c’est
possible
utile
nécessaire
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terre n°122 • automne 2008
Une société en mutation
Vers la moitié des années ’70, la troisième révolution
technologique nous amène les nouvelles technolo-
gies de l’information et de la communication. Celles-
ci vont bouleverser les rapports sociaux de produc-
tion et démultiplier la productivité du travail.
Elles engendrent une modernisation des équipements
et des procédés de production. Les travailleurs com-
mencent à manquer d’emploi (vu la mécanisation
croissante), ont besoin de requalification profession-
nelle et, bien entendu, de revenus pour participer à
la consommation.
Les employeurs ont quant à eux besoin de travail-
leurs flexibles et impliqués dans la lutte pour la com-
pétitivité au niveau mondial.
Le but est de conquérir des marchés en faisant la
promotion de la consommation. Le problème majeur
n’est plus de produire mais bien de vendre. Nous
assistons de ce fait à une manipulation des besoins
pour faire consommer tout ce que les entreprises
sont capables de produire
1
.
Vers un capitalisme sauvage :
le néolibéralisme
Comme ce nouveau modèle industriel repose davan-
tage sur l’accumulation de profits commerciaux que
sur l’extraction de la plus-value du travail, il faut pou-
voir produire à moindre coût et donc, ailleurs. De
cette manière, les pays de l’Est et du Sud sont invi-
tés à s’industrialiser par les grands groupes finan-
ciers avec, comme mode de fonctionnement écono-
mique, le néolibéralisme.
En substance, le néolibéralisme considère que l’État
ne peut être l’acteur central du développement
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et
qu’il est préférable de s’en référer aux lois du mar-
ché : la libre compétition, la libre circulation des
biens, des services et des capitaux.
Il réduit donc le développement à une affaire de crois-
sance économique et provoque — principalement
dans les pays du Sud mais également chez nous —
différents effets pervers comme la rationalisation
édito
Entreprendre autrement
au Nord et au Sud
financière des États, la privatisation des activités
rentables du secteur public (ressources stratégi-
ques, communication, santé, éducation, pensions
de retraite,...), l’inscription dans des traités de libre-
échange (réduction des taxes douanières et donc
moins de protection des marchés locaux), etc.
Pour une autre économie
Ces évolutions ne cessent d’élargir l’emprise du
monde économique sur les autres domaines de l’ac-
tivité humaine. Il est donc important d’investir la
sphère de l’économie pour y faire valoir des princi-
pes différents des règles du marché présentées
comme objectives mais qui plombent, par leur appli-
cation, les avancées sociales gagnées de dures lut-
tes par les travailleurs de nombreux pays.
En nous immisçant dans le cadre économique, nous
pouvons proposer des alternatives au mode de fonc-
tionnement économique traditionnel et redonner une
place centrale à l’être humain ainsi qu’au respect de
son environnement.
Ce numéro montre, par les différentes initiatives
européennes et internationales qui y sont présentées,
que l’économie sociale et solidaire est possible. Il
souligne que ce fonctionnement est utile pour redy-
namiser un monde socialement en perte de vitesse
et qu’il est même bien souvent nécessaire face aux
besoins de plus en plus criants que vivent les popu-
lations aujourd’hui.
Plus que ça, cette appropriation du monde de l’éco-
nomie par des entreprises différentes concourt à la
mise en œuvre de réels projets de sociétés pour le
Nord et le Sud qui sont, eux, totalement absents
d’un modèle néolibéral uniquement orienté vers le
profit. I
David Gabriel
1. G. Bajoit : Le changement social, Approche sociologique des
sociétés occidentales contemporaines, col. Cursus, Ed.
Armand Colin, 2003.
2. G. Bajoit, F. Houtart, B.Duterme, Amérique latine, à gauche
toute ?, Ed. Couleur livres, CETRI, 2008, pp. 15-16.
Une campagne pour une autre économie