
UE3-EC1 M2 / EEME Université de Cergy Pontoise - Site d’Evry
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Document A
Histoire d'un concept
Le sujet, chez les Grecs, est le sujet du discours, ce dont on
parie :
la mort est un sujet de méditation.
Ce mot avait également le sens de notre actuel « thème » : ce dont on parle, l'information connue ou donnée
comme telle en énonciation dans la phrase simple; on l'opposait à «prédicat », ce qu'on en dit. Génial, ce film! :
« génial» est le prédicat et « ce film » est le thème.
Comme dans la plupart des phrases simples, le thème est le plus souvent en position de sujet grammatical, et
référentiellement agentif (= individu de notre univers qui fait l'action), la grammaire scolaire a confondu les trois
notions:
«
Le sujet [ ... ] est le mot qui représente la personne ou la chose qui fait l'action du verbe, ou qui est dans
l'état exprimé par le verbe.
» […]
La grammaire générative transformationnelle, dans son analyse des constituants obligatoires, analyse la phrase
comme formée d'un syntagme nominal et d'un syntagme verbal, opérant une nouvelle confusion entre une
fonction, sujet grammatical, et une classe de mots, en l'occurrence celle des noms. On comprend pourquoi le plus
grand trouble règne dans les esprits des adultes et des enfants à propos du terme « sujet
»,
Niveau didactique
Le mot « sujet» étant polysémique, on doit comprendre le mot
comme
fonction syntaxique dans la phrase de
base. Le mot «thème », ce
dont on parle, sera analysé au niveau énonciatif et 1'« agent» au niveau
référentiel,
de ce qui est dit de notre monde.
Le
sujet grammatical est insupprimable : c'est un constituant indispensable
...
sauf pour les verbes à
l'impératif et les énoncés non phrastiques.
AU SUJET DU SUJET
A.
L'avion a percuté la montagne.
(S
+
V
+
COD.)
B. C'est mon père qui avait raison. (Phrase clivée […].)
C. La charrette est tirée par le lièvre. (Sujet non agentif dans une tournure passive qui permet de
thématiser un autre mot que l'agent.)
D. Alice voit arriver le chapelier. Il porte un drôle de chapeau. (1. Problème du « sujet» de l'infinitif et de
l'analyse référentielle des enfants: « le chapelier arrive. » 2. S
=
pronom représentant)
E. Alice a rencontré le lapin. (Verbe réversible.)
F. Pierre pense profondément
à
sa mère. (Verbe dont le procès n'est pas une action.)
G. Qui dort dîne
:
(Sujet propositionnel.)
H. Il est nécessaire d'enseigner autrement la grammaire. (S
=
pronom vide + sujet réel vs sujet apparent.)
I. Sur le toit flottent les drapeaux. /Quand viendras-tu ?
(Postposition du S + S
=
pronom déictique.)
J.
Me nourrir uniquement de langoustes me conviendrait bien. (S
=
infinitif.)
K. Que Pierre vienne
à
la kermesse m'étonnerait beaucoup. (S
=
proposition.)
L. Il faudrait arracher les mauvaises herbes du jardin. (S
=
forme vide.)
M. Pierre épouse Marie. (Verbe réversible.)
N.
Souviens-toi de Socrate
! /
Super, cette nouvelle cravate ! /
Bravo !
(Enoncés non phrastiques, sans
sujet.)
Sa place est devant le verbe ... s'il est également le thème
énoncia
tif. En cas de mise en exergue d'un
autre élément de la phrase et dans le type interrogatif, le sujet peut être placé derrière le verbe
(I).
L'antéposition peut être l'unique critère pour trouver le sujet quand le verbe est réversible
(E, M),
c'est-à-dire
quand l'objet peut
devenu
sujet, et vice versa.
• Le sujet est le donneur de marques morphologiques du nombre, de la personne et parfois du genre du verbe
conjugué (tous les exemples ; en N, la désinence « -s
»
peut être considérée comme la marque morphologique du
sujet […]. Il n'y a de sujet que pour les verbes conjugués. En D, dans l'univers décrit, le chapelier arrive, mais
syntaxiquement, en langue, « Alice» est le seul sujet du verbe « voir» qui, lui, possède deux objets : «le
chapelier » et
«
arriver »
,
unis par un lien prédicatif:
«
arriver» dit quelque chose sur
«
le chapelier ».
• Le sujet est un nom ou toute classe pouvant se substituer morphologiquement au nom: tout pronom
(D,
H,