercice s’ouvre donc, pour la ligne en cause, par une sorte de « produit négatif »
qui sera absorbé par les produits effectifs au fur et à mesure des versements de l’Etat
(en l’espèce, il n’y a pas de différence entre droits constatés et encaissements, les
impôts et taxes en cause étant pour la plupart des droits au comptant). Compte tenu de
la date de l’arrêté ici en cause, l’ACOSS n’a pas eu la possibilité d’ouvrir un compte
ad hoc, de sorte que les produits à recevoir correspondants sont comptabilisés dans
son compte « taxe sur les boissons », devenu inactif.
50
COUR DES COMPTES
Le dispositif de validation des comptes des organismes locaux par
l’organisme national (et au premier chef par son agent comptable) ne sera
pas pleinement opérationnel avant 2007. Pour toutes les branches et pour
l’activité de recouvrement, le référentiel de validation reste incomplet. Si
chaque organisme national a entrepris la refonte des dispositifs de contrôle
interne en vue de la certification, un très important chemin reste à
parcourir pour couvrir l’ensemble des processus de production, pour que
les organismes de base s’approprient pleinement ces nouveaux dispositifs
et pour que la caisse nationale soit en mesure d’en évaluer la mise en
œuvre et l’effectivité. En matière d’audit, les guides nécessaires aux
vérifications à mener localement concernent principalement les gestions
budgétaires. En outre, les moyens humains affectés à l’audit interne ne
permettront pas aux organismes nationaux de planifier des missions sur un
nombre suffisant d’organismes.
Enfin, l’information comptable contenue dans l’annexe aux comptes
reste insuffisante. Il convient de rappeler en effet qu’en droit comptable,
l’annexe est le complément indispensable du bilan et du compte de résultat.
Elle doit indiquer les faits marquants de l’exercice et leur impact
comptable, préciser les changements de méthode comptable et de périmètre
des comptes, expliciter les variations importantes de certains soldes, et,
plus généralement, contenir toutes les informations susceptibles d’éclairer
les comptes et leurs évolutions.
A compter de 2007, le compte rendu des vérifications effectuées,
ainsi que l’opinion qui en résultera, feront l’objet d’un rapport spécifique
rendu public au plus tard le 30 juin. La Cour se situera, pour
l’accomplissement de sa mission, dans une perspective pluriannuelle. Elle
accompagnera la montée en charge progressive du dispositif de validation.
Compte tenu de l’ensemble de ses constats, le premier rapport qu’elle
remettra, en juin 2007, sur l’exercice 2006, comportera, outre l’exposé de
ses diligences, les éléments d’appréciation qu’elle aura pu
raisonnablement établir.
___________________ RECOMMANDATIONS ____________________
1. Donner toute sa place à la démarche d’audit interne dans le
référentiel de validation des comptes des organismes de base.
2. Constituer dans chaque branche, auprès de l’agent comptable
national, au besoin par redéploiements, des équipes d’auditeurs
comptables de taille suffisante.
3. En vue de mieux prendre en compte l’évolution des normes
comptables générales, engager une réflexion de fond, au sein du haut
LA CERTIFICATION DES COMPTES DU REGIME GENERAL
51
conseil et de la mission comptable permanente, sur les normes comptables
de la sécurité sociale.
4. Définir les principes et le périmètre du « rapport particulier
d’audit » des commissaires aux comptes des organismes habilités par la loi
à gérer des prestations obligatoires pour le compte d’organismes de
sécurité sociale.
5. Dans le cadre de la refonte en cours du PCUOSS, mener à bien la
redéfinition des faits générateurs pour le rattachement aux exercices des
impôts et taxes recouvrés par l’Etat et destinés à la sécurité sociale.
6. Améliorer fortement la qualité et l’exhaustivité du contenu des
annexes des comptes combinés et des comptes des établissements publics
afin de respecter pleinement les exigences des normes comptables
générales en la matière.
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