iv
Résumé
Depuis l’émergence de la littérature africaine en langues européennes au vingtième siècle, le
thème de l’immigration a été produit par les hommes et exprimé à travers l’expérience du
protagoniste masculin. Ceci est particulièrement vrai dans la littérature francophone.
L’expérience de la femme immigrée n’a pas paru dans la littérature africaine en français jusqu’à
récemment, bien que la femme soit au centre du débat en France sur l’immigration et bien que,
selon les statistiques françaises, il y ait plus d’immigrés féminines que masculines. Aujourd’hui,
les critiques français de l’immigration africaines soutiennent que les femmes ont trop d’enfants
et ceux-ci constituent un taux élevé de la délinquance juvénile. Certaines autorités françaises ont
demandé que la femme soit soumise au test de l’ADN afin de déterminer la paternité de ces
enfants qui grandissent dans de larges familles. Les écrivaines féminines de l’Afrique
francophone ont fait leur apparition sur la scène littéraire au cours des trois dernières décennies,
cependant leur nombre reste restreint et bien peu d’entre elles s’intéressent au thème de la femme
immigrée. Le contraste entre le nombre limité des personnages immigrés féminins dans la
littérature contemporaine par les écrivaines francophones et la place centrale de la femme dans le
débat sur l’immigration en France suscite une série de questions. Entre autre, pourquoi y a-t-il un
tel silence sur l’immigration féminine dans la littérature africaine d’expression française ? Dans
les œuvres parues récemment à ce sujet, en quoi l’expérience du personnage féminin est-elle
différente de celle du personnage masculin ? En quoi l’expérience des immigrées de l’Afrique
sub-saharienne diffère-t-elle de celle des maghrébines ? Est-ce que la poignée d’écrivaines qui
s’intéressent à l’expérience de la femme immigrée créent une branche particulière de la
littérature de l’immigration ? Si oui, quels outils et quelles stratégies distinguent la
représentation de l’immigration par les auteurs féminins ? Pourquoi cette branche émergente de
la littérature est-elle si marginale non seulement dans la littérature africaine et celle en français
en général, mais surtout dans la littérature féminine francophone ? En partant de la théorie
postcoloniale, j’analyse cinq romans de femmes écrivaines francophones d’Afrique du nord et
d’Afrique sub-saharienne : La deuxième épouse de Fawzia Zouari, Beur’s story de Ferrudja
Kessas’s, L’homme qui m’offrait le ciel de Calixthe Beyala, Un amour sans papiers de Nathalie
Etoké et 53 centimètres de Bessora. Ces œuvres racontent l’histoire de différentes femmes
africaines descendantes de Beurs et de Harki, aussi bien que d’Africaines déplacées en France ou
filles de parents expatriés. Cette étude révèle que les auteures se basent sur une variété d’outils
pour traduire le statut de « Autre » auquel les immigrés sont confrontés en France. A travers des
personnages qui infirment les stéréotypes négatifs propagés par la frange « anti-immigrant » de
la société française, à travers une esthétique le plus souvent marquée par l’ironie et à travers une
narration qui allie les formes du roman traditionnel français et certains genres de la tradition
orale africaine, les auteures de notre corpus essayent de décrire la situation d’entre deux de
l’immigrée africaine. Les personnages et les situations créés par ces auteures suggèrent aussi des
stratégies d’intégration des immigrés d’origines culturelles diverses dans la société française. Les
écrivaines francophones analysées dans cette étude attaquent ainsi la tendance de la société
française d’entretenir une hiérarchie entre les « Français de souche » et les « Français
d’origine ». Finalement, cette analyse montre comment et en quoi l’émergente branche de la
littérature de l’immigration se positionne dans le tableau littéraire de la littérature francophone
aussi bien que dans celui des relations culturelles entre la France et l’Afrique francophone.