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faveurs du public, et donc c’est ce qu’a proposé Bush, dire : il n’y a aucune raison au nom
d’un bureaucratisme plus ou moins dépassé, d’empêcher les gens d’investir leur épargne, s’ils
le souhaitent, dans une bourse qui a multiplié par dix en vingt ans.
Donc par rapport à cette situation très simple, on va dire, binaire, moins d’impôts pour la
droite, et essayer de préserver ce qui peut l’être pour la gauche, je crois que aujourd’hui le
ralentissement économique d’une certaine manière, et peut-être paradoxalement, oblige la
droite à réduire l’ambition de son programme électoral. Si elle dit aujourd’hui, je veux baisser
les impôts, dans la mesure où elle ne peut plus compter, en tout cas de manière crédible sur la
croissance économique profonde, rapide, qu’on aurait pu anticiper l’année prochaine, il faudra
qu’elle se livre à l’exercice compliqué d’expliquer ce qu’elle fait en vis-à-vis de cette baisse
d’impôts, donc qu’est-ce qu’elle fait du point de vue de l’État ? Alors c’est un sujet qu’elle est
prête à affronter, je crois, puisqu’elle a déjà indiqué qu’elle ne comptait pas renouveler les
effectifs de fonctionnaires qui vont venir par plusieurs dizaines de milliers, centaines de
milliers, à la retraite dans les dix prochaines années, mais malgré tout, le terrain s’est un petit
peu déplacé, la gauche a d’une certaine façon la capacité de dire que, à ce programme de
réduction du volume de l’État, elle, elle veut par exemple favoriser un redéploiement des
effectifs de la fonction publique. En disant ça évidemment elle n’est pas sans ouvrir le flan à
la critique qui résulte des échecs d’Allègre ou de Sautter, qui ont montré que ça n’est pas si
facile à faire. Mais malgré tout, le centre de gravité du débat s’est déplacé dans un sens qui lui
est plus favorable, en tout cas qui sera plus équilibré qu’auparavant. De même, le débat sur les
35 heures, le débat sur les retraites change de nature. Commençons par les retraites, bon, la
gauche comme la droite vont forcément proposer un troisième étage au système de retraite où
on pourra en gros généraliser le système Préfon c’est-à-dire bénéficier d’un certain nombre
d’exonérations d’impôts quand on met de l’argent de côté, qu’on vous restituera plus tard sous
une autre forme. Elle rejoint de ce point de vue-là le programme de la droite, mais un
programme de droite qui s’assumerait comme tel, du genre : on va exhumer la loi Thomas,
tout faire jouer sur une retraite par capitalisation forte et triomphante qui serait portée par la
Bourse, là n’est plus crédible aujourd’hui. On voit bien que la Bourse est malmenée et au fond
personne n’a trop envie d’aller y mettre trop d’argent pour y préparer sa retraite et donc à
nouveau la récession, en tout cas les incertitudes économiques obligent, obligeront sans doute
la droite à reculer par rapport à ce qu’elle aurait voulu être, une opposition frontale. De même,
les 35 heures qui, pour la droite, auraient pu être un thème de campagne très offensif, très fort,
si la croissance économique avait démasqué ses limites, si on avait observé un rationnement
de l’offre de travail. Aujourd’hui, à cause du ralentissement, elle devra jouer avec les nuances,
mais c’est justement ça le point de ma démonstration, c’est que elle devra jouer avec les
nuances là où on peut dire que une situation économique meilleure lui aurait permis de front
de remettre en cause et en question les principaux axes de la politique économique de gauche.
La politique économique de la gauche au cours de ces cinq dernières années a été nourrie par
un programme, une réflexion, qui était celui qui a fait surgir les années de crise, la crise des
années 90, au moment de devenir obsolète parce que la croissance économique est au rendez-
vous, curieusement, paradoxalement, le ralentissement de la croissance économique peut
donner à la gauche par rapport à la droite, au fond, le ton qui peut convenir. Bon, je ne dis pas
que les choses vont se jouer aussi simplement que ça, mais le climat économique va peser sur
la campagne d’une manière qui va remettre au fond les choses un peu comme elles se seraient
passées entre 1995 et 1997, 1995 c’était bon pour la droite, 1997 c’est bon pour la gauche, on
est un petit peu entre les deux. Il y a une espèce de situation contradictoire où si la droite
dénonce au fond la récession économique à venir, bien elle ne pourra pas tirer argument de
cette récession économique pour, par exemple, proposer de baisser les impôts tous azimuts si