Santé-MAG N°32 - Septembre 2014
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DOSSIER
façon, elle n’a pas l’autorisation de mise
sur le marché, pour cet usage. En re-
vanche, lorsqu’on veut un eet contra-
ceptif et qu’on doit traiter une hyper-
androgénie, de l’acné, la Diane 35 est le
produit idéal.
Au demeurant, il existe certaines cir-
constances, comme les thrombophilies
congénitales, ou acquises, qui sont des
anomalies de la coagulation, qui rendent
très sensibles à la formation des caillots,
avec des accidents possibles. Ceci dit, j’in-
siste sur ce point important: des examens
sont à faire avant de prescrire une contra-
ception, car il y a des femmes à risque à
qui on ne prescrit pas d’œstrogène, mais
une pilule progestative pure, Cerazette
par exemple, qui est prescrite dans la
période la plus risquée des thromboses,
qui est le postpartum, où le danger est
multiplié par 60. Des femmes prennent
la Cerazette pendant une longue du-
rée. Pourquoi ? Parce qu’elles ont une
contre-indication aux œstrogènes. Elles
sont diabétiques, hypertendues….Ces
femmes, donc, peuvent bénéficier d’une
pilule progestative pure.
Nous avons à disposition, sur le marché,
le Microval, lequel, il faut reconnaître,
n’est pas très ecace; contrairement à
la Cerazette, qui est aussi ecace qu’une
pilule œstro-progestative.
Vous avez, toujours, déploré le retrait du
marché de la pilule «du lendemain» et
ce, face à la presse, lors de séminaires.
Pouvez-vous nous en dire plus, sur cette
contraception ?
Cela est, encore, l’énorme problème de la
contraception d’urgence. La contracep-
tion d’urgence, par définition, s’adresse
à une urgence. L’urgence c’est quoi ? Eh
bien c’est qu’il y a eu un rapport douteux,
pouvant entraîner une grossesse non
désirée, que la femme soit mariée, ou
pas. Quel que soit le contexte, ce rapport
risque de conduire à une grossesse non
désirée, quel qu’en soit le motif. Il peut
s’agir d’une jeune fille ou d’une femme
qui vient d’accoucher, après à peine deux
à trois mois et ne désirant pas enfanter,
dans l’immédiat.
Il existe, donc, dans ces situations, une
pilule - dite du lendemain - que l’on avait
disponible, il y a quelques années, dans
tous les centres de santé. Ce qui n’est
plus le cas aujourd’hui et je le déplore,
personnellement. C’est une anomalie, à
mon sens et l’absence de cette pilule va
conduire à une grossesse non désirée car
nous sommes dans un pays où religieu-
sement, culturellement, légalement, les
interruptions volontaires de grossesses
sont interdites. L’inexistence de ce moyen
contraceptif conduit à des circuits tor-
tueux, justement, où vont s’insinuer des
personnes sans scrupules, dont l’appât
du gain est leur seul credo et qui vont
proposer des services douteux, pour faire
avorter les femmes fragilisées et en dé-
tresse. Ce type de pratiques, illégales et
dangereuses, se terminent, souvent, dra-
matiquement, par des pelvipéritonites,
perforation utérine, septicémie, stérilité
définitive, séquelles dramatiques et pire
encore, j’ai vu des jeunes femmes mourir,
suite à ces accidents. De telles situations
dramatiques, j’en ai eu à en constater,
malheureusement, beaucoup, durant
mes 40 ans de carrière, dans le domaine.
Il importe, en conséquence que la pilule
«du lendemain» soit disponible, à nou-
veau, dans les centres de santé, pour
éviter des drames de ce genre. Il y a
quelques années, ce produit était présen-
té sous forme de deux pilules par boite,
que l’on prenait, pour la première prise,
le plus tôt possible, après le rapport et la
deuxième, 12 heures après et l’ecacité
était, au maximum, de 36 heures. Actuel-
lement et c’est une avancée, il existe une
deuxième forme de cette pilule appelée
«l’ELLAONE», qui se présente sous forme
d’une seule pilule et qu’on peut prendre
5 jours après le rapport. Cette pilule per-
met d’éviter, à peu près, 80 à 90% des
grossesses non désirées. C’est énorme;
mais, malheureusement, chez nous, cette
pilule n’existe pas, ou rarement dans, uni-
quement, certaines pharmacies. En outre,
il est dicile à une personne de deman-
der cette pilule, parce qu’il y a cette
connotation particulière, qui rejaillit sur
la femme qui rentre dans une pharmacie,
pour demander la pilule du lendemain et
c’est malheureux.
Un mot pour conclure….
En tout état de cause, je continue à être
un fervent partisan du stérilet. Cepen-
dant et cela me met mal à l’aise, du fait
de constater que, dans notre pays, l’utili-
sation de ce dispositif est au-dessous de
3%, bien qu’il soit un excellent mode de
contraception, à condition qu’il soit bien
indiqué et bien posé, par les praticiens.
Dans le cas contraire, cela peut, eecti-
vement, entraîner des accidents. Ce qui
continuera, alors, à lui donner mauvaise
presse, malheureusement.
Un autre mot, pour finir, en tant que
professeur en gynécologie et chef de
service, il faut louer les eorts de l’Etat
en matière de contraception; celle-ci
étant disponible, gratuitement, dans les
centres de santé; surtout que les indica-
teurs nationaux montrent une reprise de
la natalité dans notre pays, dont l’indice
a dépassé 3, cette année.
Je souhaiterai avoir la pilule «du len-
demain», afin d’éviter, à la femme, les
drames cités précédemment. On ne peut
pas changer certes, de but en blanc la
société et à partir de là, il faut, par consé-
quent, tirer des conclusions et adopter
les meilleurs solutions.
Concernant l’implanon NXT, contraceptif
qui est une nette avancée, dans ce sens,
une fois placé sous le bras par un gyné-
cologue averti, la femme n’aura plus à
consulter et on lui donnera rendez-vous
dans trois ans, au plus tard, pour le reti-
rer, si elle désire une grossesse, ou pour
lui en poser un autre. Son ecacité est
maximale et Il est discret. C’est le mode
de contraception le plus ecace qu’on a
à notre disposition. Toutefois, cet implant
à trois ans de validité et un peu moins
chez la femme obèse, qui rencontre un
grand problème de contraception, car
elle court un grand risque thromboem-
bolique.
Enfin, il est souhaitable que cet implanon
NXT soit remboursé par la Sécurité so-
ciale. Son prix est d’environ 9.000 dinars,
pour une validité de 3 ans et cela corres-
pond au coût d’une année de contracep-
tion par voie orale et c’est beaucoup plus
fiable, parce que la pilule on peut l’ou-
blier, la vomir…
* Professeur Mourad Derguini,
chef du service de gynécologie, au CHU
de Kouba, Alger.
- Président de la Société algérienne
d'étude et de recherche sur la méno-
pause, SAERM.
- Président du Comité médical national
de gynécologie.